L optimisation des liens avec le secteur minier exige une approche politique délibérée Pour que le secteur minier améliore sa contribution au développement généralisé, il doit être mieux intégré dans l économie nationale et régionale à travers l établissement des liens. Pour exploiter les possibilités d établissement de liens, les défis tels que les lacunes dans la formation du capital humain, en particulier, dans les domaines à forte intensité de connaissance ainsi que le manque d infrastructure doivent être relevés. - La vision minière africaine Que peut-on faire pour désenclaver le secteur minier africain? La VMA et le rapport du GIE argumentent que la voie à suivre est le renforcement des liens entre les mines et l économie immédiate. Il ne s agit pas d une idée complètement nouvelle car dès 1980, le Plan d Action de Lagos de la CUA a préconisé le renforcement des liens en amont et en aval. Cependant, la Vision Minière Africaine va plus loin en élargissant la notion d établissement des liens au delà de la chaîne minière pour inclure les liens connexes et latéraux. En fait, la VMA et le Rapport du GIE vont au delà de la «boîte minière» en lançant un appel à la planification et à l investissement dans les corridors de développement. Les entreprises non minières peuvent profiter de ces artères si les routes et les chemins de fer par lesquels les minerais sont acheminés vers les marchés sont stratégiquement placés. Le principe clé est d adopter des politiques qui sont tournées vers le développement et de planifier l investissement de manière stratégique. Cela implique qu il faut non seulement optimiser les avantages économiques directs mais aussi s assurer que les améliorations des infrastructures sont mises en œuvre de manière à faire bénéficier d autres secteurs de l économie. Une telle planification délibérée a une dimension d intégration régionale de l Afrique ; par exemple, si une mine est très éloignée d un port ou si les ressources se trouvent dans un pays enclavé, cela impliquera une coopération régionale ainsi que des stratégies nationales. Les liens peuvent être définis de diverses manières: sur le plan quantitative comme des intrants et extrants dans l exploitation minière, et sur le plan qualitative comme les relations entre les entreprises de la chaîne d approvisionnement ou l échange d idée entre ces entreprises. Plus généralement, dans un milieu d affaires, les liens servent à définir toute interaction commerciale entre les différentes entreprises à but lucratif et peuvent se présenter sous plusieurs formes telles que les contrats d approvisionnement, les partenariats, les co-entreprises et de manière plus informelle, le partage des informations relatives au marché ou aux technologies. Dans l ensemble, les différents liens forment un système de composantes individuelles qui peuvent fonctionner indépendamment et réaliser leur plein dynamisme à travers l interaction et le chevauchement. Penser dans une logique de liens encourage l examen de la manière dont chaque participant dans une industrie est lié aux autres. En fait, dans l exploitation minière chaque étape du processus allant de l extraction jusqu à la fabrication du produit fini peut avoir des liens en amont, en aval, latéraux et connexes.
Le problème fondamental de l exploitation minière en Afrique, selon le rapport du GIE, est que les liens avec les mines ne sont pas bien développés (en dehors du transport et de l énergie). Cette tendance reflète la principale orientation de l industrie, à savoir l extraction et l exportation des minerais en vrac vers les marchés d outre mer. Le problème n est pas l absence de lien mais c est que l intégration est en faveur des entreprises étrangères. C est exactement ce qui fait de l exploitation minière une activité enclavée pour ce qui concerne l Afrique. Et c est pour cette raison que l exploitation ne contribue pas de manière adéquate au développement. Pour aborder ce problème, il faudra reconnaître les contraintes de l économie locale et développer des politiques et des plans qui correspondent au contexte africain. Par exemple, pour ce qui concerne les liens en amont, il est probable que les sociétés locales n ont pas la capacité de fournir les équipements dont ont besoin les mines ou, peut être, le système d acquisition central adopté par les sociétés minières internationales ne leur permet pas de soumettre des offres. Par conséquent, prévoir une disposition relative au contenu local dans toute opération minière serait un moyen efficace de rétablir l équilibre. Mais les pays africains doivent choisir à quel niveau ils doivent faire des interventions les plus efficaces. Cela signifie que les politiques doivent prendre en compte le minerai et le marché. Par exemple, il peut paraitre attrayant d adopter des politiques qui renforcent les liens en aval, comme la fonte des minerais. La fonte peut paraitre attractive mais valeur qu elle ajoute au minerai a connu un déclin dans les années récentes en raison de la capacité mondiale excessive. Dans ce cas, le marché mondial ne favorise pas le développement des liens en aval. Et dans toute circonstance, sans l industrie manufacturière, le marché des produits raffinés sera faible. En fait, il peut y avoir très peu d opportunité pour pénétrer le marché. Par exemple, pour quelques métaux spéciaux, les sociétés minières ont de solides liens historiques et techniques avec les fabricants et ces sociétés n aimeraient pas prendre les risques liés au changement de fournisseurs. D autre part, pour les minerais en vrac, le coût élevé du transport n encourage pas la concentration locale bien qu une transformation plus poussée voire la fabrication elle-même puisse se faire plus près des principaux marchés. Dans ce cas le type de minerai permet de développer des liens en aval au niveau local. L appui aux liens connexes tels que les services financiers, l énergie, la logistique, la communication, les compétences et le développement des technologies est très important car ces services peuvent tous soutenir les liens à d autre niveaux de la chaîne de valeur des minéraux. Ce fait est particulièrement évident en aval où les intrants tels que la recherche et le développement, les compétences la technologie et l infrastructure deviennent de plus en plus importants. De nombreux liens connexes dépendent de la qualité des ressources humaines qui sont disponibles et le niveau d éducation est souvent faible en Afrique subsaharienne. Par conséquent, la formation d une main d œuvre qualifiée et compétente est un préalable. L Afrique du Sud donne un bon exemple de la manière d y procéder. Le pays dispose des ensembles de produits spécialisés et des entreprises de service ainsi des institutions du troisième cycle qui ont la tâche de transmettre et d améliorer les compétences dans ce secteur. Cependant, même en Afrique du Sud la formation au troisième cycle est
trop faible pour soutenir une forte croissance locale compte tenu de la concurrence internationale pour les compétences. Les liens latéraux n apparaissent qu aux stades avancés du développement industriel. Un lien latéral c est le cas où les capacités et les expertises acquises dans l exploitation minières sont appliquées dans un autre secteur. A titre d exemple, les connaissances dans les domaines tels que le contrôle des processus, les équipements de construction et la manutention de matériaux peuvent être vendues aux entreprises non-minières. A long terme, les politiques doivent se focaliser sur l aide aux entreprises secondaires et tertiaires pour leur permettre de se développer car elles sont plus durables et continueront d exister bien après la fermeture des mines. Les communautés économiques régionales africaines ont le potentiel de fournir les principales composantes minières des économies régionales et mondiales; le minerai de fer destiné à la fabrication d acier, l azote, les phosphates et le potassium pour l agriculture et le ciment, les armatures en acier et le cuivre pour la construction et les infrastructures. Cependant, la production doit être à un niveau adéquat pour pouvoir faire face à la concurrence sur les marchés nationaux et internationaux. L élimination des barrières au commerce entre les régions africaines permettrait d assurer que le marché des matières premières en Afrique est assez large pour mériter l augmentation de la production et créer des chaînes de valeur régionales. En conséquence, des politiques et des stratégies appropriées sont nécessaires pour exploiter le potentiel de développement de l extraction et du traitement. Tout cela peut être conçu dans le cadre du renforcement des liens. Ces politiques et stratégies peuvent être résumées comme suit : Intégrer délibérément et systématiquement la politique minière dans la politique de développement. Cela implique l abandon de l attention traditionnelle et presque exclusive accordée à l extraction des minerais. Améliorer l intégration du secteur primaire dans l économie au sens large. L établissement de lien en amont et en aval exige des stratégies supplémentaires visant, en premier lieu, à créer un environnement d affaires et des institutions du secteur public qui contribuent à promotion de la croissance. En second lieu, le gouvernement peut dans la mesure du possible définir les termes d accès au minerai qui imposent des conditions d établissement des liens aux détenteurs de droits miniers et fournissent des avantages aux investisseurs pour qu ils structurent leurs projets de manière à approfondir l intégration des projets miniers dans l économie nationale et régionale. Des objectifs raisonnables de contenu local et de valorisation doivent être intégrés dans les régimes miniers. Promouvoir la valorisation des minerais avant l exportation. Le traitement des minerais en aval avant l exportation doit être au premier plan du programme national de l industrie minière. La valorisation ne contribue à la croissance et à la diversification que si elle assure les liens en amont et de liens connexes et ne doit pas être poursuivie comme une fin en soi. Bien que quelques pays aient utilisé les impôts à l exportation pour la transformation en aval,
l expérience a donné des résultats mitigés et ces impôts doivent être appliqués de manière judicieuse. Tourner l attention au développement des biens d équipement et des industries de service. Cette mesure est très importante pour la création d emplois et de nouveaux produits et processus. Améliorer le développement des liens à travers la participation locale et des modèles de responsabilisation. De nombreux avantages peuvent émaner de la participation locale et des modèles de responsabilisation. Expansion des infrastructures économiques. Le financement et la promotion de la construction des infrastructures d énergie et de transport, en particulier, sont essentiels au développement prudent des ressources minières. Les décideurs doit optimiser les effets positifs des infrastructures déclenchés par l exploitation minière en tenant compte des corridors de ressources lors de la planification. Les politiques doivent encourager l utilisation collatérale ou intégrale par d autres secteurs économiques. Les parties tierces doivent pouvoir avoir accès aux infrastructures de transport destinées au secteur minier à des tarifs non discriminatoires. Les infrastructures élargies vont également promouvoir le développement rural. Développer les ressources humaines et promouvoir l innovation. Les efforts doivent être orientés vers l expansion des aptitudes techniques de haut niveau exigées dans l industrie minière. L appui public à l innovation dans domaines liés à l exploitation des ressources naturelles à travers des systèmes d innovation tels que des avantages fiscaux en faveur de la Recherche & Développement et du développement des ressources humaines techniques ainsi que l allocation des rentes provenant des ressources au développement des liens technologiques. Promouvoir l intégration régionale. L évolution progressive vers l intégration régionale permettra dans une certaine mesure de surmonter les obstacles à l établissement des liens à travers la création des marchés communs. Les gouvernements africains doivent éliminer les nombreuses barrières au commerce intra-régional en vue de réaliser de grands marchés régionaux. Ces marchés permettront aux producteurs de bénéficier des économies d échelle et faciliteront l exploitation des opportunités de liens en amont et en aval. (La nouvelle voie de la croissance en Afrique du Sud a lancé l idée de créer un Fonds de Développement Africain aux fins d investissement dans des infrastructures régionales afin de stimuler le commerce et les investissements intra-régionaux. En conclusion, le développement des liens efficaces repose sur la promotion des aptitudes, des économies, la performance des entreprises, la gouvernance, la détermination des prix et la capacité de mise en œuvre (Voir ci-après l étude de cas de la Mozambique). Mais, de toute évidence, l établissement des liens et la transformation de l exploitation minière en moteur du développement industriel dépendent de la demande soutenue des minerais.
Réflexions stratégiques sur les l établissement des liens Etude de cas du Mozambique Le Mozambique est sorti de sa guerre civile prolongée comme l un des pays les plus pauvres du monde. La fonderie d aluminium de Mozal est le premier développement industriel dans le pays depuis des décennies et est réalisée grâce aux investissements des acteurs internationaux, la facilitation du gouvernement et à l appui régional du gouvernement sud africain. i Elle a commencé ses opérations en 1999. Dès le départ, un programme de développement des entreprises locales Mozlink - faisait partie du projet géré par la Société Financière Internationale et le Centre de Promotion des Investissements du Mozambique. Mozlink a développé un programme pour former et orienter les petites et moyennes entreprises locales dans le secteur minier afin de leur permettre de soumissionner et de réaliser des contrats suivant les normes de Mozal. Le succès de ce programme a engendré la création de Mozlink pour fournir de l assistance technique et en matière de gestion pour mettre à niveau les capacités des petites entreprises du secteur minier à participer à la chaine d approvisionnement des biens et des services de Mozal. Des 2007, Mozlink a renforcé les capacités de 45 petites et moyennes entreprises. Pailleurs, les dépenses mensuelles au titre des entreprises locales a atteint 17 milliards de $EU. La performance des petites et moyennes entreprises mesurée en fonction de la qualité de gestion, d entretien et de sécurité a connu une amélioration de 20%. ii Les effets indirects de Mozlink sont notamment la Mozambique Organization for Quality dont l objectif est de promouvoir et d assurer la formation des entreprises locales sur les normes sanitaires, environnementales, de qualité et de sécurité ; le Mozambican Business Network pour encourager l interaction avec les petites et moyennes entreprises dans le secteur minier, et un programme de trois ans (appuyé par la Société Financière Internationale ) pour permettre aux PME de participer aux programmes d acquisition dans les secteurs miniers et de gaz naturel et d autres industries. iii Les liens connexes de la fonderie sont notamment un meilleur réseau d électricité, un réseau d approvisionnement en eau à grande échelle, les logements, de bonnes routes et une structure d embarcadère pour charger directement les produits dans les bateaux, une autoroute reliant de Port de Maputo à l Afrique du Sud, une amélioration générale de la confiance des investisseurs qui les a poussé é considérer la création d une opération de sable lourd (Corridor Sands). iv i CENUA, 2004 ii Jaspers and Mehta, 2007 iii Jaspers and Mehta, 2007 iv CENUA, 2004 ; Sandenbergh et lal., 2009