Texte et photographies : Pascal Roman Avec la collaboration de Noëlle Girod et Eva Prata Le colporteur est dessiné par Jérome Phalippou Présentation de la commune : p 2 et 3 Géographie, géologie : p 4 et 5 Histoire : p 6 à 9 Le chef-lieu et les hameaux : p 10 et 11 L'église : p 12 à 15 Les chapelles : p 16 à 19 L'habitat traditionnel : p 20 et 21 Les activités économiques : p 22 et 23 Les alpages : p 24 et 25 Traditions et folklore : p 26 et 27 Quelques personnalités : p 28 et 29 Le tourisme : p 30 et 31 Montchavin : p 32 à 39 Les Coches : p 40 à 43 Scènes de la vie d autrefois : p 44 et 45 Bellentre demain : p 46 et 47 Éditions de l'astronome 2012 F - 74200 THONON LES BAINS - www.editions-astronome.com Tous droits de traduction, de reproduction et d'adaptation strictement réservés pour tous pays. ISBN 978-2-916147-79-6 ISSN 1778-4581 Dépôt légal décembre 2012 Achevé d'imprimer en décembre 2012 par Papergraf - Piazzola sul Brenta - Padova (Italie)
La commune de Bellentre est située entre Aime et Bourg-Saint-Maurice SITUATION Commune de Savoie, Bellentre est située dans les Alpes françaises, dans la partie haute de la vallée de l'isère, la Tarentaise. Bellentre fait partie de l'arrondissement d'albertville et du canton d'aime. Situé au bord de la nationale 90 (qui le traversait jusqu'en 1990), le chef-lieu de la commune se trouve à 5 km d'aime, 7,5 de Bourg-SaintMaurice et 18 de Moûtiers. Albertville est distant de 43 km et Chambéry de 100. habitants de Tarentaise sont les Tarins et les Tarines. La Tarentaise peut s'enorgueillir de posséder le plus grand nombre de stations de sports d'hiver dont La Plagne, Les Arcs, Courchevel, Méribel, Les Menuires, Val Thorens, Tignes, Val d'isère... AU CŒUR DE LA TARENTAISE La Tarentaise constitue une des six provinces de la Savoie et correspond à la vallée de l'isère allant de sa source jusqu'à Albertville. Il s'agit d'une vallée glaciaire, assez étroite à certains endroits, bordée au sud par la Vanoise et au nord par les massifs du Beaufortin et du Mont-Blanc. La Tarentaise est frontalière du Val d'aoste en Italie. Les À CHEVAL SUR L'ISÈRE Le territoire de la commune de Bellentre est traversé d'est en ouest par l'isère et par la route nationale 90. Quant au chemin de randonnée GR 5, il parcourt la commune du nord au sud. Le chef-lieu regroupé autour de son église se situe au fond de la vallée à une altitude de 773 m. Le reste du territoire s'étend sur les deux versants, s'élevant Bellentre dans les années 1970. La vallée, vue depuis la station des Coches. Au fond, Bourg-Saint-Maurice et, à l arrière-plan, le mont Blanc enneigé. 2
BELLENTRE EN CHIFFRES Avec ses deux villages stations, Montchavin et Les Coches, Bellentre fait partie de l immense domaine skiable Paradiski. À l arrière-plan, le glacier de Bellecôte. (Photo Office du Tourisme). largement en rive gauche de l'isère jusqu'à 3 035 m au pied du glacier de Bellecôte. Ce vaste territoire, où s est développée la station de ski de Montchavin-Les Coches, est appelé le Revers de Bellentre. UNE HISTOIRE ANCIENNE Autrefois, Bellentre était une communauté paroissiale étendue et une des plus riches de la région. Elle était également très peuplée, car Les Chapelles, Valezan et Montméry en faisaient alors partie. Un prieuré était installé autour de l'église (voir p 6 et 7). Jadis, les Bellentrais vivaient des fruits de leurs vastes alpages et de l'exploitation des forêts (voir p 22 et 23). Agriculteurs et exploitants forestiers sont toujours présents, mais en faible nombre, et aujourd'hui, la principale activité économique est liée au tourisme, essentiellement hivernal. - Habitants : 967 Bellentrais et Bellentraises en 2010. - Superficie : 2 394 ha. - Altitude : de 699 m à 3 035 m (au pied du glacier de Bellecôte). 773 m au chef-lieu. - Hameaux : Le Villard, Le Rocheray, La Grange, Le Gothard, Le Crey, Bonconseil, Le Plan des Forches, Le Grand Bochet, Montorlin, Les Granges, Montchavin, Les Coches. LE SKI AU PARADIS L'essor du tourisme et le développement rapide des stations de sports d'hiver après la Seconde Guerre Mondiale, ont redonné un nouvel élan à de nombreux villages de Tarentaise. Depuis le début, Bellentre fait partie de l'aventure de La Plagne, initiée en 1961. La création, sur son territoire, de deux stations de ski, Montchavin en 1973 et Les Coches en 1980 a redynamisé toute l'activité économique de la commune. Grâce à l'implantation sur la station des Coches d'une des deux gares du Vanoise Express, Bellentre se trouve au milieu de l'immense domaine skiable Paradiski qui réunit La Plagne et Les Arcs. Agathe Biolley, une Bellentraise en costume traditionnel, coiffée de la frontière. Début du 20 ème siècle. (Archives municipales). Bellentre dans les années 1970. La RN 90 traversait le chef-lieu. 3
Le territoire de Bellentre s'étend sur les deux versants de la vallée. Pont en fer sur l Isère, début du 20ème siècle. ADRET ET UBAC Sur la rive droite de l'isère, le territoire, peu étendu, s'élève jusqu'à 1 120 m au-dessus du hameau du Villard. Bien ensoleillé, il convenait autrefois à la culture de la vigne et des arbres fruitiers. La rive gauche, le Revers de Bellentre, comprend tout le bassin du Nant Bénin jusqu'au col de la Chiaupe (2 492 m) et l'arête allant jusqu'à Bellecôte (3 416 m). Il présente de vastes forêts. C'est sur ce versant le moins ensoleillé, l'ubac, qu'ont été développées les stations de ski. La commune est limitrophe de celles de Macôt, Champagny-en-Vanoise, Landry, Peisey-Nancroix, Bourg-Saint-Maurice, Les Chapelles et Valezan. Une partie de son territoire se situe dans la zone d'adhésion du parc national de la Vanoise. L ISÈRE Cette rivière, de plus de 286 km de long, prend sa source au glacier des Sources de l'isère, sous la Grande Aiguille Rousse, près du col de la Vache sur la commune de Val-d'Isère en Savoie. Après avoir traversé les départements de la Savoie, de l'isère et de la Drôme, elle se jette dans le Rhône au nord de Valence. Autrefois, l'isère représentait une véritable séparation pour la communauté de Bellentre. Il n'était pas toujours facile pour les habitants du Revers de rejoindre le chef-lieu, en particulier pour assister aux offices religieux, en hiver ou lors de fortes pluies Les crues de l'isère ont causé quelques dégâts, comme en 1764 où le pont a été emporté (il sera reconstruit par Vue aérienne sur les stations de Montchavin (à gauche) et Les Coches (au centre). À l arrière-plan, la vallée de Peisey-Nancroix et le sommet de Bellecôte. (Photo OT, M.D.). 4
Les eaux turquoises du lac du Carrolay. LA RN 90 les communautés de Landry et Bellentre). En 1788, la rivière a débordé, son lit s est déplacé pour se retrouver au milieu de la propriété des prieurs. En 1859 et 1861, de nouvelles crues ont inondé le hameau des Granges. La commune est également parcourue par le Nant Bénin, les ruisseaux de Tochère, du Gothard, du Villard, des Combes, des Granges, des Bâches, de Combe Noire, etc... LES LACS DE MONTAGNE Au Revers, la commune s'élève jusqu'à 3 035 m sous le glacier de Bellecôte. Elle possède des sommets importants comme la Roche de Mio (2 739 m) et la pointe de Friolin (2 678 m), ainsi que deux glaciers, situés à plus de 3 000 m d altitude, celui de Bellecôte et celui de la Chiaupe (même s ils sont situés sur le territoire de Champagny-en-Vanoise, voir p 25). Sur le territoire communal se trouvent également quelques lacs d'altitude : le lac du Carroley (2 186 m), le lac de Friolin (2 540 m) et le lac Noir (vers 1 700 m). Ce dernier plan d'eau est entouré d'une tourbière à sphaignes qui constitue une curiosité naturelle rare en Tarentaise. Comme beaucoup de lacs d'altitude, le lac Noir résulte d'un dépôt morainique abandonné par un glacier et formant une dépression qui, remplie par les eaux de pluie et de la fonte des neiges, s'est transformée en lac. Les sphaignes sont un genre de mousse pouvant de retenir 20 fois leur poids en eau. Ces plantes à croissance continue grandissent par leur extrémité émergée et meurent par leur base. Leurs débris se décomposent peu dans ce milieu humide, acide et privé Le lac Noir et d'oxygène. La matière organique ainsi la tourbière. Les eaux obtenue, va se tasser, se charger en sont sombres car très carbone et se transformer lentement (à chargées en matière raison de 6 cm par siècle) en tourbe. La végétale en décomposition. tourbière du lac Noir a commencé à se constituer il y a 4 000 ans. La route nationale, qui chemine au fond de la vallée, suit globalement le tracé d'une ancienne voie romaine. Les travaux d'aménagement de la route moderne ont commencé en 1858. En 1927, la RN 90 est goudronnée dans la traversée du chef-lieu. La déviation de celui-ci ne se fera qu'en 1990. Avant l'avènement de l'automobile, Bellentre était un relais important sur le trajet Moûtiers/Bourg-SaintMaurice et comptait plusieurs commerces, des auberges et des relais de diligence. En voiture à cheval, il fallait 7 heures pour parcourir les 25 km qui séparent Moûtiers de Bourg-SaintMaurice. Savez-vous qu'en patois les habitants de Bellentre s'appellent lo Belentreye? 5
L'histoire ancienne de Bellentre est marquée par la présence de familles nobles et d un prieuré. LE PEUPLEMENT DE LA VALLÉE Lieu de passage très fréquenté, la vallée de Tarentaise est habitée depuis 5 000 ans avant Jésus-Christ. Vers 14 avant Jésus-Christ, les Romains occupent la Tarentaise, le Beaufortain, le Val d'arly, le Val Montjoie et le Val de Chamonix. Ils baptisent cette région Province des Alpes Grées, et lui donne comme capitale Aime sous le nom d'axima. Aime, tout comme Bourg-Saint-Maurice (appelée Bergintrum ou Bergentrum à l'époque), se trouvaient le long de voies romaines qui passaient par le col du Petit-Saint-Bernard. Situé entre Bergentrum et Axima, on peut penser que l'emplacement qui allait devenir le chef-lieu de Bellentre était peutêtre habité dès l'époque gallo-romaine. Mais rien n'est moins sûr LE PRIEURÉ DE BELLENTRE On ne sait rien sur la fondation initiale de Bellentre. Ni sur l'origine de son nom, même si certains le font dériver de Bergentrum, nom gallo-romain de BourgSaint-Maurice. Des textes anciens révèlent que l'orthographe du nom à quelque peu varié. On peut lire Belentro à la fin du 11ème siècle, Belentru et Bellentro en 1226 et Belintro en 1249. Un prieuré, dont les bâtiments ont aujourd'hui Le chef-lieu au début du 20ème siècle. (Archives municipales). 6 La rue principale du chef-lieu au début du 20ème siècle. (Archives municipales). disparu, était installé autour de l'église (voir p 12). La première trace que nous en avons remonte à un texte de 1145. AU MOYEN ÂGE À cette époque, Bellentre comptait trois familles nobles : les Du Verger, établis au Villard et au chef-lieu (près de la chapelle Notre-Dame de la Compassion), qui vendront leurs biens au comte de Garbillon ; les Montmayeur, dont la spacieuse résidence était installée au
Crey ; et les De La Croix implantés au sommet de la Combe. La famille du Verger possédait un château au Villard, dont on voit encore, en 2012, quelques vestiges (les pierres ayant constitué une tour carrée dont les restes ont été démolis en 1995 et l'entrée des anciens celliers). Tous ces seigneurs dépendaient du comte de Savoie. En 1599, Bellentre rejoint le comté de Saint-Maurice détenu par Guillaume-François Chabod, seigneur de Jacob (près de Chambéry). Ce comté deviendra marquisat en 1655. L'ÉVOLUTION DÉMOGRAPHIQUE Notice historique sur Bellentre publiée en 1869 par l abbé Savarin, curé de la paroisse. LES MONTMAYEUR Les Briançon ont porté le titre de vicomte de Tarentaise jusqu'en 1221. Ensuite, ce titre est passé à la maison de Montmayeur. Cette dernière était une grande famille qui a servi la Maison de Savoie. En 1147, le seigneur de Montmayeur, accompagné par d'autres membres de la noblesse savoyarde, participe à la deuxième croisade aux côtés du comte Amédée III de Savoie. Vers 1350, Hugues II de Montmayeur reçoit en dot la maison forte du Crey de Bellentre, par sa femme Léonette, dernière descendante de la famille d'aigueblanchebriançon. En 1494, la seigneurie était entre les mains de Jacques de Montmayeur, devenu comte en 1449. Vers 1530, Jacques III de Montmayeur vend au duc de Savoie la seigneurie de Briançon dont fait partie Bellentre. Les générations suivantes de Montmayeur, installées près de Turin, négligent les biens de la seigneurie du Crey et les Bellentrais qui cultivent leurs terres ont pris l'habitude de les considérer comme leurs biens propres. Le 13 mars 1759, les héritiers des Montmayeur signent un acte d'affranchissement et un contrat de vente en faveur d'habitants de Bellentre qui acquièrent ainsi des biens considérables : "châteaux, granges, écuries, moulins, cours d'eaux, prés, champs, jardins, etc ". En cette fin de 18ème siècle, une série d'autres affranchissements, avec le marquis de Chabod et le comte de Garbillon, notamment, ont permis aux Bellentrais de s'émanciper définitivement de leurs seigneurs. Contrat de vente, signé le 13 janvier 1759, entre les descendants des Montmayeur et les consorts de Bellentre : Marchand-Maillet, CléazSavoyen et Tantet-Marei-Berthod. Les Chapelles faisait partie de la communauté de Bellentre jusqu'au 12ème siècle. En 1561, lors du recensement pour la consigne du sel, Bellentre qui comprenait Valezan et Montméry, comptait 1 757 habitants, ce qui en faisait la commune la plus peuplée du canton d'aime. Sur un total de 359 feux (équivalent de foyers), 166 se trouvaient à Valezan. Le chef-lieu ne comptait que 16 feux et le Revers 120. Vers la fin du 15ème ou au début du 16ème siècle, le quartier de Montméry rejoint la paroisse d'aime. Dès lors, Bellentre se compose de trois quartiers, ayant chacun un syndic : Montvalezan-surBellentre, le Plan et les Villes du Revers. En 1715, Montvalezan (aujourd hui Valezan), a été séparé de Bellentre qui ne comptait plus, en 1776, que 690 habitants. La population a augmenté pour atteindre les 900 âmes en 1861. Elle a subi une forte baisse au 19ème siècle. En 1936, il ne restait plus que 556 Bellentrais et 515 en 1979. Aujourd hui, Bellentre compte près d un millier d habitants. 7