Les constituants de la matrice des CCF sont : - le ciment ; c'est le liant hydraulique ;

Documents pareils
Plate forme de modélisation en vue de la prédiction de la durée de vie des bétons vis-à-vis de la pénétration d agents agressifs

Les composites thermoplastiques

Chapitre Contenu Page. 14 Restauration du béton 383

Chapitre XIV BASES PHYSIQUES QUANTITATIVES DES LOIS DE COMPORTEMENT MÉCANIQUE. par S. CANTOURNET 1 ELASTICITÉ

Colle époxydique multi usages, à 2 composants

Compte rendu de LA37 B, TP numéro 1. Evolution de la température et du degrée d'hydratation

Présentations GTF. Point de vue d un utilisateur final. Durée de vie des ouvrages : Approche Prédictive, PerformantielLE et probabiliste

Décharges. La meilleure protection des couches étanches à l eau. Décharges

N09 Viaduc de Chillon

Rupture et plasticité

2.7 Le bétonnage par temps chaud par temps froid

Utilisation historique de nanomatériaux en pneus et possibilités de nouveaux développements

Etude expérimentale et numérique de la Sédimentation/Consolidation de sols à très forte teneur en eau

UTILISATION DES SÉDIMENTS VALORISÉS : exemple de la plate-forme expérimentale SOLINDUS pour le pré-traitement des produits de dragage

Ultrasons diffus pour la caractérisation d une fissure dans le béton

SOMMAIRE Thématique : Matériaux

P M L R O G W. sylomer. Gamme de Sylomer Standard. Propriétés Méthode de test Commentaires. Polyuréthane (PUR) Cellulaire mixte

La présente fiche technique décrit les exigences auxquelles doit répondre le Système Barofor Round.

LE BÉTON À HAUTES PERFORMANCES

DIRECTIVE D'APPLICATION

PROPRIÉTÉS TECHNIQUES DU SYSTÈME NEOWEB

Projet ANR. Bruno Capra - OXAND. 04/06/2015 CEOS.fr - Journée de restitution (Paris) B. CAPRA

Document Technique d Application. Agilia sols A

On peut être «lourd» et agile!

Consolidation des argiles. CUI Yu-Jun ENPC-CERMES, INSTITUT NAVIER

TUTORIAL 1 ETUDE D UN MODELE SIMPLIFIE DE PORTIQUE PLAN ARTICULE

Document Technique d Application

Installez votre paroi remplie Zenturo et Zenturo Super pour un beau mur décoratif

Généralités. Aperçu. Introduction. Précision. Instruction de montage. Lubrification. Conception. Produits. Guides à brides FNS. Guides standards GNS

Styrodur C, un XPS exempt de CFC, HCFC et HFC. De l air, tout simplement. Ecologique, tout simplement.

Tous les produits de la gamme SAF offrent des résistances :

Processus de rupture dans les roches fragiles : déformations, variations de perméabilité et émission acoustique

ÉTUDE DE L EFFICACITÉ DE GÉOGRILLES POUR PRÉVENIR L EFFONDREMENT LOCAL D UNE CHAUSSÉE

Contrôle Non Destructif C.N.D.

SSNV143 - Traction biaxiale avec la loi de comportement BETON_DOUBLE_DP

Application de panneaux de construction en extérieur. Guide pratique et technique

LES RÉPLIQUES MÉTALLOGRAPHIQUES

DISQUE DUR. Figure 1 Disque dur ouvert

INFLUENCE de la TEMPERATURE. Transition ductile/fragile Choc Thermique Fluage

Mécanique des sols I. Chapitre I Propriétés physiques des sols. Chapitre II Hydraulique des sols. Chapitre III Déformations des sols

Bandes en polyuréthane HP avec conformité HACCP

ANNEXE J POTEAUX TESTÉS SELON UN CHARGEMENT STATIQUE ET TESTÉS SELON UN CHARGEMENT CYCLIQUE ET STATIQUE

PROTECTION DEs MAINs ET DEs BRAs INfORMATIONs TEChNIquEs

Le béton léger prêt à l emploi, la solution idéale pour les applications intérieures et extérieures

Physique Chimie. Utiliser les langages scientifiques à l écrit et à l oral pour interpréter les formules chimiques

La fabrication des objets techniques

5 STATIQUE. 5.1 Généralités

Adhésif structural pour le collage de renforts

Réussir l assemblage des meubles

= RÉALISATION DE QUALITÉ DURABLE

BACCALAURÉAT GÉNÉRAL SÉRIE SCIENTIFIQUE

INFOFICHE EB001 NETTOYAGE ET ENTRETIEN DES PAVÉS ET DES DALLES DE RUE EN BÉTON

SIMULATION DU PROCÉDÉ DE FABRICATION DIRECTE DE PIÈCES THERMOPLASTIQUES PAR FUSION LASER DE POUDRE

SSNL126 - Flambement élastoplastique d'une poutre droite. Deux modélisations permettent de tester le critère de flambement en élastoplasticité :

FICHE TECHNIQUE SikaLatex

SOL FORTE ÉPAISSEUR INDUSTRIAL FLORIM

SOCIETE NATIONALE DES CHEMINS DE FER BELGES SPECIFICATION TECHNIQUE L-70

Microstructure des soudures de titane. Paul Danielson, Rick Wilson, et David Alman U. S. Department of Energy, Albany Research Center Albany, Orégon

Relations structure-propriétés dans les élastomères fortement

10ème Congrès Français d'acoustique Lyon, Avril 2010

Les matériels des centrales électronucléaires sont

FICHE TECHNIQUE POSTE METALLIQUE

Hepatex CR. Le panneau à flux laminaire de référence

FORMULATION DES BETONS AVEC AJOUT PAR L UTILISATION DES RESEAUX DE NEURONES

Béton. Fig. 1- Essai d'étalement sur table

Contrôle non destructif Magnétoscopie

APPLICATIONS DE L'IMPLANTATION IONIQUE POUR LE BIOMEDICAL

Cours de résistance des matériaux

Membrane synthétique pour étanchéité de toiture

Défauts dan les sachets souples état date stérilisables en autoclave nouveau 31/05/2002 Caractérisation et classification

Vis à billes de précision à filets rectifiés

PROTECTION DU CORPS INfORmaTIONS TEChNIqUES

Notice technique La filtration sur terre

Fixateurs pour murs périmétriques Description de l'application Description du produit Composition.

TECHNIQUES: Principes de la chromatographie

Sujet proposé par Yves M. LEROY. Cet examen se compose d un exercice et de deux problèmes. Ces trois parties sont indépendantes.

Comment agir sur le bilan environnemental d une bouteille PET?

BTS BAT 1 Notions élémentaires de chimie 1

Distribution Solutions WireSolutions. Catalogue produits. Fils de palissage Vital

Construire des Ouvrages d'art en Béton

Drainage de maches anti-remontée à l humidité. Pour la pose de carreaux en céramique et de pierres naturelles/dalles sur des escaliers extérieurs.

Béton fibré à ultra-hautes performances

Structur 3. Brillant sans polissage. Structur 3. Composite pour la fabrication de couronnes

Les précautions indispensables pour bétonner par temps froid. Holcim Bétons

Rapport du projet CFD 2010

THÈSE. pour l obtention du Grade de

QUELLE FIBRE UTILISER EN FONCTION DE MES APPLICATIONS. OM1, OM2 ou OM3, QUELLE EST LA FIBRE QU IL ME FAUT POUR MON INSTALLATION?

Table des matières IDENTIFICATION DE VOS SALARIÉS ET VISITEURS IDENTIFICATION POUR VOS ÉVÈNEMENTS ET CONFÉRENCES OUTILS DE PERFORATIONS DE TABLE

Utilisation des matériaux magnétostrictifs filaires comme capteurs de mesure de champ magnétique

BROSSES ANTISTATIQUES GUIDE TECHNIQUE

Photons, expériences de pensée et chat de Schrödinger: une promenade quantique

Chapitre 2 : Respiration, santé et environnement.

RÈGLE ALPHA MGSI Rue de la Belle Île Chelles - France - Tel./Fax: mgsifrance@yahoo.

Principe de fonctionnement des batteries au lithium

Fiche Technique d Évaluation sismique : Construction basse en Maçonnerie Non-armée, Chaînée, ou de Remplissage en Haïti

DOSSIER TECHNIQUE VESTIAIRES MONOBLOCS MULTI-CASES

Essais de charge sur plaque

SOCIETE NATIONALE DES CHEMINS DE FER BELGES SPECIFICATION TECHNIQUE

Projet de Fin d Etudes ANNEXE 1 : Présentation du Collège Doctoral Européen

ConSolidation de talus en béton

Transcription:

co n traint es 27 1.2. La matrice cimentaire. Les constituants de la matrice des CCF sont : - le ciment ; c'est le liant hydraulique ; - les charges : des fines destinées à améliorer l'ouvrabilité, et du sable siliceux fin, d'intervalle granulométrique situé entre 0,08 et 0,50 mm [11] ; - éventuellement des adjuvants : en général des polymères synthétiques. Ces derniers augmentent l'ouvrabilité des CCF et réduisent leur sensibilité à la dessiccation lors de la cure [12] ; - l'eau. Le ciment le plus utilisé est le ciment Portland. Son hydratation est un phénomène complexe faisant intervenir divers processus : - l'adsorption physique et chimique de l'eau par les grains de ciment ; - la dissolution ou solvatation, correspondant à un changement d'état du solide ionique (ciment) en présence de solvant (eau) ; - la cristallisation, qui débute par la germination et se poursuit par la croissance de cristaux. La matrice durcie peut, sur le point de vue mécanique, être considérée comme un matériau fragile. Son comportement en traction uniaxiale peut se schématiser comme suit : σ déformations ε Figure 5. Schématisation du comportement en traction uniaxiale de la matrice.

28 1.3. Les fibres. Il existe une pluralité de fibres de renfort pour les CCF. Cette diversité peut se classifier selon : - la nature des fibres : fibres polymériques, métalliques, de verre, de kevlar, de carbone, etc... - la géométrie des fibres : fibres courtes, longues, droites, ondulées, avec crochets, en faisceau, alignées, d'orientation quelconque, etc... - la caractérisation mécanique des fibres : fibres flexibles, rigides, ductiles, fragiles, etc... Certaines fibres subissent une dégradation chimique et même physique dans le milieu cimentaire [13]. Les fibres de verre E, les fibres de polyester et certains types de fibres polyacrylonitrite présentent un mauvais comportement en milieu alcalin [14]. Diverses études ont été menées pour pallier aux problèmes de dégradation physico-chimique de certaines fibres, notamment par PERA et al [13], [15] et [16]. Par exemple, l'ajout de métakaolin permet d'améliorer la ductilité des composites ciment/verre E [13]. Contraintes [mn/tex] 2000 polyaramide carbone 1500 1000 fibre de verre polyester polyamide 6.6 500 5 10 15 20 25 30 Déformations % Figure 6. Courbes contrainte-déformation de fils industriels. (Documentation commerciale ENKA AKZO).

29 1.4 Les interfaces fibre-matrice. L'interface fibre-matrice peut être considérée comme une phase en soi, car sa microstructure est différente de celle de la matrice. Aussi appelée zone de transition interfaciale, ou auréole interfaciale, sa morphologie dépend du type, de la géométrie et du traitement de surface des fibres, de la composition de la matrice et du procédé d'élaboration du CCF. Selon BENTUR et al. [17], la taille de la section des fibres influence considérablement la microstructure de l'interface fibre-matrice : - Pour les micro-fibres, i.e. les fibres ayant un diamètre inférieur ou égal à celui des particules de ciment ( 70 µm), la microstructure de l'interface est dense, peu différente de celle de la matrice. Ceci est dû au fait que les diamètres des fibres et des particules de ciment sont du même ordre de grandeur [17]. - Pour les fibres en faisceau, les particules de ciment et les hydrates formés ne pouvant pénétrer dans le faisceau, la microstructure autour du filament se différencie selon son positionnement interne ou externe. - Pour les macro-fibres, i.e. les fibres ayant un diamètre supérieur à celui des particules de ciment, la microstructure de l'interface ressemble à celle de l'auréole de transition des granulats dans le béton. Sa formation est due entre autre à un effet de paroi et de ressuage au niveau de l'interface. Elle peut se composer d'un film duplex, d'une couche discontinue de cristaux issus de l'hydratation du ciment (en particulier de cristaux de portlandite orientés) et d'une zone poreuse [18]. L'auréole interfaciale peut avoir une épaisseur de quelques dizaines de micromètres [19].

30 A: couche de cristaux Portlandite B: zone poreuse C: pâte de ciment compacte Figure 7. Zone interfaciale [19] zone interfaciale matrice couche poreuse couche de portlandite film duplex 500 400 300 200 100 0 Microdureté [MPa] 0 20 40 60 80 100 Distance de la surface de la fibre [µm] Figure 8. Schématisation de la zone interfaciale [20]. Figure 9. Evolution de la microdureté dans la zone interfaciale et dans le voisinage de la fibre [21.]

31 D'un point de vue mécanique, l'interface, à cause de sa structure peut être considérée comme un point faible du composite. CHEN ZHI YUAN et al. [22] proposent diverses méthodes pour fortifier la structure et accroître la rigidité de l'interface. Parmi ces méthodes, citons l'ajout de fumées de silice et la baisse du rapport eau/ciment. Le transfert d'efforts entre la fibre et la matrice a lieu au niveau de leur interface et joue un rôle essentiel dans le comportement mécanique du composite. L'adhésion interfaciale est une combinaison de trois phénomènes agissant simultanément à des degrés différents [23]: - interpénétration mécanique entre la pâte de ciment et la surface de la fibre ; - adhésion physique moléculaire ; - adhésion chimique. Le transfert d'efforts entre la matrice et la fibre est généralement modélisé à partir de la théorie de la couche de cisaillement [24]. Dans le transfert d'efforts orientés dans le sens de l'axe de la fibre, l'interface est considérée comme une couche de cisaillement. Lorsqu'il n'y a pas décohésion interfaciale, le comportement est élastique : le cisaillement interfacial est linéairement proportionnel à la différence de déplacement entre la matrice et la fibre au niveau de leur paroi interfaciale. Le coefficient de proportionnalité qui en découle est une constante caractéristique de l'interface. Matrice Interface Fibre x m f Etat initial τ=0 x'm x'f m f Etat final Figure 10. Schématisation du saut de déplacement à l'interface. Déplacement sur la matrice u m = x' m - x

32 Déplacement sur la fibre u f = x' f - x Saut de déplacement interfacial [[u]] = u f - u m Cisaillement interfacial τ = k [[u]] k est la constante de cisaillement élastique interfacial et s'exprime en Nmm -3. La limite élastique du cisaillement interfacial τ e, est la valeur de cisaillement pour laquelle il y a décohésion interfaciale. C'est aussi une constante caractéristique de l'interface. Après la décohésion, le cisaillement interfacial est considéré comme frictionnel, généralement variable avec le glissement local de la fibre : τ f = τ f [s(x)], s(x) étant le glissement local [25], [26]. τ f est une constante caractéristique de l'interface. La théorie de la couche de cisaillement et les modèles qui en découlent [27] ne prétendent pas décrire complètement tous les phénomènes complexes ayant lieu lors du transfert d'efforts dans les interfaces du composite (cf. III CONCLUSIONS : CRITIQUES). Les paramètres interfaciaux k, τ e, τ f [s(x)] se déterminent expérimentalement à l'aide d'essais d'arrachement (Pull-out). Les modèles théoriques pour l'interprétation de ces essais sont généralement basés sur la théorie de la couche de cisaillement [28], [29], [30], [27]. Interface Fibre δ(l), déplacement P, force d arrachement x L zone de décohésion Figure 11. Schématisation de l'arrachement d'une fibre.

33 (a) (b) Force d'arrachement Pmax Pcr δcri δmax décohésion complète phase frictionnelle δ(l) Déplacement Cisaillem ent interfacial τe τf(s) κ Scr Glissement local S Figure 12. Arrachement d'une fibre droite. a) type de courbe charge d'arrachement/déplacement de l extrémité de la fibre (pour une fibre d'acier dans une matrice cimentaire) ; b) type de courbe cisaillement interfacial/glissement local qui se déduit de la courbe (a) - [31]. Les forces d'arrachement peuvent sensiblement s'accroître avec l'angle d'inclinaison de la fibre par rapport à l'axe de chargement [32], [33]. Force d arrachement [N] 90 60 Angle d inclinaison 37 degrés 27 degrés 14 degrés 0 degré 30 0 0.3 0.6 0.9 1.2 1.5 Glissement [mm] Figure 13. Courbes force d'arrachement/déplacement pour différents angles d'inclinaisons de la fibre [33.].

34 Certains auteurs [34],[35],[36],[27] traitent la décohésion interfaciale à l'aide de la mécanique de la rupture. La décohésion interfaciale est considérée comme une fissure se propageant le long de l'interface. D autres auteurs ( par exemple HAMELIN et COURTADE [85] ) utilisent des méthodes numériques pour analyser les problèmes aux interfaces ( éléments finis mixtes...).il est nécessaire, avant l utilisation de tels éléments, de vérifier qu ils modélisent correctement la réalité physique de l interface considérée. axe de symétrie δ P glissement pointe de fissure L b τf décohésion cohésion fibre 2R matrice Figure 14. Description schématique de la décohésion interfaciale selon la mécanique de la rupture [34]. Le principe de la couche de cisaillement est la base de plusieurs méthodes de calcul d'efforts dans la cellule élémentaire fibre-matrice [37], [27]. La cellule élémentaire est l'élément microstructural des modèles qui tiennent compte des caractéristiques microstructurales du composite.

35 matrice fibre interface Cisaillement interfacial Force dans la fibre Contrainte dans la matrice Figure 15. Cellule élémentaire fibre-matrice ; cas de l'adhésion interfaciale complète ; description qualitative des efforts dans la fibre et la matrice. σ σ Décohésion Décohésion Cisaillement interfacial Force dans la fibre Contrainte dans la matrice Figure 16. Cellule élémentaire fibre-matrice ; cas de décohésion interfaciale partielle ; description qualitative des efforts dans la fibre et la matrice.