N 07/00481 RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



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Transcription:

COUR D APPEL DE NOUMÉA N 07/00481 RÉPUBLIQUE FRANÇAISE Président : M. THIOLET AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS Greffier lors des débats : Cécile KNOCKAERT Chambre sociale Arrêt du 4 Juin 2008 PARTIES EN CAUSE DEVANT LA COUR APPELANT Mme X née le à demeurant à NOUMEA représentée par la SELARL TRISKELL PACIFIQUE, avocats INTIMÉE LA SELARL ( ), ès qualités de mandataire-liquidateur de la Société Y demeurant à NOUMEA représentée par la SELARL PELLETIER-FISSELIER-CASIES, avocats PROCÉDURE DE PREMIÈRE INSTANCE Par un jugement rendu le 03 août 2007 auquel il est renvoyé pour l exposé de l objet du litige, le rappel des faits et de la procédure, les prétentions et les moyens des parties, le Tribunal du Travail de NOUMEA, statuant sur les demandes formées par Mme X à l encontre de la selarl. ( ), mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de la Société Y, aux fins d obtenir la fixation de sa créance de la manière suivante : - 20.905 FCFP au titre du solde de l indemnité de congés payés, - 483.722 FCFP au titre du préavis,

N 2-37.607 FCFP à titre de complément de l indemnité de licenciement, - 170.303 FCFP à titre de dommages-intérêts (irrégularité résultant de la non consultation des délégués du personnel), ainsi que la remise des bulletins de salaires correspondants et la régularisation de sa situation auprès des organismes sociaux, a : - fixé la créance de Mme X à l égard de la société Y comme suit : * solde sur indemnité de licenciement : 6.751 FCFP, * dommages-intérêts : 15.000 FCFP, - condamné la selarl. ( ), mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de la Société Y à remettre à madame Mme X le bulletin de salaire correspondant à l indemnité de licenciement rectifiée et à régulariser sa situation auprès des organismes sociaux pour ce montant, - débouté les parties de toutes leurs autres demandes, - fixé à quatre le nombre d unités de valeur servant de base à la rémunération de Maître LE GALL, avocat désigné au titre de l aide judiciaire. Ce jugement a été notifié par le greffe le 03 août 2007. La selarl. ( ) l a réceptionné le 10 août 2007. Aucune date ne figure sur l avis remis à Mme X. PROCÉDURE D'APPEL Par une requête enregistrée au greffe de la Cour le 29 août 2007, Mme X a déclaré relever appel de cette décision. Dans son mémoire ampliatif d appel, elle sollicite la confirmation du jugement entrepris en ce qu il a fixé sa créance à la somme de 6.571 FCFP au titre du solde de l indemnité de licenciement et condamné la selarl. ( ), mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de la Société Y à remettre à Mme X le bulletin de salaires correspondant et à régulariser sa situation auprès des organismes sociaux pour ce montant. Elle reproche au premier juge d avoir rejeté la demande relative à l indemnité compensatrice de préavis au motif qu elle se trouvait en arrêt de maladie au moment de son licenciement. Elle soutient qu elle n a pu exécuter le préavis, non pas en raison de sa maladie mais du fait que le mandataire liquidateur a mis un terme à l ensemble des contrats de travail avec effet au 22 mai 2006. Elle fait valoir que la décision du mandataire liquidateur de dispenser l ensemble du personnel de l exécution du préavis n est pas contestable et que l inexécution ne lui est pas imputable. Elle fait valoir qu en raison de son ancienneté, elle a droit à trois mois de salaires, soit la somme de 243.223 FCFP.

N 3 S agissant de l indemnité compensatrice de congés payés sur préavis, elle sollicite la somme de 46.774 FCFP correspondant à 7,5 jours de congés. S agissant de l indemnité complémentaire de licenciement, elle fait valoir qu il convient de prendre en compte la durée du préavis soit un complément de 6.755 FCFP. Elle demande en conséquence à la Cour de fixer sa créance supplémentaire à la somme de 296.752 FCFP. Elle fait valoir que deux irrégularités affectent la procédure de licenciement économique, d une part, le non-respect de la procédure consultative du comité d entreprise ou des délégués du personnel, et d autre part, le non-respect de l obligation de reclassement. Elle soutient que du fait de ces irrégularités, la procédure de licenciement économique est nulle et le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse. Elle sollicite en conséquence la somme de 972.894 FCFP à titre de dommages-intérêts correspondant à six mois de salaires. Par conclusions datées du 12 mars 2008, la selarl. ( ) demande à la Cour de débouter Mme X de toutes ses demandes. S agissant de la demande relative à l indemnité de préavis, elle relève que pendant la durée de celui-ci, soit du 22 mai au 22 août 2006, Mme X se trouvait en position d arrêt de maladie de sorte qu elle ne saurait prétendre à l indemnité correspondante. Elle soutient que l inexécution du préavis n est pas imputable à l employeur mais résulte de la maladie de la salariée et des raisons économiques entraînant la fermeture de l entreprise. S agissant de l indemnité compensatrice de congés payés et de l indemnité de licenciement, elle fait valoir que les demandes présentées sont basées sur la prise en compte du préavis et devront donc être rejetées. S agissant des irrégularités relatives à la procédure de licenciement économique, elle verse aux débats la copie de l ordonnance de non lieu concernant l incendie du magasin Z, qui démontre que du jour au lendemain, la société s est trouvée dépourvue de tout local et placée en liquidation judiciaire. Elle fait valoir le caractère de force majeure de l incendie qui vient justifier le caractère réel et sérieux du licenciement. Elle verse également de la jurisprudence selon laquelle l importance et l étendue de l incendie entraînent l impossibilité même de reprendre l activité, de maintenir les emplois et de respecter une éventuelle obligation de reclassement. L ordonnance de fixation de la date d audience a été rendue le 03 avril 2008.

N 4 MOTIFS DE LA DÉCISION 1) Sur la recevabilité des appels : Attendu que l appel principal et l appel incident, formés dans les délais légaux, doivent être déclarés recevables ; 2) Sur le licenciement de Mme X : Attendu qu il résulte des pièces versées et des débats que Mme X a été embauchée par la Société Y le 1er novembre 1989 en qualité d opératrice de saisie ; que le 18 décembre 2005, l établissement principal de l entreprise, un magasin situé, sur la commune de ( ), a été détruit par un incendie ; qu à compter du sinistre, Mme X a été placée en congé de maladie et ce, jusqu à son licenciement ; que par un jugement rendu par le Tribunal Mixte de Commerce le 17 mai 2006, la Société Y a été placée en liquidation judiciaire ; que par un courrier daté du 19 mai 2006, la selarl. ( ), mandataire liquidateur de la Société Y a informé Mme X que la liquidation judiciaire impliquait le licenciement des salariés de l entreprise, qu elle faisait l objet d un licenciement économique, que son préavis commencerait à courir à compter de la réception de la lettre de licenciement et qu elle bénéficiait d une priorité de réembauche en raison de la nature économique de son licenciement ; que par une ordonnance rendue le 19 janvier 2007, le magistrat instructeur chargé du dossier concernant l incendie du magasin a dit n y avoir lieu à poursuivre, faute d identification du ou des auteurs de cet incendie volontaire ; Attendu que la lettre de licenciement fixe les limites du litige et lie le contentieux ; qu en l espèce, la lettre de licenciement adressée le 19 mai 2006 par la selarl. ( ), mandataire liquidateur de la Société Y à Mme X indique clairement que la rupture du contrat de travail est motivée par la procédure de liquidation judiciaire et qu il s agit d un licenciement pour cause économique ; que la lettre de licenciement ne fait pas référence à l incendie du magasin ni à un quelconque cas de force majeure ; que c est donc au regard des règles applicables au licenciement économique qu il convient de trancher le présent litige ;

N 5 3) Sur l incidence de la force majeure : Attendu qu aux termes de l article Lp. 122-29 du Code du Travail de la Nouvelle Calédonie, la cessation de l entreprise pour cas de force majeure libère l employeur de l obligation de respecter le préavis et de verser, s il y lieu, l indemnité de licenciement prévue à l article Lp. 122-27 ; que la Cour de Cassation considère que l indemnité légale n est due qu en cas de licenciement, ce qui exclut les cas de cessation du contrat résultant de la force majeure ; qu en effet, elle estime que la rupture du contrat de travail imposée à l employeur par la force majeure ne doit pas être considérée comme un licenciement mais comme un autre mode autonome de rupture du contrat de travail ; que la force majeure, si elle est reconnue, apparaît comme une cause de rupture du contrat de travail qui permet à celui qui l invoque, l employeur ou le salarié, de rompre immédiatement le contrat sans procédure, ni préavis, ni indemnités, aussi bien pour les contrats à durée indéterminée que pour les contrats à durée déterminée ; que dans un souci de protection du salarié, la Cour de Cassation a une approche très restrictive de la notion de force majeure et en réserve l application à des cas très exceptionnels ; que l événement caractérisant la force majeure doit présenter tout à la fois un caractère imprévisible, irrésistible et insurmontable que la Cour de Cassation définit comme la survenance d un événement extérieur irrésistible ayant pour effet de rendre impossible la poursuite du contrat de travail ; qu au titre des cas de force majeure reconnus, la jurisprudence a admis celui de l incendie qui provoque la destruction totale de l entreprise et entraîne une impossibilité absolue et durable de poursuivre l exécution des contrats de travail ; qu il en va de même, s agissant d un établissement distinct d une entreprise qui possède dans la même ville un autre établissement demeuré intact, ce qui s apparente à la situation de la Société Y, laquelle disposait d un autre magasin situé au ( ) et dans lequel ont été affectés quelques salariés du magasin après l incendie ; Attendu qu il résulte de ces éléments, que la force majeure permet à l employeur de rompre immédiatement les contrats de travail, sans avoir à respecter la procédure de licenciement, ni les règles relatives au délai de préavis et aux indemnités légales; que dans le cas présent, l incendie du magasin pourrait présenter les caractéristiques d un cas de force majeure ; que toutefois, le mandataire liquidateur ne peut l invoquer utilement dans la mesure où il a opté, comme cela a été dit plus haut, pour la procédure de licenciement économique ;

N 6 4) Sur les demandes présentées par Mme X : A) Sur l indemnité de licenciement : Attendu que dans son mémoire d appel, Mme X sollicite la confirmation du jugement en ce qu il lui a accordé la somme de 6.571 FCFP au titre du solde de l indemnité de licenciement ; que dans les mêmes écritures et à propos du même point du litige, elle reproche au premier juge d avoir omis de prendre en compte les trois mois de préavis et sollicite un complément de 6.755 FCFP ; Attendu que dans le paragraphe intitulé sur l indemnité de licenciement, le premier juge a : - rappelé que le calcul de l ancienneté du salarié doit tenir compte des fractions d années incomplètes, - rappelé que les périodes de suspension du contrat de travail ne sont pas prises en compte pour le calcul de l ancienneté, soit en l espèce les mois de février, mars et avril 2006, - estimé que Mme X avait une ancienneté de 16 ans et 3 mois, - dit que sur cette base, une somme de 6.751 FCFP lui était due ; Attendu que le calcul sur lequel s est fondé le premier juge porte sur : - les mois novembre et décembre de l année 1989, soit deux mois, - les années 1990 à 2005, soit seize ans, - le mois de janvier 2006, soit un mois, soit un total de 16 ans et 3 mois ; Attendu que les bulletins de salaires versées aux débats et portant sur les mois de février, mars et avril 2006, mentionnent respectivement une ancienneté de 16 ans et 4 mois pour le premier, 16 ans et 5 mois pour le second et 16 ans et 6 mois pour le dernier ; qu ils mentionnent également que Mme X était en arrêt de maladie durant cette période ; Attendu que Mme X a été licenciée par un courrier du 19 mai 2006 avec effet au 22 mai 2006 ; que dans ces conditions, le préavis de trois mois s achevait le 22 août 2006 ; qu il n est pas contesté que Mme X était toujours en arrêt maladie pendant toute la durée du préavis ; que dans ces conditions, le calcul effectué par le premier juge entre le 1er novembre 1989 et le 31 janvier 2006, est juste, l arrêt maladie qui a débuté à partir du mois de février 2006 et s est poursuivi jusqu au terme du préavis constituant une période de suspension du contrat de travail qui ne peut être prise en compte pour le calcul de l ancienneté du salarié ;

N 7 que le jugement critiqué sera donc confirmé sur ce point ; B) Sur la régularité de la procédure de licenciement : Attendu que Mme X sollicite l indemnisation du préjudice résultant de l irrégularité de la procédure de licenciement économique, à hauteur de 972.894 FCFP, en raison du non-respect de la procédure consultative du comité d entreprise ou des délégués du personnel et de l obligation de reclassement ; qu il soutient que du fait de ces irrégularités, la procédure de licenciement économique est nulle et le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ; Attendu que le mandataire liquidateur fait valoir que l incendie du magasin constitue une cause de force majeure qui justifie le caractère réel et sérieux du licenciement et l impossibilité de procéder à l obligation de reclassement ; Attendu que s agissant du premier point, à savoir le grief lié au non-respect de la procédure consultative du comité d entreprise ou des délégués du personnel, le premier juge a rappelé qu aux termes de l article 45 de la Délibération du 24 février 1988, en cas de liquidation judiciaire, le mandataire liquidateur doit réunir et consulter le Comité d Entreprise ou à défaut les délégués du personnel ; qu après avoir constaté que cette procédure n avait pas été respectée, il a estimé que cette irrégularité avait causé un préjudice certain à Mme X et dit qu il sera réparé par l allocation d une somme de 15.000 FCFP versée à titre de dommages-intérêts ; qu au regard des circonstances qui ont conduit au licenciement économique de Mme X, cette décision paraît adaptée et sera donc confirmée ; Attendu que s agissant du second point, à savoir le grief lié au non-respect de l obligation de reclassement qui s impose à l employeur en cas de licenciement pour cause économique, il ne paraît pas envisageable de l étendre au mandataire liquidateur d une société placée en liquidation judiciaire ; qu en effet, la procédure de liquidation judiciaire entraîne la cessation de l activité de l entreprise ; que dans ce contexte, l obligation de reclassement n a plus de sens et l on ne saurait reprocher au mandataire liquidateur de ne pas avoir mis tout en œuvre pour essayer de reclasser un employé au sein d une entreprise qui n avait plus d existence légale et plus aucune activité ; qu en l absence de faute imputable au mandataire liquidateur, la demande d indemnisation présentée à ce titre par Mme X sera donc rejetée ; C) Sur l indemnité compensatrice de préavis : Attendu que le premier juge a rejeté cette demande au motif que Mme X ne pouvait prétendre à cette indemnité dans la mesure où elle se trouvait en position d arrêt durant la période du préavis et se trouvait donc dans l impossibilité d exécuter sa prestation de travail ;

N 8 que sur ce point, il convient de rappeler que l employé qui se trouve en arrêt de maladie perçoit des indemnités journalières versées par l organisme social, en l espèce, la CAFAT ; que dans ces conditions, la perception d indemnités journalières et des indemnités compensatrices de préavis font double emploi ; qu il convient en conséquence de confirmer le jugement critiqué sur ce point ; D) Sur les indemnités de congés payés sur préavis : Attendu que Mme X sollicite la somme de 46.774 FCFP à ce titre, correspondant à 7,5 jours de congés ; que les bulletin de salaires versées aux débats et portant sur les mois de février, mars et avril 2006, portent les mentions suivantes : congés acquis 2,50 - reste à prendre 35,50 - pris 00 ; qu ils confirment donc que le droit à congés payés est bien de 2,5 jours par mois ; qu ils présentent donc une contradiction dans la mesure où le poste reste à prendre aurait dû augmenter de 2,5 pour chaque mois, soit : 38 fin mars et 40,5 fin avril ; que le calcul effectué par le mandataire liquidateur mentionne : - rémunération brute mensuelle : 162.149 FCFP, - congés payés acquis à la date du licenciement : 38,0 jours, - congés payés acquis pendant le préavis : 1,25 jours ; Attendu qu il n est pas contestable que bien que n ayant pas effectué son préavis de trois mois pour cause de maladie, Mme X a droit à 2,5 jours de congés payés soit un total de 7,5 jours ; que le mandataire liquidateur ayant seulement retenu 1, 25 jours, il manque 6,25 jours, soit sur une base journalière de 6.279 FCFP une somme de 39.243 FCFP ; qu il convient en conséquence de faire droit à cette demande et de fixer la créance de Mme X à la somme de 39.243 FCFP au titre du solde de l indemnité compensatrice de congés payés sur préavis; PAR CES MOTIFS La Cour, statuant par arrêt contradictoire déposé au greffe; Déclare l appel principal et l appel incident recevables en la forme ;

N 9 Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 03 août 2007 par le Tribunal du Travail de NOUMEA ; Y ajoutant : Fixe la créance de Mme X à l égard de la Société Y à la somme de trente neuf mille deux cent quarante trois (39.243) FCFP au titre du solde de l indemnité compensatrice de congés payés sur préavis ; Condamne la selarl. ( ), mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de la Société Y à remettre à Mme X le bulletin de salaire correspondant à l indemnité compensatrice de congés payés rectifiée et à régulariser sa situation auprès des organismes sociaux pour ce montant ; Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires comme mal fondées ; LE GREFFIER LE PRÉSIDENT