NOTRE MÈRE LA GUERRE Les sources écrites
Une nouvelle vision historique de la Grande Guerre Depuis 40 ans, de nombreux historiens ont donné une nouvelle vision de la Première Guerre mondiale se focalisant davantage sur les effets de cette guerre, sur les soldats et leurs familles, que sur la rivalité des nations. Dans son ouvrage La Première Guerre mondiale (1999), John Keegan, pionnier du renouveau, nous immerge dans les sons et les odeurs de la guerre ; apparaît alors l expression «la Guerre vue d en bas». À sa suite, des historiens comme André Loez ou Nicolas Offenstadt rapportent la souffrance des soldats au combat, leurs esquives de la guerre. Leurs œuvres défendent la mémoire des hommes ayant souffert. Ils étudient aussi le contexte culturel ayant favorisé la guerre, notamment la notion de patriotisme qui était enseigné dans les écoles sous forme de jeux pour enfants composés à 50% d outils de guerre. Alors que les femmes réclamaient la paix, les hommes, au cœur du champ de bataille, luttaient contre les atrocités du front, c est le début des mutineries. Les séquelles physiques, mais aussi psychologiques de ceux que l on appelle désormais «Les Gueules Cassées», ne peuvent être oubliées et rappellent à chaque nouvelle génération les effets ravageurs de la Grande Guerre. Depuis 1992, l Historial de Péronne présente les épreuves physiques et morales des soldats de la Grande Guerre et de leurs familles, prenant en compte la violence à laquelle ils ont été confrontés. De même, le CRID (Collectif de Recherche International et de Débat sur la Guerre de 1914-1918) agit depuis 2005 pour transmettre une autre vision de la Grande Guerre et s engage dans un devoir de mémoire en ramenant la lumière sur de nombreux écrits provenant du cœur des combats. Tenues de combattants, Historial de Péronne.
war Poets Roland Vialatte, personnage principal de Notre Mère la Guerre, est un fervent amateur de poésie. Il a l âme d un intellectuel, capable de saisir la guerre sous toutes ses formes, tel les poètes de la Grande Guerre dont il s inspire au fil des pages. Parmi ces artistes on trouve Siegfried Sassoon (1886-1967), poète anglais belliqueux puis pacifiste ; Robert Graves (1895-1985) poète anglais reconnu dans les contrées anglo-saxonnes ; Rudyard Kipling (1865-1936), poète anglais impérialiste, auteur du Livre de la Jungle ; John McCrae (1872-1918), poète canadien auteur de «Au champ d honneur». La guerre, le combat, les tranchées, les morts, les gaz... La guerre ravage des vies entières. Elle fait disparaître des amis, comme celui que perdit Sassoon en 1917, ce qui le pousse au pacifisme, ainsi qu en témoignent des poèmes comme «How to die» ou des lettres comme «Déclaration d un soldat». La guerre détruit la famille : le conflit prive Kipling de son fils, emportant l innocence du Livre de la jungle. La guerre brise des vies comme celle de McCrae, qui combattit pour la justice et en mourut. La guerre fait oublier les liens familiaux : Graves fut oublié par sa famille suite à l annonce prématurée de sa mort. Mais certains laissent des traces. En l honneur de son fils, Kipling consacre le reste de sa vie au «Soldat inconnu, connu de Dieu». McCrae, disparu dans la boue, y fit germer les «coquelicots du souvenir», qui rappellent à tous l horreur du conflit. À vous jeunes désabusés À vous de porter l oriflamme Et de garder au fond de l âme Le goût de vivre en liberté. Au champ d honneur, John McCrae John McCrae, âgé de 19 ans, photographie de 1914 extraite du site mydaguerreotypeboyfriend.tumblr.com Rudyard Kipling, photograhie extraite du site www.telegraph.co.uk
Les romanciers de la Grande Guerre Notre Mère la Guerre s inspire explicitement de Henri Barbusse (français 1873-1935), Roland Dorgelès (français 1885-1973), Ernest Hemingway (américain 1899-1961) et Fréderic Manning (australien 1882-1935), quatre romanciers ayant combattu en tant que volontaires. Trois d entre eux se sont engagés malgré des ennuis de santé, et Manning sombre dans la dépression pendant le conflit. Leurs romans sont inspirés d expériences personnelles qu ils ont vécues durant le conflit. Avec réalisme et par le biais de doubles fictionnels, ils racontent la vie quotidienne des poilus. Nick Adams et la Grande Guerre est ainsi une autobiographie romancée d Hemingway. Le Feu est un roman-feuilleton inspiré des carnets que Barbusse a tenus pendant la guerre. Dans Nous étions des hommes, Manning met en scène le soldat Bourne pendant la seconde offensive de la Somme. Dorgelès, décoré de la croix de guerre, raconte le quotidien des soldats de l armée française dans Les Croix de bois. Le titre est un hommage aux soldats enterrés dans des cimetières improvisés sur les chemins du front (visibles dans Notre Mère la Guerre). Ce livre est une succession de tableaux propres à la guerre, nous montrant différents types de soldats comme dans la bande dessinée (le sentimental, le peureux ).