P-96 A 17 septembre 2003 Rapport de la commission des pétitions chargée d examiner la pétition intitulée: «Soutien aux habitants du 2, rue Jean-Jacquet». Rapporteuse: M me Marie Vanek. La commission a examiné cet objet lors de ses séances des 15 et 29 mars, 29 novembre, 6 décembre 1999 et 10 janvier 2000. Elle a procédé à l audition des pétitionnaires, puis des représentants du Conseil municipal au conseil d administration de la Banque cantonale de Genève, MM. Daniel Pilly et David Hiler. Nous remercions M mes Marie-Cécile Vérolet et Ursi Frey, pour les notes de séance qu elles ont rédigées avec compétence. Texte de la pétition (Voir annexe.) Audition des pétitionnaires Les pétitionnaires souhaitent apporter leur soutien à la Coopérative de l habitat associatif (Codha) qui gère déjà le 41, rue Plantamour. Tant les habitants que l Association genevoise de défense des locataires (Asloca) entretiennent de bonnes relations avec cette coopérative. Celle-ci souhaite depuis des années pouvoir acheter le bâtiment N 2 de la rue Jean-Jacquet. Le Service financier de l Etat a estimé à 2,5 millions de francs le prix de cet immeuble, fonds que la Codha a amené en propre, en vue de traiter avec la Banque cantonale de Genève (BCGe). Cette dernière s est montrée intraitable, en exigeant une somme de 4,5 millions de francs. La Codha souhaite disposer de cet immeuble pour y faire des logements sociaux à bas prix, pour que les familles et les personnes âgées puissent y rester (5 pièces à 1100 francs/mois et 6 pièces de 1350 à 1450 francs/mois avant la subvention). Il est précisé que la BCGe a repris les créances sur cet immeuble, soit 9 millions de dettes, suite à la faillite de nombreux propriétaires.
2 La BCGe a convié la coopérative aux enchères, mais la mise de départ était fixée à 4 millions de francs et c est la société de portage de la BCGe, Etima SA, qui a acquis le bâtiment, en souhaitant le revendre rapidement pour récupérer la mise. Les pétitionnaires demandent donc que la Ville se prononce en faveur du développement des coopératives et qu elle fasse pression sur la BCGe pour que celle-ci change de projet et remplisse ses obligations sociales, puisqu elle n est pas une banque privée. La Ville peut intervenir du fait qu il s agit là d un projet d utilité public, en faveur de logements sociaux. Il y a urgence, dans la mesure où les habitants se défendent contre un ordre d expulsion émis par Etima SA pour le mois de juin 1988 déjà. Des commissaires font remarquer que, au-delà des intérêts des petits contribuables, il y a aussi les intérêts des petits épargnants et des caisses de prévoyance à défendre. De plus, une autorisation de construire a été délivrée et des travaux ont déjà commencé. Les pétitionnaires rectifient ces informations. En effet, le Département de l aménagement, de l équipement et du logement (DAEL) a stoppé les travaux effectués par les anciens propriétaires, travaux illicites car dépourvus d une autorisation de construire. A l époque, il y avait 7 appartements vides depuis cinq ans, que l association ANH a occupés. Audition des représentants du Conseil municipal au conseil d administration de la BCGe La pétition s élève contre le fait que c est une société de portage qui a acquis cet immeuble. Il faut savoir que des fonds propres sont exigés en fonction des types de crédit: 4 à 8% pour des crédits hypothécaires, environ 30% si l immeuble appartient à la banque (cela est imposé par la loi fédérale bancaire, afin d éviter que les banques ne possèdent trop d immeubles). Si le débiteur est défaillant, soit la banque rachète l immeuble, soit elle poursuit le débiteur défaillant, procédure longue qui augmente la valeur de la dette et a un effet sur le marché immobilier. Actuellement, les acheteurs sont à 95% des spéculateurs d outre-sarine.
3 La BCGe a comme politique générale de ne pas faire de bradage, afin de ne pas diminuer les valeurs de ses gages. Seules les grandes banques peuvent assainir leurs biens en les mettant aux enchères à n importe quel prix. La société de portage indépendante de la banque est souvent dirigée par des régisseurs. Elle rachète l immeuble avec un prêt de la banque égal à l état locatif, d où: pertes moindres, pas de bradage et mise en valeur de l immeuble. La rénovation, dans le cas de l immeuble 2, rue Jean-Jaquet, est régie par des lois qui limitent les montants répercutés sur les loyers. La moitié des appartements de cet immeuble est squattée depuis dix ans. Il y a près d un million de pertes sur la valeur locative. L Office cantonal des faillites avait accepté le plan de la Codha mais en majorant le prix de près d un million, estimant qu en dessous il y aurait bradage. Le litige ne porte donc pas sur une question de principe. Il est d ordre économique. En ce qui concerne la pétition, les représentants du Conseil municipal estiment que la Codha est trop gourmande. On ne peut pas laisser dire que les sociétés de portage veulent faire de la spéculation, alors qu elles cherchent à maintenir une valeur raisonnable du bien immobilier. La BCGe est propriété des collectivités et ne doit pas brader des biens collectifs. Elle a hérité des prêts risqués consentis par l ex-caisse d épargne et l ex- Banque hypothécaire et sa santé ne lui permet pas d aller à la casse, bien que cette pratique puisse amener une baisse des loyers. C est pourquoi cette banque se tourne vers la gestion de fortune et vers le négoce, afin de garder des marges bénéficiaires. Il y a une association des locataires en place et seule une solution politique peut débloquer la situation. C est l affaire du Conseil d Etat et non de la BCGe. Une négociation peut encore reprendre, tant que les travaux ne sont pas autorisés. Une caisse de pension ou une fondation, comme la Fondation HLM de la Ville, pourrait peut-être reprendre l opération pour une période transitoire, afin que cet immeuble devienne coopératif avec les locataires en place. Discussion Les commissaires souhaitent avoir l avis de M. Moutinot. Celui-ci se dit favorable à la politique des coopératives et soumettra prochainement un projet dans ce sens au Grand Conseil.
4 Bien qu il n y ait pas d arrangement entre les occupants et la régie, le procureur général ne fera pas évacuer les occupants tant qu il n existe pas de projet de rénovation de l immeuble. Pour l instant, les occupants essaient d obtenir des contrats de confiance, mais leur demande est refusée. Ils paient une indemnité de 120 francs par pièce et prennent en charge les réparations. Certains commissaires sont en faveur du classement de la pétition, arguant du fait que cet immeuble est propriété privée et que les indemnités versées constituent un loyer fictif qui déresponsabilise les personnes. Par ailleurs, la demande de la pétition de lutter contre la spéculation a trouvé une réponse dans le fait que cet immeuble a été vendu, alors que le prix offert par la Codha était dérisoire. A l opposé, d autres commissaires font valoir qu il faut développer les coopératives d habitation et qu il est souhaitable de demander au Conseil administratif de prendre contact avec la Codha et la BCGe. Il est encore temps, du fait que les propriétaires n ont toujours pas déposé de projet de rénovation. Entretemps, des contrats de confiance devraient être acceptés. Vote Le classement de la pétition est mis aux voix; il est refusé par 7 non (2 S, 2 AdG/TP, 2 AdG/SI, 1 Ve) contre 6 oui (2 DC, 2 L, 2 R). Annexe mentionnée
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