La Place. Annie Ernaux. Édition d Émilie Péron Blévennec. Classe de Troisième Formes du récit aux XX e et XXI e siècles



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Classe de Troisième Formes du récit aux XX e et XXI e siècles La Place Annie Ernaux Édition d Émilie Péron Blévennec Après la mort de son père, Annie Ernaux retrace la vie de cet ancien ouvrier devenu cafetier, qui avait conquis sa «place» dans la société. À travers ce récit biographique, l auteure-narratrice évoque ses origines modestes et ses propres souvenirs. Elle tente aussi, par l écriture, de combler la douloureuse distance qui s était creusée ISBN 978-2-7011-6286-7 160 pages entre son père et elle : un hommage plein de justesse et de pudeur.

Arrêt sur lecture 1 Arrêt sur lecture 1 p. 29-35 Un quiz pour commencer p. 29-30 Quel événement est raconté au tout début du récit? L annonce des résultats du concours de professeur. Dans quelle région de France le récit se déroule-t-il? En Normandie. Quel métier le père de la narratrice a-t-il exercé lorsqu il était jeune? Vacher. Comment le grand-père de la narratrice est-il présenté? Dur et violent. Comment le père de la narratrice découvre-t-il un monde différent de son milieu d origine? En faisant son service militaire. Lorsqu il quitte la campagne, vers quel métier le père de la narratrice se tourne-t-il d abord? Ouvrier. Que décident les parents de la narratrice lorsque son père tombe du toit? D acheter un commerce. bibliothèque au sol en moquette sable», l. 4 ; ou des «plantes vertes», l. 2 ; la disposition de la salle de l examen oral), que psychologiques («avec hauteur, sans hésiter», l. 7-8 ; «j écoutais à peine», l. 15 ; «colère», l. 2 ; «espèce de honte», l. 23 ; «je n ai pas cessé de penser à cette cérémonie», l. 22). L incipit donne donc une impression d authenticité : le lecteur peut imaginer que cette scène s est réellement déroulée. Quels événements sont racontés au début du récit? Quel effet l enchaînement de ces deux souvenirs produit-il sur le lecteur? Deux événements sont racontés au début du récit : le succès de la narratrice au concours de professeur de lettres et le décès de son père deux mois après. Le début du récit est donc marqué par deux nouvelles à l impact contradictoire qui créent chez le lecteur un effet de surprise : on passe en quelques lignes du bonheur d un succès au malheur d un décès. Expliquez en quoi les lignes 199 à 209 (p. 18-19) marquent une rupture par rapport au reste du récit. Ces lignes marquent le retour au temps de l écriture, lequel se démarque du temps du récit, de l histoire. Plusieurs éléments signalent ce décrochage temporel et énonciatif : le passage du passé au présent, le marqueur temporel «depuis peu» (l. 199) et la réflexion de la narratrice sur le type d écriture le plus propice à décrire précisément, au plus près de la réalité, la vie de son père. La généalogie familiale Des questions pour aller plus loin p. 31-32 Étudier la mise en place du récit d enfance Le récit des souvenirs Dans les deux premiers paragraphes, quels éléments donnent une impression d authenticité? Appuyez-vous sur les pronoms personnels employés et sur l importance donnée aux détails. Les deux premiers paragraphes comptent de nombreuses marques de la première personne permettant ainsi dès le début de caractériser le récit comme étant un récit de vie. Le premier paragraphe se focalise sur la personne de la narratrice tandis que le second s intéresse au père : les pronoms personnels employés sont alors successivement ceux de la première personne du singulier puis ceux de la troisième personne du singulier. Cet incipit abonde également en détails, tant matériels (la décoration du lycée avec «une 2 Par quelle formule le récit des origines familiales débute-t-il (p. 19)? Quel est l effet produit? Le récit des origines familiales commence par la formule «L histoire commence» (l. 210), donnant ainsi l impression d un retour à une généalogie lointaine et produisant également l effet d un second incipit. Pourquoi la narratrice raconte-t-elle la vie de ses grands-parents? La narratrice raconte la vie de ses grands-parents afin de donner un cadre à l histoire familiale : le retour aux origines est un passage quasi obligé, presque un topos de la littérature autobiographique. L histoire des grands-parents permet de mieux comprendre d où vient la narratrice, comment ses parents sont devenus ce qu ils sont et comment ils lui ont permis d être qui elle est. Dressez le portrait du grand-père et de la grand-mère de la narratrice en vous appuyant sur des expressions du texte. Le grand-père d Annie Ernaux est employé comme charretier dans une ferme. C est «un homme dur» (l. 220), «sombre» (l. 218), qui boit et se montre méchant. Cette méchanceté est d ailleurs 3

Arrêt sur lecture 1 sa façon à lui de résister à la misère. Il peut aussi se montrer violent, «il distribuait des coups de casquette aux enfants» (l. 219), notamment quand il voit quelqu un de sa famille en train de lire (l. 224), car lui-même ne sait pas lire : cela le renvoie donc à sa propre incapacité. La grand-mère d Annie Ernaux est tisserande (l. 236). C est une femme soignée, qui s occupe bien de son ménage, a même de la «distinction» (l. 248) : «elle ne pissait pas debout» (l. 249) comme la plupart des femmes de la campagne à l époque. Elle est enfin très pieuse et s en remet aux saints pour se soigner (l. 253 à 257). Le mari et la femme sont donc diamétralement opposés. La narratrice écrit à propos de son père : «son cadre à lui c est le Moyen Âge» (p. 22). Comment comprenez-vous cette phrase? Les conditions de vie du père semblent tellement difficiles à sa fille qu elle en vient à les comparer à celles du Moyen Âge, alors qu elles étaient une réalité quelques dizaines d années seulement avant sa naissance. C est dire si en peu de temps le progrès social et technologique a permis aux campagnes françaises de prospérer et de donner à tous des conditions de vie plus faciles. La notion de classe sociale Quelles informations les portraits des grands-parents donnent-ils sur les conditions de vie à la fin du XIX e siècle et au début du XX e siècle dans les campagnes françaises? Évoquez en particulier la place de l école et celle de la religion. Le récit de la vie des grands-parents permet de dresser un tableau des conditions de vie dans les campagnes françaises de la fin du XIX e siècle et du début du XX e siècle. On apprend ainsi que la vie n y était pas aisée : les enfants étaient mis au travail dès leur plus jeune âge, comme le grand-père de la narratrice qui a commencé à travailler à l âge de huit ans et qui n a donc pas appris à lire ni à écrire à l école. Les seuls moments de réjouissance étaient les noces et les communions, occasions pour tout le village de manger à outrance, ainsi que les dimanches d été où le village faisait la fête lors des «assemblées» (l. 266). La religion joue également un rôle fondamental dans la vie du village : les coutumes religieuses permettent de donner une «dignité» (l. 272) à chacun et de mettre tous les paysans sur un pied d égalité. Le père d Annie Ernaux a ainsi été enfant de chœur. L école, quant à elle, n est pas facile d accès car elle est souvent éloignée de la ferme de plusieurs kilomètres et elle joue un rôle ambivalent : c est le symbole d une possible ascension sociale car si certains élèves originaires des campagnes réussissent leur certificat d études, ils peuvent ainsi intégrer une école 4 d instituteurs (l. 282 à 297). Mais c est aussi le révélateur d une certaine misère sociale : la propreté y est imposée, avec vérification hebdomadaire par le maître, de même que l assiduité, pas toujours possible en fonction des travaux agricoles. Quelles valeurs le livre de lecture du père de la narratrice enseigne-t-il (p. 23)? Quelle impression produit-il sur un lecteur d une génération postérieure? Le livre de lecture du père, Le Tour de la France par deux enfants, exalte des valeurs morales telles que la charité, apprendre à s accommoder de son sort, les liens familiaux, le travail. Ces formulations s appellent des maximes : elles ont valeur de leçons de morale. Elles produisent sur le lecteur d une génération postérieure une impression désuète et austère. Quels changements le passage au régiment entraîne-t-il dans la vie du père? Dès qu il est en âge de faire son service militaire, le père entre au régiment, étape importante de sa vie puisqu elle marque son entrée «dans le monde» (l. 360). C est l occasion pour lui de sortir de sa campagne et de découvrir d autres horizons : Paris, le métro Le régiment a l avantage de placer tous les hommes sur un pied d égalité par l uniforme commun qui gomme l origine sociale (l. 361-362), une chance pour le père qui vient d un milieu modeste. Le régiment lui permet également d obtenir un appareil dentaire, devenu nécessaire vu l état de ses dents rongées par le cidre (l. 363-364). Ainsi, après son passage au régiment, ayant découvert d autres horizons de vie bien meilleurs, le père refuse de redevenir garçon de ferme, de retomber ainsi dans sa condition d origine (l. 365). Relevez des détails qui révèlent que les parents de la narratrice ne sont pas satisfaits de leur condition sociale et qu ils en ont honte. L insatisfaction des parents de la narratrice quant à leur condition sociale s exprime différemment : pour le père, cela s illustre dans le choix du travail, pour la mère, dans l attitude quotidienne. Ainsi, le père de la narratrice n entend pas travailler à la ferme comme ses parents avant lui : son passage au régiment lui permet de découvrir la ville et le travail qui s y trouve, à l usine. Il choisit donc de s engager dans une corderie plutôt que de retourner au travail de la terre, c est la première étape de son ascension sociale. La mère de la narratrice essaie, quant à elle, de suivre la mode de son temps afin de ne pas montrer son origine sociale très modeste : elle cherche à «copier la mode des journaux» (l. 397), se fait «couper les cheveux parmi les premières» (l. 397), porte des «robes courtes» (l. 398), se maquille (l. 398), se fait «les ongles des mains» (l. 398-399). La mère est par ailleurs très fière que son mari n ait jamais «fait ouvrier» (l. 385). Une fois commerçants, leur crainte commune récurrente reste de «retomber ouvriers» (l. 438), formulation d autant plus significative de leur désir d ascension sociale qu elle est écrite en italiques. 5

Arrêt sur lecture 1 En quoi la question de la classe sociale est-elle à l origine du projet d écriture du livre? Justifiez votre réponse en citant le texte. Le récit déroule chronologiquement les différentes classes sociales occupées par les parents : on passe du champ lexical de la campagne : «vacher» (l. 327), «gars de ferme» (l. 330), «fermiers» (l. 331), «fermes» (l. 347), «culture» (l. 365) à celui de l usine : «usine» (l. 368), «industrialiser» (l. 369), «corderie» (l. 383), «fabrique» (l. 383), «ouvrier» (l. 378, 385), puis à celui du commerce : «prendre un commerce» (l. 429), «marchandises» (l. 433), «bistrots» (l. 435), «épiceries-merceries» (l. 435). Par ailleurs, le titre même du récit est annonciateur du projet d écriture : il cherche à montrer comment le père s est fait une «place» dans la société en gravissant l échelle sociale. Le récit ne cesse de ramener les propos de la narratrice à la question de la classe sociale : ses grands-parents sont paysans, son père passe de paysan à ouvrier puis commerçant, elle-même va faire mieux que ses parents en devenant professeur, accédant donc à un milieu qu elle qualifie elle-même de «petit-bourgeois» (l. 1045-1046). Toutefois, en retraçant cette ascension sociale, la narratrice montre également le fossé inéluctable qui se creuse entre chaque génération : le père quitte sa famille à la campagne, puis plus tard la fille ne voit plus ses parents qu à de rares occasions et ses visites sont empreintes de gêne. Le projet d une écriture «plate» Lorsque la narratrice commence pour la première fois l écriture d un livre sur son père, cette tentative échoue. Quelles caractéristiques son récit devra-t-il respecter afin que son entreprise réussisse? Appuyez-vous sur le texte pour répondre. Pour rendre compte de la vie de son père avec le plus de précisions possibles et au plus près de la réalité, la narratrice doit rassembler «les paroles, les gestes, les goûts» (l. 203) de son père, «les faits marquants de sa vie, tous les signes objectifs» (l. 204-205) de son existence. Le roman est donc, selon ses propres mots, «impossible» (l. 199) car il est trop empreint de subjectivité. La narratrice doit donc bannir toute «poésie du souvenir», toute «dérision jubilante» (l. 206), qui ôteraient au récit de la vie du père son objectivité. Le texte ménage des blancs plus ou moins importants : comment peut-on les interpréter? Les blancs, de tailles variables, qui émaillent le récit peuvent permettre d exprimer l émotion. La narratrice, refusant toute écriture du sentiment dans son projet d écriture «blanche» (l. 168), laisse place dans ces espaces à l émotion que les mots ne peuvent pas rendre. 6 Quel effet les passages en italique produisent-ils? Citez au moins deux exemples. On peut relever les passages en italique suivants : «Ceux qui n avaient pas de terre se louaient» (l. 212) ; «Sa femme ne riait pas tous les jours» (l. 221) ; «respecté» (à propos de l instituteur) (l. 285) ; «On était heureux quand même. Il fallait bien» (l. 329) ; «Ne pas s oublier dans une femme» (l. 418) ; «retomber ouvriers» (l. 438). L emploi de l italique permet de rapporter des propos que les parents prononçaient souvent. Autant de règles, de valeurs, de sentiments, de nécessités, dont il faut se contenter ou qu il faut respecter pour mener une existence satisfaisante. L italique est également un gage d authenticité, la marque de propos rapportés tels quels. Il correspond donc bien au projet de la narratrice, guidée par l objectivité et soucieuse de ne pas déformer la réalité. Par le biais de l italique, c est la voix des parents qui est donnée à entendre au lecteur. La narratrice dit faire le choix d une écriture «plate» (p. 19), «blanche» (p. 17). Relevez les caractéristiques qui produisent cette impression : ponctuation, structure et enchaînement des phrases, nature de ce qui est raconté, implication minimale de la narratrice dans son récit. L écriture «plate» telle que la conçoit la narratrice présente plusieurs caractéristiques essentielles : une écriture factuelle ; l absence totale d expression des sentiments ; les phrases extrêmement brèves, souvent non verbales ; l emploi de la parataxe ; l absence de ponctuation expressive ; l absence de recherche d effets de style (on remarque ainsi l absence quasitotale de figures de style) ; l implication minimale de la narratrice. 7

Arrêt sur lecture 1 De la lecture à l écriture p. 33-34 Des mots pour mieux écrire a. Indélicat ; b. mauvais genre ; c. distinction ; d. savoir-vivre ; e. dignité ; f. convenable. a. Le mot «misérable» est formé du radical «miser-» et d un suffixe en «-able». Il peut être à la fois nom et adjectif. b. Ce mot peut désigner quelqu un qui vit dans la misère, dans le dénuement (ex : Ces enfants qui vivent dans la rue sont vraiment misérables) ; ou quelqu un qui se comporte avec bassesse (ex : Il ne cesse de faire du mal aux gens, c est vraiment un misérable!) famille : la petite fille, ses parents et ses grands-parents. Les différents âges de la vie croissent depuis la petite fille jusqu aux grands-parents. Sur Internet, faites une recherche sur la vie de Frida Kahlo et identifiez les différents lieux représentés dans le tableau. Le tableau représente différents lieux importants dans la vie de l artiste : elle se représente, petite fille, dans la «maison bleue» où elle est née (où, plus tard, elle mourra et qui est aujourd hui un musée consacré à l artiste), et rattache chacun de ses grands-parents à un lieu qui les symbolise, l océan pour ses grands-parents paternels allemands, et la terre pour ses grands-parents maternels mexicains. Quels détails du tableau évoquent la maternité et la paternité? La maternité est symbolisée par le fœtus relié au ventre de la mère par un cordon ombilical, la paternité est, elle, suggérée, juste en dessous du bébé, par le spermatozoïde pénétrant l ovule, symbolisant la fécondation. Du texte à l image p. 35 Frida Kahlo, Mes grands-parents, mes parents et moi, peinture à l huile et tempera sur métal, 1936. (Image reproduite en fin d ouvrage, au verso de la couverture.) Lire l image Décrivez de manière organisée les différents éléments qui composent le tableau. Quel objet donne du sens à cette composition? Que symbolise-t-il? Ce tableau s organise autour de l objet que tient la petite fille, sorte de ruban symbolisant les branches d un arbre généalogique. Sur la partie gauche du tableau sont présentés la mère et les grands-parents maternels tandis que sur la partie droite, symétriquement, apparaissent le père et les grands-parents paternels. L arbre symbolique, qui structure le tableau, ressemble à l appareil reproductif féminin. La couleur rosée et la présence du fœtus renforcent cette impression et laissent à penser que les branches de cet arbre sont en fait des trompes de Fallope. Les personnages sont présentés dans différents cadres : la maison familiale, dans laquelle se trouve la petite fille, mais aussi le désert et, en arrière-plan, la mer. Les différents paysages illustrent ainsi les lieux dans lesquels la famille a vécu. Aucune proportion n est par ailleurs respectée : la petite fille est démesurément grande par rapport à la maison. Qui sont les personnages du tableau? À quel moment de leur vie sont-ils représentés? Les différents personnages du tableau sont les membres de la 8 Comparer le texte et l image En quoi la peinture de Frida Kahlo peut-elle faire écho à la première partie de La Place? Ce tableau, comme la première partie de La Place, fait le portrait des origines familiales : de même que dans le récit on découvre les personnages des grands-parents et des parents, sur le tableau sont présentées les différentes figures familiales. Comme dans le récit d Annie Ernaux, l arrière-plan du tableau montre également le décor dans lequel s est déroulée l histoire familiale. Frida Kahlo ancre sa représentation d elle-même et de sa famille dans des lieux précis : Annie Ernaux partage-t-elle cette démarche? Justifiez votre réponse. Annie Ernaux situe moins précisément que Frida Kahlo les lieux de l histoire familiale : on sait que l histoire commence «dans un village du pays de Caux, à vingt-cinq kilomètres de la mer» (l. 211), sans plus de précisions, sans nom de village par exemple. 9

Arrêt sur lecture 2 Arrêt sur lecture 2 p. 61-67 Un quiz pour commencer p. 61-62 Pourquoi le café-épicerie ne rapporte-t-il pas autant d argent que prévu? Les clients achètent à crédit. Que font les parents de la narratrice pour résoudre leurs difficultés financières? Son père s engage sur un chantier de construction. Que fait le père de la narratrice pendant la Seconde Guerre mondiale? Il se charge du ravitaillement pour les habitants de la Vallée. Pourquoi les parents de la narratrice achètent-ils un nouveau café-épicerie à Y? Parce que le climat y est moins humide. De quoi le père a-t-il peur lorsque leur situation s améliore? D avoir honte. Quel signe matériel montre que la vie des parents s est améliorée? Ils acquièrent une 4 CV. À quel sujet le fossé se creuse-t-il entre la narratrice et son père? Le langage. Que souhaite le père de la narratrice pour sa fille? Qu elle ait une vie meilleure que la sienne. Des questions pour aller plus loin p. 63-65 Comprendre le récit d une ascension sociale difficile Les étapes d une ascension sociale Aux lignes 454 à 466 (p. 37-38), comment est souligné le contraste entre les espoirs des débuts au café et la déception qui a suivi? Appuyez-vous notamment sur les champs lexicaux pour répondre. Les débuts du café se révèlent vite déceptifs pour les nouveaux commerçants : un contraste se crée entre la profusion de marchandises (l. 454-455), le jeu du marchand et de la marchande (l. 458 10 à 461), et la nécessité de faire crédit aux clients (l. 465-466). Les champs lexicaux montrent bien ce contraste : la pluralité des marchandises («boissons» ; «boîtes de pâté» ; «paquets de gâteaux», l. 455) et les tournures intensives («une telle simplicité», l. 456 ; «un effort physique si réduit», l. 457) sont vite remplacées par la pluralité des clients demandant qu on leur fasse crédit : «suivie d une autre, d une autre encore» (l. 464-465). Recopiez et complétez le tableau suivant afin de retracer les différentes étapes de l ascension sociale de la famille. Lieu et époque À L, années 1930 À Y, début des années 1950 Café tenu par les parents Café-épicerie de la Vallée : plafond bas, pièces sombres, minuscule courette (l. 448 à 450). Les parents attendent plusieurs mois avant de pouvoir acquérir un commerce : «aucun commerce correspondant à leurs moyens n était à vendre» (l. 615). Second métier exercé par le père Travaille d abord comme ouvrier sur un chantier de construction (l. 482-483) car le café ne rapporte «pas plus qu une paye d ouvrier» (l. 481-482) ; Puis s engage «aux raffineries de pétrole Standard» (l. 509), d abord comme simple ouvrier, puis comme contremaître. En 1945, juste avant d acquérir le café, le père travaille au remblaiement des trous de bombes. 11 Citations marquant l évolution de la vie et de la condition sociale «Mon père a dû s embaucher sur un chantier de construction» (l. 482-483) ; «mi-commerçant, mi-ouvrier» (l. 486) ; «elle était patronne à part entière» (l. 500) ; «C était une femme qui pouvait aller partout, autrement dit, franchir les barrières sociales» (l. 507) ; «Il gagnait beaucoup et il y avait de l avenir» (l. 513) ; «Il cherchait à tenir sa place» (l. 529) ; «Paraître plus commerçant qu ouvrier» (l. 529-530) ; «aux raffineries il est passé contremaître» (l. 530). Les parents vivent dans un deux-pièces extrêmement modeste : «sans électricité, au sol de terre battue, prêté par un membre de la famille» (l. 613 à 615), qui fait dire à la mère : «quelle position» (l. 618-619) ; Leur quotidien est fait de «privation» (l. 622).

Arrêt sur lecture 2 À Y Café-épiceriebois-charbons dans un quartier excentré de la ville, «à mi-chemin de la gare et de l hospice» (l. 627). Le père n a plus besoin d exercer un métier en complément : «la vie d ouvrier de mon père s arrête ici» (l. 640). 12 «on avait tout ce qu il faut» (l. 698) ; «ils ont pu embellir la maison, supprimant ce qui rappelait l ancien temps» (l. 708-709) ; «il a emprunté pour devenir propriétaire des murs et du terrain. Personne dans la famille ne l avait jamais été» (l. 722-723). Relevez les détails qui montrent l amélioration de la vie quotidienne et l accession à la classe moyenne. Le manque perpétuel est remplacé par une relative aisance, signe d une accession à la classe moyenne. La famille améliore son quotidien et ne manque ainsi de rien : ni dans l alimentation : «on mangeait à notre faim (preuve, l achat de viande à la boucherie quatre fois par semaine)» (l. 698-699) ; ni dans le confort domestique : «on avait chaud dans la cuisine et le café» (l. 700) ; ni dans la possession de biens matériels : «deux tenues, l une pour le tous-lesjours, l autre pour le dimanche» (l. 701-702), «plus tard une 4 CV» (l. 693). Pourquoi les parents cherchent-ils à faire disparaître ce qui leur rappelle «l ancien temps» (p. 48)? Que révèle l anecdote de l institutrice (p. 48)? Tout ce qui rappelle «l ancien temps» est pour les parents signe de l appartenance à la paysannerie et évoque leurs années de labeur. En faisant disparaître ce qui se rattache au passé, et en rendant leur intérieur plus moderne, les parents montrent qu ils peuvent vivre avec leur temps, suivre la marche du progrès, et qu ils ont donc suffisamment d argent pour embellir leur intérieur, pour le mettre au goût du jour. Les parents croient même que ceux qui admirent leurs «vieilles choses» (l. 718), l institutrice en tête, parlent ainsi «par politesse» (l. 718), afin de ne pas les vexer. Ces «vieilles choses» sont le signe d un manque d évolution, d une absence de modernité et de confort comme l «eau sur l évier» et le «pavillon blanc» (l. 721). Les marques du «monde d en bas» Quelles habitudes et quels goûts trahissent l origine populaire du père? Le père a gardé des habitudes de paysan, comme le fait remarquer sa femme : «C est un homme de la campagne, que voulez-vous.» (l. 864) : il vit en osmose avec la nature qui l environne, particulièrement fier de son potager («son jardin, toujours net», l. 868-869) ; à table, il ne se sert que de son «Opinel» pour manger (l. 880) et ne gaspille pas la nourriture («me voir laisser de la nourriture dans l assiette lui faisait deuil. On aurait pu ranger la sienne sans la laver», l. 882 à 885) ; il enfouit son couteau dans la terre s il a «mangé du hareng» (l. 885) pour ôter l odeur. ses habitudes alimentaires sont celles d un paysan, qui se nourrit frugalement : avale une soupe le matin (l. 887), se fait une «collation» d «œufs», de «radis», de «pommes cuites», et le soir se contente d un «potage» (l. 890 à 892) ; il dort «avec sa chemise et son tricot de corps» (l. 893) ; il ne se sert jamais de la salle de bains (l. 898-899). Les goûts du père sont également populaires : il apprécie les films comiques de l époque, qui trahissent son origine : ces films mettent en effet en scène des «héros naïfs et paysans» (l. 754) plongés dans un milieu urbain dans lequel ils se trouvent en décalage. Leurs bêtises le font «rire aux larmes» (l. 755). il aime également s adonner aux loisirs populaires : le «cirque», les «films bêtes» (l. 834), le «feu d artifice» (l. 834), la «foire» (l. 834) et toutes ses attractions (l. 835-836). Relevez une anecdote qui révèle la naïveté du père, et une anecdote montrant qu il a une perception caricaturale du monde. L anecdote de la faute d orthographe chez le notaire montre la naïveté du père qui, au lieu d écrire, «approuvé», s interroge et écrit «à prouver» (l. 751). Il a également une perception caricaturale du monde qui consiste à tirer des conclusions sur quelqu un selon que son jardin soit correctement entretenu ou non : «Avoir un jardin sale, aux légumes mal soignés indiquait un laisser-aller de mauvais aloi, comme se négliger sur sa personne ou trop boire» (l. 869 à 871). Montrez que, paradoxalement, l accession à un confort financier et matériel s accompagne pour les parents d un inconfort moral, d un malaise qui les empêche de profiter de leur existence. Même s ils vivent dans un relatif confort, les parents restent hantés par les années de misère et de dur labeur, craignant à tout moment de «retomber ouvriers» (l. 438). Ils sont ainsi extrêmement regardants à la dépense : ils se fâchent après leur fille lorsqu elle déchire sa robe, «cette gosse ne compte rien» (l. 731), ou qu elle parle, envieuse, d une camarade de classe qui a visité les châteaux de la Loire (l. 734 à 736). Plusieurs expressions renvoient à cette idée d inconfort moral : «la crispation de l aisance gagnée à l arraché» 13

Arrêt sur lecture 2 (l. 724), «Comment décrire la vision d un monde où tout coûte cher» (l. 727), «Sacralisation obligée des choses» (l. 732), «Un manque continuel, sans fond» (l. 736). Ce malaise relatif aux choses matérielles est complété par la crainte perpétuelle «d avoir honte» (l. 747), d être mal considéré par les autres. Quelles anecdotes et quelles expressions révèlent le regard négatif et méprisant porté par l ensemble de la société sur les paysans et les ouvriers? Deux anecdotes révèlent ce regard négatif que porte l ensemble de la société sur les mondes paysan et ouvrier : la narratrice n a jamais pu faire le portrait de son père en classe car son manque de distinction aurait été mis en avant et cette description lui est même «interdite», (l. 902) : la seule anecdote de l éternuement d une des élèves de la classe, ponctué d un ironique «Distingué, vraiment!» (l. 905) de la maîtresse, laisse supposer que toute allusion à des habitudes rustres n est pas la bienvenue ; les gens se délectent de l anecdote du paysan, en visite chez son fils à la ville, qui croit que la machine à laver est une télévision (l. 910 à 914). On peut également relever les expressions : «sortir de sa campagne» (l. 907-908), «faire paysan» (l. 908), «pas évolué» (l. 908), «toujours en retard sur ce qui se fait» (l. 908-909), «le pire, c était d avoir les gestes et allures d un paysan sans l être» (l. 917-918), qui marquent le même regard négatif de la société sur le monde paysan et ouvrier. Le langage, un révélateur de l origine sociale (p. 51-52, l. 782-829) Que pense le père de la narratrice du patois? Que symbolise-t-il pour lui? Pour le père, le patois est «quelque chose de vieux et de laid, un signe d infériorité» (l. 789-790). C est pour lui la marque d un monde paysan qu il a voulu quitter et dans lequel on ne parlait d ailleurs que le patois, «l unique langue» (l. 782) des grands-parents. Montrez que le langage représente pour le père quelque chose de complexe, qui nécessite des efforts et qui finalement lui échappe. Appuyez votre réponse sur quelques citations. Le père aborde le langage de façon complexe : il veut se départir du patois mais s amuse dans le même temps quand quelqu un de haut placé utilise une expression cauchoise (l. 795 à 798) ; il est naïf et ne comprend pas que le patois soit vu comme un sujet de raillerie : le père croit que le médecin utilise le patois de façon accidentelle (l. 798 à 800) ; en société, il préfère se retenir de parler plutôt que de montrer sa mauvaise maîtrise du langage. Sa règle de conduite : «toujours parler avec précaution» (l. 807-808) ; 14 il se braque facilement et entre «dans une violente colère» notamment quand sa fille le reprend au sujet d expressions incorrectes comme «se parterrer» ou «quart moins d onze heures». (l. 823-824) ; il est finalement perpétuellement animé par la «peur indicible du mot de travers» (l. 808). Le père de la narratrice est-il le seul à ne pas maîtriser parfaitement le langage? Citez un exemple qui le prouve. Sa fille, la narratrice, lorsqu elle était petite ne maîtrisait pas non plus parfaitement le langage. À l école, la maîtresse la reprend (l. 822), et une anecdote comique vient même illustrer cette méconnaissance du langage : elle ne comprend pas le sens de la locution latine «idem» qui indique à Bécassine qu elle doit broder plusieurs fois un oiseau sur un bavoir, et se demande, comme l héroïne, s il faut broder ce mot sur les bavoirs (l. 757-760). Pourquoi le langage provoque-t-il une crispation des relations entre le père et la fille? Le langage est un des facteurs à l origine du fossé qui se creuse entre le père et sa fille : il ne maîtrise pas les codes langagiers alors que sa fille, studieuse, apprend à l école le «langage châtié» (l. 817-818). Le langage est également un «motif de rancœur et de chicanes douloureuses» (l. 828) lorsque la fille reprend son père, notamment. Un récit difficile à mener Énumérez les obstacles rencontrés par la narratrice pour brosser le portrait de son père (p. 41). Pour brosser le portrait de son père, la narratrice rencontre les obstacles suivants : il lui est difficile de dresser un portrait vivant tout en ne s attachant qu aux faits : «l épure tend à prendre toute la place» (l. 534), elle cherche à «sortir du piège de l individuel» (l. 539) ; dans son souci d objectivité elle cherche à ne pas se laisser entraîner par ses souvenirs (l. 535 à 539) même si pourtant, ce portrait empreint d anecdotes d enfance n en est que plus vivant. Comment la narratrice justifie-t-elle l emploi des italiques? Les italiques lui permettent de faire revivre le monde qui fut le sien : «ces mots et ces phrases disent les limites et la couleur du monde où vécut mon père, où j ai vécu aussi» (l. 545). Quels sentiments contradictoires la narratrice éprouve-t-elle par rapport au mode de vie qu elle décrit (p. 46)? Quelles en sont les conséquences sur l écriture de son récit? Le mode de vie de sa famille est perçu par la narratrice 15

Arrêt sur lecture 2 de manière paradoxale : elle cherche à la fois à réhabiliter ce milieu populaire, ce «mode de vie considéré comme inférieur» (l. 675-676) et à en dénoncer les limites, «l aliénation qui l accompagne» (l. 676-677). De fait, son récit oscille entre ses deux contradictions : le «bonheur» et «l aliénation», elle ne peut prendre le parti de l un ou de l autre, et il lui est difficile de rendre les deux à la fois. De la lecture à l écriture p. 65-66 Des mots pour mieux écrire a. Indignité ; b. impair ; c. honte ; d. gêne. a. Le mot «indicible» est formé du préfixe «in-», du radical «dic-» et du suffixe «-ible». b. Indescriptible (qu on ne peut décrire) ex : Un chaos indescriptible régnait dans la maison quand les parents sont rentrés. Incorrigible (qu on ne peut pas corriger) ex : Ce garçon est vraiment incorrigible, il est impossible de lui faire entendre raison! Inflexible (qu on ne peut pas fléchir) ex : Le professeur est resté inflexible malgré les protestations des élèves. Du texte à l image p. 67 La grande rue d Yvetot, carte postale colorisée, vers 1950. Robert Doisneau, Vins, tabac, ballons, photographie, 1953. (Illustrations reproduites en début d ouvrage, au verso de la couverture.) Lire l image même s ils sont absents de la photographie. La carte postale, à l origine en noir et blanc, a été colorisée afin de montrer à quoi ressemblait la grande rue d Yvetot. Les devantures des magasins sont ainsi bigarrées, et on distingue des gens se promenant et faisant leurs commissions. En quoi ces deux images constituent-elles des instantanés de la vie quotidienne dans les années 1950? La vue d Yvetot montre l organisation de la ville avec sa grande rue et son trottoir bordé de nombreuses boutiques : les personnages s y promènent ou font leurs courses. La scène traduit bien la relative effervescence d une journée dans une ville de province. La photographie de Robert Doisneau pourrait tout à fait constituer une sorte de zoom sur un des probables cafés de la grande rue : on y voit des clients attablés en terrasse, tant hommes que femmes, qui se détendent. Les promeneurs ont été photographiés à leur insu, sans aucune pose : c est ce qui crée cette impression d instantané, de moment volé de la vie quotidienne. Comparer le texte et l image Sur la photographie de Robert Doisneau, quels éléments peuvent faire écho au récit d Annie Ernaux? C est principalement la devanture qui fait écho au récit d Annie Ernaux, rappelant le commerce des parents. Les clients attablés en terrasse rappellent également les clients du café familial. La Place évoque la transformation de la vie quotidienne et la mutation des villes dans les années 1950 : en quoi la carte postale illustre-t-elle ces changements? La carte postale montre la nouvelle organisation de la ville : une grande artère bordée de commerces à la suite les uns des autres, l éclairage public, les pelouses et les parterres impeccables qui font la liaison entre la rue et le trottoir. Les habitations ne sont plus de simples maisons mais de petits immeubles à deux étages, aux façades soignées et toutes identiques avec des balcons fleuris et des chiens-assis du deuxième étage. Observez attentivement les deux images et décrivez-les (support, couleurs, composition, décor, attitude des personnages). Les deux images sont de natures différentes : la première est une carte postale colorisée, la seconde est une photographie en noir et blanc. Toutes deux datent de la même époque : le début des années 1950. La carte postale représente la grande rue d Yvetot, avec les magasins qui la bordent. La photographie de Robert Doisneau représente la terrasse d une boutique de vins, tabacs et cafés. On y voit des clients attablés. Le landau ainsi que les deux poussettes et les ballons laissent deviner qu il y a des enfants, 16 Cherchez et expliquez ce qu est la colorisation, effectuée sur la carte postale. Quel effet cette technique produit-elle aujourd hui? En quoi ce choix technique peut-il rappeler la façon dont le père renie «l ancien temps» (p. 48) par désir de modernité? D anciennes cartes postales en noir et blanc peuvent être colorisées, technique qui consiste à colorier au «patron» (ou pochoir) les différents éléments de la carte postale. En coloriant ainsi les vides laissés par le patron à l aquarelle, on obtient une colorisation du décor ou des personnages. Cette technique est symptomatique d un désir de modernité : passer du noir et blanc, trop ancien, à 17

Arrêt sur lecture 3 la couleur permet à la fois de donner une image plus moderne de la scène mais aussi, pour les plus nostalgiques, de retrouver ce que fut un paysage que la technique photographique ancienne ne pouvait saisir en couleurs. Des questions pour aller plus loin p. 93-94 Analyser la fin du récit La fin de l histoire du père Arrêt sur lecture 3 p. 91-97 Un quiz pour commencer p. 91-92 Quelle est l activité favorite de la narratrice lorsqu elle est adolescente? La lecture. Pourquoi le père de la narratrice est-il gêné de parler de sa fille aux clients du café? Parce qu elle fait des études et qu elle ne gagne pas sa vie. Quel bouleversement survient dans la vie du père de la narratrice? On lui découvre une tumeur. Quelles études la narratrice poursuit-elle? Des études de lettres. Comment le père réagit-il lorsque la narratrice sort avec ses amies? Il approuve sa conduite. Où la narratrice et son époux partent-ils s installer? Dans les Alpes. Comment les parents se comportent-ils lors des visites de leur fille? Ils sont gênés. Qu est devenu le café après la mort du père? Il a été vendu pour en faire une maison particulière. 18 Relevez des expressions du texte qui montrent le vieillissement du père d un point de vue physique. Pour mettre en évidence le vieillissement du père du point de vue physique, on peut relever les citations suivantes : «Mon père marchait voûté» (l. 1144) ; «Dans la voiture, j ai remarqué qu il avait des taches jaunes près des yeux, sur les tempes» (l. 1149-1150) ; «Mon père était vieux, crispé» (l. 1152) ; «Il prenait de la magnésie, redoutant d appeler le médecin» (l. 1154-1155) ; «le spécialiste de Rouen lui a découvert un polype à l estomac» (l. 1156) ; «Ses forces étaient perdues» (l. 1162-1163) ; «La nourriture est devenue une chose terrible, bénéfique ou maléfique suivant qu elle passait bien ou lui revenait en reproche» (l. 1170-1172) ; «Mains le long du corps, fermées, tournées vers l extérieur, parfois jointes dans son dos» (l. 1187-1188) ; «il avait vomi à l aube sans même avoir pu attendre de parvenir au seau de toilette» (l. 1429-1431) ; «Sa voix m a semblé changée» (l. 1434) ; «la respiration de mon père est devenue profonde et déchirée» (l. 1485-1486). «Sa main tremblait avec violence» (l. 1525) ; «Devenu un de ces vieillards alités de l hospice devant les lits desquels la directrice de l école religieuse nous faisait brailler des Noëls» (l. 1534-1536). Quelles manies le père de la narratrice développe-t-il en vieillissant? Il développe différentes manies en vieillissant : il s énerve pour un rien : «À cette époque, il a commencé d entrer dans des colères, rares, mais soulignées d un rictus de haine» (l. 1090-1091) ; ses manies tournent autour de la nourriture. Il s en méfie : «Il reniflait le bifteck ou le merlan avant de les jeter dans la poêle. La vue de mes yaourts lui répugnait» (l. 1172-1174). Elle devient un sujet de conversation incontournable : «Au café, dans les repas de famille, il racontait ses menus, discutait avec d autres des soupes maison et des potages en sachet, etc.» (l. 1174-1176). Il mange selon ses envies mais se montre difficile : «Un cervelas, un cornet de crevettes grises. L espérance du bonheur, évanouie souvent dès les premières bouchées» ou «je 19

Arrêt sur lecture 3 vais manger une demi-tranche de jambon», «donnez-m en un demi-verre», (l. 1178-1182), continuellement ; ses cigarettes donnent lieu à un véritable rituel : «défaire le papier des gauloises, mauvais au goût, et les renrouler dans du Zig-Zag avec précaution» (l. 1183-1184). Pourquoi le père de la narratrice ne cherche-t-il pas à faire prospérer davantage son commerce? Le père de la narratrice ne cherche pas à faire prospérer son commerce, car il s est persuadé que celui-ci disparaîtrait avec lui. La vieillesse ne le rend pas assez réactif face aux transformations des autres commerces : «Il s était résigné à ce que son commerce ne soit qu une survivance qui disparaîtrait avec lui» (l. 1224-1225). La vie du père de la narratrice est-elle racontée suivant un ordre chronologique? Justifiez votre réponse en reprenant les différentes étapes du récit depuis le début. Le récit s ouvre et s achève sur la mort du père, comme pour boucler la boucle. Au milieu de cette composition circulaire, le récit de la vie du père est raconté chronologiquement : son enfance, son service militaire, la rencontre avec la mère de la narratrice et leur mariage, les commerces qu ils tiennent successivement, les changements apportés au café puis la maladie et la décrépitude menant à sa mort. La fin d une relation Pourquoi le père se sent-il gêné que sa fille ne travaille pas encore à dix-sept ans? Relevez trois expressions qui le montrent (p. 70-71). Le père est gêné que sa fille ne travaille pas encore, contrairement aux filles de ses clients. On peut ainsi relever que : le père a peur que sa fille ne réussisse pas ses études : «Et toujours la peur ou peut-être le désir que je n y arrive pas» (l. 1065) ; le père a honte, car sa fille ne gagne pas encore sa vie : «Devant la famille, les clients, de la gêne, presque de la honte que je ne gagne pas encore ma vie à dixsept ans» (l. 1074-1075) ; Le père a peur que sa fille soit mal considérée : «Il craignait qu on ne me prenne pour une paresseuse et lui pour un crâneur» (l. 1072-1073). En vous appuyant sur quelques citations, montrez que la question du travail et des études révèle particulièrement le décalage entre le père et sa fille. Le travail pour le père n a foi que s il est associé à l effort manuel : «Il disait que j apprenais bien, jamais que je travaillais bien. Travailler, c était seulement travailler de ses mains» (l. 1079-1081). Pour le père, les études sont considérées comme étant 20 l apprentissage de notions abstraites : «Les études n avaient pas pour lui de rapport avec la vie ordinaire» (l. 1082-1083). Pour lui, apprendre des choses n ayant pas pour finalité de servir dans la vie quotidienne est inutile, bien que sa fille lui prouve le contraire : «Que j aie appris une langue étrangère en classe, sans aller dans le pays, le laissait incrédule» (l. 1088-1089). Récapitulez toutes les raisons pour lesquelles l incompréhension grandit entre la narratrice et son père. Le père et la fille n évoluent pas dans le même monde : alors que le père tient son commerce en province, sa fille côtoie des personnes plus cultivées et d un milieu social plus élevé. Leur vocabulaire se différencie donc progressivement, leurs ambitions ne sont plus les mêmes, leurs centres d intérêt divergent : «Les livres, la musique, c est bon pour toi. Moi je n en ai pas besoin pour vivre» (l. 1103-1104). Pourquoi peut-on dire que l arrivée du gendre dans la famille creuse définitivement le fossé entre le père et la fille? Le gendre ne vient pas du même monde que sa femme. La distance avec son beau-père est donc importante tant socialement que culturellement : «l écart de culture et de pouvoir qui le séparait de son gendre» (l. 1296-1297). Au moment où sa fille amène son futur mari pour le présenter à ses parents, le père est plein d espoir : «Il exultait, sûr de pouvoir considérer mon futur mari comme son fils» (l. 1280-1281), mais cet espoir est vite déçu, la différence d origine sociale se faisant très vite ressentir. Relevez des exemples qui montrent la maladresse des parents lors des séjours en Normandie de leur fille devenue adulte. Lorsque la narratrice revient voir ses parents en Normandie, les embrassades sont gênées : «il cessait de servir une seconde pour m embrasser avec brusquerie» (l. 1327-1328). Le père ne s intéresse pas au cadeau de sa fille : «Un flacon d after-shave. Gêne, rires, à quoi ça sert?» (l. 1340). Les discussions montrent qu ils ne partagent plus les mêmes réalités : «Très vite, il n écoutait plus» (l. 1346). La fin d un récit de soi À quelle classe sociale la narratrice a-t-elle accédé? Quelles sont les différentes étapes de cette accession? La narratrice accède progressivement à la bourgeoisie : dès le lycée : «J émigre doucement vers le monde petit-bourgeois» (l. 1045) ; puis lorsqu elle devient monitrice d une colonie de vacances (l. 1142-1143) ; en entrant comme élève-institutrice à l école Normale de Rouen : «J y étais nourrie avec excès, blanchie, un homme à toutes mains réparait même les 21

Arrêt sur lecture 3 chaussures» (l. 1196-1197) ; «L État m offrait d emblée ma place dans le monde» (l. 1199) ; en partant à Londres (l. 1203) ; en poursuivant ses études de lettres modernes à l université : «Elle étudie pour être professeur» (l. 1239) ; enfin, en se mariant à un bourgeois, diplômé de Sciences Politiques (l. 1275-1276). «J ai fini de mettre au jour l héritage que j ai dû laisser au seuil du monde bourgeois et cultivé quand j y suis entrée» (l. 1555-1556) : comment comprenezvous cette phrase? Finalement, de qui la narratrice a-t-elle raconté l histoire et les origines? La narratrice a mis de côté les usages appris par ses parents issus d un milieu paysan et commerçant pour accéder à un milieu bourgeois qui n utilise pas les mêmes codes. Mais en même temps, le récit lui a permis de revenir sur ses origines, de raconter ce qui lui a permis de se construire. Finalement, c est sa propre vie que la narratrice a racontée à travers ce récit. La fin de l écriture du livre Repérez les paragraphes où la narratrice revient au temps de l écriture. On peut relever les phrases suivantes qui marquent un retour au temps de l écriture : «J écris peut-être parce qu on n avait plus rien à se dire» (l. 1116) ; «Le commerce n existe plus. C est une maison particulière, avec des rideaux de tergal aux anciennes devantures. Le fonds s est éteint avec le départ de ma mère qui vit dans un studio à proximité du centre. Elle a fait poser un beau monument de marbre sur la tombe. À D 1899-1967. Sobre, et ne demande pas d entretien» (l. 1549-1554) ; «J ai fini de mettre au jour l héritage que j ai dû déposer au seuil du monde bourgeois et cultivé quand j y suis entrée» (l. 1555-1556) ; «Tout le temps que j ai écrit, je corrigeais aussi des devoirs, je fournissais des modèles de dissertation, parce que je suis payée pour cela. Ce jeu des idées me causait la même impression que le luxe, sentiment d irréalité, envie de pleurer» (l. 1581-1574). Pourquoi peut-on dire que le récit est pour la narratrice une façon de racheter son comportement envers son père? Appuyez-vous sur des expressions du texte, sur les blancs laissés entre les paragraphes et sur l épigraphe (p. 9). À travers l écriture, l auteur-narratrice tente de racheter son comportement envers son père. Dans le récit, elle met en évidence le sentiment de honte qu elle a pu éprouver à l égard de son père : «Un jour, avec un regard fier : Je ne t ai jamais fait honte» (l. 1274). Elle veut se faire pardonner ses absences et celles de son conjoint 22 et de leur enfant : «J y allais seule, taisant les vraies raisons de l indifférence de leur gendre» (l. 1315-1316). L épigraphe «Je hasarde une explication : écrire c est le dernier recours quand on a trahi» indique également le besoin de se racheter, de réparer par l écriture une faute, une trahison traduite par l éloignement. Ce récit personnel peut-il avoir une dimension universelle? Citez des expressions du texte (p. 82, l. 1378-1383) pour justifier votre réponse. Ce récit peut avoir une dimension universelle. C est grâce aux gestes et aux attitudes des anonymes qu Annie Ernaux a écrit ce récit : «dans des êtres anonymes rencontrés n importe où, porteurs à leur insu des signes de force ou d humiliation» (l. 1381-1382). Selon vous, que cherche à montrer la narratrice en racontant, pour clore le récit, l anecdote de son ancienne élève devenue caissière? Pour répondre, tenez compte de la situation sociale et professionnelle dans laquelle se trouvent chacune des deux protagonistes. Le lieu dans lequel se déroule cette rencontre qui clôt le récit a son importance : le petit commerce a ici laissé place à la grande surface. La narratrice pose encore une dernière fois le problème de la mémoire car elle ne se souvient pas de son ancienne élève. Mais elle veut surtout montrer, à travers cette anecdote, qu il n est pas facile de changer de classe sociale, même parfois en faisant des études. Accéder à une classe sociale supérieure n est plus aussi aisé qu auparavant et cette anecdote est donc comme un dernier hommage rendu à son père. De la lecture à l écriture p. 95-96 Des mots pour mieux écrire a. Dispute ; b. colère ; c. se chamaillent ; d. rictus ; e. houspiller ; f. acrimonieuses. a. Le mot «gêne» peut signifier à la fois la situation embarrassante dans laquelle on se trouve (une situation financière difficile également) et le fait de perturber quelque chose ou quelqu un par sa présence. Dans la première définition, les synonymes de «gêne» sont : embarras, inconfort, malaise, confusion ; et les antonymes sont : confort, commodité, aisance. Dans la seconde définition, les synonymes de «gêne» sont : trouble, entrave ; et les antonymes sont : aplomb, assurance. b. La présence de son père à table met la narratrice dans l embarras face à ses amies. Durant son enfance à la campagne, le père de la narratrice vivait sans confort. 23

Arrêt sur l œuvre Ses origines modestes auraient pu être une entrave à l ascension sociale de la narratrice. Aujourd hui, c est avec une certaine assurance, que la narratrice peut affirmer faire partie de la classe bourgeoise. Du texte à l image p. 96-97 Édouard Boubat, Rendez-vous au Café La Vache noire, 1957. (Image reproduite en couverture.) Lire l image Décrivez la photographie de manière organisée. Quelle est la particularité technique de ce cliché? Cette photographie en noir et blanc met en scène une jeune femme, à l intérieur d un café-bar, qui semble songeuse. À l intérieur du café, un client la regarde du coin de l œil, les autres, sur la droite, semblent absorbés par leur conversation, accoudés au bar, sur lequel on distingue des verres ballons. Tout l intérêt de la photographie réside dans les jeux de reflets : sur la double-porte du café on distingue en effet une rue parisienne avec ses pavés, ses voitures, un vélo attaché à un arbre. variée, comme celle du café des parents de la narratrice. Elle témoigne de la vie urbaine dont certains éléments, comme la voiture, apparaissent également dans La Place. Identifiez les points communs entre le récit d Annie Ernaux et cette photographie. Appuyez-vous sur le cadre de la photographie et sur l attitude des personnes présentes. La jeune femme représentée sur la photographie n est pas éloignée de l image que le lecteur peut se faire de la jeune narratrice. L attitude songeuse de la jeune femme de la photographie, détachée du reste de la clientèle, pourrait être rapprochée de la position de partance dans laquelle se trouve la jeune femme dans La Place : en partance d un lieu qu elle a occupé enfant et adolescente, en partance aussi vers un univers plus urbain, représenté sur la photographie par les reflets. Arrêt sur l œuvre p. 98-104 Quels éléments font de cette photographie une scène de vie quotidienne en ville? Comme le renseigne la légende, la scène se passe en 1957 à Paris : la rue montre une voiture, un vélo, des passants, une bâtisse. Les clients du café appartiennent à des classes sociales diverses : à gauche se trouve un homme d âge mûr, avec une casquette, probablement un ouvrier, alors qu à droite, accoudé au bar, se tient un homme en costume-cravate. Quelle impression la jeune fille donne-t-elle? Montrez qu elle paraît être en décalage avec ce qui l entoure. La jeune femme paraît étrangère à la scène : seule figure féminine dans cet univers d hommes, elle semble inadaptée au monde qui l entoure, tout absorbée dans ses pensées. Son positionnement, comme son regard, sont d ailleurs tournés sur l extérieur. Peut-être attend-elle quelqu un? Comparer le texte et l image Pourquoi la jeune fille photographiée ici peut-elle faire penser à la narratrice de La Place? Cette photographie présente un café fréquenté par une clientèle 24 Des questions sur l ensemble du roman p. 98-99 Un portrait du père Que choisit de dire la narratrice afin de faire de son père le portrait le plus proche possible de la réalité? La narratrice entend rassembler au sein de son récit «les paroles, les gestes, les goûts» de son père, «les faits marquants de sa vie, tous les signes objectifs d une existence» (l. 202-204). Son projet d écriture consiste donc à mettre en mots, de la façon la plus objective possible, avec une «écriture plate» (l. 206-207) l existence de son père. Quelles marques d affection de la fille envers le père, et du père envers la fille, pouvez-vous relever? Le père montre, à plusieurs reprises dans le récit, son attachement à sa fille : en lui proposant des activités de loisirs comme la foire, le cirque (l. 833 à 836) ; en l emmenant en vacances au bord de la mer, dans la famille (l. 849-850) ; 25

Arrêt sur l œuvre en insistant pour qu elle travaille bien à l école, afin qu elle réussisse mieux que lui (l. 974-977) ; en essayant de faire plaisir aux amies de sa fille venues passer quelques jours de vacances (l. 1255-1264) ; en mettant une cravate pour recevoir le petit ami de sa fille (l. 1279) ; en lui donnant de l argent, au moment de son mariage, pour permettre au jeune couple de s installer (l. 1294-1297) ; en l emmenant à la bibliothèque, expérience cependant peu concluante (l. 1558-1571) ; et même secrètement, en conservant la coupure de journal indiquant les noms des élèves reçues au concours d entrée à l École normale, que la narratrice trouve, après la mort de son père, dans son portefeuille (l. 181-183). Ces manifestations sont peu expansives et sans aucune tendresse apparente, mais la narratrice conserve de son père la «certitude d une tendresse abstraite» (l. 1203-1204). Les manifestations d attachement de la fille envers son père sont soit peu nombreuses soit ne sont pas racontées, à l exception du flacon d after-shave qu elle lui offre à son retour en Normandie (l. 1340). C est surtout la distance qui s est créée entre eux qui est mise en avant dans le récit. Leur incompréhension mutuelle est illustrée par les reproches que la fille adresse à son père au sujet de ses manières, de sa façon de manger, ou ceux que le père adresse à sa fille qui lit très tard le soir ou reste dans sa chambre au lieu de profiter du grand air. Comment pourriez-vous caractériser les différents tons adoptés par la narratrice pour évoquer la figure paternelle? La narratrice essaie de brosser un portrait de son père le plus objectif possible, en se défaisant de tout caractère émotionnel : elle met en avant ses défauts et ses manières paysannes ; elle montre son inadaptation, tant sur les photographies que lors de son mariage où il ne se sent pas à sa place ; elle le décrit de façon extrêmement péjorative lors de sa maladie, puis de sa mort. Mais aucun ton ironique n est à chercher dans le récit de la narratrice : la variation des tons ne peut s associer avec son projet d écriture «plate». Du récit personnel au témoignage universel Montrez que La Place constitue un document sur le monde des petits commerçants. En plaçant au cœur de son récit la question de l ascension sociale, 26 la narratrice décrit le quotidien de son père devenu cafetier. Sa description, minutieuse, constitue donc un document sur le monde des petits commerçants. Elle met en avant l énergie et la disponibilité sans faille dont il faut faire preuve pour s occuper d un commerce comme le café-épicerie de ses parents, auquel ils consacrent tout leur temps. La narratrice montre ses parents obsédés par la crainte de «manger le fonds» (l. 470), l angoisse des fins de mois difficiles qui persiste. Quant à la relation avec les clients, le récit prouve qu elle se doit d être des plus cordiales. Ainsi, malgré tous leurs efforts, les parents de la narratrice, comme bon nombre de petits commerçants, sont restés modestes (un petit logement, une petite voiture, une enfant unique et boursière). En quoi le récit se présente-t-il comme un témoignage sur une époque passée et sur les changements qui l ont transformée? De nombreux éléments du récit constituent le témoignage d une époque passée et des changements qui l ont transformée : la vie, difficile, dans les campagnes est racontée à travers le récit des grandsparents et de la jeunesse du père (p. 19-25) ; la découverte du monde de la ville permise par le service militaire (page 25) ; les événements historiques importants qui ont marqué le siècle : le récit des deux Guerres mondiales (p. 25 et p. 42-43), le Front Populaire (p. 40), la guerre d Algérie (p. 75) ; le passage du petit commerce au supermarché (p. 38, 81) ; les innovations techniques (voitures, p. 47 ; télévision, p. 56 ; machines à laver, p. 56) ; la facilité des voyages : la jeune narratrice part à Londres, habite dans les Alpes et revient rendre visite à ses parents en Normandie grâce au train ; les goûts et les modes : les filles aux cheveux courts, le retour des maisons à colombages (p. 53) ; les progrès médicaux et en matière de santé (p. 22, 41, 74, 82). Quelle thématique du récit peut être commune à d autres époques? La question des origines et le désir d ascension sociale sont des thématiques communes à toutes les époques, mais plus prégnantes, peut-être, à notre époque contemporaine. En quoi chaque lecteur peut-il trouver un écho à son histoire personnelle dans La Place? Chacun peut trouver dans ce récit un écho à son histoire personnelle : les adolescents se reconnaissent dans l incompréhension qui existe entre la jeune fille et ses parents, les lecteurs adultes se reconnaissent dans la volonté de 27

Arrêt sur l œuvre chercher dans son histoire familiale les éléments qui ont permis de se construire en tant qu adulte. Enfin, selon le milieu social auquel on appartient, chacun peut retrouver les éléments d un mode de vie, d une histoire commune. L écriture d un récit autobiographique Faites une recherche biographique sur Annie Ernaux. Comparez ses origines et sa vie à celles de la narratrice : que remarquez-vous? Que peut-on en déduire sur le genre du récit? Annie Ernaux Elle est née à Lillebonne en 1940. Elle est issue d un milieu modeste : ses parents sont d abord ouvriers puis petits commerçants. Elle a passé sa jeunesse à Yvetot. Elle a fait des études de lettres. Elle est devenue professeur. Elle a eu une sœur, décédée avant sa naissance. 28 Narratrice Elle est née à L en 1940. Ses parents sont ouvriers avant d acquérir un café. Les parents ont vécu à Y après avoir quitté L Elle fait des études de lettres. Elle obtient le concours de professeur. La première fille des parents est morte de la diphtérie. Les événements marquants de la vie de l auteur sont les mêmes que ceux de la narratrice : on peut donc en déduire que l auteur et la narratrice sont une seule et même personne. Un récit dans lequel l auteur, le narrateur et le personnage sont la même personne est qualifié d autobiographique. À plusieurs reprises, la narratrice évoque des photographies de famille : quel rôle jouent-elles dans la construction du récit? Les références aux photographies de famille sont assez nombreuses : l. 174-180 : une ancienne photographie, retrouvée par la narratrice dans le portefeuille de son père après sa mort, le représente parmi un groupe d ouvriers. Elle la qualifie de «photo typique des livres d histoire pour illustrer une grève ou le Front populaire» ; l. 364 : le père est photographié au moment de son service militaire, «il se faisait prendre en photo souvent», fier d avoir pu échanger ses dents rongées par le cidre contre un appareil dentaire ; l. 404-408 : la photographie du mariage, sur laquelle personne ne sourit ; l. 557 à 567 : un portrait du père, âgé de quarante ans, dans la cour. Le cadre de l objectif marque la «condition sociale», certes avec discrétion, mais la narratrice remarque bien qu «un œil petit-bourgeois» n aurait pas choisi ce fond pour la photo. l. 682 à 695 : la photographie représente cette fois le père à cinquante ans, photographié avec ce qu il est «fier de posséder», sa 4 CV, et accompagné de sa fille. l. 742 : leur chambre est décorée de «photos encadrées». l. 1033 à 1040 : un tournant s opère car, cette fois, c est la narratrice qui est prise en photo, à l âge de seize ans et qui, à la différence de son père, sourit. L ombre de celui-ci apparaît toutefois sur la photographie, montrant par là même une nouvelle fois son absence de sens esthétique. Les photographies ont pour objectif de fixer non pas des instantanés de la vie quotidienne mais des moments clés de la vie, et de montrer ce que les parents possèdent : ils ne sont pas seulement pris en photo pour eux-mêmes mais aussi pour le cadre ou les objets qui les environnent et traduisent leur aisance (le commerce, le vélo, la 4 CV). Récapitulez les motivations qui amènent la narratrice à raconter la vie de son père. Les motivations de la narratrice sont exposées dans les passages qui correspondent au temps de l écriture, on peut ainsi relever : elle veut écrire sur son père, raconter sa vie, tenter d expliquer cette distance qui s est créée entre eux à l adolescence (l. 193 à 196) ; elle entend également faire le témoignage d une époque, d une classe sociale dont elle est issue mais dont, par son travail, elle a pu s extraire pour accéder à une classe sociale supérieure : «J ai fini de mettre au jour l héritage que j ai dû déposer au seuil du monde bourgeois et cultivé quand j y suis entrée» (l. 1555-1556). Annie Ernaux a qualifié son écriture de «plate» : récapitulez toutes les caractéristiques de cette écriture et relevez un exemple pour chacune d elles. Afin de coller au plus près à la réalité, Annie Ernaux fait le choix d une écriture «plate» ou «blanche», qui présente de nombreuses caractéristiques : pas de ponctuation forte : le texte ne comporte presque que des points, les seules marques de ponctuation forte, points d exclamation ou d interrogation, se trouvent dans les paroles rapportées directement ; pas d expression des sentiments : on peut se référer au récit de la mort puis à celui de l enterrement du père, dénués de tout pathos ; refus de l ironie, aucun sens implicite à rechercher dans le récit ; beaucoup de phrases extrêmement courtes et épurées : «il ne buvait pas» (l. 529), «Il était gai.» (l. 830) ; beaucoup de phrases non verbales : «Aucune poésie du souvenir. Pas de dérision jubilante» (l. 206), «Grivoiseries à mots couverts. Scatologie» (l. 831-832) ; très peu de connecteurs logiques créant un effet de liste : «Des vaches du matin à celles du soir [ ] les grenouilles pétées avec une paille» (l. 337-342) ; 29

Arrêt sur l œuvre des paroles rapportées directement pour ne pas diluer les propos des parents dans la narration et coller ainsi au plus près à la réalité langagière : «cette gosse ne compte rien» (l. 731), «Qu est-ce qu on va penser de nous?» (l. 769), «CARNE! J aurais mieux fait de te laisser où tu étais!» (l. 928-929) ; de nombreux blancs, de tailles variables (p. 41, 48, 52, 58, 60 ) ; emploi de l italique : «ce qui se fait» (l. 740), «il ne faut pas péter plus haut qu on l a» (l. 746). Des mots pour mieux écrire p. 100-102 Lexique du milieu social Mots cachés A B O N C Q L S I T U A T I O N S O I A R U E R O U V R I E R A T T D R D É V A T H A N B È F T I R A A A D I R E M È R R O N E E R N P R O L É T A R I A T L I C I U E B O G N O N P L E I P R P C H R Y D O S O M E G A Z É E R S B O U R G E O I S I E W Q Y I A M N D R I H A Y I P I Q U E V N A È G W C E L T S T È D E O I E K L I N C I L E P O T I N U L L B U L N C E R N A H L L O T É L U C A P U È T O C U P P T R G C R S I M S L U I R E A V T U I É I R R I A R B T A B A N E M É A S È M N C P O P U L A I R E E O T I E L L É R M O D É R A V 30 Lexique de la gêne a. Gêné ; b. résignation ; c. laisser-aller ; d. impair ; e. honte ; f. indélicat. 31

Vers l écrit du Brevet Vers l écrit du Brevet p. 131-135 Première partie Questions I. Un récit de vie 1. Qui est désigné par le pronom «on» dans les premières lignes du texte? Le pronom personnel «on» désigne la narratrice et ses parents dans les premières lignes. 2. Qu est-ce qui, dans le texte, donne l impression que les événements racontés sont réels? Les événements racontés correspondent à des préoccupations de la vie quotidienne : la nourriture, l habillement, l école. Les passages au discours direct donnent également l impression d une instantanéité. 3. Dans le premier paragraphe, quel est le temps dominant? Quelle est sa valeur? Le temps dominant dans le premier paragraphe est l imparfait, c est le temps de la description, celle des habitudes de vie de la famille. 4. a. Selon vous, qui prononce les expressions en italique? Les expressions en italique sont prononcées par le père ou par la mère de la narratrice. b. Quel effet crée cet emploi de l italique? Cet emploi de l italique donne une impression de réel, de spontanéité au récit : on croit entendre les parents parler, comme en témoigne aussi le niveau de langage. II. La valeur des choses matérielles 5. Dans le premier paragraphe, relevez au moins deux indices qui montrent que, pour l époque, la famille mène une existence relativement aisée. Le fait que la famille mange à sa faim («preuve, l achat de viande à la boucherie quatre fois par semaine», l. 2-3), qu elle puisse se chauffer convenablement (l. 3-4) et que la fille ait «deux tenues» (l. 4) sont autant d indices qui prouvent que la famille mène une existence confortable. 6. Quelles modifications les parents de la narratrice apportent-ils à leur intérieur? Citez le texte à l appui de votre réponse. Les parents modifient leur 32 intérieur dans le but de supprimer tout ce qui pourrait rappeler «l ancien temps» (l. 13), signe d une mauvaise réussite sociale. Ainsi, «les poutres apparentes, la cheminée, les tables en bois et les chaises de paille» (l. 13-14), qui rappellent une origine paysanne, se voient supprimées. Tout l intérieur est mis au goût du jour. 7. Expliquez la formation du mot «embellir». Le mot «embellir» est formé du préfixe «em-», du radical «bell-» et du suffixe «-ir». 8. «Il a emprunté pour devenir propriétaire des murs et du terrain.» a. Quelle est la fonction grammaticale de la proposition soulignée? La proposition est complément circonstanciel de but. b. Reformulez cette phrase en exprimant le même rapport logique. Il a emprunté afin de devenir propriétaire des murs et du terrain. 9. a. Quel niveau de langue est utilisé par la mère lignes 29-30? L expression «cette gosse» montre que la mère de la narratrice utilise le langage familier. b. Que révèle l anecdote de la robe déchirée sur la valeur accordée aux objets? L anecdote de la robe déchirée révèle que les parents accordent une valeur importante aux objets qui se voient presque sacralisés. Il n est pas question d abîmer ou de gaspiller ce qui a été durement acquis. En reprochant à leur fille de ne rien «compter» lorsqu elle déchire sa robe, les parents soulignent l attention qu ils portent à l argent. III. La question du manque 10. Parmi les expressions en italiques, relevez-en au moins deux qui montrent le rapport qu entretiennent les parents avec l argent. Les expressions «La gosse n est privée de rien», «cette gosse ne compte rien», et l insistance, lignes 9 et 10, sur le «moins bien que les autres» / «autant», témoignent du rapport qu entretiennent les parents avec l argent ; argent difficilement gagné et qu il s agit donc d utiliser avec parcimonie, en montrant toutefois qu on en a suffisamment pour être aussi bien que les autres. 11. a. Dans le dernier paragraphe, relevez deux phrases non verbales. On peut relever les phrases non verbales suivantes : «Sacralisation obligée des choses», (l. 31) «Et sous toutes les paroles, des uns et des autres, les miennes, soupçonner des envies et des comparaisons» (l. 31-32), et «Un manque continuel, sans fond» (l. 36). b. Que révèlent-elles sur le mode de vie de la famille? Ces phrases révèlent que la famille regarde à la dépense bien qu elle dispose de suffisamment d argent pour vivre assez confortablement. La narratrice a souffert dans son enfance, enviant les autres qui avaient, elles, tout ce qu elles désiraient. 33

Vers l écrit du Brevet 12. a. Sur quel ton les phrases citées aux lignes 34-35 sont-elles probablement prononcées? Expliquez. Les paroles sont probablement prononcées sur un ton agacé, énervé. L expression «sois heureuse avec ce que tu as» se rapproche même de la morale. b. Que révèlent ces phrases sur le caractère du père? Ces phrases montrent que le père redoute les dépenses qui ne lui paraissent pas essentielles et qu il n accorde aucune place aux loisirs, aux sorties, à la culture. 13. Quelle est la réaction des parents quand la narratrice évoque les châteaux de la Loire? Citez une expression du texte pour justifier votre réponse. Les parents de la narratrice réagissent de façon véhémente : ils sont «fâchés» (l. 34) lorsque leur fille évoque les châteaux de la Loire, peut-être même voient-ils dans la remarque de leur fille un reproche déguisé? Réécriture «Je n ai pas quatre bras. Même pas une minute pour aller au petit endroit. La grippe, moi, je la fais en marchant.» Réécrivez ce passage au discours indirect. Commencez par «Il disait». Vous ferez toutes les modifications nécessaires. Il disait qu il n avait pas quatre bras. Même pas une minute pour aller au petit endroit. La grippe, lui, il la faisait en marchant. Deuxième partie Sujet de réflexion Dans cet extrait, la narratrice aborde la question de la possession des choses matérielles. Pensez-vous qu il soit nécessaire, dans notre société, de posséder les objets à la mode? Pourquoi? Vous avancerez au moins trois arguments, illustrés par des exemples. Pour que le sujet soit considéré comme réussi, il faudra donc que l élève ait : avancé au moins trois arguments pertinents assortis chacun d au moins un exemple ; présenté sa réflexion de façon organisée en plusieurs paragraphes ; fourni une réflexion développée et réfléchie ; employé un vocabulaire riche et un niveau de langue courant ou soutenu ; apporté du soin à la langue. Sujet d imagination Il vous est déjà arrivé de désirer quelque chose que vos parents ne voulaient pas vous acheter. Racontez la conversation qui s est engagée entre eux et vous. Vous commencerez par présenter la situation, puis vous insérerez un dialogue dans lequel chacun avancera ses arguments. Le dernier paragraphe racontera l issue de l anecdote. Le sujet demande la maîtrise de la narration, pour les premier et dernier paragraphes, ainsi que celle des codes du dialogue. Les passages narratifs devront être suffisamment développés pour comprendre la conversation qui s engage (que réclame l adolescent à ses parents?) et les protagonistes devront avoir été présentés. Le dialogue ne doit pas tomber dans la banalité mais être, au contraire, efficace et percutant : chacun présente ses arguments et ses exemples selon un déroulement logique. À la fin du dialogue, on peut imaginer que les arguments les plus convaincants devront l emporter. Il convient donc de valoriser : l intérêt des passages narratifs ; le respect des codes du dialogue ; la pertinence des arguments avancés par chacun des protagonistes ; le soin apporté à la langue et la richesse du vocabulaire employé. Dans ce sujet de réflexion il s agit de donner son avis sur le matérialisme et le consumérisme. Que l élève avance des arguments en faveur ou en défaveur de la société de consommation il faudra tenir compte de la pertinence des arguments et du poids des exemples. Il est fort probable que les élèves prennent comme exemple à l appui de leur argumentation le cas des objets technologiques : téléphones portables, tablettes numériques, ordinateurs, consoles de jeux. Le choix de l élève devra être justifié de façon approfondie. 34 35

Bibliographie et sitographie Ouvrages Œuvres d Annie Ernaux Écrire la vie, Gallimard, collection Quarto, Paris, 2011. La Place et Une Femme, présentés par Marie-France Savéan, Gallimard, Paris, 1994. Ouvrages critiques sur l œuvre d Annie Ernaux Francine Dugast-Portes, Annie Ernaux : étude de l œuvre, Bordas, Paris, 2008. Élise Hugueny-Léger, Annie Ernaux : une poétique de la transgression, P. Lang, Oxford, 2009. Thomas Lyn, Annie Ernaux, à la première personne, traduit de l anglais par Dolly Marquet, Stock, Paris, 2005. Claire-Lise Tondeur, Annie Ernaux ou L exil intérieur, Rodopi, Amsterdam, 1996. Entretiens L Écriture comme un couteau, entretien avec Frédéric-Yves Jeannet, Stock, 2003. http://editionsdelabibliotheque.bpi.fr/resources/titles/ 84240100911590/ extras/entretien_annie_ernaux.pdf On peut écouter ou regarder des interviews d Annie Ernaux sur les sites de : France Inter http://www.franceinter.fr/emission-eclectik-annie-ernaux http://www.franceinter.fr/emission-l-humeur-vagabonde-annie-ernaux France culture L INA http://bibliobs.nouvelobs.com/romans/20111209.obs6413/annieernaux-je-voulais-venger-ma-race.html http://www.franceinter.fr/emission-les-liaisons-heureuses-annieernaux-et-pascal-quignard http://www.franceculture.fr/emission-la-grande-table-poesie-etpolitique-grand-entretien-avec-annie-ernaux-rediffusion-2011-12-2 http://www.ina.fr/art-et-culture/litterature/video/i11095690/annieernaux-la-place.fr.html http://www.ina.fr/art-et-culture/litterature/video/3577128001/annieernaux-les-annees.fr.html France 2 http://ma-tvideo.france2.fr/video/ilyrooaftcxq.html Ressources sur Internet On peut lire des interviews d Annie Ernaux sur les sites : http://www.lexpress.fr/culture/livre/annie-ernaux_813603.html http://www.rue89.com/rue89-presidentielle/2011/12/10/annieernaux-passion-amoureuse-et-revolte-politique-vont-de-pair 36 37