chronique de jurisprudence financière



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Jean-Luc GIRARDI Président de section, procureur financier près la chambre régionale des comptes de Rhône-Alpes Louis RENOUARD Avocat au barreau de Paris Ancien magistrat des juridictions financières Les Chambres régionales des comptes Pierre ROCCA Conseiller référendaire à la Cour des comptes Président de la chambre régionale des comptes du Centre Clefs proposées (base Jade) : 18-01-04-06 (jugement des comptes - gestion patente) 18-01-03-02 (responsabilité des comptables - obligations) 18-08-01 (régie d avances). CRC Aquitaine, jugement nº 2009-018 du 22 septembre 2009, Commune de Montussan (Gironde). Résumé : La régie d avances constitue le cadre indispensable à l octroi d avances à un agent afin que celui-ci puisse payer des frais occasionnés par des activités organisées par la collectivité. Références jurisprudentielles : financières : CRC Alsace, 20 novembre 2006, CH de Sélestat, La Revue du Trésor, nº 8/9-2007, p. 832 CRC Provence-Alpes-Côte d Azur, 3 décembre 2007, Commune de Brignoles, et CRC Ile-de-France, 13 décembre 2007, Commune de Sainte-Geneviève-des-Bois, Gestion et Finances publiques nº 11/2008, p. 877 CRC Bretagne, 18 novembre 2008, Office de tourisme de Cancale, Gestion et Finances publiques nº 6-2009, p. 532 CRC Auvergne, 2 juillet 2009, Commune de Souvigny, Gestion et Finances publiques nº 7-2010, p. 565. Doctrine : GAJF, 5 e éd., nº 32.3, sous CC, 3 e Ch., 30 octobre 1952, Lévêque, receveur municipal de la commune de La Roche-Posay. Textes de référence : Article 60-III et X de la loi de finances nº 63-156 du 23 février 1963 modifiée Code général des collectivités territoriales, articles R. 1617-1 et s. Instruction nº 06-031-A-B-M du 21 avril 2006, relative aux régies de recettes, d avances et de recettes et d avances des collectivités territoriales et de leurs établissements publics. Commentaires Par jugement du 22 septembre 2009, la chambre régionale des comptes d Aquitaine, ayant examiné les comptes des exercices 2003 à 2006 de la commune de Montussan (Gironde), a déclaré le comptable débiteur pour avoir versé directement la somme de 550 c, à titre d avance sur frais à un agent qui n avait pas la qualité de régisseur d avances, une telle régie n ayant d ailleurs pas été créée. Les frais en cause étaient des dépenses d alimentation et de carburant, occasionnées par des vacances sportives organisées par la commune. Cette décision met en lumière tout l intérêt de la régie d avances, dispositif visant à concilier le respect des règles fondamentales de la comptabilité publique avec les besoins les plus courants et divers de l action publique, en l espèce la nécessité, lors d activités de loisirs ou de sport conduites par la collectivité, de mettre à la disposition des animateurs une somme modique leur permettant de faire face à des menues dépenses. Une fois rappelés le principe et les règles de base des régies d avances (1), il apparaîtra que, par construction, le comptable n aurait pas dû accepter d effectuer le paiement qui lui était demandé (2). 1. Principe et règles de base de la régie d avances : En matière de dépenses, l intérêt de la régie d avances est d organiser de manière simplifiée, y compris à titre temporaire (art. R. 1617-4 du CGCT) le paiement de prestations (fournitures, services ou travaux) ou de dépenses destinées au personnel (certaines rémunérations, frais de mission ou avances sur ceux-ci). Ainsi, s agissant d achats, le régisseur règle d emblée le prestataire au vu de pièces justificatives, notamment les factures, en utilisant les fonds qui lui ont été avancés par le comptable (art. R. 1617-13). Pour autant, les règles fondamentales de la comptabilité publique demeurent présentes. En effet, lors de la reconstitution de l avance, l ordonnateur devra émettre un mandat s imputant sur les crédits appropriés et c est au vu des pièces justificatives des paiements effectués par le régisseur, notamment les factures, que le comptable pourra prendre en charge le mandat émis par l ordonnateur en vue de reconstituer l avance du régisseur (art. R. 1617-14). On peut ainsi schématiser le principe de la régie d avances par cette inversion qu elle opère dans les étapes de la dépense publique : le paiement y précède, en quelque sorte, l engagement, la liquidation et le mandatement. Le dispositif reste dans des limites précisément définies : l article R. 1617-11 le réserve à certaines dépenses : dépenses de matériel et de fonctionnement (1), dans la limite de 2 000 c certaines rémunérations et charges sociales du personnel secours avances sur frais de mission et de stage ou les frais de mission et de stage lorsqu il n a pas été (1) Selon le texte, et par erreur, il s agit des dépenses «non comprises dans un marché public passé selon une procédure formalisée». Etant donné que des fournitures ou des services peuvent être acquis par des marchés à procédure adaptée jusqu à 193 000 c HT dans le cas des collectivités territoriales et que les marchés de travaux peuvent également être passés de la sorte jusqu au seuil communautaire de 4 845 000 c HT, il va de soi que le texte a voulu évoquer, comme étant hors du périmètre des régies d avances, les marchés faisant l objet d un contrat écrit, soit, depuis le décret nº 2008-1356 du 19 décembre 2008, les marchés à partir de 20 000 c HT (4 000 c HT auparavant). D ailleurs, l instruction du 21 avril 2006 relative aux régies évoque au paragraphe 1.4.1 les «marchés publics formalisés par un contrat écrit». -N o 1 - Janvier 2011 75

consenti d avance remboursements de recettes préalablement encaissées par régie acquisitions de spectacles le montant de l avance, fixé par l acte constitutif de la régie, est au maximum égal au quart du montant prévisible des dépenses annuelles à payer par le régisseur (art. R. 1617-12) l avance n est pas reconstituée si le régisseur ne justifie pas l utilisation des fonds (cf. ci-dessus). 2. La nécessité d une régie au cas d espèce : Le comptable a accepté de payer le mandat de 550 c du 29 juin 2006, imputé sur le compte 6228 «rémunération d intermédiaires et honoraires - divers», l objet de la dépense porté sur le mandat étant «avance frais vacances sportives juillet 2006». La pièce justificative jointe au mandat est une attestation de l ordonnateur en date du 26 juin 2006 certifiant que le bénéficiaire du règlement de cette somme, en charge de l organisation des vacances sportives des 12-17 ans, sera «amené pour les vacances sportives de juillet, à payer directement certains frais correspondant à des frais de carburant, d alimentation». Comme on le voit, le destinataire du paiement n est en rien un prestataire extérieur à la commune mais un agent de celle-ci. On chercherait vainement dans la liste des pièces justificatives, qui constitue l annexe I au CGCT mentionnée à l article D. 1617-19 de ce code, la trace d une justification de ce type de paiement. Qu il s agisse de la liste issue du décret nº 2003-301 du 2 avril 2003, applicable à l époque des faits, ou de celle du décret nº 2007-450 du 25 mars 2007 aujourd hui en vigueur, les seules avances prévues sont celles destinées à des prestataires, notamment celles versées dans le cadre étroitement réglementé par le Code des marchés publics, les avances au bénéfice des agents pour des rémunérations ou des frais de mission (qui, comme vu ci-dessus peuvent par ailleurs entrer dans le champ d une régie d avances) et les avances accordées au titre des interventions économiques des collectivités locales. Par ailleurs, ainsi que le mentionne le jugement, l instruction codificatrice nº 03-041-M0 du 23 juillet 2003 sur les pièces justificatives des dépenses dans le secteur public local rappelait que la production de certificats administratifs ne saurait valablement se substituer à une pièce justificative prévue par la nomenclature (il en va de même aujourd hui de l instruction nº 07-024-M0 du 30 mars 2007 qui a remplacé la précédente). Il ne s agit pas non plus, dans le cas d espèce, du remboursement à un agent de frais qu il aurait consenti à avancer sur ses propres deniers, situation qui fait l objet d une mention dans l instruction nº 06-031- A-B-M du 21 avril 2006, relative aux régies des collectivités territoriales et de leurs 76 établissements publics (2). De même, cette situation ne correspond à aucun des cas de paiement à la commande prévus par l instruction nº 05-003-M0 du 24 janvier 2005. En réalité, le versement d une avance à un agent pour permettre à celui-ci de régler des dépenses telles que celles de l espèce (alimentation, carburant) ne peut se faire, par construction, que dans le cadre d une régie d avances. Le paiement n est pas alors l un de ceux prévus par la liste de pièces justificatives il doit suivre, en revanche, les règles du CGCT relatives à la constitution des avances et à leur renouvellement (cf. supra). Le régisseur, quant à lui, sera tenu, lors des paiements qu il effectuera avec cette avance, d exiger les justifications prévues par le décret afin d obtenir la reconstitution de son avance. CRC Aquitaine, jugement nº 2009-018 du 22 septembre 2009 Vu le jugement nº 2008-0687 du 1 er décembre 2008 par lequel il a été statué, notamment, sur les comptes rendus par M. M..., en qualité de comptable de la commune de Montussan, pour la période du 2 janvier 2003 au 31 août 2006, notifié au comptable le 10 décembre 2008 (...) Vu la réponse de M. M... à l injonction formulée à son encontre par le jugement nº 2008-0687 susvisé, datée du 9 février 2009 et enregistrée au greffe de la Chambre le 11 février 2009 Vu les lettres en date du 19 août 2009 adressées par le greffe de la chambre régionale des comptes d Aquitaine respectivement au comptable, M. M..., ainsi qu à l ordonnateur actuellement en fonctions les informant que l audience publique au cours de laquelle il sera statué sur la situation du comptable a été fixée au 8 septembre 2009, ensemble les accusés de réception desdites lettres ces personnes n étant pas présentes ou représentées à l audience Vu les conclusions du procureur financier, entendu en ses observations Après avoir entendu Mme Pézerat-Santoni, conseillère, en son rapport Après avoir délibéré hors la présence du rapporteur et du procureur financier Ordonne ce qui suit : Statuant définitivement, Sur l exercice en jugement : Sur l injonction unique prononcée par jugement du 1 er décembre 2008 : Attendu que, par jugement du 1 er décembre 2008, la chambre régionale des comptes d Aquitaine a enjoint M. M... d apporter la preuve du versement dans la caisse de la commune de la somme de 550 c, au besoin sur ses deniers personnels, ou toute autre justification à sa décharge. N o 1 - Janvier 2011 - Attendu en effet que, par mandat nº 702 du 29 juin 2006, M. M... a payé sur les crédits de l article 6228 «rémunération d intermédiaires et honoraires - divers» la somme de 550 c à M. X... que l objet de la dépense porté sur le mandat de paiement est «avance frais vacances sportives juillet 2006» Attendu que la pièce justificative jointe à l appui du mandat est une attestation de l ordonnateur en date du 26 juin 2006 certifiant que le bénéficiaire du règlement de cette somme, en charge de l organisation des vacances sportives des 12-17 ans, sera «amené pour les vacances sportives de juillet, à payer directement certains frais correspondant à des frais de carburant, d alimentation» Attendu dès lors, que le paiement ainsi effectué consiste dans le versement d une avance aux fins de règlement de dépenses communales soumis aux dispositions des articles R. 1617-1 à R. 1617-5-2 et R. 1617-11 à R. 1617-14 du Code général des collectivités territoriales et de l instruction codificatrice nº 06-031-A-B-M du 21 avril 2006 relative aux régies de recettes, d avances et de recettes et d avances des collectivités territoriales et de leurs établissements publics Attendu qu en application de ces dispositions, l avance ainsi versée aurait dû être précédée, d une part, de la création d une régie temporaire d avances et, d autre part, de la nomination en qualité de régisseur temporaire de M. X..., lequel, en application des dispositions de l article R. 1617-14 du Code général des collectivités territoriales, aurait été contraint, dans le délai d un mois, de justifier de l emploi de ladite avance et de reverser entre les mains du comptable l éventuel reliquat. Attendu qu en n exigeant pas, pour le paiement cité qui constituait une avance à régulariser et justifier, la création d une régie temporaire d avances et la nomination de M. X... en qualité de régisseur temporaire en application des dispositions des articles R. 1617-1 à R. 1617-5-2 et R. 1617-11 à R. 1617-14 du Code général des collectivités territoriales, M. M... a ouvert irrégulièrement sa caisse provoquant un manquant et ainsi engagé sa responsabilité Attendu qu en application des articles 11, 12 et 13 du décret nº 62-1587 du 29 décembre 1962 modifié portant règlement général sur la comptabilité publique, les comptables publics, seuls chargés du paiement des dépenses, sont tenus d exercer, en cette matière, divers contrôles, notamment celui de la validité de la créance que ce contrôle (2) L instruction indique : «Il convient de souligner que bien qu il s agisse d une dérogation au principe de séparation des fonctions d ordonnateur et de comptable, lorsqu un agent de la collectivité ou de l établissement public local ou un élu consent à faire l avance, sur ses deniers, de faibles dépenses tel que l achat d articles de faible valeur marchande, il n y a pas lieu d instituer une régie».

particulier porte, entre autres, sur la vérification de la production des justifications et l exactitude des calculs de liquidation Attendu qu en application des dispositions de l article 60 de la loi nº 63-156 du 23 février 1963 modifiée, les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables des contrôles qu ils sont tenus d assurer en matière de recettes, de dépenses et de patrimoine dans les conditions prévues par le règlement général sur la comptabilité publique que cette responsabilité pécuniaire se trouve notamment engagée dès lors qu un déficit ou un manquant en monnaie ou en valeurs a été constaté, qu une dépense a été irrégulièrement payée Attendu qu en réponse, M. M... a présenté trois moyens par lesquels il soutient que : premièrement, le certificat de l ordonnateur produit à l appui du mandat précité en constituait la pièce justificative, deuxièmement, les pièces justificatives de la dépense ont été produites à l appui du compte de gestion de l exercice 2006, troisièmement, le contrôle hiérarchisé de la dépense constitue un contrôle sélectif des mandats, ce qui ne lui a pas permis de contrôler ceux-ci de façon exhaustive Sur le premier moyen : Attendu que le paiement de la somme de 550 c à M. X... n est pas justifié par une des pièces prévues par l article D. 1617-19 du Code général des collectivités territoriales dans sa rédaction en vigueur au jour du paiement en cause et rappelées par l instruction codificatrice nº 03-041-M0 du 23 juillet 2003 sur les pièces justificatives des dépenses dans le secteur public local, cette dernière précisant notamment que la production de certificats administratifs ne saurait valablement se substituer à une pièce justificative prévue par la nomenclature Attendu qu en tout état de cause, il ne s agissait pas, en l espèce, du paiement d une dépense mais du versement d une avance aux fins de paiement de dépenses communales que les pièces justificatives qui devaient être exigées du comptable pour le versement de ladite avance étaient, en ce cas, celles prévues par les dispositions du Code général des collectivités territoriales et de l instruction codificatrice nº 06-031-A-B-M du 21 avril 2006, rappelées par le jugement du 1 er décembre 2008 soit, d une part la décision exécutoire de la création de la régie temporaire d avances correspondante, faisant obligation au régisseur de produire au comptable, dans le délai prescrit, les justificatifs de ces opérations et de reverser entre ses mains le reliquat de l avance pour la partie éventuellement non justifiée de son emploi et, d autre part, l acte de nomination de M. X... en qualité de régisseur temporaire de cette avance que, dès lors, le premier moyen avancé par M. M... doit être rejeté Sur le deuxième moyen : Attendu que M. M... n a été en mesure de produire ni les justificatifs de dépenses réalisées pour le compte de la commune par M. X... au moyen de la somme de 550 c qui lui avait été remise à cet effet, ni de produire les références des mandats de régularisation qui auraient éventuellement pris en charge les dépenses correspondantes que le deuxième moyen présenté en défense par M. M... doit, dès lors, être rejeté Sur le troisième moyen : Attendu que le contrôle hiérarchisé de la dépense constitue une procédure de contrôle interne des services du Trésor public que cette procédure n exonère en rien les comptables de leur responsabilité personnelle et pécuniaire qu ils engagent du fait de leurs opérations, au regard des obligations de contrôle imposées par les dispositions en vigueur du décret nº 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique et de la définition de cette responsabilité par les dispositions de l article 60 de la loi nº 63-156 du 23 février 1963 qu en conséquence, ce troisième moyen doit être rejeté. Par ces motifs, M. M... est constitué débiteur envers la commune de Montussan de la somme de cinq cent cinquante euros, augmentée des intérêts au taux légal le point de départ desdits intérêts est fixé au 1 er décembre 2008, date du jugement susvisé. Fait et jugé en la chambre régionale des comptes d Aquitaine par M. Chevillotte, président de la première section, MM. Richard et Monamicq, conseillers. Conclusions du Ministère public du 1 er septembre 2009 Nous, commissaire du Gouvernement près la chambre régionale des comptes d Aquitaine, Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l homme et des libertés fondamentales, notamment son article 6, paragraphe 1 Vu le Code des juridictions financières Vu l article 34 de la loi nº 2008-1091 du 28 octobre 2008 relative à la Cour des comptes et aux chambres régionales des comptes Vu l arrêté du président de la juridiction nº 2008-05 en date du 19 décembre 2008, portant organisation et détermination de la compétence des formations de délibéré de la chambre régionale des comptes d Aquitaine Vu Nos conclusions nº 2008-0399 rendues le 26 novembre 2008 Vu le jugement nº 2008-0687 rendu le 1 er décembre 2008 par la chambre régionale des comptes d Aquitaine chronique de jurisprudence financière Vu le rapport nº 2009-0018 communiqué par le président de la première section de la chambre régionale des comptes d Aquitaine Avons pris connaissance avec intérêt du rapport susvisé sur lequel nous croyons devoir formuler les observations suivantes : 1. Sur la procédure : Rappelons que, par jugement susvisé nº 2008-0687 en date du 1 er décembre 2008, rendu sur les comptes des exercices 2003 à 2006 de la commune de Montussan, la chambre régionale des comptes d Aquitaine (1 re section) a prononcé à l encontre de M. M..., comptable de ladite collectivité du 2 janvier 2003 au 31 août 2006, une injonction de produire, dans le délai de deux mois à compter du jour de la notification dudit jugement, la preuve du versement dans la caisse communale, au besoin sur ses deniers personnels, de la somme de 550 c, ou toute autre justification à décharge Relevons que M. M... a accusé réception dudit jugement le 11 décembre 2008 et a adressé ses éléments de réponse par lettre en date du 9 février 2009, enregistrée au greffe de la juridiction le 11 février 2009 Concluons des considérations qui précèdent, en application des dispositions de l article 34 de la loi nº 2008-1091 du 28 octobre 2008 relative à la Cour des comptes et aux chambres régionales des comptes, qu il y a lieu de poursuivre la procédure selon les dispositions précédentes du Code des juridictions financières Qu à cette fin, dans le respect des principes du procès équitable tels qu énoncés par la Convention de sauvegarde des droits de l homme et des libertés fondamentales susvisée, article 6, paragraphe 1, selon l interprétation dégagée en la matière et en dernier lieu par la Cour européenne des droits de l homme dans son arrêt du 12 avril 2006 Martinie c/ France, la Juridiction devra délibérer au terme d une audience publique, les parties intéressées ayant été dûment averties en temps utile de la date de celle-ci et de la possibilité de consulter préalablement au greffe de la Chambre les pièces du dossier, le public ayant été informé par voie d affichage à la porte des locaux de la juridiction de la tenue de ladite audience publique, au cours de laquelle les parties précitées auront été mises en mesure de présenter leurs observations, la formation de jugement délibérant ensuite hors la présence du public, du rapporteur et du commissaire du Gouvernement, le jugement ainsi délibéré étant enfin lu en audience publique Constatons que les parties intéressées, soit en l espèce le comptable dont la responsabilité est mise en jeu, M. M..., et l ordonnateur actuellement en fonctions de la commune de Montussan, ont été dûment averties par lettres en date du 19 août 2009 dont elles ont respectivement accusé réception le 21 août 2009, de la tenue le -N o 1 - Janvier 2011 77

8 septembre 2009 de l audience publique de jugement que l avis public correspondant est affiché à la porte de la juridiction depuis le 24 août 2009 que le dossier de l affaire, déposé au greffe de la Chambre, comprend, outre les pièces de comptabilité en cause, d une part l extrait correspondant du rapport antérieur du rapporteur, copie des conclusions y afférentes du procureur financier et copie du jugement susvisé, d autre part le rapport du rapporteur relatif aux suites à donner qu en outre, les présentes conclusions y seront déposées sans délai Estimons en conséquence l affaire en état d être jugée 2. Sur les suites proposées : Rappelons que la Chambre a prononcé l injonction précitée au motif du paiement du mandat nº 702 du 29 juin 2006, imputé au compte 6228 «rémunération d intermédiaires et honoraires» d un montant de 550 c (il s agit bien de la somme de 550 c, ainsi qu indiqué dans l intitulé et le dispositif de l injonction) à M. X... à titre «d avance frais vacances sportives juillet 2006» ainsi que mentionné sur le mandat, aux fins de paiement de dépenses communales par M. Olivier, alors que la régie d avance correspondante n a pas été instituée et que le bénéficiaire dudit règlement n a pas été nommé en qualité de régisseur de ladite avance que les justificatifs de l emploi de ladite avance n ont pu être produits à la Chambre ni même leurs références Observons qu en réponse au jugement susvisé, M. M... présente comme premier moyen de défense que le certificat de l ordonnateur produit à l appui du mandat précité en constituait la pièce justificative, comme second moyen que les pièces justificatives de la dépense ont été produites à l appui du compte de gestion de l exercice 2006, comme troisième moyen enfin que le contrôle hiérarchisé de la dépense constitue un contrôle sélectif des mandats, ce qui ne lui a pas permis de contrôler ceux-ci de façon exhaustive Qu il conclut sa défense en demandant à la Chambre de statuer en équité et de lui accorder décharge de sa gestion En ce qui concerne la valeur du certificat de l ordonnateur, en date du 26 juin 2006, produit à l appui du mandat, rappelons qu il consiste dans l attestation que M. Olivier «est en charge de l organisation des vacances sportives des 12-17 ans» et sera à ce titre «amené, pour les vacances sportives de juillet, à payer directement certains frais correspondant à des frais de carburant, d alimentation... Le montant total de ces frais s élève à 550 c» Observons que le rapporteur relève que le paiement de la somme de 550 c à M. Olivier n est pas justifié par une des pièces prévues par l article D. 1617-19 du Code général des collectivités territoriales dans sa rédaction en vigueur au jour du paiement en cause et rappelées par l instruction codificatrice nº 03-041-M0 du 23 juillet 2003 sur les pièces justificatives des dépenses dans le secteur public local, cette dernière précisant notamment que la production de certificats administratifs ne saurait valablement se substituer à une pièce justificative prévue par la nomenclature Estimons cependant, pour notre part, que ne s agissant pas du paiement d une dépense mais du versement d une avance aux fins de paiement de dépenses communales, les pièces justificatives qui devaient être exigées du comptable pour le versement de ladite avance étaient, en ce cas, celles prévues par les dispositions du Code général des collectivités territoriales et de l instruction codificatrice nº 06-031-A-B-M du 21 avril 2006, rappelées par le jugement susvisé, soit d une part la décision exécutoire de création de la régie temporaire d avance correspondante, faisant obligation au régisseur de produire au comptable, dans le délai prescrit, les justificatifs de ses opérations et de reverser entre ses mains le reliquat de l avance pour la partie éventuellement non justifiée de son emploi, d autre part l acte de nomination de M. Olivier en qualité de régisseur temporaire de cette avance Que, pour ce motif, le moyen précité présenté en défense par M. Jean-Paul Olivier devrait être rejeté En ce qui concerne le second moyen, constatons comme le rapporteur que M. M... n a pas été en mesure de produire ni les justificatifs des dépenses réalisées pour le compte de la commune par M. Olivier au moyen de la somme de 550 c qui lui avait été remise à cet effet, ni de produire les références des mandats de régularisation qui auraient éventuellement pris en charge les dépenses correspondantes Estimons qu ainsi le second moyen présenté pour sa défense par M. M... devrait, pour ce motif, être rejeté En ce qui concerne le troisième moyen, observons, comme le rapporteur, que les mesures d organisation interne des contrôles du comptable ne l exonèrent en rien de la responsabilité personnelle et pécuniaire qu il engage du fait de ses opérations, au regard des obligations de contrôle que lui imposent les dispositions en vigueur du décret nº 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique et de la définition de cette responsabilité par les dispositions de l article 60 de la loi nº 63-156 du 23 février 1963 Estimons, comme le rapporteur, que pour ce motif ce troisième moyen devrait être rejeté En ce qui concerne enfin la possibilité pour la juridiction de statuer en équité, à quoi l appelle M. M..., rappelons que le juge des comptes, statuant sur une comptabilité patente, ne peut que se prononcer au vu des opérations du compte en jugement et des pièces justificatives prévues par la réglementation qu ainsi, la juridiction ne saurait, en la matière, suppléer par des considérations d équité à l insuffisance des justifications produites Pour tous ces motifs, M. M... n ayant pas satisfait à l injonction, souscrivons à la proposition du rapporteur de lever ladite injonction et de le constituer débiteur de la commune de Montussan pour la somme de 550 c 3. En ce qui concerne les intérêts du débet : Rappelons qu aux termes des dispositions de l article 60-VIII de la loi précitée du 23 février 1963, les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics Croyons que, nonobstant l absence de proposition du rapporteur en la matière, il y a lieu pour la Chambre de statuer d office sur l imputation, au débet qu elle aura éventuellement décidé, d intérêts au taux légal que le premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. M... est le jugement susvisé du 1 er décembre 2008 prononçant une charge provisoire à l encontre du comptable précité Souscririons en conséquence à la fixation par la Chambre de la date de départ du décompte des intérêts du débet éventuel au 1 er décembre 2008 N avons pas d autre observation particulière à formuler sur le présent rapport en l état du dossier. Gérard RIBIÈRE. 78 N o 1 - Janvier 2011 -

Clefs proposées (base Jade) : 18-01-04-06 (gestion patente) 18-01-03-02-01 (responsabilité des comptables - production des comptes) 18-05-06 (pièces justificatives) 39-02 (formation des contrats et marchés). CRC Ile-de-France, jugement nº 09-0116 J du 7 janvier 2010, Commune de Montrouge. Résumé : Le comptable a payé à de nombreuses reprises des dépenses relatives à l exécution d un marché à bons de commande au vu de bons de commande émis alors que le marché n était plus valide. Les bons de commande ne pouvaient dès lors pas constituer les pièces justificatives nécessaires aux paiements de ce type de marchés. Références jurisprudentielles : financières : CC, 11 septembre 2003, Syndicat intercommunal des collectivités électrifiées du département de la Côte-d Or (SICECO), La Revue du Trésor, nº 11-2004, p. 692 à 694 CRC Rhône-Alpes, 10 juin 2004, Département de la Loire, Rec. p. 68, La Revue du Trésor, nº 5-2005, p. 251 CRC Bourgogne, 7 juillet 2009, SICECO, Gestion et Finances publiques n o 10-2010, p. 750. Doctrine : Sur les pièces justificatives : GAJF, 5 e éd., note 21, sous CE, 21 mars 2001, Morel Sur l exécution des marchés publics : GAJF, note 23, sous CC, 22 novembre 1972, Delsuc Instruction codificatrice nº 07-024-M0 du 30 mars 2007 sur les pièces justificatives des dépenses du secteur public local, complétée par l instruction nº 09-007-M0 du 10 avril 2009. Textes de référence : Code des juridictions financières Article 60, paragraphe I de la loi de finances nº 63-156 du 23 février 1963 Décret nº 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique, notamment articles 12 B et 13 Code des marchés publics Annexe 1 au CGCT mentionnée à l article D. 1617-19 de ce code (nomenclature des pièces justificatives). Commentaires Par réquisitoire du 31 mars 2009, le procureur financier près la chambre régionale des comptes d Ile-de-France a requis la Chambre de statuer sur la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. L... pouvant résulter du I de l article 60 de la loi du 23 février 1963 au motif que l intéressé a réglé, sur le compte 60621 «fournitures non stockées - combustibles», des mandats émis entre le 15 février et le 12 mai 2006 pour un montant total de 39 895,96 c sur le fondement de bons de commande postérieurs au 13 janvier 2006, date de la fin du marché auxquels ils se référaient. Ils étaient antérieurs, par ailleurs, à la conclusion, le 6 octobre 2006, d un nouveau marché signé avec la même entreprise. La situation est identique à celle qui a donné lieu au jugement de la CRC Bourgogne du 7 juillet 2009, SICECO, à ceci près que les faits se sont déroulés sous l empire du Code du 7 mars 2001 et non de l ancien Code des marchés publics, antérieur à la réforme de 2001 et que la procédure suivie par la Juridiction est celle issue de la réforme instituée par la loi nº 2008-1091 du 28 octobre 2008 et les décrets n os 2008-1397 et 2008-1398 du 19 décembre 2008. La commune de Montrouge a passé, en 2003, un marché à bons de commande de fourniture de carburant et de fioul. Le lot nº 2 de ce marché, relatif à la fourniture de combustibles liquides nécessaires au chauffage de bâtiments municipaux, a été notifié à son titulaire le 13 janvier 2003. Ce contrat a fait l objet de reconductions, d abord pour 2004, puis jusqu au 13 janvier 2006 : conformément au Code des marchés publics alors applicable, sa durée totale a été de trois ans (la durée maximale d un tel marché, reconductions comprises, a été portée à quatre ans par le Code du 7 janvier 2004). Un nouveau marché, ayant le même objet, a été conclu le 6 octobre 2006. Faisant référence au marché de 2003, dont la date de validité était pourtant dépassée depuis le 14 janvier 2006, des bons de commande ont été émis entre le 18 janvier et le 23 mars 2006 pour un montant total de 39 895,96 c. Le comptable a donc payé les achats correspondants sans disposer de bons de commande valides, pièce justificative exigée, pour les marchés passés après formalités préalables (soit, alors, à partir du seuil de 90 000 c HT) à la rubrique 4121 de la liste des pièces justificatives en annexe I au CGCT mentionnée à l article D. 1617-19 du même code, dans sa version issue du décret nº 2003-301 du 2 avril 2003. En tout état de cause, à supposer que le marché ait été passé sans formalités préalables, le comptable devait, dès lors qu il s agissait d un marché écrit, disposer (rubrique 4112 de la même liste des pièces justificatives) de «contrat et, le cas échéant, annexes ayant des incidences financières», le contrat, dans le cas d un marché à bons de commande, étant, par construction, constitué conjointement du marché luimême et des bons de commande successifs. La Chambre était donc fondée à considérer ces paiements comme irréguliers faute des justifications appropriées. Dans sa réponse, le comptable n avait pas apporté d éléments de nature à conduire la Juridiction à reconnaître l existence d un cas de force majeure. CRC Ile-de-France, jugement nº 09-0116 J du 7 janvier 2010 Vu le réquisitoire du procureur financier, enregistré au greffe le 31 mars 2009, par lequel le procureur financier a saisi la Chambre en vue de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. L..., comptable de la commune de Montrouge au titre d opérations relatives à l exercice 2006 Vu la notification du réquisitoire du procureur financier et du nom du magistrat chargé de l instruction en date du 8 avril 2009 Vu les accusés de réception signés le 9 avril 2009 par M. L..., comptable et par M. Jean- Loup Y..., maire de la commune de Montrouge, du réquisitoire et de la désignation du magistrat chargé de l instruction Vu les comptes de la commune pour l exercice 2006 Vu les pièces relatives à l achat en 2006 de fioul domestique par la commune Vu les justifications et les observations reçues au cours de l instruction Vu le Code des juridictions financières Vu le Code général des collectivités territoriales Vu le Code des marchés publics Vu l article 60 de la loi de finances nº 63-156 du 23 février 1963 modifiée Sur le rapport de M. Clément Tournier, conseiller : Vu les conclusions du procureur financier Après avoir entendu, en audience publique, le rapporteur et les conclusions orales de Mme Agnès Karbouch, procureur financier M. L..., informé de l audience, n étant ni présent ni représenté Après avoir délibéré hors la présence du rapporteur et du procureur financier Mandats n os 950, 966, 2299, 2311, 2312, 2313, 3754, 3768, 3779, 3787, 3788 et 4548 : Attendu que, par le réquisitoire susvisé du 31 mars 2009, le procureur financier, se fondant sur les dispositions des articles 12 et 13 du décret du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique, a -N o 1 - Janvier 2011 79

requis la Chambre de statuer sur la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. L... pouvant résulter du I de l article 60 de la loi du 23 février 1963 au motif que l intéressé a réglé, sur le compte 60621 «fournitures non stockées - combustibles», les mandats susmentionnés émis entre le 15 février et le 12 mai 2006 pour un montant total de 39 895,96 c sur le fondement de bons de commande postérieurs au 13 janvier 2006, date de la fin du marché auxquels ils se référaient, et antérieurs à la conclusion, le 6 octobre 2006, d un nouveau marché signé avec la même entreprise Attendu que, dans sa réponse, le comptable fait valoir qu il est certain qu en l absence de prolongation, le marché de fioul domestique de 2003 a pris fin le 13 janvier 2006, mais qu il suppose que l agent de la trésorerie chargé du visa a pris l attache des services de la ville afin de savoir si la passation d un nouveau marché était en cours que les services communaux ayant probablement répondu que le lancement de l appel d offres était imminent, les mandats en cause ont été payés au lieu d être systématiquement rejetés et réémis sans référence au marché que ces mandats ont été considérés par la trésorerie comme des paiements hors marché Attendu que le comptable indique, par ailleurs, que l anomalie juridique constatée lors de l instruction résulte des difficultés internes de la commune ayant conduit à retarder de façon très importante le lancement et l attribution du nouveau marché, combinées avec le souhait de la trésorerie de ne pas pénaliser le fournisseur de fioul de la ville et de ne pas compromettre, durant la période hivernale, l approvisionnement en combustible des locaux concernés, au nombre desquels figurent les écoles maternelles et primaires qu il ajoute qu il convient, toutefois, de noter que le préjudice financier pour la ville n est pas avéré puisque la fourniture de combustible aura continué aux conditions du marché précédent et que, de plus, eu égard à la période concernée, il est tout à fait certain que ces achats de fioul étaient indispensables et ne pouvaient être repoussés jusqu à la conclusion du nouveau marché Attendu que, dans ses conclusions, le procureur financier a constaté que les mandats en cause faisaient explicitement référence à un marché de 2003 auquel ils ne pouvaient être rattachés et fait valoir que les arguments du comptable ne sauraient être considérés comme exonératoires, au regard du caractère objectif des conditions de l engagement de la responsabilité du comptable telles qu ils résultent de l article 60 de la loi du 23 février 1963, cette responsabilité ne pouvant être écartée, le cas échéant, que par des circonstances constitutives de force majeure que les arguments tirés des circonstances qu invoque M. X..., susceptibles de fonder une demande de remise gracieuse, ne peuvent être retenus par le juge des comptes dont l appréciation ne peut porter que sur les seuls éléments matériels du compte 80 Attendu que l article 60 de la loi nº 63-156 du 23 février 1963 modifiée prévoit, dans sa rédaction en vigueur au moment des faits constatés, que : «I. (...) Les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables (...) du paiement des dépenses (...). Les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables des contrôles qu ils sont tenus d assurer en matière (...) de dépenses (...) dans les conditions prévues par le règlement général sur la comptabilité publique. (...) IV. La responsabilité pécuniaire prévue ci-dessus se trouve engagée dès lors (...) qu une dépense a été irrégulièrement payée (...)» Attendu qu il résulte de l article 12 du décret nº 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique que «les comptables sont tenus d exercer (...) en matière de dépenses, le contrôle (...) de la validité de la créance dans les conditions prévues à l article 13 ci-après», l article 13 du même décret précisant qu «en ce qui concerne la validité de la créance, le contrôle porte sur (...) l intervention préalable des contrôles réglementaires et la production des justifications» Attendu que la commune a passé, en 2003, un marchés de fourniture de carburant et de fioul que le lot nº 2 de ce marché, relatif à la fourniture de combustibles liquides nécessaires au chauffage de bâtiments municipaux, a été attribué la SA Chantiers Marc et notifié le 13 janvier 2003 qu après la reconduction du marché pour l année 2004 par lettre du 9 novembre 2003, la dernière notification relative à sa reconduction, en date du 16 septembre 2004, indique qu il est reconduit jusqu au 13 janvier 2006 Attendu que l article 77 du Code des marchés publics indique que «l émission des bons de commande ne peut intervenir que pendant la durée de validité du marché» qu un nouveau marché de fourniture de carburant et de fioul a été passé en 2006 et à nouveau attribué à la SA Chantiers Marc, mais que ce marché n a été signé que le 6 octobre 2006 Attendu qu il ressort de l examen des pièces justificatives de dépenses relatives au compte 60621 «fournitures non stockées - combustibles», que, parmi les paiements rattachés explicitement à l application du marché de 2003, figurent des factures relatives à des livraisons postérieures à la date d achèvement du marché (13 janvier 2006) qu il s agit des mandats suivants : mandat nº 950 du 15 février 2006, 1 376 c, fioul domestique pour le cimetière communal livré le 23 janvier 2006 suivant marché, bon de commande du 18 janvier 2006, facture du 31 janvier 2006 mandat nº 966 du 15 février 2006, 2 753,19 c, fioul domestique pour le domaine de Villelouvette pour le 27 janvier 2006, suivant marché, bon de commande du 25 janvier 2006, facture du 27 janvier 2006 N o 1 - Janvier 2011 - mandat nº 2299 du 17 mars 2006, 2 850,67 c, fioul domestique pour les ateliers Paul-Bert pour le 15 février 2006 suivant marché, bon de commande du 7 février 2006, facture du 28 février 2006 mandat nº 2311 du 17 mars 2006, 3 410,54 c, fioul domestique pour le domaine de Villelouvette pour le 13 février 2006, suivant marché, bon de commande du 7 février 2006, facture du 28 février 2006 mandat nº 2312 du 17 mars 2006, 5 703,62 c, fioul domestique pour le domaine de Villelouvette pour le 27 février 2006, suivant marché, bon de commande du 24 février 2006, facture du 28 février 2006 mandat nº 2313 du 17 mars 2006, 2 565,60 c, fioul domestique pour le club 14/17 pour le 13 février 2006, suivant marché, bon de commande du 7 février 2006, facture du 28 février 2006 mandat nº 3754 du 20 avril 2006, 8 073,96 c, fioul domestique pour la mairie pour le 10 mars 2006, suivant marché, bon de commande du 9 mars 2006, facture du 23 mars 2006 mandat nº 3768 du 20 avril 2006, 2 883,56 c, fioul domestique pour les ateliers Paul-Bert pour le 13 mars 2006, suivant marché, bon de commande du 9 mars 2006, facture du 23 mars 2006 mandat nº 3779 du 20 avril 2006, 1 441,78 c, fioul domestique pour le cimetière communal pour le 23 mars 2006, suivant marché, bon de commande du 21 mars 2006, facture du 23 mars 2006 mandat nº 3787 du 20 avril 2006, 3 242,85 c, fioul domestique pour le domaine de Villelouvette pour le 15 mars 2006, suivant marché, bon de commande du 13 mars 2006, facture du 23 mars 2006 mandat nº 3788 du 20 avril 2006, 2 595,20 c, fioul domestique pour le club 14/17 pour le 13 mars 2006, suivant marché, bon de commande du 9 mars 2006, facture du 23 mars 2006 mandat nº 4548 du 12 mai 2006, 2 998,99 c, fioul domestique pour le domaine de Villelouvette pour le 4 avril 2006, suivant marché, bon de commande du 28 mars 2006, facture du 3 avril 2006 Qu au total, c est une dépense de 39 895,96 c qui a été irrégulièrement rattachée au marché de 2003 Attendu que, dans sa réponse, le comptable ne met pas en cause les faits rappelés ci-avant qu il explique, pour l essentiel, que l agent en charge des paiements a dû avoir connaissance de l imminence de la passation d un nouveau marché, que ce délai s est prolongé du fait des difficultés qu ont rencontrées les services techniques de la commune, que la collectivité était dans la nécessité de se fournir en combustible, notamment pour le chauffage des écoles et, enfin, qu aucun préjudice n avait résulté de la pratique suivie que, comme l a exposé, dans ses conclusions, le procureur financier, ces arguments, s ils expliquent clairement les conditions dans

lesquelles se sont produits les faits constatés, ne sont pas de nature à exonérer le comptable de la responsabilité qui lui incombe en application de l article 60 de la loi du 23 février 1963, dans la mesure où le juge des comptes ne peut fonder sa décision sur les circonstances particulières, objectives et subjectives, qui ont conduit le comptable à payer, comme s ils concernaient des paiements hors marché, des mandats relevant explicitement du marché terminé le 13 janvier 2006 Qu ainsi M. L... se trouve dans le cas prévu par le paragraphe VII de l article 60 de la loi susvisée du 23 février 1963 qu il y a donc lieu de le constituer débiteur de la commune de Montrouge pour la somme de 39 895,96 c Attendu que, aux termes du paragraphe VIII de l article 60 de la loi précitée du 23 février 1963, «les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics» qu en l espèce, cette date est la date de notification du réquisitoire, soit le 10 avril 2009 Décide : I. Au titre des mandats n os 950, 966, 2299, 2311, 2312, 2313, 3754, 3768, 3779, 3787, 3788 et 4548, M. L... est constitué débiteur de la commune de Montrouge pour la somme de 39 895,96 c augmentée des intérêts de droit à compter du 10 avril 2009 II. La décharge de M. L... ne pourra être donnée qu après apurement du débet cidessus prononcé. Fait et jugé à la chambre régionale des comptes d Ile-de-France, septième section, le 7 janvier 2010. Délibéré par M. Christian Carcagno, président de séance MM. Prigent et Sinnassamy. En présence de Mme Sandrine Gillet, auxiliaire du greffe. Conclusions du Ministère public nº 2009-0509 du 22 septembre 2009 Nous, procureur financier près la Chambre régionale des comptes d Ile-de-France, Vu le Code des juridictions financières Vu la loi nº 63-156 du 23 février 1963 en son article 60 Vu le réquisitoire nº 09-11 du 31 mars 2009 Vu le rapport relatif au jugement des comptes de la commune de Montrouge nº 09-0356 R, enregistré au greffe de la Chambre le 20 août 2009, communiqué au Ministère public le 21 août 2009, ensemble les pièces à l appui Avons pris connaissance du rapport susvisé sur lequel sont formulées les conclusions qui suivent. Sur la procédure : Le rapport d examen à fin de jugement des comptes des exercices 2003 à 2007 de la commune de Montrouge nº 09-0228 R de M. Clément Tournier, conseiller rapporteur, enregistré au greffe de la Chambre le 20 août 2009, a donné lieu à notre réquisitoire visé cidessus du 31 mars 2009. Celui-ci a mis en jeu la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. L..., comptable de la commune du 30 janvier 2004 au 1 er juillet 2007. Ce réquisitoire a été régulièrement notifié à l ordonnateur et à M. L... le 10 avril 2009. Conformément à l arrêté du président de la chambre régionale des comptes d Ilede-France nº 09-04 du 16 février 2009, M. Clément Tournier a assuré, en qualité de rapporteur, l instruction des charges soulevées par le Ministère public M. L... en a été averti par lettre notifiée le 23 juin 2009. L instruction a été close par le dépôt du rapport à fin de jugement nº 09-0356 R enregistré au greffe de la Chambre le 20 août 2009, communiqué au Ministère public le 21 août 2009. Nous rappelons que, conformément aux dispositions du II de l article R. 241-36 du Code des juridictions financières, les parties auxquelles le réquisitoire a été notifié devront être informées de la clôture de l instruction, du dépôt des conclusions du Ministère public, des productions faites par les parties ainsi que de la possibilité de consulter ces pièces. Dès lors que ces dernières formalités auront été accomplies, la procédure apparaissant régulière, l affaire sera en état pour qu il y soit statué en audience publique comme le prévoit le III de l article L. 242-1 du Code des juridictions financières. Sur le fond : Rappelons qu aux termes des dispositions de l article 12 du décret du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique, «les comptables sont tenus d exercer (...) b) En matière de dépenses, le contrôle (...) de la validité de la créance dans les conditions prévues à l article 13 ci-après (...)». L article 13 du même décret dispose que, «en ce qui concerne la validité de la créance, le contrôle porte sur la justification du service fait et l exactitude des calculs de liquidation l intervention préalable des contrôles réglementaires et la production des justifications (...)». La commune de Montrouge a passé en 2003 un marché à bons de commande pour la fourniture de fioul avec la SA Chantiers Marc. Le marché a été notifié à cette dernière le 13 janvier 2003. Cette convention n avait cependant été conclue que pour une durée de un an, renouvelée deux fois par reconduction expresse, et ce en application des dispositions de l article 72 du Code des marchés publics dans sa version issue du décret nº 2001-210 du 7 mars 2001. Le contrat est donc arrivé à échéance le 13 janvier 2006. A la suite d un appel d offres qui, selon M. L..., aurait été lancé le 27 avril 2006, un nouveau marché a été conclu avec cette même société. Mise en liquidation-vente, son activité a été reprise par une autre entreprise, la SEDEP. Le marché a finalement été signé le 6 octobre 2006. M. L... a pourtant réglé entre le 13 janvier et le 6 octobre 2006 sur le compte 60621 «fournitures non stockées - combustible», les mandats relatifs à l achat de fioul domestique n os 950 (1 376 c) et 966 (2 753,19 c) du 15 février 2006, n os 2299 (2 850,67 c), 2311 (3 410,54 c), 2312 (5 703,62 c) et 2313 (2 565,60 c) du17mars 2006, n os 3754 (8 073,96 c), 3768 (2 883,56 c), 3779 (1 441,78 c), 3787 (3 242,85 c) et 3788 (2 595,20 c) du 20 avril 2006 et nº 4548 (2 998,99 c) du 12 mai 2006. Ces mandats faisaient certes explicitement référence au marché de 2003, mais les paiements d un montant total de 39 895,96 c, ne pouvaient lui être rattachés, pas plus qu au marché du 6 octobre 2006. M. L... acquiesce aux faits, mais invoque plusieurs explications. En premier lieu, il pense que l agent en charge des paiements à la trésorerie a dû appeler les services de la commune qui l ont sans doute assuré de l imminence d un marché. Au regard de difficultés qu ont connues les services techniques de la commune, le délai s est cependant prolongé. Il argue, en second lieu, de la nécessité pour la communedesefournirencombustibleen cette période hivernale. Enfin, il demande à la Chambre de relever l absence de préjudice pour la commune s agissant d une dépense irrégulière. Ces éléments ne sauraient cependant être considérés comme exonératoires, au regard du caractère objectif des conditions de l engagement de la responsabilité du comptable. Rappelons, en effet, qu aux termes des dispositions du I de l article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée : «(...) La responsabilité personnelle et pécuniaire prévue ci-dessus se trouve engagée dès lors (...) qu une dépense a été irrégulièrement payée». Aux termes du V de ce même article, seules des circonstances constitutives de force majeure conduisent le juge des comptes à écarter, le cas échéant, la mise en jeu de la responsabilité du comptable. Les arguments tirés des circonstances qu invoque M. L... sont probablement de nature à fonder une demande de remise gracieuse, mais le juge des comptes, strictement cantonné par les textes et la jurisprudence du juge de cassation à l appréciation des seuls éléments matériels du compte, ne peut les prendre en considération. Dans ces conditions, la Chambre ne peut que constater que M. L... a engagé sa responsabilité personnelle et pécuniaire à raison de 39 895,96 c. Pierre VAN HERZELE. -N o 1 - Janvier 2011 81

Clefs proposées (base Jade) : 61-06 (établissements publics d hospitalisation) 36-08-03 (rémunération - indemnités et avantages divers) 18-05-06 (dettes des collectivités publiques - pièces justificatives). CRC Auvergne, jugement nº 2009-0029 du 20 novembre 2009 (audience du 7 octobre 2009), Centre hospitalier de Saint-Flour (Cantal). Résumé : Au jugement provisoire, la Chambre avait relevé des paiements de frais de déplacement et d indemnisation de temps de travail additionnel qu elle jugeait irréguliers. Au jugement définitif, elle lève les injonctions relatives aux frais de déplacement mais transforme en débets celles concernant les indemnisations de temps de travail additionnel. Références jurisprudentielles : financières : CRC Franche-Comté, 3 mai 2007, Hôpital de Champagnole CRC Rhône-Alpes, 17 octobre 2007, Centre hospitalier général de Tarare CRC Auvergne, 19 mai 2009, Communauté de communes de Varennes-Forterre, Gestion et Finances publiques nº 7-2010, p. 560 CRC Bretagne, 7 juillet 2009, Syndicat intercommunal de collecte et de traitement des ordures ménagères (SICTOM) de Hédé - Bécherel - Combourg - Tinténiac, Gestion et Finances publiques nº 7-2010, p. 572. Doctrine : Instructions codificatrices nº 03-041-M0 du 23 juillet 2003 et nº 07-024-M0 du 30 mars 2007 sur les pièces justificatives des dépenses du secteur local CRC Aquitaine, 1 er décembre 2009, Rapport d observations définitives sur la gestion du Centre hospitalier spécialisé (CHS) de Cadillac. Textes de référence : Article 60 de la loi de finances nº 63-156 du 23 février 1963 Article D. 6152-220-1 du Code de la santé publique Décret nº 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique, notamment articles 12 B et 13 Décret nº 92-566 du 25 juin 1992 fixant les conditions et les modalités de règlement des frais occasionnés par les déplacements des fonctionnaires et agents relevant de la fonction publique hospitalière sur le territoire métropolitain de la France Arrêté du 30 avril 2003 relatif à l organisation et à l indemnisation de la continuité des soins et de la permanence pharmaceutique dans les établissements publics de santé et dans les établissements publics d hébergement pour personnes âgées dépendantes Décret nº 2008-455 du 14 mai 2008 relatif aux modalités d indemnisation des jours accumulés sur le compte épargne-temps des personnels médicaux, pharmaceutiques et odontologiques des établissements publics de santé Arrêté du 14 mai 2008 fixant le montant d indemnisation des jours accumulés sur leur compte épargne-temps par les personnels médicaux, pharmaceutiques et odontologiques des établissements publics de santé Nomenclature des pièces justificatives en annexe à l article D. 1617-19 du CGCT. Commentaires Il sera traité brièvement des injonctions relatives aux frais de déplacement et plus longuement de celles relatives à l indemnisation du temps de travail additionnel. 1. Les frais de déplacement : La Chambre d Auvergne a prononcé de nombreux débets relatifs à des frais de déplacement mal justifiés : voir notamment Communauté de communes de Varennes- Forterre. Le présent jugement démontre qu il peut lui arriver d y renoncer lorsque le comptable présente de sérieux moyens à décharge. Ainsi, l injonction nº 1 concernait des frais de repas pris en un lieu indéterminé par les états de frais produits, les bénéficiaires disposant d un «ordre de mission permanent collectif». Cette injonction est levée car le comptable produit, en réponse, des «relevés d activité» suffisamment précis, dont on peut supposer qu ils ont été visés par l ordonnateur antérieurement au paiement. L injonction nº 2 concernait des frais de repas pris dans un restaurant situé dans la résidence administrative des intéressés. Cette injonction est également levée car le comptable produit, en réponse, la preuve qu il s agissait, en fait, de frais de repas avancés par les bénéficiaires du paiement, lors d une sortie thérapeutique effectuée avec des patients du secteur psychiatrique. La Chambre relève que ces frais auraient pu aussi bien être payés directement au restaurateur sur facture. 82 2. L indemnisation du temps de travail additionnel des praticiens hospitaliers : L examen des deux débets prononcés par la chambre d Auvergne permet de rappeler les pièces justificatives désormais prévues par la nomenclature du secteur local. 2.1. Jours de congés non pris : L injonction nº 3 concernait des paiements justifiés par aucune pièce justificative, puis jugés mal justifiés en cours d instruction. La Chambre avait, en effet, refusé de considérer que des lettres du directeur aux praticiens concernés, acceptant d assimiler à du temps de travail additionnel des congés annuels non pris, répondaient aux exigences de l arrêté du 30 avril 2003. Cet arrêté autorise, en effet, l indemnisation du temps de travail additionnel à un praticien à condition qu il s engage, par contrat et pour une durée d un an renouvelable par reconduction expresse, à effectuer un volume prévisionnel de temps de travail additionnel déterminé par quadrimestre. L article 4 précise : «Après accord du directeur, les praticiens concernés peuvent figurer au tableau de service prévisionnel pour effectuer des périodes de temps de travail additionnel afin d assurer la permanence des soins conformément au contrat de temps additionnel qu ils ont signé». Or, la Chambre constatait qu aucun contrat de temps additionnel n avait été produit et que les tableaux de service ne faisaient pas apparaître les temps de travail additionnels rémunérés. Au jugement définitif, la Chambre maintient cette position bien que le comptable N o 1 - Janvier 2011 - soutienne que les lettres précitées constituaient des décisions exécutoires du directeur du centre hospitalier mentionnant la liquidation de la dépense et qu il ne lui appartenait pas d apprécier la légalité interne de ces décisions. Pour rejeter ce moyen, la Chambre affirme ne pas reprocher au comptable de n avoir pas exercé un contrôle de la légalité interne desdites décisions mais avoir seulement constaté qu il n avait pas pu exercer les contrôles de la justification du service fait et de l exactitude des calculs de liquidation qui lui incombaient en application du règlement général sur la comptabilité publique. On observera que le dispositif mis en place pour compenser le temps de travail additionnel n est pas adapté aux congés non pris. D ailleurs, si l indemnisation des jours de congés non pris par des agents publics est désormais possible, c est au moyen de l indemnisation d une partie des jours accumulés sur un compte épargne-temps : voir le décret nº 2008-455 et l arrêté du 14 mai 2008, s agissant des praticiens hospitaliers. 2.2. Travail de nuit : L injonction nº 4 concernait également une indemnisation qui aurait dû, selon la Chambre, intervenir dans le cadre du dispositif prévu par l arrêté précité du 30 avril 2003. Comme pour l injonction précédente, la Chambre constatait que les tableaux de service mensuels sur la période concernée ne faisaient pas apparaître le nom du praticien intéressé. De fait, l article 4 de l arrêté du 30 avril 2003 dit : «Le décompte du temps de travail additionnel n intervient

qu à l issue de chaque période de référence de quatre mois, après que la réalisation de la totalité des obligations de service hebdomadaires effectuées, en moyenne, sur cette même période aura été constatée au vu du tableau de service». En réponse, le comptable soutient qu il n avait pas à exiger les dates auxquelles les permanences avaient été effectuées dans la mesure où l état dont il disposait (intitulé «indemnisation de la permanence des soins assurée sur place») attestait du service fait et lui permettait d effectuer le contrôle de la liquidation de la créance dudit praticien. Pour rejeter ce moyen, la Chambre rappelle que les praticiens hospitaliers qui sont volontaires pour dépasser leurs obligations de service ont le choix entre trois modalités de rétribution : l indemnisation, la récupération ou le versement au compte épargnetemps (3). Dans tous les cas, seul un travail effectué au-delà des obligations de service peut être effectivement compensé. Elle considère, en outre, qu un document produit par le comptable valant contrat entre l établissement et deux médecins n était pas applicable au praticien bénéficiaire des paiements reprochés et que, à supposer qu il l ait été, le comptable aurait dû constater la contradiction entre ce document qui permettait le paiement de temps additionnels forfaitaires et les dispositions de l arrêté qui soumettent ce paiement à la constatation du dépassement effectif des obligations de service. 2.3. Justifications de l indemnisation : La nomenclature des pièces justificatives des dépenses du secteur local prévoit, depuis 2007, des pièces spécifiques aux établissements publics de santé (4). A la rubrique nº 220224 «service de permanence (personnels médicaux)», il est ainsi prévu la production : 1º d un état récapitulatif périodique 2º du tableau mensuel de service annoté des modifications apportées et arrêté par le directeur comme état des services faits. L annexe H précise que «le tableau mensuel de service mentionne explicitement, pour chaque mois, le détail des périodes de temps de travail de jour et de nuit et d astreinte à domicile, en précisant à chaque fois le nom et la qualité du praticien qui en est chargé, qu il soit personnel enseignant et hospitalier, praticien hospitalier, praticien à temps partiel, assistant, praticien contractuel, praticien adjoint contractuel ou attaché». Même si cette nomenclature n était pas applicable à l époque des faits, il est donc confirmé que le tableau de service qui permet avant tout d organiser la continuité des soins constitue bien la pièce justificative indispensable au contrôle de l indemnisation du temps de travail additionnel des praticiens hospitaliers, comme c est le cas pour les gardes et astreintes. Voir deux précédents s agissant de l indemnisation du temps de travail additionnel : CRC Franche-Comté, Hôpital de Champagnole, et CRC Rhône-Alpes, Centre hospitalier général de Tarare. On notera, en revanche, que la nomenclature ne fait pas référence au «contrat de temps additionnel», pourtant prévu par l article 4 de l arrêté précité du 30 avril 2003. Il est vrai que le même article dit aussi que «le recours au temps de travail additionnel peut également être ponctuel». CRC Auvergne, jugement du 20 novembre 2009, CH de Saint-Flour La chambre régionale des comptes d Auvergne, Statuant en section, Vu le jugement nº 2008-0166 du 27 novembre 2008 par lequel il a été statué sur les comptes produits en qualité de comptables du centre hospitalier de Saint- Flour pour les exercices 2004 à 2006 par M. Jean-Louis M..., du 1 er janvier 2004 au 10 septembre 2006, et par M. Fabrice P..., du 11 septembre 2006 au 31 décembre 2006 (...) Entendu M. René Juillard, premier conseiller, en son rapport Entendu le procureur financier en ses conclusions Entendu M. Jean-Louis M..., comptable, présent à l audience Après avoir délibéré hors la présence du rapporteur et du procureur financier Ordonne ce qui suit : Statuant définitivement, En ce qui concerne la gestion de M. Jean- Louis M... : Injonction nº 1 - Paiement de frais de déplacement - Exercice 2005 : Attendu que par jugement du 27 novembre 2008, il a été enjoint à M. Jean-Louis M... d apporter la preuve du versement dans la caisse du centre hospitalier de Saint-Flour de la somme de 732 c ou toute autre justification à décharge Attendu, en effet, que M. Jean-Louis M... a payé à quatre agents du secteur psychiatrique des indemnités de repas pour un montant total de 732 c, par mandats collectifs de paie nº 8357 de 2004 (payé le 15 janvier 2005) et nº 8472 de 2005 (payé le 31 décembre 2005) Attendu que les états de frais de déplacement présentés par les intéressés, qui bénéficient d un ordre de mission permanent collectif leur permettant d utiliser un véhicule de service, ne précisaient ni le lieu d exercice de la mission, ni les dates et heures du séjour dans cette destination, comme l exigeaient les dispositions de l article 7 du décret nº 92-566 du 25 juin 1992 Attendu que, dans ces conditions, la Chambre a jugé que les pièces justificatives détenues par le comptable étaient insuffisantes au regard des exigences du décret précité puisqu elles ne lui ont pas permis d effectuer les contrôles qu il était tenu d exercer avant de procéder aux paiements, conformément aux dispositions des articles 12 et 13 du décret nº 62-1587 du 29 décembre 1962 que M. Jean-Louis M... aurait donc dû suspendre les paiements Attendu que dans sa réponse du 30 janvier 2009 au jugement du 27 novembre 2008, le comptable a transmis des relevés d activité du service psychiatrie qu il s agit d états de frais nominatifs portant, pour chaque déplacement indemnisable, sa date, les heures de départ et d arrivée, le nombre de repas pris et le lieu d exercice de la mission Attendu qu au cours de l audience publique, M. Jean-Louis M... a précisé que les états de frais ont été signés par le directeur des ressources humaines du centre hospitalier le 3 janvier 2005, pour les uns, et le 7 décembre 2005, pour les autres Considérant qu il n est pas établi qu au moment des paiements, le comptable ne disposait pas des relevés d activité susmentionnés lui permettant de procéder aux contrôles prescrits par le décret précité du 29 décembre 1962 Par ces motifs, L injonction nº 1 prononcée par le jugement du 27 novembre 2008 est levée. Injonction nº 2 - Paiement de frais de déplacement - Exercice 2005 : Attendu que, par jugement du 27 novembre 2008, il a été enjoint à M. Jean-Louis M... d apporter la preuve du versement dans la caisse du centre hospitalier de Saint-Flour de la somme de 61 c ou toute autre justification à décharge Attendu, en effet, que M. Jean-Louis M... a payé le 15 janvier 2005, par mandat collectif de paie nº 8357 de l exercice 2004, une indemnité de repas à quatre agents (3) Sur l interdiction du cumul de compensation, voir l article D. 6152-220-1 du Code de la santé publique et le rapport d observations de la CRC Aquitaine concernant le CHS de Cadillac. (4) Lesquels sont devenus des établissements publics nationaux par l effet de la loi nº 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires. Mais le décret n o 2010-425 du 29 avril 2010 est venu préciser que les dispositions de l article D. 1617-19 du CGCT leur sont toujours applicables. -N o 1 - Janvier 2011 83

du secteur psychiatrique, pour un montant total de 61 c qu au vu des états de frais joints au mandat de paiement, les repas indemnisés ont été pris dans un restaurant de Saint-Flour et non pas en dehors de la résidence administrative des agents concernés que la mission effectuée par les quatre agents du centre hospitalier ne remplissait pas l ensemble des conditions exigées par le décret nº 92-566 du 25 juin 1992 et que, dès lors, le comptable aurait dû suspendre les paiements Attendu qu à sa réponse du 30 janvier 2009, le comptable a joint un certificat administratif en date du 29 janvier 2009 par lequel le directeur de l établissement certifie que les indemnités de repas payées aux intéressés par mandat nº 8357 de 2004 correspondaient à des frais de repas avancés par eux lors d une sortie thérapeutique effectuée le 17 décembre 2004 avec des patients du secteur psychiatrique Considérant qu il apparaît, ainsi, que ces repas auraient pu être payés au restaurant, sur facture, par le comptable du centre hospitalier et que c est par méconnaissance de l organisation comptable que les agents ont payé leur repas avant d en obtenir le remboursement sous la forme d une indemnité de repas Considérant qu il n y a donc pas lieu de mettre en cause la responsabilité du comptable pour les paiements de ces dépenses Par ces motifs, L injonction nº 2 prononcée par le jugement du 27 novembre 2008 est levée. Injonction nº 3 - Paiement d indemnités de congé - Exercice 2005 : Attendu que par jugement du 27 novembre 2008, il a été enjoint à M. Jean-Louis M... d apporter la preuve du versement dans la caisse du centre hospitalier de Saint-Flour de la somme de 15 037,50 c ou toute autre justification à décharge Attendu, en effet, que par mandats collectifs de paie nº 6894 payé le 25 octobre 2005, nº 7605 payé le 25 novembre 2005 et nº 8430 payé le 23 décembre 2005, le comptable a payé à deux praticiens les indemnisations suivantes de jours de congés non pris, pour un montant total de 15 037,50 c (suit un tableau) Considérant qu aucune pièce justificative n était jointe aux fiches de paie sur lesquelles figurent ces indemnités que le comptable a toutefois indiqué que chacun des deux intéressés disposait de douze jours et demi non pris par année (2003 et 2004) et produit un extrait des lettres que le directeur de l établissement leur a adressées le 9 septembre 2005 et qui mentionnent : «pour les congés annuels non pris pour assurer la continuité médicale du service, j accepte de les considérer comme du temps additionnel et ils seront 84 indemnisés au tarif de 300 c par jour en 2003 (12,5 300 c) et 301,50 c par jour en 2004 (12,5 301,50 c)» Attendu que l article 4 de l arrêté du 30 avril 2003 relatif à l organisation et à l indemnisation de la continuité des soins et de la permanence dans les établissements publics de santé autorise la rétribution, sous certaines conditions, du travail additionnel au-delà des obligations de service de certains praticiens hospitaliers qu il est ainsi prévu qu il puisse être proposé à un praticien de s engager, par contrat et pour une durée d un an renouvelable par reconduction expresse, à effectuer un volume prévisionnel de temps de travail additionnel déterminé par quadrimestre Attendu qu il est prévu dans ce dispositif que le décompte de travail additionnel effectué intervient à l issue de chaque période de référence de quatre mois, après que la réalisation de la totalité des obligations de service hebdomadaires effectuées, en moyenne, sur cette même période a pu être constatée au vu du tableau de service Attendu qu aucun contrat de temps additionnel n a été produit et que les tableaux de service ne faisaient pas apparaître les temps de travail additionnels rémunérés, ce qui rendait impossible le contrôle du décompte de ces derniers Considérant dans ces conditions que le comptable ne pouvait procéder aux paiements, en l absence des pièces justificatives afférentes au mode d indemnisation du temps de travail additionnel qu il aurait donc dû suspendre ces paiements Attendu qu en réponse au jugement du 27 novembre 2008, le comptable a transmis à la Chambre, le 30 janvier 2009, les courriers adressés le 9 septembre 2005 par le directeur du centre hospitalier aux deux praticiens concernés, acceptant de considérer comme du temps additionnel les congés annuels non pris et de les indemniser au taux en vigueur que, dans cette réponse, confirmée oralement à l audience publique du 7 octobre 2009, le comptable a précisé que les indemnisations du temps de travail additionnel ont été payées sur la base d une «décision exécutoire» du directeur du centre hospitalier mentionnant la liquidation de la dépense et qu il ne lui appartenait pas d apprécier la légalité interne de cette décision exécutoire, ainsi que l ont jugé le Conseil d Etat et la Cour des comptes (jurisprudences Balme et Mariller) Attendu qu à l audience publique, M. Jean- Louis M... a remis à la Chambre des copies des lettres adressées le 19 juillet 2005 par le directeur du centre hospitalier aux docteurs N... et R... et de la lettre adressée conjointement le 2 septembre 2005 par les deux N o 1 - Janvier 2011 - praticiens au directeur de l établissement que les correspondances du directeur datées du 19 juillet 2005, évoquées par la lettre précitée du 9 septembre 2005, ne font que mentionner les droits à congés annuels des deux médecins, au titre des années 2003 à 2005 que dans leur lettre du 2 septembre 2005, les praticiens demandent que leur temps de travail effectué au-delà des obligations de service leur soit rémunéré en temps additionnel ou, éventuellement, soit versé sur leur compte épargne-temps, selon une répartition à définir Considérant qu en estimant insuffisantes les pièces justificatives détenues par le comptable au moment des paiements, alors même que celui-ci disposait d une autorisation donnée par l ordonnateur, la Chambre n a pas reproché à M. Jean- Louis M... de n avoir pas exercé un contrôle de la légalité interne de cette autorisation mais a seulement constaté que celui-ci n avait pas pu exercer les contrôles de la justification du service fait et de l exactitude des calculs de liquidation qui lui incombaient, en application des dispositions des articles 12 et 13 du décret nº 62-1587 du 29 décembre 1962 qu en effet, ces contrôles auraient exigé qu il disposât au moment des paiements, conformément aux dispositions de l arrêté du 30 avril 2003, des contrats signés entre le directeur de l établissement et les deux praticiens ainsi que des tableaux de service faisant mention de la totalité des obligations de service hebdomadaire effectuées par les mêmes praticiens Considérant que les pièces produites à l audience publique par M. Jean-Louis M... ne sont pas de nature à satisfaire aux exigences du décret précité du 29 décembre 1962 Considérant, dès lors, que M. Jean-Louis M... n a apporté aucun élément nouveau permettant de justifier de la régularité des paiements précités qu il n a donc pas satisfait à l injonction et a engagé sa responsabilité personnelle et pécuniaire au sens de l article 60-1 de la loi nº 63-156 du 23 février 1963 modifiée Par ces motifs, M. Jean-Louis M... est constitué débiteur du centre hospitalier de Saint-Flour pour la somme de 15 037,50 c. Cette somme portera intérêt à compter du premier acte de la mise en jeu de sa responsabilité personnelle et pécuniaire, soit à compter du 15 décembre 2008, date à laquelle le jugement du 27 novembre 2008 lui a été notifié. Injonction nº 4 - Indemnisation de temps additionnel de nuit - Exercice 2005 : Attendu que, par jugement du 27 novembre 2008, il a été enjoint à M. Jean-Louis M... d apporter la preuve du versement dans la caisse du centre hospitalier de Saint-Flour de la somme de 4 545 c ou toute autre justification à décharge

Attendu, en effet, que par mandat collectif de paie nº 8440, le comptable a payé le 23 décembre 2005 à un praticien, M. Z..., une somme de 4 545 c au titre de l indemnisation du temps additionnel de nuit Attendu que l article 4 de l arrêté du 30 avril 2003 relatif à l organisation et à l indemnisation de la continuité des soins et de la permanence dans les établissements publics de santé autorise la rétribution, sous certaines conditions, du travail additionnel exécuté audelà des obligations de service par les praticiens hospitaliers que, pour ce faire, les praticiens doivent s engager contractuellement pour une durée d un an renouvelable par reconduction expresse, à effectuer un volume prévisionnel de temps de travail additionnel déterminé par quadrimestre Attendu que, dans ce dispositif, le décompte de travail additionnel effectué est établi à l issue de chaque période de référence de quatre mois, après que la réalisation de la totalité des obligations de service hebdomadaires accomplies, en moyenne, sur cette même période a pu être constatée au vu du tableau de service Considérant que l indemnisation du travail additionnel a été payée au docteur Z... au vu d un état intitulé «indemnisation de la permanence des soins assurée sur place» et mentionnant vingt demi-périodes de temps additionnel pour un montant de 4 545 c pour le mois de novembre 2005 que toutefois les dates auxquelles ces permanences ont été effectuées ne sont pas indiquées Considérant que les tableaux de service mensuels sur la période allant de janvier à novembre 2005 ne faisaient pas apparaître le nom du praticien intéressé, que le contrôle du décompte des temps de travail additionnel ne pouvait ainsi être contrôlé qu en l absence de ces éléments de vérification du service fait et de contrôle de la liquidation, le comptable aurait dû suspendre le paiement Attendu que, dans sa réponse du 30 janvier 2009, le comptable a précisé qu il disposait pour payer ces indemnités de permanence de nuit d un état intitulé «indemnisation de la permanence des soins assurée sur place» sur lequel figurait les éléments de liquidation de la dépense au tarif prévu par l arrêté du ministre de la Santé en date du 3 août 2005 qu il n avait pas à exiger les dates auxquelles ces permanences ont été effectuées dans la mesure où l état attestait du service fait et lui permettait d effectuer le contrôle de la liquidation de la créance du médecin Attendu qu il a joint à sa réponse un extrait de l arrêté du 3 août 2005 qui prévoit pourtant la nécessité de connaître précisément les dates auxquelles ces permanences de soins ont été effectuées, afin de pouvoir comptabiliser le nombre exact de demi-gardes accomplies de nuit, le dimanche, ou un jour férié Attendu qu à l audience publique, M. Jean- Louis M... a remis à la Chambre une correspondance adressée à son successeur, le 2 février 2009, par la directrice de l hôpital rural de Murat, rattaché au centre hospitalier de Saint-Flour qu à son courrier est joint «le seul document en (sa) possession», à savoir un extrait d un document relatif à l «organisation de la continuité des soins» à l hôpital rural de Murat que ce document signé le 26 septembre 2003, notamment par le directeur de l établissement et le docteur L., stipulait l attribution à ce praticien d un temps additionnel forfaitaire mensuel de 3 000 c (20 périodes de 150 c) que, selon la directrice, le docteur Z... ayant succédé au docteur L..., les termes du document précité lui sont applicables Considérant que les praticiens hospitaliers qui ont exécuté un travail au-delà des obligations de service ont le choix entre trois modalités de rétribution : le paiement du temps de travail additionnel, la récupération des heures excédentaires effectuées ou encore leur versement sur un compte épargne-temps que, par conséquent, au moment de la prise en charge d un mandat de paiement de temps de travail additionnel, le comptable doit disposer des pièces utiles aux contrôles auxquels il est tenu en application des dispositions des articles 12 et 13 du décret nº 62-1587 du 29 décembre 1962, à savoir de documents justifiant, d une part, du travail au-delà des obligations de service et, d autre part, des modalités de rétribution choisies par le médecin Considérant que M. Jean-Louis M... n a pas établi que le document relatif à l «organisation de la continuité des soins» à l hôpital rural de Murat valant contrat du 26 septembre 2003 entre l établissement et deux médecins était applicable au docteur Z... qu en tout état de cause, si c était le cas, le comptable aurait dû constater la contradiction entre ce document qui permettait le paiement de temps additionnels forfaitaires et les dispositions de l arrêté précité du 30 avril 2003 qui soumet ce paiement à des conditions dûment justifiées qu en présence de documents contradictoires, le comptable ne pouvait donc que suspendre le paiement Considérant, dès lors, que M. Jean-Louis M... n a apporté aucun élément nouveau permettant de justifier de la régularité du paiement précité qu il n a donc pas satisfait à l injonction et a engagé sa responsabilité personnelle et pécuniaire au sens de l article 60-1 de la loi nº 63-156 du 23 février 1963 modifiée Par ces motifs, M. Jean-Louis M... est constitué débiteur du centre hospitalier de Saint-Flour pour la somme de 4 545 c. Cette somme portera intérêt à compter du premier acte de la mise en jeu de sa responsabilité personnelle et chronique de jurisprudence financière pécuniaire, soit à compter du 15 décembre 2008, date à laquelle le jugement du 27 novembre 2008 lui a été notifié. La décharge et le quitus de M. Jean-Louis M... ne pourront lui être donnés qu après l apurement des débets ci-dessus prononcés En conséquence, le sursis à décharge prononcé par le jugement nº 2008-0166 du 27 novembre 2008 sur la gestion de M. Jean- Louis M... du 1 er janvier 2004 au 10 septembre 2006 est maintenu (...). Conclusions du Ministère public nº 09-0033 du 27 mai 2009 (...) 4. Injonction nº 1 - Exercice 2005 - Frais de déplacement - Mandats collectifs de paye nº 8357, exercice 2004, et 8472, exercice 2005 - Montant 732 g : Rappel des faits : Le comptable a payé des indemnités de repas en janvier et décembre 2005 pour un montant total de 732 c à quatre agents du secteur psychiatrique sur la seule base d un ordre de mission permanent collectif leur permettant d utiliser un véhicule de fonction. Les états de frais n indiquaient pas le lieu d exercice de leur mission. Le comptable ne disposait pas des pièces justificatives suffisantes lors du paiement de ces indemnités. La réponse reçue : Le comptable transmet des relevés d activité précisant les lieux d exercice, dates et heures des missions. Il s agit en fait des documents déjà versés au dossier et annotés de mentions manuscrites. Les suites à donner : Il est probable que ces annotations aient été portées ultérieurement aux paiements il convient aussi de noter qu il n est pas possible de savoir qui a porté ces mentions complémentaires sur les états préexistants. Or, les pièces postérieures aux paiements n ont, de jurisprudence constante, aucun effet sur la régularité desdits paiements. Au cas particulier, les compléments portés concernent le lieu de la mission, qui doit être différent des résidences administrative et familiale. La question est de savoir si ces documents préexistaient ou non au paiement. Si la Chambre répond par la négative, elle sera fondée à considérer que M. Jean-Louis M... n apporte pas de justification à décharge acceptable par la juridiction et ne satisfait donc pas à l injonction. En conséquence, la juridiction pourrait, en application de -N o 1 - Janvier 2011 85

l article R. 231-13 (5) du Code des juridictions financières, constituer M. Jean-Louis M... en débet. Dans le cas contraire, la Chambre lèvera l injonction. 5. Injonction nº 2 - Exercice 2005 - Frais de déplacement - Mandat collectif de paye nº 8357 - Montant 61 g : Rappel des faits : Par mandat collectif de paye nº 8357, exercice 2004, le comptable a payé, en janvier 2005, des indemnités de repas à quatre agents sur la base d un ordre de mission collectif ayant pour objet une «sortie thérapeutique au restaurant à Saint-Flour». Dans son jugement, la Chambre a considéré que le comptable ne pouvait pas payer d indemnité de repas pris par les quatre agents, car la mission s était déroulée dans leur résidence administrative. La réponse reçue : Dans sa réponse, le comptable indique que les repas en cause ont été payés directement par les agents au lieu de les faire facturer au centre hospitalier. Le comptable a donc considéré que les dispositions du décret du 25 juin 1992 ne s appliquaient pas au cas particulier. Le comptable fournit un certificat administratif du directeur du centre hospitalier, en date du 29 janvier 2009, attestant que les frais de repas ont été avancés par les quatre agents lors de leur sortie thérapeutique. Les suites à donner : Il est probable que les repas auraient pu être payés sur facture. La Chambre pourrait lever l injonction. 6. Injonction nº 3 - Exercice 2005 - Indemnités de congé - Mandats collectifs n os 6894, 7605 et 8430 - Montant 15 037,50 g : Rappel des faits : Deux médecins ont perçu lors du dernier trimestre 2005 des indemnités de jours de congés, payées sur la seule base de la feuille de paye. Chacun a perçu les sommes suivantes : octobre... 900 c novembre... 900 c décembre... 5 718,75 c. Le comptable a payé ces indemnisations sans avoir au préalable vérifié la production des pièces justificatives et le calcul de liquidation. Aucune pièce n était jointe au mandat. Notamment, aucun contrat additionnel n a pu être produit et les tableaux de service ne permettaient pas les contrôles nécessaires. La réponse reçue : Dans sa réponse, le comptable précise que ces indemnisations ont été payées sur la base d une décision exécutoire du directeur du centre hospitalier, mentionnant la liquidation de la dépense. Il rappelle la jurisprudence du Conseil d Etat, excluant le contrôle de légalité interne du contrôle à assurer par le comptable public. Il joint à sa réponse deux courriers, adressés par le directeur le 9 septembre 2005 aux deux praticiens concernés, acceptant de considérer comme du temps additionnel les congés annuels non pris et de les indemniser au taux en vigueur. Les suites à donner : En réalité, le comptable n apporte aucun élément nouveau à la Chambre. La Chambre avait rappelé que, pour pouvoir payer du travail additionnel, ainsi que l autorise l article 4 de l arrêté du 30 avril 2003, un contrat doit être signé entre l établissement et le médecin. De plus, la rémunération n est due qu après vérification de la réalisation de la totalité des obligations de service hebdomadaire effectué, en moyenne, sur cette même période et sur le fondement du tableau de service. Aucune pièce n étant jointe, le comptable ne pouvait donc pas vérifier la liquidation. En outre, les courriers du directeur mettent bien en évidence qu il ne s agit pas de rémunérer du temps additionnel, au sens de la réglementation. Ainsi, contrairement à ce qu affirme le comptable public, la Chambre ne demande pas au comptable d exercer un contrôle de légalité interne, mais constate qu il n a pas pu exercer les contrôles qui lui incombent, en n exigeant pas la production de toutes les pièces et en ne pouvant pas vérifier les éléments de la liquidation. Dans ces conditions, M. Jean-Louis M... n apporte pas de justification à décharge acceptable par la juridiction et ne satisfait donc pas à l injonction. En conséquence, la juridiction peut, en application de l article R. 231-13 du Code des juridictions financières, constituer M. Jean-Louis M... en débet. Le point de départ du calcul des intérêts qui doivent majorer la somme en cause sera fixé, en application des dispositions de la loi de 1963 précitée, à la date du «premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics», soit le jugement provisoire en date du 27 novembre 2008. 7. Injonction nº 4 - Exercice 2005 - Indemnisation du temps additionnel de nuit - Montant 4 545 g : Rappel des faits : Un médecin a perçu en décembre 2005, des indemnités de temps additionnel de nuit pour un montant de 4 545 c. L état joint à sa fiche de paye n indiquait pas les dates de réalisation de ces permanences. Pour la Chambre, le comptable ne disposait pas de toutes les pièces justificatives lui permettant de payer ces indemnisations de temps additionnel de nuit. Il manquait notamment les tableaux de service mensuels comportant tous les éléments nécessaires au contrôle du comptable public. La réponse reçue : Le comptable considère que l état intitulé «indemnisation de la permanence des soins assurée sur place» est suffisant pour permettre le paiement. Il permet, selon lui, l attestation du service fait et le contrôle de la liquidation au tarif réglementaire. Il considère que le comptable ne pouvait pas exiger les dates des permanences, élément non nécessaire à son contrôle. Les suites à donner : Le comptable considère toujours qu il n avait pas à faire préciser les dates des permanences effectuées. Or, si l arrêté du 30 avril 2003 précité autorise la rétribution du travail additionnel, il conditionne cette possibilité à la vérification de la réalisation de la totalité des obligations statutaires sur le fondement du tableau de service. Il convient de rappeler que le médecin peut choisir les modalités d indemnisation du travail réalisé au-delà des obligations de service : indemnisation, récupération ou versement en compte épargne-temps. Au moment de la prise en charge des mandats, le comptable ne disposait pas des pièces utiles à ces contrôles, d une part, d une certification justifiant du travail au-delà des obligations de service et, d autre part, des modalités choisies par le praticien pour une éventuelle indemnisation. Le comptable considère, lui, ne pas avoir besoin de ces pièces. Dans ces conditions, M. Jean-Louis M... n apporte pas de justification à décharge acceptable par la juridiction et ne satisfait donc pas à l injonction. En conséquence, la juridiction peut, en application de l article R. 231-13 du Code des juridictions financières, constituer M. Jean-Louis M... en débet. Le point de départ du calcul des intérêts qui doivent majorer la somme en cause sera fixé, en application des dispositions de la loi de 1963 précitée, à la date du «premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics», soit le jugement provisoire en date du 27 novembre 2008. (...) Maud CHILD. (5) Désormais abrogé pour les procédures relevant de la loi nº 2008-1091 du 28 octobre 2008. 86 N o 1 - Janvier 2011 -

Clefs proposées (base Jade) : 36-08-03-004 (rémunération - frais de déplacement) 18-05-06 (dettes des collectivités publiques - pièces justificatives). CRC Centre, jugement nº 2009-0009 du 14 octobre 2009 (audience du 17 septembre 2009), Centre hospitalier du Chinonais (Indre-et-Loire). Résumé : La Chambre sanctionne le paiement de frais de déplacement entre le domicile et le lieu de travail à quatre médecins contractuels, alors que ces défraiements n étaient pas prévus par leurs contrats. Références jurisprudentielles : financières : CRC Bretagne, 11 avril 2008, Communauté de communes de Saint-Méen-le-Grand et Commune de Cesson-Sévigné, Gestion et Finances publiques nº 1-2009, p. 75 CDBF nº 165-617, 16 avril 2009, Centre hospitalier de Fougères, Revue juridique de l économie publique nº 670-2009, p. 30 CRC Auvergne, 19 mai 2009, Communauté de communes de Varennes-Forterre, Gestion et Finances publiques nº 7-2010, p. 560 CRC Haute-Normandie, 9 juin 2009, Commune de Rouen, Gestion et Finances publiques nº 2-2010, p. 186 CRC Haute-Normandie, 9 juin 2009, Centre hospitalier régional et universitaire (CHRU) de Rouen - Hôpitaux de Rouen, Gestion et Finances publiques nº 5-2010, p. 384 CRC Bretagne, 7 juillet 2009, Syndicat intercommunal de collecte et de traitement des ordures ménagères (SICTOM) de Hédé - Bécherel - Combourg - Tinténiac, Gestion et Finances publiques nº 7-2010, p. 572. Doctrine : Instructions codificatrices nº 03-041-M0 du 23 juillet 2003 et nº 07-024-M0 du 30 mars 2007 sur les pièces justificatives des dépenses du secteur local. Textes de référence : Article L. 313-4 du Code des juridictions financières Article 60 de la loi de finances nº 63-156 du 23 février 1963 Décret nº 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique, notamment articles 12 B et 13 Décret nº 92-566 du 25 juin 1992 fixant les conditions et les modalités de règlement des frais occasionnés par les déplacements des fonctionnaires et agents relevant de la fonction publique hospitalière sur le territoire métropolitain de la France Décret nº 2006-781 du 3 juillet 2006 fixant les conditions et les modalités de règlement des frais occasionnés par les déplacements temporaires des personnels civils de l Etat Décret nº 2010-676 du 21 juin 2010 instituant une prise en charge partielle du prix des titres d abonnement correspondant aux déplacements effectués par les agents publics entre leur résidence habituelle et leur lieu de travail Nomenclature des pièces justificatives en annexe à l article D. 1617-19 du CGCT. Commentaires Le paiement des frais de déplacement donne lieu à de nombreux débets fondés, le plus souvent, sur le défaut de contrôle de l exactitude de la liquidation de la dépense et l insuffisance des pièces justificatives, malgré la diminution progressive du nombre de ces pièces : voir, en dernier lieu, nos commentaires sous les jugements de la CRC Auvergne, Communauté de communes de Varennes-Forterre, et de la CRC Bretagne, SICTOM de Hédé - Bécherel - Combourg - Tinténiac. Le présent jugement concerne le remboursement de frais de déplacement entre le domicile et le lieu de travail qui est tout simplement interdit par les textes, et qui l était, ici, par l article 27 du décret nº 92-566 du 25 juin 1992 fixant les conditions et les modalités de règlement des frais occasionnés par les déplacements des fonctionnaires et agents relevant de la fonction publique hospitalière sur le territoire métropolitain de la France (6). En l occurrence, une telle indemnisation, bien qu interdite, avait été mise en place comme un avantage destiné à faciliter le recrutement de médecins contractuels afin de pallier la pénurie de praticiens dans certaines spécialités. Le comptable en fait un argument à décharge en invoquant la jurisprudence de la Cour de discipline budgétaire et financière qui a effectivement reconnu, dans certains cas, que la nécessité d assurer la continuité du service public constituait une circonstance atténuante de la responsabilité des auteurs d infractions qu elle peut sanctionner. Le comptable se réfère ici, très certainement, à la relaxe, prononcée peu de temps avant l audience en cause, dans le cas du directeur du centre hospitalier de Fougères qui avait mandaté le paiement de gardes en l absence de service fait et avait proposé au conseil d administration et mis en œuvre un dispositif de rémunération des médecins contractuels manifestement irrégulier (7). Ce moyen original est assez facilement écarté par la Chambre car, dans le jugement des comptes, ce qui est en cause ce n est pas une infraction aux règles d exécution des dépenses (réprimée par l art. L. 313-4 du Code des juridictions financières), mais une irrégularité au regard des contrôles préalables au paiement que doit effectuer le comptable public (en application du règlement général sur la comptabilité publique). Or, la Chambre précise que ce qu elle qualifie de «défraiement» n était pas prévu aux contrats des bénéficiaires. On ne saurait mieux dire que, si cela avait été le cas, la responsabilité personnelle et pécuniaire du comptable n aurait pas été mise en jeu, conformément à la jurisprudence constante qui veut que le comptable contrôle uniquement la légalité externe des actes qui lui sont produits à titre de pièces justificatives (voir nos commentaires sous le jugement de la CRC Haute- Normandie, CHRU de Rouen). Le jugement fait d ailleurs référence à de nouveaux contrats qui ont été ultérieurement conclus, en application d une délibération du conseil d administration de l établissement prévoyant expressément le principe de ce défraiement, cette circonstance ne pouvant avoir pour effet de régulariser les paiements reprochés. La Chambre écarte par ailleurs, de manière assez classique, deux autres moyens souvent invoqués en vain par les comptables : le contrôle hiérarchisé de la dépense (voir nos commentaires sous le jugement de la CRC Haute-Normandie, Commune de Rouen), et l absence (supposée) de préjudice pour l établissement. CRC Centre, jugement du 14 octobre 2009, CH du Chinonais La chambre régionale des comptes du Centre, Vu les comptes rendus, en qualité de comptables du centre hospitalier du Chinonais, pour les exercices 2005 à 2006, par Mme Lucette P... Vu les justifications produites au soutien des comptes ou recueillies au cours de l instruction Vu le jugement nº 2006-0432 en date du 9 octobre 2006 sur les comptes des exercices 1999 à 2004 Vu la convention de sauvegarde des droits de l homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 et notamment son article 6 (6) Cet article a été abrogé par l article 11 du décret nº 2010-676 du 21 juin 2010 qui fixe les conditions permettant la prise en charge d une partie des frais engagés par les agents publics pour se déplacer entre leur résidence habituelle et leur lieu de travail. (7) Cet arrêt est notamment motivé comme suit : «les rémunérations irrégulières ayant bénéficié à certains praticiens contractuels de l hôpital de Fougères entre 2003 et août 2006 ont été, dans les circonstances de l espèce, servies en l absence de toute autre solution réglementaire pour maintenir l accès aux soins de la population». -N o 1 - Janvier 2011 87

Vu le Code des juridictions financières, notamment ses articles L. 242-1, R. 212-19 et R. 241-32 à R. 241-42 Vu la loi de finances nº 63-156 du 23 février 1963 et notamment l article 60 Vu les textes législatifs et réglementaires relatifs à la comptabilité des établissements publics de santé Vu le décret nº 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique Vu les arrêtés du président de la chambre régionale des comptes n os 2009-1 du 6 janvier 2009, modifié, et 2009-4 du 4 mars 2009, modifié, fixant les attributions de la Chambre et des sections ainsi que la composition de ces dernières Vu la lettre de notification au comptable du contrôle portant sur les exercices 2005 et 2006 du centre hospitalier du Chinonais, en date du 30 janvier 2009, et celles adressées aux ordonnateurs le même jour Vu le rapport nº 2009-0019 de Mme Catherine Renondin, première conseillère, revêtu du soit-communiqué du président de la chambre régionale des comptes du Centre en date du 18 février 2009 Vu le réquisitoire du Ministère public nº R/09/0022/J en date du 4 mars 2009 notifié aux parties le 9 mars 2009 Vu l arrêté nº DCO 2009-04, du 5 mars 2009, par lequel le président de la chambre régionale des comptes a désigné M. François Gajan, premier conseiller, comme magistrat instructeur Vu les observations enregistrées au greffe de la Chambre le 23 avril 2009, déposées par Mme Lucette P..., comptable du centre hospitalier du Chinonais du 31 juillet 2002 au 1 er juillet 2007 Vu les observations déposées par M. F..., ordonnateur délégué du centre hospitalier du Chinonais, enregistré au greffe de la Chambre le 5 mai 2009 Vu l arrêté nº DCO 2009-08, du 26 mai 2009, par lequel le président de la chambre régionale des comptes a désigné Mme Cécile Daussin-Charpantier, première conseillère, comme magistrat instructeur Vu le rapport nº 2009-0094 de Mme Cécile Daussin-Charpantier, première conseillère, revêtu du soit-communiqué, en date du 27 juin 2009 Vu les conclusions nº C/09/0201/J2 en date du 7 juillet 2009 du procureur financier Vu les lettres de la secrétaire générale de la chambre régionale des comptes en date du 25 août 2009, informant les parties de la date de l audience publique du 17 septembre 2009 Entendu lors de l audience publique du 17 septembre 2009, Mme Cécile Daussin- Charpantier, première conseillère, dans son rapport, M. Rémi Indart, procureur financier, et Mme Lucette P..., comptable, en dernier Après avoir délibéré hors la présence du rapporteur et du procureur financier Entendu M. Jean-Louis Hidas, réviseur, en ses observations Ordonne ce qui suit : Statuant définitivement, Considérant que l examen des comptes du centre hospitalier du Chinonais a révélé le paiement de frais de déplacement «domicile-travail» à quatre médecins contractuels, sans que ces défraiements soient prévus par leurs contrats que ces dépenses s élèvent au total, à 3 572,40 c pour l exercice 2005 et à 3 954,36 c au titre de l exercice 2006 Considérant que Mme Lucette P..., comptable, pour la période incriminée, du centre hospitalier du Chinonais, reconnaît ces faits Considérant, en premier lieu, que Mme Lucette P..., ne peut utilement, pour s exonérer de sa responsabilité, invoquer la circonstance que dans le cadre du contrôle hiérarchisé de la dépense, dont au demeurant elle ne produit pas le plan, elle n aurait pas été en mesure de détecter immédiatement ces anomalies Considérant, en deuxième lieu, qu aux termes des dispositions de l article 27 du décret nº 92-566 du 25 juin 1992 fixant les conditions et les modalités de règlement des frais occasionnés par les déplacements des fonctionnaires et agents relevant de la fonction publique hospitalière sur le territoire métropolitain de la France, les frais de déplacements effectués par un agent entre son domicile et son lieu de travail ne peuvent donner lieu, sous réserve des dispositions de la loi du 4 août 1982 susvisée et des textes pris pour son application, à aucun remboursement direct que, par suite, si de nouveaux contrats ont été ultérieurement conclus, en application d une délibération du conseil d administration du 21 décembre 2007 prévoyant expressément le principe de ce défraiement, cette circonstance ne peut, en tout état de cause, avoir pour effet de régulariser les remboursements litigieux Considérant, en troisième lieu, que Mme Lucette P... fait valoir, d une part, que cette situation n est pas spécifique au centre hospitalier du Chinonais et illustre, en fait, les dérives dénoncées par la Cour des comptes, résultant de la pénurie de médecins dans certaines spécialités et, d autre part, que la Cour de discipline budgétaire et financière a reconnu que la nécessité d assurer la continuité du service public constituait une circonstance atténuante de responsabilité que cet argumentaire, développé dans un contexte très général, est sans incidence sur le jugement objectif des comptes du centre hospitalier du Chinonais, et ne peut qu être écarté, sans que cela fasse cependant obstacle à ce que Mme Lucette P... développe, si elle s y croit fondée, ces éléments dans le cadre d une demande de remise gracieuse Considérant, en dernier lieu, que si Mme Lucette P... fait valoir que ces remboursements n ont causé aucun préjudice à l établissement, cette circonstance, à la supposer avérée, est également sans incidence sur l appréciation de la régularité des comptes Considérant qu en application des dispositions des articles 12 et 13 du décret susvisé du 30 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique, le comptable doit, en matière de dépense, contrôler la validité de la créance, ce qui inclut la justification du service fait, l exactitude des calculs de liquidation, l intervention préalable des contrôles réglementaires et la production des justifications Considérant qu il résulte de ce qui précède que Mme Lucette P... se trouve dans le cas prévu par le paragraphe IV de l article 60 de la loi susvisée du 23 février 1963 qu il y a donc lieu de la constituer débitrice du centre hospitalier du Chinonais pour la somme de 7 526,76 c (...) Considérant qu aux termes du paragraphe VIII de l article 60 de la loi susvisée du 23 février 1963, «les débets portent intérêt au taux légal à compter de la date du fait générateur ou, si cette date ne peut être fixée avec précision, à compter de celle de leur découverte» qu en l espèce, la notification, le 9 mars 2009, à Mme Lucette P..., du réquisitoire du Ministère public constitue le premier acte d engagement de sa responsabilité Par ces motifs, Mme Lucette P... est constituée débitrice du centre hospitalier du Chinonais pour la somme de 7 526,76 c augmentée des intérêts de droit à compter du 9 mars 2009 Statuant provisoirement, Attendu que la décharge de Mme Lucette P... ne pourra intervenir qu après apurement du débet ci-dessus prononcé, il est sursis à sa décharge pour les exercices 2005 et 2006. 88 N o 1 - Janvier 2011 -

Clefs proposées (base Jade) : 18-05-09 (dettes des collectivités publiques - caractère libératoire du paiement). CRC Centre, jugements nº 2009-0004 du 23 juillet 2009 (audience du 23 juin 2009), Commune de Tours (Indre-et-Loire). Résumé : Un mandat, émis au bénéfice de la ville de Cosenza (Italie) au titre du reversement d une aide européenne, avait été payé à la ville de Tolède (Espagne). La répétition de l indu n ayant été que partielle, la Chambre prononce un débet pour la partie de la somme non restituée. Références jurisprudentielles : financières : C. comptes, 30 avril 1980, Commune de Sucy-en-Brie, GAJF, p. 246 CRC Pays-de-la-Loire, 9 septembre 2003, AFR de Luché-Pringé, La Revue du Trésor nº 5-2004, p. 305 CRC Lorraine, 18 mai 2004, Centre hospitalier de Sarreguemines, Rec. p. 34, La Revue du Trésor nº 10-2005, p. 5 C. comptes, 22 mai 2008, Syndicat intercommunal d alimentation en eau potable (SIAEP) de Guerbigny, Gestion et Finances publiques nº 10-2009, p. 783 C. comptes nº 56772, 28 janvier 2010, Syndicat mixte de l Ile-Saint-Germain. Doctrine : Instructions codificatrices nº 03-041-M0 du 23 juillet 2003 et nº 07-024-M0 du 30 mars 2007 sur les pièces justificatives des dépenses du secteur local. Textes de référence : Article 60 de la loi de finances nº 63-156 du 23 février 1963 Décret nº 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique, notamment articles 12 B, 35 et 36 Nomenclature des pièces justificatives en annexe à l article D. 1617-19 du CGCT, notamment rubriques 02, 03, 43, 45 et 47. Commentaires Aux termes de l article 12 B du règlement général sur la comptabilité publique (RGCP), le comptable doit contrôler le «caractère libératoire du règlement», c est-à-dire qu il doit s assurer que le paiement éteindra bien en tout ou partie une dette de la collectivité. L article 35 du RGCP précise : «Le règlement d une dépense est libératoire lorsqu il intervient selon l un des modes de règlement prévus à l article précédent au profit du créancier ou de son représentant qualifié». Les cas dans lesquels il peut être dérogé à cette règle, c est-à-dire les cas où les règlements peuvent valablement être effectués entre les mains de personnes autres que les véritables créanciers, ne sont pas rares : il s agit essentiellement de la cession ou du nantissement de créance, du paiement direct aux sous-traitants d un marché public (8) et de l opposition dûment signifiée au comptable en application de l article 36 du RGCP mais aussi des paiements à des avocats, à des notaires, à des héritiers ou des mandataires du créancier, etc. La nomenclature des pièces justificatives du secteur local précise, dans chaque cas, les justifications qui doivent être exigées. Si le paiement est effectué à une autre personne que le créancier dans un cas où ce n est pas possible, il est irrégulier (9). Que cette erreur provienne de l ordonnateur ou, comme au cas présent semble-t-il, du comptable, aux termes de l article 60-I de la loi du 23 février 1963, la responsabilité de ce dernier est engagée et peut être mise en jeu par le juge des comptes. Le présent jugement de la chambre régionale des comptes du Centre porte sur un cas qui ne présente aucune difficulté, puisque l erreur est manifeste : paiement mandaté au bénéfice d une ville italienne et effectué au bénéfice d une ville espagnole (ne portant pas le même nom). A défaut de discussion de moyens invoqués par le comptable, le jugement et les conclusions ne permettent pas réellement de savoir comment une telle erreur a été possible. On ne saura pas non plus pourquoi la municipalité bénéficiaire de l indu ne l a pas restitué en totalité. Il est vrai que les circonstances ayant conduit au paiement irrégulier ont peu d incidences sur la mise en jeu de la responsabilité du comptable qui est objective et ne peut être écartée que si ces circonstances sont constitutives de force majeure, ce qui n est reconnu que très exceptionnellement, en particulier en cas de paiement non libératoire (voir C. comptes, SIAEP de Guerbigny). En outre, s agissant d un paiement irrégulier, les difficultés rencontrées dans le recouvrement de l indu ne peuvent pas non plus avoir une incidence sur le débet, dès lors qu au moment où intervient le jugement la totalité n a pas été reversée par le bénéficiaire ou par le comptable sur ses deniers personnels. On sait, néanmoins, que les versements ultérieurs s imputeront sur le débet et que «le comptable public qui a couvert sur ses deniers personnels le montant d un déficit est en droit de poursuivre à titre personnel le recouvrement de la somme correspondante» (art. 60-VII de la loi du 23 février 1963). CRC Centre, jugement du 23 juillet 2009, Commune de Tours La chambre régionale des comptes du Centre, Vu les comptes rendus en qualité de comptables de la commune de Tours, pour les exercices 1999 à 2006, par M. Roland X... jusqu au 30 septembre 1999, par M. Jean-Pierre Y... du 1 er octobre 1999 au 1 er avril 2001, par Mlle Brigitte Z... du 2 avril 2001 au 1 er mai 2001, par M. Joël C..., du 2 mai 2001 au 28 avril 2005 et par M. Jean-Pierre L..., du 29 avril 2005 au 31 décembre 2006 Vu les dates de production à la Chambre Vu les justifications produites au soutien des comptes ou recueillies au cours de l instruction Vu les pièces de mutation présentées par les comptables, notamment le certificat de l ordonnateur constatant qu il n y a aucune réclamation à présenter à l encontre du comptable sortant Vu le jugement nº 2002.0617 en date des 4 et 5 juin 2002 sur les comptes des exercices 1993 à 1998 Vu la Convention de sauvegarde des droits de l homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 et notamment son article 6 Vu le Code des juridictions financières, notamment ses articles L. 242-1, R. 212-19 et R. 241-32 à R. 241-42 Vu l article 60 de la loi de finances pour 1963 nº 63-156 du 23 février 1963, modifiée Vu le décret nº 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général de la comptabilité publique Vu la lettre de notification au comptable du contrôle portant sur les exercices 1999 à 2006 de la commune de Tours en date du 29 janvier 2009 et celle adressée au maire de Tours le même jour Vu le rapport nº 2009-0013 de Mme Karine Delamarche, conseillère, revêtu du soitcommuniqué du président de la chambre régionale des comptes du Centre en date du 17 février 2009 (8) Voir CRC Lorraine, Centre hospitalier de Sarreguemines, dans le cas de paiements directs en l absence d accord exprès et préalable de la part du maître d ouvrage autorisant le titulaire du marché à recourir à la sous-traitance. (9) Voir C. comptes, Syndicat mixte de l Ile-Saint-Germain, dans le cas de paiements au titulaire d un bail rural à long terme consenti par un donateur de la collectivité. Bien entendu, si le paiement est effectué au créancier alors qu il aurait dû l être à une autre personne, il est également irrégulier : voir C. comptes, Commune de Sucy-en-Brie, dans le cas de paiements au titulaire d un marché nanti. -N o 1 - Janvier 2011 89

Vu le réquisitoire du Ministère public nº R/09/0016/J du 23 février 2009 Vu les lettres de notification du réquisitoire en date du 3 mars 2009 au maire de Tours, au comptable en fonction et à M. Joël C... Vu le rapport nº 2009-0057 de Mme Karine Delamarche, conseillère, revêtu du soit-communiqué du président de la chambre régionale des comptes du Centre en date du 23 avril 2009 Vu les lettres du greffier de la chambre régionale des comptes, en date du 17 mars 2009, informant les parties de la production de justifications Vu les lettres du greffier de la chambre régionale des comptes, en date du 29 mai 2009, informant les parties de l audience publique du 23 juin 2009 Vu les conclusions du procureur financier Entendu lors de l audience publique Mme Karine Delamarche, conseillère, en son rapport et M. Rémi Indart, procureur financier Après avoir délibéré hors la présence du rapporteur et du procureur financier Ordonne ce qui suit : Attendu que, par l effet de la prescription édictée par l article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée, il n y a plus lieu de statuer sur les comptes des exercices 1999 à 2002 Statuant définitivement, Attendu que le mandat de paiement nº 17919 daté du 29 juillet 2004, destiné à la ville de Cosenza (Italie) pour solder une subvention communautaire, a été réglé à tort à la ville de Tolède (Espagne) à la suite d une erreur dans les coordonnées bancaires de l ordre de virement à l étranger Attendu que la ville de Tolède a indûment perçu la somme de 25 220,26 c que l action en répétition de l indu engagée a permis de recouvrer une partie seulement de la somme précitée, soit 17 382,32 c Attendu qu aux termes de l article 12 du décret nº 62-1587 du 29 décembre 1962, les comptables sont tenus d exercer, en matière de dépenses, le contrôle du caractère libératoire du règlement qu en vertu de l article 35 du décret portant règlement général de la comptabilité publique, un paiement est considéré comme libératoire notamment lorsqu il est effectué au profit du véritable créancier Attendu qu en cas d erreur sur le véritable créancier, le paiement n est pas libératoire et la responsabilité du comptable peut être engagée sur la base de l irrégularité de la dépense Attendu qu en matière de dépenses, la responsabilité du comptable public s apprécie à la date à laquelle le paiement a été 90 effectué qu au cas d espèce, le paiement a été effectué le 27 août 2004, date à laquelle était en fonction M. Joël C... Attendu que l exécution d un débet ne peut créer un enrichissement sans cause pour la commune qu ainsi le comptable ne peut être mis en débet que des seules sommes qu il a injustement payées et dont il n a pas obtenu le reversement Attendu que la ville de Tolède a reversé la somme de 17 382,32 c le 1 er septembre 2006 et que cette somme doit être soustraite du montant de 25 220,26 c, payé à tort à la ville de Tolède que seule la différence entre le montant du titre émis et la somme recouvrée via l action en répétition de l indu, soit 7 837,94 c, peut être mise à la charge du comptable ayant pris en charge le mandat, M. Joël C... Attendu qu aux termes de l article 60-VIII de la loi nº 63-156 du 23 février 1963 de finances pour 1963, modifiée, les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics qu en l espèce, le réquisitoire du Ministère public du 23 février 2009 à M. Joël C... constitue le premier acte de la mise en jeu de sa responsabilité En ce qui concerne l exercice 2004 : Par ces motifs, M. Joël C... est constitué débiteur de la commune de Tours pour la somme de 7 837,94 c augmentée des intérêts de droit à compter du 23 février 2009 En ce qui concerne les exercices 2003, 2005 et 2006 : M. Joël C... est déchargé de sa gestion du 1 er janvier 2003 au 31 décembre 2003 ainsi que du 1 er janvier 2005 au 28 avril 2005 M. Jean-Pierre L... est déchargé de sa gestion du 29 avril 2005 au 31 décembre 2006, la reprise des soldes 2006 en balance d entrée de l exercice suivant ayant été constatée Statuant provisoirement, Attendu que la décharge de M. Joël C... ne pourra intervenir qu après apurement du débet ci-dessus prononcé, il est sursis à la décharge de M. Joël C... pour l exercice 2004. Conclusions du Ministère public nº 2009-452 du 30 octobre 2009 (...) I. Sur la prise en charge du mandat nº 17919 : Attendu qu il ressort du rapport nº 2009-0057 que par mandat nº 17919 daté du 29 juillet 2004, M. C... a versé la N o 1 - Janvier 2011 - somme de 25 220,26 c le 27 août 2004 à la ville de Tolède (Espagne) au titre du reversement d une aide européenne du projet «AVEC» alors même que le mandat mentionnait la ville de Cosenza (Italie) Rappelons qu en application de l article 12-B du règlement général sur la comptabilité publique, le comptable est notamment tenu d exercer le contrôle du caractère libératoire sur les dépenses qu il prend en charge et, qu à défaut, en application de l article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée, sa responsabilité personnelle et pécuniaire se trouve engagée dès lors qu une dépense a été irrégulièrement payée Attendu qu une somme de 17 382,32 c a cependant pu être recouvrée par le comptable auprès de la ville de Tolède Partageons la proposition du rapporteur de mettre en débet M. C... pour la somme de 7 837,94 c assortis des intérêts légaux N avons pas d autres observations à formuler Par ces motifs, En application de l article 60-IV de la loi du 23 février 1963 modifiée : M. X... doit être réputé déchargé de sa gestion 1998 et de sa gestion du 1 er janvier 1999 au 30 septembre 1999 date à laquelle il est également réputé quitte M. Y... doit être réputé déchargé de sa gestion du 1 er octobre 1999 au 1 er avril 2001 date à laquelle il est également réputé quitte Mlle Z... doit être réputée déchargée de sa gestion du 2 avril 2001 au 1 er mai 2001 date à laquelle elle est également réputée quitte M. C... doit être réputé déchargé de sa gestion du 2 mai 2001 au 31 décembre 2001 N avons pas d objection à ce que soient prononcées : la décharge de M. C..., du 1 er janvier 2002 au 31 décembre 2003 et du 1 er janvier 2005 au 28 avril 2005 la décharge de M. L..., du 29 avril 2005 au 31 décembre 2006, eu égard à la vérification du correct enchaînement des comptes. Sommes favorable au prononcé d un débet de 7 837,94 c assortis des intérêts légaux à l encontre de M. C... au titre du paiement effectué à tort auprès de la ville de Tolède suite à la prise en charge du mandat nº 17919 daté du 29 juillet 2004. Si la Chambre retient le prononcé de ce débet alors il conviendrait de surseoir à la décharge de M. C... au titre de l exercice 2004.

Clefs proposées (base Jade) : 18-01-03-02 (obligations du comptable - forme des comptes) 18-05-06 (dettes des collectivités publiques - pièces justificatives). CRC Bretagne, jugements n os 2009-0210 et 2009-202 du 16 février 2010 (audience du 14 janvier 2010), Communes de Noyal-sur-Vilaine et d Antrain (Ille-et-Vilaine). Résumé : La Chambre prononce deux débets pour des bordereaux de mandats non ou mal visés par les ordonnateurs. Références jurisprudentielles : financières : C. comptes, 8 mai 1942, Association syndicale de la Grange-des-Noues (Seine-et-Oise), Recueil p. 61 C. comptes, 16 mai 2002, Lycée Las Cases-de-Lavaur (Tarn), Recueil p. 51, La Revue du Trésor nº 6-2003, p. 383 C. comptes, 10 juillet 2003, Agence de l eau Loire Bretagne, Recueil p. 49, La Revue du Trésor nº 8/9-2004, p. 536 CRC Bretagne, 31 janvier 2006, Centre hospitalier de Bretagne Atlantique à Lorient, La Revue du Trésor nº 6-2007, p. 604 C. comptes, 29 juin 2007, Université Paris III - Sorbonne Nouvelle, Recueil p. 49 et 51 CRC Poitou-Charentes, 25 septembre 2008, Commune d Angoulême, Gestion et Finances publiques nº 3/4-2009, p. 348. Doctrine : Instructions codificatrices n os 03-041-M0 du 23 juillet 2003 et 07-024-M0 du 30 mars 2007 sur les pièces justificatives des dépenses du secteur local. Textes de référence : Article 60 de la loi de finances nº 63-156 du 23 février 1963 Article D. 1617-23 du Code général des collectivités territoriales Décret nº 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique, notamment articles 6, 7, 12 B et 13 Décrets n os 2003-301 du 2 avril 2003 et 2007-450 du 25 mars 2007 modifiant le Code général des collectivités territoriales (partie réglementaire). Commentaires On a longtemps considéré que la sécurité des opérations de dépense publique nécessitait que l ordonnateur appose son visa sur trois documents : 1º la pièce justifiant la dépense, pour attester de son caractère exécutoire 2º le mandat de paiement, notamment pour attester du service fait 3º le bordereau récapitulatif, afin d assurer un rapprochement périodique entre la comptabilité administrative tenue par l ordonnateur et la comptabilité générale tenue par le comptable. Depuis peu, on se contente d une seule signature celle qui continue d être apposée sur le bordereau récapitulatif des mandats au motif que, selon l article 7 du règlement général sur la comptabilité publique (RGCP), «les ordonnateurs sont responsables des certifications qu ils délivrent». Les présents jugements permettent de rappeler les mesures de simplification ainsi introduites et d en mesurer les conséquences pour le comptable et le juge des comptes, étant présupposé que ces mesures bénéficient effectivement à l ordonnateur, parfaitement conscient que son visa sur les bordereaux récapitulatifs des mandats de paiement n est plus de pure forme. 1. Les mesures de simplification : Depuis la réforme de la nomenclature des pièces justificatives par le décret nº 2003-301 du 2 avril 2003, la direction de la comptabilité publique considérait que la signature des mandats que seul le maire peut «émettre» selon l article L. 2342-1 du Code général des collectivités territoriales (CGCT) n était plus obligatoire et qu elle pouvait être remplacée par celle du bordereau (voir instruction codificatrice nº 03-041-M0 du 23 juillet 2003 [10]). L article D. 1617-23 du CGCT, introduit par le décret nº 2007-450 du 25 mars 2007, entérine cette évolution. Il est, en effet, dit que «la signature manuscrite, ou électronique conformément aux modalités fixées par arrêté du ministre en charge du Budget, du bordereau récapitulant les mandats de dépenses emporte justification du service fait des dépenses concernées et attestation du caractère exécutoire des pièces justifiant les dépenses concernées». D après l instruction codificatrice nº 07-024-M0 du 30 mars 2007, ce nouvel article a été introduit pour donner une base réglementaire explicite au recours croissant à la dématérialisation des pièces justificatives et «alléger la charge de signature des pièces comptables par les ordonnateurs locaux dans le prolongement de la simplification déjà opérée en 2003 qui concernait la justification du service fait désormais donnée de manière globale par la signature du bordereau de mandat». De fait, l instruction budgétaire et comptable M 14 n impose plus que le mandat soit signé : il est seulement exigé qu il soit «arrêté (11)». Il est, en revanche, précisé : «Le bordereau est arrêté selon les mêmes modalités que le mandat et il est signé par l ordonnateur». Cette simplification opérant un transfert de responsabilité du comptable vers l ordonnateur, on pouvait penser que la jurisprudence traditionnelle sur l absence de justification du service fait et le défaut du caractère exécutoire des pièces justificatives allait tomber (voir nos commentaires sous CRC Poitou-Charentes, Commune d Angoulême). Les présents jugements démontrent qu il n en est rien, car le contrôle de la qualité de l ordonnateur subsiste, même si la dématérialisation est susceptible, à terme, de rendre ces jugements obsolètes. 2. La première espèce, le bordereau doit être signé : Si une seule signature est supposée en remplacer trois autres, on conçoit que le juge des comptes attache une importance particulière à ce qu elle existe bel et bien. Dans un cas précédent concernant un établissement de santé (centre hospitalier de Bretagne-Atlantique à Lorient, voir en références), la Chambre de Bretagne avait d ailleurs émis l opinion que «la simplification que constitue la suppression de la signature des mandats à compter du 1 er janvier 2003 rend plus nécessaire encore la vérification de la signature du bordereau de mandat». Tel est également le sens du premier jugement ici commenté par lequel la même Chambre prononce un débet dans un cas où aucun visa ne figurait tant sur le bordereau de mandats que sur les mandats euxmêmes. Le fait que la Chambre ait pris la précaution de préciser cette seconde circonstance conduit à penser que le débet n aurait pas été prononcé si le maire de Noyal-sur- Vilaine avait signé les mandats. Indépendamment des mesures de simplification qui ont conduit à la disparition progressive du visa des pièces justificatives puis des mandats eux-mêmes, il est, en effet, évident que le document le plus important est bien celui qui manifeste le mieux l ordre de payer la dépense et non pas celui qui n est utile que du point de vue de la comptabilité. (10) Il y était affirmé : «Dorénavant, la signature du bordereau de mandats par l ordonnateur vaut tant pour les mandats que pour les pièces jointes à l appui de ceux-ci. De plus, l apposition de cette signature vaut dorénavant attestation du service fait pour l ensemble des pièces jointes». (11) Dans certains cas, il doit même être arrêté en toutes lettres : «L ordonnateur est tenu d arrêter en lettres le mandat, lorsque le mandat doit être réglé en numéraire ou lorsqu il n est accompagné d aucun décompte ou arrêté de liquidation permettant de justifier l arrêté en chiffres». -N o 1 - Janvier 2011 91

3. La seconde espèce, le bordereau doit être correctement signé : Dans la deuxième espèce, le maire d Antrain, venant en défense du comptable, produisait un exemplaire du bordereau, dûment signé selon lui. Pour rejeter ce moyen contre l avis du Ministère public, la CRC se fonde sur l absence d identification de ladite signature qui ne peut être attribuée à une personne régulièrement habilitée pour ce faire. Pour souligner la pertinence du moyen invoqué et la nécessité de le contredire, il convient de rappeler que les bordereaux de mandats sont établis par l ordonnateur en trois exemplaires qui sont adressés au comptable. L un de ces exemplaires celui produit par le maire d Antrain est renvoyé à l ordonnateur «pour ses archives» il est donc à un moment donné en possession du comptable et pourrait être susceptible de pallier l insuffisance de l un des deux exemplaires conservés par ce dernier, notamment celui produit au compte de gestion. La Chambre de Bretagne n a donc pas cru devoir soutenir le point de vue que seule la signature de l exemplaire du bordereau de mandats qui lui avait été initialement produit était susceptible de dégager la responsabilité du comptable. Pour autant, elle n a pas décidé de le faire bénéficier du doute né de l existence d un exemplaire signé, comme l y invitaient les conclusions du procureur financier. Ce second jugement étant frappé d appel, il conviendra d être attentif à la position que prendra la Cour des comptes. 4. Le contrôle de la qualité de l ordonnateur ou de son délégué : Dans les deux espèces, le débet est d abord fondé sur l absence de vérification de la qualité de l ordonnateur, préalablement au paiement comme le précise le premier jugement, contrôle prévu par l article 12 B du règlement général sur la comptabilité publique. Bien entendu, comme l indique le second jugement, du fait des simplifications mises en œuvre, il est fondé «subsidiairement» sur l absence de contrôle de la justification du service fait, contrôle prévu, quant à lui, par l article 13 du règlement, au titre de la validité de la créance. Avant même les simplifications, ces deux contrôles pouvaient d ailleurs être liés, comme l illustre l exemple de l arrêt Lycée Las Cases» (voir en références), dans un cas où l attestation du service fait émanait d une personne extérieure à l établissement et non pas de l ordonnateur en titre. Comme nous l indiquions dans nos commentaires sous le précédent jugement précité de la CRC de Bretagne (Centre hospitalier de Bretagne-Atlantique), il y a peu de débet fondé sur le défaut de contrôle de la qualité de l ordonnateur. Ce contrôle est effectué par la vérification de la présence sur l un des documents transmis au 92 poste comptable d un visa conforme à celui produit lors de l accréditation auprès du comptable des personnes compétentes pour émettre les mandats (12). Ce n est qu en cas d absence totale de visa, ou dans le cas très particulier où le signataire n est manifestement pas habilité pour ce faire (13), que le juge des comptes peut, en pratique, se rendre compte que le contrôle n a pas ou a mal été effectué. Si on peut admettre que la réduction du nombre de signatures exigées constitue bien une simplification, en particulier quand les procédures restent en tout ou partie manuelles, il peut sans doute également être reconnu que les mesures de simplification ont certainement des limites. On peut donc espérer qu il ne sera jamais admis que le contrôle minimal tel qu il subsiste soit supprimé ou encore affaibli. 5. La dématérialisation des bordereaux, des mandats et des titres : On signalera, cependant, que les présents débets traduisent l existence d une certaine «fracture numérique» entre les comptables qui bénéficient de la dématérialisation des bordereaux et ceux qui n en bénéficient pas. On sait, en effet, que, depuis la mise en place de l application HELIOS, la dématérialisation des bordereaux de titres et de mandats, de même que des titres et des mandats eux-mêmes, est confondue avec la dématérialisation du compte de gestion sur chiffres (14), du moins dès lors que l ordonnateur respecte le protocole de transmission de fichiers d interface dit PESV2 (Protocole d échange standard, version 2). Dans ce cas, un seul support est adressé au juge des comptes supposé admettre, sans pouvoir bien entendu le vérifier, que les fichiers transmis au comptable durant l exercice ont bien été visés par l ordonnateur. Dans ces conditions, il est fort improbable qu un débet pour absence de contrôle de la qualité de l ordonnateur ne soit jamais prononcé à l encontre d un comptable ayant obtenu dudit ordonnateur le respect de la norme précitée. Les autres comptables restent à la merci d une négligence de leur ordonnateur qu il n aurait pas détectée, ce qui devrait les inciter à promouvoir activement la dématérialisation qui présente, d ailleurs, bien d autres avantages... CRC Bretagne, jugement du 16 février 2010, Commune de Noyal-sur-Vilaine La Chambre, Vu le compte rendu, en qualité de comptable de la commune de Noyal-sur-Vilaine pour l exercice 2007 par M. L... N o 1 - Janvier 2011 - Vu le Code des juridictions financières Vu le Code général des collectivités territoriales Vu l article 60 de la loi de finances nº 63-156 du 23 février 1963 modifiée Vu le décret nº 62-1587 du 29 décembre 1962 modifié, portant règlement général sur la comptabilité publique Vu l arrêté nº 1/2010 déterminant les affaires qui sont délibérées en Chambre et celles qui le sont en sections Vu l ordonnance du 24 août 2009 statuant sur les comptes précédents Vu le réquisitoire nº 2009-340 du procureur financier du 24 août 2009 et les pièces principales sur lesquelles celui-ci est fondé Vu les lettres du 27 août 2009 notifiant le réquisitoire du Ministère public au comptable et à l ordonnateur Vu le rapport nº 2009-210 de M. Prioleaud, magistrat rapporteur Vu la lettre du 18 décembre 2009 notifiant la date de l audience publique Vu les conclusions du procureur financier nº 2009-452 du 30 octobre 2009 Vu les autres pièces du dossier Entendu, lors de l audience publique de ce jour, M. Prioleaud, magistrat rapporteur, en son rapport, M. Millet, procureur financier, en ses conclusions, M. L..., comptable, en son intervention Après avoir délibéré hors la présence du magistrat rapporteur et du procureur financier Ordonne ce qui suit : Attendu qu en application de l article 12, alinéa B, du règlement général de la comptabilité publique (RGCP), les comptables sont tenus, en matière de dépenses, d exercer «le contrôle de la qualité d ordonnateur ou de son délégué» qu en application de l article 37 du RGCP, «lorsque, à l occasion de l exercice du contrôle prévu à l article 12 B, des irrégularités sont constatées, les comptables suspendent les paiements et en informent l ordonnateur» Attendu que le bordereau de mandat nº 27 du 21 février 2007 d un montant de 20 418,11 c n est pas signé de l ordonnateur (12) Malgré le texte même de l article L. 2342-1 du CGCT précité («le maire peut seul émettre des mandats»), les instructions admettent que le maire puisse déléguer l émission. Ces délégués ou suppléants doivent être accrédités auprès du comptable, comme doit l être l ordonnateur lui-même, en application de l article 6 du RGCP. (13) Voir l arrêt «Université Paris III», un cas où l agent comptable avait lui-même signé des certificats administratifs et procédé au paiement d une facture relative à un contrat signé par un ordonnateur secondaire, alors que l arrêté de nomination de celui-ci ne lui donnait pas compétence en la matière. (14) Dématérialisation effective depuis les comptes de l exercice 2008 pour la plupart des comptabilités tenues par les comptables du Trésor disposant de l application HELIOS.

Attendu qu en l absence de visa de l ordonnateur sur le bordereau de mandats, le comptable était tenu de suschronique de jurisprudence financière Attendu que, s agissant de la transmission des mandats de paiement au comptable, l instruction budgétaire dispose que «le bordereau de mandats est arrêté selon les mêmes modalités que le mandat et [qu ]il est signé par l ordonnateur» que l absence de visa de l ordonnateur sur le bordereau de mandats s opposait au contrôle par le comptable de la qualité de l ordonnateur et de la justification, par ce dernier, du service fait que, dans cette situation, le comptable était tenu de suspendre la totalité des paiements correspondants qu en acceptant de payer, le comptable a méconnu les obligations de contrôle précitées qu en conséquence, la responsabilité pécuniaire et personnelle de M. L..., comptable de la commune de Noyal-sur-Vilaine, est susceptible d être mise en jeu au titre de sa gestion 2007 Attendu que l existence de ce visa s apprécie à la date du paiement, que ni le bordereau de mandats joint à la liasse des pièces justificatives, ni les mandats concernés n ont été visés par l ordonnateur qu aucun élément nouveau n a été apporté au cours de l instruction, que le comptable n a adressé aucune réponse écrite à la Chambre et qu au cours de l audience, il a reconnu les éléments cidessus énoncés Par ces motifs, M. L... est constitué débiteur envers la commune de Noyal-sur-Vilaine de la somme de vingt mille quatre cent dix-huit euros et onze centimes (20 418,11 c), augmentée des intérêts de droit à compter du 28 août 2009. Conclusions du Ministère public nº 2009-452 du 30 octobre 2009 1. Sur la procédure : 1º Le présent rapport fait suite au réquisitoire nº 2009-340 du 24 août 2009, notifié le 27 août 2009 au comptable et à l ordonnateur, par lequel une présomption de charge avait été retenue à l encontre de M. L..., comptable en poste en 2007. 2º Le dépôt du rapport au greffe de la Chambre a clos l instruction le 24 septembre 2009. 3º Conformément au III de l article L. 242-1 et aux articles R. 241-35 à R. 241-41 du Code des juridictions financières sur les dispositions relatives aux activités juridictionnelles des chambres régionales des comptes, l examen des suites à donner au présent rapport et aux réponses apportées par le comptable fait l objet d une audience publique, dont la date doit être notifiée aux parties sept jours au moins avant sa tenue, l ensemble du dossier, y compris les présentes conclusions, devant être accessible auxdites parties. 4º Comme précisé à l article L. 242-1 précité, le rapporteur et le Ministère public sont exclus du délibéré. 2. Sur le fond : Charge unique : Par réquisitoire susvisé, avions relevé l absence de signature du bordereau de mandat nº 27 du 21 février 2007 d un montant de 20 418,11 c (pièce nº 1). Avions estimé que le comptable n aurait pas dû payer les mandats correspondants car l absence de visa de l ordonnateur sur le bordereau de mandats s opposait au contrôle par le comptable de la qualité de l ordonnateur (art. 12 B du décret nº 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique) et de la justification, par ce dernier, du service fait (ibid. art. 13). Relevons, cependant, que le magistrat instructeur a déposé au dossier (pièce nº 5) les mandats correspondants pour s assurer éventuellement de leur certification à défaut du visa du bordereau. Conformément aux principes du décret nº 2003-301 du 2 avril 2003 sur les pièces justificatives en vigueur au moment de la prise en charge du bordereau par le comptable comportant notamment une importante mesure de simplification des procédures d ordonnancement des recettes et dépenses publiques locales par la certification globale du service fait sur le bordereau de mandat, et non plus sur chaque mandat, les mandats ne sont pas signés. En conséquence, en l absence de signature sur le bordereau de mandat et en l absence de réponse du comptable, la Chambre pourra, comme proposé au rapport d instruction, constituer M. L... débiteur de la commune de Noyal-sur-Vilaine à hauteur de 20 418,11 c portant intérêts de droit à compter du 27 août 2009, date de notification du réquisitoire. 3. Sur la situation du comptable : Il résulte de ce qui précède que la Chambre ne pourra pas décharger M. L... de sa gestion des comptes de la commune de Noyalsur-Vilaine au cours de l exercice 2007, à raison du débet qui doit être prononcé à son encontre. Le procureur financier par intérim, Michel PROVOST. CRC Bretagne, jugement du 16 février 2010, Commune d Antrain La Chambre, Vu le compte rendu, en qualité de comptable de la commune d Antrain, pour l exercice 2007, par M. T... Vu le Code des juridictions financières Vu le Code général des collectivités territoriales Vu l article 60 de la loi de finances nº 63-156 du 23 février 1963 modifiée Vu le décret nº 62-1587 du 29 décembre 1962 modifié, portant règlement général sur la comptabilité publique Vu l arrêté nº 1/2010 déterminant les affaires qui sont délibérées en Chambre et celles qui le sont en sections Vu l ordonnance du 30 juin 2009 statuant sur les comptes précédents Vu le réquisitoire nº 2009-233 du procureur financier du 30 juin 2009 et les pièces principales sur lesquelles celui-ci est fondé Vu les lettres du 3 juillet 2009 notifiant le réquisitoire du Ministère public au comptable et à l ordonnateur Vu les observations déposées par les parties, en l occurrence un courrier de l ordonnateur, enregistré au greffe de la Chambre le 10 juillet 2009 Vu le rapport nº 2009-202 de M. Prioleaud, magistrat rapporteur Vu la lettre du 18 décembre 2009 notifiant la date de l audience publique Vu les conclusions du procureur financier nº 2009-447 du 30 octobre 2009 Vu les autres pièces du dossier Entendu, lors de l audience publique de ce jour, M. Prioleaud, magistrat rapporteur, en son rapport, M. Millet, procureur financier, en ses conclusions, M. T..., comptable, informé de l audience, n étant ni présent, ni représenté Après avoir délibéré hors la présence du magistrat rapporteur et du procureur financier Ordonne ce qui suit : Attendu qu en application de l article 12 du règlement général sur la comptabilité publique, les comptables sont tenus en matière de dépenses d exercer le contrôle de la qualité de l ordonnateur ou de son délégué qu en application de l article 37 du même règlement, lorsqu à l occasion de l exercice du contrôle prévu à l article 12 (al. B) des irrégularités sont constatées, les comptables suspendent les paiements et en informent l ordonnateur Attendu qu il ressort du rapport susvisé que le bordereau de mandats nº 30 du 29 juin 2007 d un montant de 12 470 c n est pas signé par l ordonnateur, que par ailleurs sa signature n apparaît sur aucun des 27 mandats concernés, n os 549 à 575, du 29 juin 2007 -N o 1 - Janvier 2011 93

pendre les paiements correspondants pour la totalité du montant, soit 12 470 c qu en acceptant de payer les dépenses en cause, le comptable a méconnu son obligation de contrôle de la qualité de l ordonnateur et, subsidiairement, de la justification du service fait qu en conséquence, la responsabilité pécuniaire et personnelle de M. T..., comptable de la commune d Antrain, est susceptible d être mise en jeu au titre de sa gestion 2007 Attendu que l instruction comptable M 14 en vigueur au 1 er janvier 2007 (tome II, p. 74) prévoit que «les mandats appuyés des pièces justificatives et des documents relatifs au mode de règlement des dépenses sont récapitulés (...) sur un bordereau établi en trois exemplaires : l un destiné au comptable, le deuxième pour être joint au compte de gestion, le troisième pour être renvoyé par le comptable à l ordonnateur pour ses archives» Attendu que l ordonnateur a fourni à la Chambre un exemplaire du bordereau de mandats en cause, portant une signature non identifiée et un tampon simple de la mairie d Antrain, sans autre mention, notamment pas celle de l identité et de la qualité du signataire Attendu que le bordereau de mandats figurant en annexe des comptes rendus par le comptable ne comporte aucune signature Attendu que le comptable n a pas apporté de réponse à la Chambre, que ce soit avant ou après avoir reçu notification d une copie du courrier de l ordonnateur, par lettre en date du 16 juillet 2009, et qu il n a pas produit d autre exemplaire du bordereau de mandats Attendu que le comptable n a donc pas démontré qu il disposait bien d un bordereau de mandats signé, de manière régulière et complète, au moment du paiement des mandats Par ces motifs, M. T... est constitué débiteur envers la commune d Antrain de la somme de douze mille quatre cent soixante-dix euros (12 470 c), augmentée des intérêts de droit à compter du 7 juillet 2009. Conclusions du Ministère public nº 2009-447 du 30 octobre 2009 1. Sur la procédure : 1º Le présent rapport fait suite au réquisitoire nº 2009-233 du 23 juin 2009, notifié le 6 juillet 2009 au comptable et à l ordonnateur, par lequel une présomption de charge avait été retenue à l encontre de M. T..., comptable en poste en 2007. 2º Le dépôt du rapport au greffe de la Chambre a clos l instruction le 14 septembre 2009. 3º Conformément au III de l article L. 242-1 et aux articles R. 241-35 à R. 241-41 du Code des juridictions financières sur les dispositions relatives aux activités juridictionnelles des chambres régionales des comptes, l examen des suites à donner au présent rapport et aux réponses apportées par le comptable fait l objet d une audience publique, dont la date doit être notifiée aux parties sept jours au moins avant sa tenue, l ensemble du dossier, y compris les présentes conclusions, devant être accessible auxdites parties. 4º Comme précisé à l article L. 242-1 précité, le rapporteur et le Ministère public sont exclus du délibéré. 2. Sur le fond : Charge unique : Par réquisitoire susvisé, avions relevé l absence de signature du bordereau de mandat nº 30 du 29 juin 2007 d un montant de 12 470 c. Avions estimé que le comptable n aurait pas dû payer les mandats correspondants car l absence de visa de l ordonnateur sur le bordereau de mandats (aucun des 27 mandats n ayant par ailleurs fait l objet d un visa) s opposait au contrôle par le comptable de la qualité de l ordonnateur (art. 12 B du décret nº 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique) et de la justification, par ce dernier, du service fait (ibid. art. 13). Si le comptable n apporte pas de réponse, le maire de la commune d Antrain par lettre enregistrée au greffe le 10 juillet 2009 adresse le volet 1 du bordereau signé, précisant qu il lui avait été transmis en retour par le Trésor public après liquidation de la dépense. M. le Maire en conclut donc «que le comptable public a exécuté la décision du maire au vu de ce bordereau et a, par conséquent, respecté les obligations légales et réglementaires qui lui incombent». L instruction M 14 en vigueur au 1 er janvier 2007 (tome II, p. 74) dispose, concernant l exécution des dépenses et plus précisément la transmission des mandats de paiement au comptable, que «les mandats appuyés des pièces justificatives et des documents relatifs au mode de règlement des dépenses sont récapitulés dans l ordre croissant des articles budgétaires sur un bordereau établi en trois exemplaires : l un destiné au comptable, le deuxième pour être joint au compte de gestion, le troisième pour être renvoyé par le comptable à l ordonnateur pour ses archives. (...) Le bordereau est arrêté selon les mêmes modalités que le mandat et il est signé par l ordonnateur». Relevons que la Chambre se trouve donc face à deux de ces exemplaires dont le deuxième joint au compte de gestion et non signé (intitulé volet 3) et le troisième renvoyé par le comptable à l ordonnateur remis signé en annexe du courrier du maire (intitulé volet 1). Estimons, en conséquence, qu en raison de son impossibilité à démontrer que le comptable ne disposait pas d un bordereau de mandat signé au moment du paiement des mandats (volet 1 retourné en mairie), la Chambre pourrait, comme proposé au rapport, ne pas retenir de charge à l encontre de M. T... 3. Sur la situation du comptable : Il résulte de ce qui précède que M. T... pourrait, ce qui n est pas proposé au rapport, être déchargé de sa gestion des comptes de la commune d Antrain au titre de l exercice 2007 après que le rapporteur se soit assuré de l exacte reprise des soldes de 2007 en 2008. Le procureur financier par intérim, Michel PROVOST. 94 N o 1 - Janvier 2011 -