RESUME ANONYMISE DE LA DECISION

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Transcription:

Décision du Défenseur des droits MLD-2013-108 RESUME ANONYMISE DE LA DECISION Décision relative au refus de reclassement professionnel opposé à un militaire reconnu inapte et radié des cadres (observations) Domaine de compétence de l Institution : Lutte contre les discriminations Thèmes de la décision : Synthèse : domaine de discrimination : Emploi public sous-domaine : Cessation des fonctions critère de discrimination : Etat de santé / Handicap Un réclamant, ancien militaire sous contrat dans l armée de l air, a saisi le Défenseur des droits, d une réclamation relative à sa radiation des cadres de l armée par le Ministre de la défense, sans qu une procédure de reclassement professionnel n ait été recherchée. Le réclamant estime que cette décision constitue une appréciation discriminatoire de son aptitude physique fondée sur une situation de handicap présumée. L enquête menée par le Défenseur des droits a permis de considérer, qu en méconnaissance de la jurisprudence et des textes applicables, aucune mesure de reclassement n a été recherchée et, qu ainsi, le réclamant a illégalement été radié des cadres de l armée. Partant, il a été victime d une discrimination prohibée. C est pourquoi, le Défenseur des droits a décidé de présenter ses observations devant le tribunal administratif saisi par le réclamant. 1

Paris, le 21 juin 2013 Décision du Défenseur des droits MLD-2013-108 Le Défenseur des droits, Vu l article 71-1 de la Constitution du 4 octobre 1958 ; Vu la loi organique n 2011-333 du 29 mars 2011 relative au Défenseur des droits ; Vu le décret n 2011-904 du 29 juillet 2011 relatif à la procédure applicable devant le défenseur des droits ; Vu la Directive n 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 portant création d un cadre général en faveur de l égalité de traitement en matière d emploi et de travail ; Vu le Code de la défense ; Vu la loi n 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations ; Vu la circulaire n 4500/DEF/DPMAA/BDSO/ADM/SPE du 11 mai 1994 relative aux changements d orientation professionnelle en cours de carrière des militaires non officiers brevetés du personnel non navigant. Saisi par M. A, ancien militaire, technicien de l air dans la spécialité «conducteur de chien» qui a été radié des contrôles de l armée de l air, par une décision du Ministre de la défense du 24 octobre 2012 ; Décide de présenter les observations suivantes devant le tribunal administratif. Le Défenseur des droits Dominique Baudis 2

Observations devant le Tribunal Administratif dans le cadre de l article 33 de la loi organique n 2011-333 du 29 mars 2011 I. Les faits : La haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l égalité (Halde) a été saisie le 13 avril 2010, par M. Saïfoulaye DIALLO, ancien militaire qui a été radié des contrôles de l armée de l air pour inaptitude physique, par une décision du Ministre de la défense du 24 octobre 2012. Le réclamant estime qu en l absence du reclassement dont il aurait dû bénéficier, cette décision constitue une discrimination à son encontre. Depuis le 1er mai 2011, conformément à l article 44 de la loi organique n 2011-333 du 29 mars 2011 susvisée, «les procédures ouvertes par [ ] la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité [ ] se poursuivent devant le Défenseur des droits. A cette fin, les actes valablement accomplis par [ ] la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité sont réputés avoir été valablement accomplis par le Défenseur des droits». Par une requête du 10 avril 2010, le réclamant a également saisi le tribunal administratif pour solliciter l annulation de la décision du 6 février 2009 du Ministre de la défense par laquelle ce dernier a confirmé le rejet de son recours par la commission de recours des militaires. Il convient de rappeler, que M. A, caporal chef a intégré l armée le 1 er septembre 1999 en qualité de militaire technicien de l air dans la spécialité «conducteur de chien». Depuis le 11 juin 2001, il a été affecté à l escadron de protection de la base aérienne de B. Suite à une consultation à l hôpital d instruction des armées de C, le 21 février 2008, le réclamant a été déclaré inapte à sa spécialité. Le 27 février 2008, il a déposé une demande de réorientation professionnelle pour raisons médicales dans les spécialités suivantes : «transit aérien», «conducteur routier» et «conducteur grand routier de transport fret». Le 22 mai 2008, le Conseil régional de santé (CRS) de C, instance chargée de statuer sur les conséquences de l inaptitude, a rendu un avis favorable à la réorientation professionnelle du réclamant dans la spécialité «transit aérien» et deux avis défavorables concernant les spécialités «conducteur routier» et «conducteur grand routier de transport fret». Par une décision de la direction des ressources humaines de l armée de l air (DRH-AA) du 11 août 2008, la demande de réorientation professionnelle du réclamant a été rejetée, en raison de la situation excédentaire des effectifs dans la spécialité «transit aérien». Toutefois, le 3 décembre 2008, suite à un nouvel examen médical, par le médecin chef de la base aérienne, le réclamant a été déclaré apte à l exercice de toutes les spécialités à l exception de sa spécialité d origine (conducteur de chien). Le réclamant a, ainsi, adressé un courrier le 11 avril 2009 au Caporal-chef D pour lui demander de réexaminer avec bienveillance sa demande de réorientation. En septembre 2009, le médecin expert de l hôpital d instruction des armées de C a confirmé les conclusions de l examen médical de décembre 2008, en considérant que M. A était apte 3

à l exercice de toutes les spécialités à l exception de sa spécialité d origine (conducteur de chien). Le réclamant a, cependant, été placé en congé de longue durée pour maladie de novembre 2009 à novembre 2012 et a été rayé des contrôles de l armée, à compter du 8 novembre 2012. Interrogée par le Défenseur des droits, dans le cadre de son enquête contradictoire, l administration souligne qu en qualité de personnel militaire, le réclamant ne pouvait prétendre à un reclassement professionnel. II. L obligation de reclassement du réclamant : S agissant de l aptitude physique exigée des militaires, il convient de rappeler que l article 20 de la loi du 24 mars 2005 portant statut général des militaires, devenu article L. 4132-1 du code de la défense, dispose que : «Nul ne peut être militaire : ( ) 3 S il ne présente les aptitudes exigées pour l exercice de la fonction ( )». Il ressort de la jurisprudence du Conseil d Etat, que dans les cas où un agent est reconnu inapte de manière définitive à ses fonctions, conformément à un principe général du droit applicable à l ensemble des agents publics, «il appartient à l'employeur de le reclasser dans un autre emploi et, en cas d'impossibilité, de prononcer, dans les conditions prévues pour l'intéressé, son licenciement». (CE, 2 octobre 2002, n 227868). A ce titre, la jurisprudence citée par le ministère de la défense, de la Cour administrative d appel de Nantes du 4 mars 2010 (n 08NT0225), selon laquelle les militaires contractuels ne pourraient pas bénéficier de la procédure de reclassement professionnel n est, en tout état de cause, pas applicable en l espèce, dans la mesure où l administration militaire n est dispensée de son obligation de reclassement, en application de cet arrêt, que durant la période probatoire, ce qui n était pas le cas en l espèce, le réclamant n étant pas dans une période probatoire à la date de sa radiation des contrôles de l armée. En effet, dans cet arrêt, la Cour indique expressément que : «que dès lors qu'il est constaté, au cours de la période probatoire, qu'un militaire engagé ne remplit pas les conditions d'aptitude requises, l'autorité administrative est en droit de ne pas confirmer son engagement, sans qu'une obligation de reclasser l'agent dans un autre emploi s'impose à elle». Par ailleurs, la circulaire n 4500/DEF/DPMAA/BDSO/ADM/SPE du 11 mai 1994 susvisée dispose qu «un militaire en activité de service qui ne satisfait plus aux normes médicales pour servir dans sa spécialité, doit demander :- soit à être maintenu dans sa spécialité par dérogation aux normes médicales ou à défaut à être réorienté pour raisons médicales vers une autre spécialité ; - soit à servir au titre d'une autre spécialité requérant un profil médical moindre». En l espèce, le réclamant a été placé dans l impossibilité de poursuivre sa carrière dans l armée pour des raisons découlant de son état de santé, sans que l administration ne recherche à le reclasser dans une autre spécialité, conformément à l obligation lui incombant en la matière. En dépit du courrier adressé le 11 avril 2009, au Caporal-chef D pour lui demander de réexaminer avec bienveillance sa demande de réorientation, aucun élément versé au dossier ne permet d établir qu une recherche d affectation conforme à l état de santé du réclamant a été entreprise. 4

Ainsi, l administration qui se borne à indiquer qu il ne lui incombe aucune obligation de reclassement s agissant de ses personnels militaires, n a pas rempli son obligation en matière de reclassement pour raison de santé, alors que conformément aux principes énoncés plus haut, il lui appartenait de rechercher une affectation compatible avec l état de santé du réclamant, en prenant en compte les restrictions résultant des préconisations médicales. III- La discrimination en raison du trouble de santé invalidant présenté par le réclamant : La loi n 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, applicable au secteur public, prévoit dans son article 2-2, que : «Toute discrimination directe ou indirecte fondée sur ( ) le handicap ( ) est interdite en matière ( ) d'emploi, ( ) / Ce principe ne fait pas obstacle aux différences de traitement fondées sur les motifs visés à l'alinéa précédent lorsqu'elles répondent à une exigence professionnelle essentielle et déterminante et pour autant que l'objectif soit légitime et l'exigence proportionnée». En l espèce, aucune exigence professionnelle essentielle et déterminante n est invoquée. En outre, conformément à l arrêt du 11 avril 2013 de la Cour de justice de l Union Européenne (affaires C-335/11 et C-337/11), la notion de handicap, au sens de la Directive 2000/78 du 17 novembre 2000, doit être interprétée en ce sens qu elle inclut un état pathologique causé par une maladie médicalement constatée comme curable ou incurable dès lors que cette maladie entraîne une limitation, résultant notamment d atteintes physiques, mentales ou psychiques, dont l interaction avec diverses barrières peut faire obstacle à la pleine et effective participation de la personne concernée à la vie professionnelle sur la base de l égalité avec les autres travailleurs, et si cette limitation est de longue durée. S agissant de la pathologie de M. A, celle-ci entre bien dans le cadre de cette définition eu égard au fait qu elle entraîne une limitation de longue durée, résultant d atteintes physiques et psychiques, qui font obstacle à sa pleine et effective participation à la vie professionnelle. Par suite, sa situation relève bien du champ d application de la loi du 27 mai 2008 interdisant toute discrimination dans l emploi fondée sur le handicap. Il ressort, par ailleurs, de la combinaison des stipulations de la Directive 2000/78 du 27 novembre 2000 (considérant 19 et article 3 4), que les Etats membres peuvent prévoir de ne pas appliquer les dispositions de cette directive relatives notamment au handicap, à tout ou partie de leurs forces armées, afin de maintenir la capacité de ces forces, à la condition qu ils définissent le champ d application de cette dérogation. Une telle dérogation doit également être expressément prévue par la loi. Or, il n apparaît pas qu une telle dérogation ait été mise en œuvre par l Etat français, dans les conditions prévues par les dispositions précitées. Cet élément n est d ailleurs pas sérieusement contredit par le ministère de la défense. Il résulte de tout ce qui précède, que l administration n apporte aucun élément objectif permettant de considérer que la décision de radiation des cadres de M. A et les autres décisions contestées reposent sur des éléments objectifs, conformément au dispositif adapté de la charge de la preuve applicable lorsque le moyen tiré de la discrimination est soulevé (article 4 de la loi n 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations ; CE, 30 octobre 2009, Mme Perreux, n 298348). 5

Dès lors, de telles décisions doivent être considérées comme discriminatoires en raison du handicap au sens de la loi du 27 mai 2008. Telles sont les observations que le Défenseur des droits souhaite porter à la connaissance du tribunal. 6