PLAN : Introduction. I- La répartition des êtres vivants (notions de chorologie) II- Les grandes formations terrestres (les biocénoses)

Documents pareils
HERBIER NUMERIQUE COLLABORATIF DE MAURICE. enseignants des établissements à programme français de Maurice

Mise en place d un réseau d Arboretums pour une valorisation coordonnée des ressources ligneuses ex situ

Les Français et la nature

Une espèce exotique envahissante: Le Roseau commun. ou Phragmites australis

4. Résultats et discussion

MASTER (LMD) GESTION DE DONNEES ET SPATIALISATION EN ENVIRONNEMENT (GSE)

Compléments et commentaires liés à l outil d initiation à la biodiversité à destination du secteur privé

EXAMEN DES PROPOSITIONS D'AMENDEMENT DES ANNEXES I ET II. Autres propositions

Enjeux et Perspectives de la composante «Environnement Santé» du Plan d Action de l Initiative Environnement du NEPAD

FAITS SAILLANTS : 1. CONDITIONS CLIMATIQUES ET ENVIRONNEMENTALES EN AFRIQUE

Quelles sont les conditions sociales favorisant les stratégies d'intensification écologique? Petit tour d'horizon international...

Conception d un CD interactif : simulation d une sortie en écologie végétale

LE RESEAU AFRICAIN D INFORMATION ENVIRONNEMENTALE

UNIVERSITE D ANTANANARIVO FACULTE DES SCIENCES DEPARTEMENT DE BIOLOGIE ET ECOLOGIE VEGETALES

Les principaux thèmes liés à cette cause sont :

Végétaux Exemples d individus

VI/23. Espèces exotiques qui menacent des écosystèmes, des habitats ou des espèces

CORRIGES Plan de la séance

ENQUÊTE SUR LE COMMERCE D'ESPÈCES SAUVAGES SUR L'INTERNET

au concept de «développement durable» Pour une éducation ouverte sur le monde

Jeu de l ingénierie écologique. mémo du joueur

2.0 Interprétation des cotes d évaluation des risques relatifs aux produits

La gestion des données en écologie des communautés végétales : l exemple de Phytobase

Association des. Objectifs. convivialité, réunir les habitants autour du jardinage. action sociale, action environnementale,

Traits fonctionnels : concepts et caractérisation exemples des prairies Marie-Laure Navas, Eric Garnier, Cyrille Violle, Equipe ECOPAR

Évolution du climat et désertification

Systèmes sylvopastoraux. Pour un environnement, une agriculture et une économie durables

Redéploiement et conservation des Antilopes Sahélo-Sahariennes en Tunisie Atelier technique, Douz, 18 et 19 avril 2004

Les macroinvertébrés: des bioindicateurs incontournables pour le monitoring des cours d eau en CH

TELA BOTANICA Le réseau des botanistes francophones. Daniel MATHIEU, président Montpellier, FRANCE

SOMMAIRE CYCLE 1. Des jeux tout prêts. Des activités à préparer. Les solutions

Natura 2000 Golfe du Morbihan

«Poursuivre au-delà de BEEST : une approche fonctionnelle basée sur les traits de vie des espèces en relation avec l habitat».

Etat de la connaissance de la biodiversité. sur la commune de Pantin

Morcellement du paysage

LE MONITORING DE LA BIODIVERSITE EN SUISSE. Hervé LETHIER, EMC2I

Bienvenue sur la planète des insectes!

[Présentation] Juillet 2005

Séquence 4. Comment expliquer la localisation des séismes et des volcans à la surface du globe?

Demande d examen au cas par cas préalable à la réalisation d une étude d impact

CENTRALES HYDRAULIQUES

LISTE DE PROTECTION DES ESPÉCES

Informations Mongolie

FORUM TECHNOLOGIQUE D AFRIQUE DE L OUEST ET DU CENTRE POUR L EXPLOITATION INDUSTRIELLE DES RESULTATS DE RECHERCHE EN AFRIQUE

Bien vivre, dans les limites de notre planète

Sélection du pays I. Contraintes géographiques II. Culture nationale III. Système politique et règlementaire IV. Système social V.

Office bavarois de l environnement

4. Verdissement, une PAC plus verte

Où sont les Hommes sur la Terre

OUVERT02 - Maintien de l ouverture par élimination mécanique ou manuelle des rejets ligneux et autres végétaux indésirables Sous-mesure :

Plan d action Gentianella germanica (Willd.) Börner

Les animaux vertébrés sont-ils réservoirs de rickettsies?

Niveau CEl CE2. Le grand dauphin ou dauphin souffleur Tursiops truncatus

Fiche Technique. Filière Maraichage. Mais doux. Septembre 2008

Sud Expert Plantes Comité de Pilotage

CONVENTION PORTANT CREATION DE L'AGENCE PANAFRICAINE DE LA GRANDE MURAILLE VERTE

COMPTE RENDU FINAL D EXECUTION DE PROJET

République de Côte d Ivoire NOTE D INFORMATION UN INSTRUMENT PROFESSIONNEL AU CŒUR DU DEVELOPPEMENT AGRICOLE ET DES FILIERES DE PRODUCTION

Chapitre 6 : coloniser de nouveaux milieux

Demande d examen au cas par cas préalable à la réalisation d une étude d impact

Les bases de données en ligne

Sud Expert Plantes (Appui aux expertises scientifiques en biologie végétale dans les pays de la ZSP)

Savoirs traditionnels et indications géographiques

BOURSES DE RECHERCHE DOCTORALE ET DE POST-DOCTORAT «EUGEN IONESCU»

Une trousse à outils de l Analyse Economique des Espèces Envahissantes

Michel Fortin 1 er Vice-président FTPF 26 janvier 2011

Thème sélection génétique des plantes hybridation et génie génétique

Comment utiliser les graines de soja à la cuisine

L importance du suivi du dioxyde de carbone (CO 2. ) dans la production de dindes

DEVELOPPEMENT D UNE BANQUE DE DONNEES PHOTOGRAPHIQUES ET SON PORTAIL WEB

FAVORISER LA BIODIVERSITÉ DANS LE CIMETIÈRE. Guillaume Larregle (Maison de l Environnement de Seine-et-Marne)

Conclusion. La deuxième étape correspond aux 6 années de mise en application de ce Document d objectifs.

Comment le réchauffement de la planète va-t-il modifier notre milieu? Guide simplifié de Changements Climatiques 2001 : impacts, adaptation et

Enjeux environnementaux prioritaires des forêts de Poitou-Charentes

Sorgho grain sucrier ensilage L assurance sécheresses

Consensus Scientifique sur la. Biodiversité. et le bien-être humain

ETUDE AFRIQUE AUPRES DU RESEAU BPIFRANCE EXCELLENCE

conservation volontaire : différence vous pouvez faire la Principales options de conservation légales pour les propriétaires de terrains privés

CINQUIEME RAPPORT NATIONAL SUR LA MISE EN ŒUVRE DE LA CONVENTION SUR LA DIVERSITE BIOLOGIQUE AU BENIN

COMITÉ ADMINISTRATIF ET JURIDIQUE. Quarante-huitième session Genève, 20 et 21 octobre 2003

Caisse Nationale de Mutualité Agricole

Indications de contenus, commentaires, recommandations pédagogiques

Référentiel FairWild Version 2.0. Approuvé par le Conseil d Administration de FairWild le 26 août 2010

LE CONGÉ SOLIDAIRE DEUX SEMAINES POUR AGIR AU SERVICE DE LA SOLIDARITÉ INTERNATIONALE

Projet Pédagogique Conférence interactive HUBERT REEVES Vendredi 13 mars H

ACTIONS ET POLITIQUES SUR L'INVESTISSEMENT DANS L'AGRICULTURE

Décryptage des pouvoirs économiques et politiques du continent africain à travers 5 titres de référence

SAVAIS-TU QUE DANS MA COUR D ÉCOLE...

1. DISPOSITIONS GÉNÉRALES

L évidence écologique Une station d assainissement où il fait bon se

Quelques données : Domaines & Patrimoine. Accord de partenariat avec le Groupe LAFORET Franchise. Membre de l ASFFOR.

Principe d un test statistique

Mise à jour Évaluation et Rapport de situation du COSEPAC. l adiante cheveux-de-vénus Adiantum capillus-veneris

Intrants médicamenteux en agriculture et en santé : les écosystèmes microbiens sont-ils un problème ou une solution?

Journées portes ouvertes ECOPHYTO

Formations en gestion des aires protégées en Afrique de l ouest et centrale

Les compensations écologiques sur la ligne à grande vitesse Sud Europe Atlantique

Transcription:

Département de Géographie Faculté des Lettres et Sciences Humaines Université Cheikh Anta Diop (UCAD) PLAN : Introduction I- La répartition des êtres vivants (notions de chorologie) II- Les grandes formations terrestres (les biocénoses) III- Les évolutions et les adaptations IV- Les ressources vivantes (utilisation, protection et durabilité) Bibliographie indicative Documentation à visiter sur INTERNET (très nombreux sites). BRAQUE, R. (1988) - Biogéographie des continents. Paris, Masson, 470 p. LACOSTE, A. & SALANON, R. (1986) Eléments de biogéographie et d écologie. Paris, Nathan, 189 p. ROUGERIE, G. (1988) Géographie de la biosphère.- Paris, A colin, 358 p.

INTRODUCTION La biogéographie s occupe de la partie vivante de la Terre. Elle a plusieurs façons de l aborder et de s interroger sur son objet. 1. Par les répartitions ou distributions des organismes vivants : La chorologie (c'est-à-dire la science des répartitions). 2. Par les modes d association des organismes vivants : La phytosociologie (la sociologie des plantes) plus fréquemment abordée en Biogéographie. La zoosociologie (la sociologie des animaux), partie de la biogéographie généralement traitée par les spécialistes des sciences naturelles plutôt que les géographes. 3. Par les dynamiques (individuelles ou collectives) des organismes : L évolution et les changements pour les espèces comme pour les écosystèmes). Les origines (la biogenèse : d où vient la vie?). L avenir (comment assurer la survie et la pérennité des espèces?). La préoccupation conduit à formuler des stratégies de protection et de conservation des ressources de la nature. 4. Par les modes d organisation et de fonctionnement des organismes : La production et l utilisation de la matière organique. Les trois premiers points seront étudiés dans cet enseignement.

I. La répartition des êtres vivants (notions de chorologie) Les êtres vivants ne se répartissent jamais au hasard, ni de manière uniforme à la surface de la Terre. Elles développent toujours des stratégies leur permettant de survivre et d exprimer leurs potentialités : de façon isolée (c est-à-dire individuellement), ou collectivement (c est-à-dire comme populations formées d un nombre variable d individus, à l intérieur desquelles il est possible d identifier des groupements d espèces végétales ou animales). Si on considère chaque espèce vivante séparément, il devient possible d observer, sur un territoire donné, un nombre variable d espèces qui vont constituer une communauté particulière appelée flore (s il s agit de végétaux) ou faune (si cela concerne les animaux). I.1- Définition de la Chorologie Dans la Biosphère, chaque espèce occupe un territoire qui lui convient en fonction de sa propre évolution et de ses préférences écologiques. Ce territoire est considéré comme une «aire», c est-à-dire une zone géographique d extension très variable, en situation de continuité ou de discontinuité, sur laquelle une espèce vivante se rencontre de façon spontanée. La Chorologie est donc la branche de la Biogéographie qui se charge de délimiter les «aires» de localisation des organismes vivants sur Terre. En règle générale, l organisme à la base de chaque «aire» est considéré comme un «taxon» ou «unité taxonomique» qui a une répartition géographique propre. Le «taxon» correspond le plus souvent à une «espèce» ; on parle alors de la répartition ou de la chorologie de cette «espèce». Exemple : «l aire» de répartition du Baobab, cette plante étant une espèce appelée botaniquement Adansonia digitata. Le Baobab a une aire de répartition qui correspond à presque toutes les zones tropicales sèches situées en Afrique de l Ouest, de l Est et en Afrique australe. Mais la répartition peut cependant être perçue à des niveaux taxonomiques plus élevés, compte tenu des classements hiérarchiques retenus pour les organismes vivants :

«l aire» de telle «espèce» (végétale ou animale), «l aire» de tel «Genre», «l aire» de telle «Famille», «l aire» de tel «Ordre», Etc. I.2- Intérêt de l étude chronologique De nombreuses raisons justifient l étude de la distribution des organismes vivants. Par commodité, on peut en retenir quelques-unes. A- L origine, les convergences La répartition actuelle de la flore ou de la faune terrestre permet de s interroger sur leur origine, les éléments communs entre des territoires parfois séparés par des espaces océaniques ou des barrières montagneuses. Chaque territoire possède des espèces qui lui sont particulières, d où elles sont originaires. Des territoires différents peuvent disposer d espèces communes (ou qui se ressemblent beaucoup, par exemple : les Palmiers). Quelle serait alors la zone d apparition des éléments identiques de leur flore? B- La diversité (richesse floristique) Des zones géographiques disposent d un plus grand nombre d espèces que d autres (exemple: milieux tropicaux et milieux polaires). La répartition de la richesse en espèces peut être un élément de caractérisation des territoires. C- Les opportunités Les espèces vivantes sont sources de molécules ou de produits variés servant à de nombreux usages : alimentaire, thérapeutique, récréatif, de construction, etc. La connaissance de la distribution des espèces permet l exploitation, la valorisation des ressources par les communautés humaines notamment.

D- Les risques Toutes les espèces sont par nature fragiles. Elles restent exposées aux risques de réduction voire de suppression de leur aire de répartition, par conséquent menacées de disparition. La connaissance des territoires de prédilection donne la possibilité de prévenir ou de limiter les risques par des stratégies adaptées (au moins aux espèces qui ont le plus de valeur). I.3- Facteurs de répartition des organismes La distribution des êtres vivants est contrôlée par plusieurs facteurs ; certains leur sont propres, d autres appartiennent au milieu dans lequel se trouvent les organismes A- Facteurs de répartition des espèces vivantes Schématiquement, on peut retenir trois catégories : 1. Aptitude à la propagation La capacité de produire une grande descendance (capacité de reproduction) et de la propager (pouvoir de dissémination) assure en principe à une espèce la faculté d occuper des territoires étendus. Cela fait que les espèces fécondes apparaissent a priori privilégiées pour avoir des aires de répartition étendues. Cependant, la fécondité n implique pas forcément la survie de toute la descendance : chez les espèces prolifiques, le taux de survie des semences est généralement très faible. Chez les plantes, la dissémination se réalise par des mécanismes actifs (propres aux organismes) ou passifs (dépendant de facteurs extérieurs) : Dissémination active : par graine, par multiplication végétative, par rhizomes Dissémination passive par l intervention d un agent de transport comme le vent (anémochorie), l eau (hydrochorie), les animaux sauvages (zoochorie), et même l homme (anthropochorie) volontairement (introduction d espèces) ou involontairement (transferts accidentels)!

2. Potentiel évolutif La capacité à conquérir et à occuper un territoire ne reste pas stable mais soumise à des variations car les organismes subissent des pressions constantes qui les font évoluer en permanence, car le milieu exerce toujours une pression de sélection. Deux types d évolution : La mutation (changement brutal du potentiel génétique par des processus propres à l espèce). L hybridation (changement suite à un croisement entre individus différents). 3. Amplitude écologique Chaque espèce se cantonne dans des limites (seuils) correspondant à des valeurs du milieu qu elle supporte. En général, ce sont des valeurs déterminées par le climat et le sol du territoire d établissement. Si l écart entre les limites (climatiques, hydriques, thermiques, édaphiques ) est grand, l espèce va s adapter et conquérir de grands territoires. Si l écart entre ces limites est réduit, l espèce va se maintenir dans des territoires très limités où ses exigences sont satisfaites. B- Types d aires de distribution En fonction des exigences (en particulier écologiques) des organismes vivants, quatre grands types de répartition sont généralement reconnus au niveau du Globe. 1. Aire cosmopolite Au sens strict, elle correspond à une extension sur l ensemble de la Terre. En réalité, le cosmopolitisme d un organisme se rapporte plutôt à sa présence sur la majeure partie de la Biosphère. Les espèces à aire cosmopolite sont peu nombreuses : Chez les végétaux, surtout des plantes aquatiques. Chez les animaux il y a les exemples des rats et des mouches

2. Aire circumterrestre Certaines distributions d organismes restent liées à des limites strictes en latitude. Elles apparaissent par conséquent avec une disposition en bandes correspondant à une localisation latitudinale : Polaire, exemple : le pingouin. Tempérée, exemple : le chêne, le loup. Subtropicale (ou méditerranéen), exemple : l olivier. Tropicale, exemple : le palmier, le lion. 4. Aire disjointe Il s agit de répartition présentant des discontinuités imp ortantes entre les zones d installation d une Espèce ou d une Famille d organismes. On peut ainsi retrouver des individus appartenant au mê me taxon, mais localisés dans des zones géographiques très distantes. Les oiseaux montrent souvent des c as d aires disjointes. 3. Aire endémique Cette répartition a un e localisation limitée à un seul territoire dont la surface peut être très variable. En général l endémisme est le résultat d un isolement, ce qui fait que les îles (Madagascar, Nouvelle- Zélande), certaines montagnes (Ethiopie), parfois même les déserts (Australie), peuvent être riches en espèces endémiques. I.4- Classifications A- Les territoires biogéographiques L organisation des territoires est fondée principalement sur la reconnaissance des particularismes (végétaux ou animaux) qui se révèlent sous la forme d espèces exclusives à ces territoires, compte tenu aussi du niveau taxonomique considéré.

Le critère-clé des découpages des territoires repose sur l endémisme et le niveau taxonomique à partir duquel on l apprécie. B- Les grandes divisions biogéographiques Hiérarchie des territoires (floristiques ou faunistiques) Empire Région Domaine Secteur District Caractéristiques Endémisme au niveau supérieur (Ordre Famille ) Endémisme niveau Famille ou Genre Endémisme niveau Genre Endémisme niveau Espèce Endémisme niveau sousespèce Localisation approximative (continent ou blocs de continents) Holarctique Néotropical Africano-malgache (ou Paléotropical) Asiatico-pacifique Antarctico-australien

C- Cas du Sénégal Empire Région Domaine Secteur District (floristique) (phytogéographique) (ou sous-secteur) Sahélosaharien Oriental Sahélien Sahélo- (Ferlo cuirassé) Soudano- soudanien Occidental déccanienne (Ferlo sableux) Africano- Soudano- Occidental malgache sahélien Oriental Soudanien Soudanoguinéen Guinéen Casamance Congo-indienne Subguinéen Niayes Spécial Littoral