Cérémonie commémorative du 8 mai 1945 Le 8 mai 2016 Mesdames et Messieurs les Elus, Mesdames et Messieurs les anciens combattants et résistants, Mesdames et Messieurs, Mes Chers enfants, Il y a 71 ans, la France vaincue en 1940 était associée à la signature de la Réédition sans condition des troupes allemandes réitérées à Berlin dans la nuit du 8 au 9 mai par le Maréchal Keitel, au nom du Grand Amiral Doenitz, successeur d Hitler à la tête de l Etat. Ceci 5 ans après l attaque du 10 mai 1940, non seulement de la France mais aussi d Etats avec qui l Allemagne n était pas en guerre, Pays- Bas, Belgique, Luxembourg, Danemark, la Norvège quant à elle ayant déjà été attaquée et occupée. A la demande du gouvernement Belge, les armées françaises et britanniques pivotent sur leurs centres pour prendre position sur une ligne Namur Anvers et peut-être par extension, la manœuvre Bréda pour rejoindre l armée néerlandaise. Aux yeux des commandants alliés, le Haut Commandement Allemand semble utiliser le vieux plan Schlieffen de 1905 évitant ainsi d attaquer la ligne Maginot considérée comme imprenable. 1
En vérité cette attaque était un piège. La France, son gouvernement, ses hauts responsables militaires n ont pas perçu le changement de nature de la guerre. Ils ressentent encore la nécessité d une ligne de front continue appuyée sur une artillerie dense et peu mobile, encore en partie hippomobile. Depuis 20 ans, nous préparions nos armées à une guerre purement défensive, une guerre de siège et nous abandonnons brutalement ce principe pour nous engager dans une guerre de mouvement qui devait déboucher sur une bataille frontale en Belgique, sur un terrain mal reconnu et peu ou pas préparé. La guerre à l Ouest sera rapide. La France sera battue et occupée en moins de temps que la Pologne. Elle sollicitera un armistice dès le 17 juin 1940 alors que nous savions que du 20 au 24 mai le cabinet de guerre britannique avait étudié les moyens d obtenir de l Allemagne des conditions de paix avantageuses. Les Etats-Unis y étaient favorables à condition de récupérer la flotte anglaise et Lord Halifax aurait conduit les négociations. Churchill par son discours aux communes du 24 mai fera capoter cette manœuvre. Nous sommes défaits en quelques semaines, après que nous ayons accepté, en raison des faiblesses de nos gouvernements et d une absence totale de politique étrangère, la remilitarisation de la Rhénanie, l annexion de l Autriche, de la Bohème Moravie et même l attaque de la Pologne sans réagir et cependant nos armées sont plus puissantes que les armées allemandes mieux entrainées, mieux équipées mais dotées hélas d un haut commandement timide, peu directif et rapidement débordé. Comment expliquer autrement cette 2
défaite brutale où dès le 14 mai, quatre jours après le début de la bataille, le président Raynaud annonce à Winston Churchill que la bataille est perdue. La vie des Nations est liée intimement à la qualité de ses élites, à leur capacité d anticipation, de décisions, de compréhension des évolutions du monde et d adaptation. Dans son appel du 18 juin 1940, le général de Gaulle a lui compris que la bataille de France ne tranche pas de la guerre. En réalité, la France et son empire, de même que l Empire britannique, a le recul qui lui permettrait de poursuivre le combat en Afrique du Nord voire en Afrique sub-saharienne et d y frapper l adversaire, ce que saura faire l Empire soviétique en 1942, lorsque ses lignes trop étirées en seront fragilisées. L affrontement entre la France et les Allemagnes durera plus de 1 000 ans pour détruire la Lotharingie dont il ne reste plus que les Pays-Bas, la Belgique, le Luxembourg et la Suisse ; les autres provinces ayant été annexées par les états de l ouest ou de l Est. La question franco-allemande est essentielle à l équilibre de l Europe, une Europe émiettée, après la première guerre mondiale, est une Europe en danger, à la merci d une puissance prédatrice à l époque, l Allemagne, puis l Union Soviétique. Le traité du Charbon et de l Acier puis l Union Européenne sont les réponses raisonnables à la guerre qui pendant si longtemps a ravagé ce continent. 71 ans de paix ont résulté de la courageuse décision du Général de Gaulle et du chancelier Adenauer, le traité de 3
l Elysée a réglé la question de nos relations, il appartenait à ces deux grandes nations de se réconcilier après tant de morts mais aussi de fédérer les démocraties occidentales et après la chute de la dictature soviétique, les pays qui pendant trente ans avaient été dominés. Au moment où dans un mois et demi, le 23 juin prochain, la Grande-Bretagne choisira de rester ou de quitter l Union, nous devons nous interroger sur les conséquences immédiates mais aussi plus lointaine d une telle décision. Une union européenne qui s effriterait, ne nous faisons aucune illusion, ce sera le risque d un continent non seulement affaibli face notamment à l Asie mais aussi d un continent qui prendra le risque de nouveaux affrontements. A l Yalta, alors que les trois grandes puissances discutaient de leur zone d influence respective, Staline avait rappelé qu en 1814 le tsar Alexandre ne s était arrêté que dans Paris. Le centre du monde a été longtemps l Europe. On voit bien que ce centre s oriente désormais vers la zone pacifique où se nouent les accords entre l Asie et l Amérique. Le président Obama à Londres a rappelé que les Etats-Unis avaient besoin d une Europe forte, ce rappel utile nous renvoie à notre histoire. Non le passé n a pas été heureux, le passé n a été qu une succession de guerres dont nous avons pris plus que notre part. Une victoire allemande lors de la dernière guerre aurait entrainé le démembrement de notre pays au profit de l Allemagne, de l Italie et de l Espagne. L acharnement et le génie du Général de Gaulle nous ont permis d être à la table des vainqueurs alors que nous 4
avions bien peu de droit à y être invités. En 1943, les armées polonaises combattant l Allemagne étaient supérieures en nombre et de loin aux forces françaises libres. Nous devons notre liberté à tous ceux dont les noms sont inscrits sur ces monuments, nous leur devons considération, respect, hommage ; nous leur devons aussi de ne pas trahir par notre faiblesse les idéaux qui étaient les leurs ; oui ils ont à jamais des droits sur nous. Ne l oublions pas! Les survivants avaient été capables de créer l union des combattants sous le double patronage du Père Brottier et de Clémenceau, quel exemple ainsi donné à leurs successeurs. Soyons en digne! 5