Dossier de presse. Present Tense. Photographies du sud de l'afrique. 18 septembre - 14 décembre 2013. Sabela Mlangeni, Courtoisie de l'artiste



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Dossier de presse Present Tense Photographies du sud de l'afrique 18 septembre - 14 décembre 2013 Sabela Mlangeni, Courtoisie de l'artiste 1

Communiqué de presse Present Tense Photographies du sud de l'afrique 18 septembre - 14 décembre 2013 Commissaire : António Pinto Ribeiro Une coproduction du Programme Gulbenkian Next Future et de la Délégation en France de la Fondation Calouste Gulbenkian. Sabela Mlangeni, Courtoisie de l'artiste Photographies de Délio Jasse, Dillon Marsh, Guy Tillim, Jo Ractliffe, Kiluanji Kia Henda, Mack Magagane, Malala Andrialavidrazana, Paul Samuels, Pieter Hugo, Sabelo Mlangeni, Tsvangirayi Mukwazhi, Filipe Branquinho, Mauro Pinto et Sammy Baloji Du 18 septembre au 14 décembre 2013 Fondation Calouste Gulbenkian Paris 39 Bd de la Tour-Maubourg 75007 Paris Du lundi au vendredi de 9h à 18h Le samedi de 11h à 18h Fermeture les dimanches et jours fériés Entrée libre : m.magalhaes@gulbenkian-paris.org c.bossard@gulbenkian-paris.org Cette exposition a rejoint la programmation des Saisons Afrique du Sud - France 2012 & 2013 (www.france-southafrica.com) Partenaires média : Alors que 2011 a marqué les vingt ans de la fin de l apartheid en Afrique du Sud, la Délégation en France de la Fondation Calouste Gulbenkian célèbre, en collaboration avec le programme Gulbenkian Next Future, les photographes du sud de l Afrique. S intéresser à l Afrique revient à s intéresser à un continent où l histoire de la photographie est particulièrement importante. Peu visibles en Europe bien que porteurs d autant de talents que d un regard aiguisé sur leurs sociétés, deux importantes générations de photographes sont ici présentées. Ces derniers développent deux tendances : alors que certains prouvent qu ils n oublient pas leur passé et leur histoire, d autres se tournent désormais vers l avenir. L exposition, qui réunit les travaux de 14 photographes, met en valeur les tensions contemporaines qui existent dans leurs pays et les sociétés en général. A travers des choix de thèmes et de mises en scène savamment réfléchis et parfois insolites, où la question sociale, d'identité et l espace public sont souvent au centre de l œuvre, ces tensions deviennent productives et participent à la richesse des propositions de ces artistes. L'exposition sera tout d'abord inaugurée à la Fondation Calouste Gulbenkian de Lisbonne le 21 juin 2013. 2 5 juillet 2013

L'exposition Present tense Photographies du sud de l'afrique Une co-production de la Délégation en France de la Fondation Calouste Gulbenkian et du Programme Gulbenkian Next Future Dans le récent programme consacré à la situation culturelle et géopolitique des pays d'afrique du Nord, organisé en Juin par le Programme Next Future, la penseuse algérienne Wassyla Tamzali, en s'exprimant au sujet de la fameuse thèse de Samuel Huntington qui opposerait l'occident contre l'orient dans une confrontation inévitable, dite de civilisations, affirmait : «le choc des civilisations n'est pas entre l'est et l'ouest, le choc des civilisations est à l intérieur de mon pays, entre la démocratie et le fanatisme, entre l'islamisme fondamentaliste et la rationalité laïque, entre les islamistes et la modernité.» Et ce choc de civilisations à l'intérieur de l'algérie est le même que l'on trouve en Tunisie, en Egypte, au Yémen, comme le confirment les événements récents de persécution, assassinats, et promulgation de lois qui s'opposent aux droits de l'homme. Mais le même genre de choc civilisationnel sans ces contours de fanatisme religieux, peut être trouvé dans d'autres pays où, concomittament à la possession de grandes richesses par certains, des millions de personnes vivent avec un dollar par jour et des différends de travail opposent le côté le plus sauvage du capital au droit à la dignité des travailleurs comme le montre le massacre des mineurs en grève perpétré par la police à Marikana. Mais revenons à l'affirmation de Wassyla Tamzali. Il est opportun que cette déclaration soit également considérée à l intérieur de l Europe où une crise politique a exacerbé un choc civilisationnel dans de nombreux pays de l'union européenne, entre une minorité de super-riches et une majorité de pauvres et très pauvres, entre pays du Nord et pays du Sud, entre bon nombre de politiques d'exclusion et quelques politiques d'inclusion. Pour l'histoire de la photographie de nombreux pays africains, ce choc civilisationnel n'est pas inédit ; il est en fait une question fondamentale pour les photographes de nombreuses villes africaines, depuis que la photographie a été introduite en Afrique au XIX ème siècle comme un instrument et un langage du colonialisme européen. Et l'un des aspects les plus étonnants de cette histoire est la manière dont - avant même de nombreuses indépendances - plusieurs photographes "ont décolonisé l esprit", pour employer une expression extraordinaire de Ngugi wa Thiong'o. 3

En regardant vers le passé, les photographies ne dérivent pas d'une "constellation d'ethnies ou de tribus". Je me réfère ici à la thèse d Elikia M'Bokolo, qui est un préalable essentiel au commissariat de cette exposition, Present Tense. Nous sommes aujourd'hui très loin des photographies que l'on prenait des Noirs, officiellement et souvent décrites avec le même langage visuel de la faune et de la flore, comme le dit Santu Mofokeng dans The Black Photo Album. Ce qui nous intéresse est de montrer et de comparer le travail des photographes qui vivent ou voyagent à travers un ensemble de villes, la plupart situées en ce qui est généralement appelée l'afrique australe. Peu importe le genre - portrait, paysage-document, photojournalisme ce sont les photographies à propos de ce présent conflictuel en Afrique mais pas seulement, comme en est le cas de la série exemplaire de Pieter Hugo présentée ici - le projet "Empire of the In-Between" réalisé au long de la voie ferrée qui relie New york à Washington, publié dans le New York Times. "Present Tense" englobe également la tension entre les langages, entre l'option de la couleur ou du noir et blanc, le détail qui diverge du panoramique. Chaque jour des millions de photographies sont prises avec des appareils photos, des téléphones portables, des ipads, etc. et qui les prend dans la plupart des cas se sent en ce moment-là comme un photographe. Qu est-ce qui rend singulière une photographie qui est choisie pour une exposition? Nous croyons en deux présupposés: le premier concerne le fait que le photographe en tant qu'artiste, comme le peintre, transporte son corps ("Le peintre apporte son corps" disait le philosophe Maurice Merleau-Ponty). C'est à dire que le photographe au moment où il photographie est entier devant l'objet qu'il photographie. Dans cet acte, nous avons le photographe avec sa biographie, la physicalité de ses gestes et son attitude dans la production de l'image. Le deuxième aspect qui fait élire ces photographies découle du fait que, dans chaque photographe, il y a une théorie privée sur la photographie et sur le monde et que l ensemble des théories privées mais non explicites n'est pas nécessairement consensuel correspondant en ce sens à la contribution la plus affirmative de "Present Tense". António Pinto Ribeiro Programmateur du Gulbenkian Next Future Program 4

Photographes et œuvres Délio Jasse, Angola Dillon Marsh, Afrique du Sud Guy Tillim, Afrique du Sud Jo Ractliffe, Afrique du Sud Kiluanji Kia Henda, Angola Mack Magagane, Afrique du Sud Malala Andrialavidrazana, Madagascar Paul Samuels, Afrique du Sud Pieter Hugo, Afrique du Sud Sabelo Mlangeni, Afrique du Sud Tsvangirayi Mukwazhi, Zimbabwe Filipe Branquinho, Mozambique Mauro Pinto, Mozambique Sammy Baloji, République Démocratique du Congo 5

Délio Jasse Delio Jasse vit et travaille à Lisbonne, la ville où il s est installé après avoir décidé, à l âge de dix-huit ans, de quitter sa Luanda natale. Son intérêt pour les différentes techniques d impression lui est parvenu d abord par la sérigraphie, mais l a rapidement conduit à la photographie. Lauréat du prix Anteciparte en 2009, avec la série «Identidade Poética», Jasse a connu une reconnaissance internationale rapide, évidente dans sa récente participation aux Rencontres photographiques de Bamako, en 2011. Si le post-colonialisme apparaît comme un concept central, ce que la critique associe récurrement à son travail, il est également important de noter que cette dimension est construite, surtout, à partir de l expérience personnelle de l artiste. Plusieurs de ses œuvres, constamment traversées par des références et des souvenirs liés à un passé colonial, sont également caractérisées par des questions du présent, comme dans la série «Schengen». Ici, Jasse subvertit la notion de fichier tout en travaillant sur les réalités de la migration africaine au Portugal ce qu il a durement vécu dans une stratégie qui expose la difficulté qui existe dans les limbes bureaucratiques, quelque part entre le statut de citoyen et d étranger. Ses premiers projets se caractérisent également par une expérimentation technique excellente qui se traduit par des photos imprimées à la main, souvent sur bois ou sur verre. Plus récemment, Délio Jasse cherche à se distancier de cette marque d auteur, faite d images évanescentes et presque picturales, pour explorer stylistiquement la voie classique de la photographie documentaire. C est dans ce registre plus direct qu il réalise sa dernière série «Desencontro», une œuvre qui témoigne de la transformation féroce et de la croissance inhumaine de Luanda, au cours des dernières années, à travers des images qui révèlent les asymétries d une ville aussi nouvelle qu inconnue, et dans laquelle l artiste ne retrouve plus son passé. Untitled series, 2012 6

Dillon Marsh La rencontre du sud-africain Dillon Marsh avec la photographie remonte à la période de sa formation en beaux-arts, à l Université de Stellenbosch. Après ce premier contact c est principalement à partir du Cap, où il est né et où il vit actuellement, qu il a développé davantage la plupart de ses projets artistiques. Concentré et attentif aux particularités du monde, Dillon Marsh articule son travail autour de deux grands noyaux. Dans le premier groupe, «Travel Series», sont réunis les recueils de son expérience en tant que voyageur, consolidés dans des images aux allures documentaires et provenant de géographies aussi diverses que l Afrique du Sud, l Inde, la Thaïlande ou le Cambodge. D autre part, le deuxième volet est reflété dans les multi-faces de «Landscape Series» qui, dans une autre logique, propose un abordage conceptuel plus stimulant. Dans ces oeuvres, Marsh s appuie sur la catégorisation des archives pour définir une stratégie esthétique par laquelle il recueille, systématise et distingue ce qu il qualifie lui-même comme des «familles d objets» particulières. Dans ce geste d isoler et de regrouper ces objets qui, autrement, ne se détacheraient pas du paysage ou du quotidien, Marsh met l accent sur les différences, souvent bizarres, qui les unissent en tant que famille. Un exemple de cela est la série «Assimilation», où l artiste réunit des images - et met ainsi en évidence leur étrange architecture - des nids spectaculaires que de petits oiseaux tisserands construisent sur les poteaux du désert de Kalahari. Avec une portée plus symbolique, il est de remarquer le projet «Limbo». Marsh y fait apparaitre un certain nombre d arbres qui, bien que morts, se maintiennent majestueusement debout à Cape Flats, une banlieue résidentielle du Cap, qui évoque bien le régime ségrégationniste de l apartheid. C est donc par son inhabituel mais judicieux inventaire que Dillon Marsh nous rappelle comment l archive n est, après tout, qu un dispositif analytique dont la neutralité est douteuse. Limbo series 7

Guy Tillim C est pendant les tumultueuses années 1980, dans une Afrique du Sud secouée par l opposition croissante à l apartheid, que Guy Tillim a intégré le collectif Afrapix et a commencé à définir son chemin dans la photographie documentaire. En convergeant commodément activisme et curiosité, l appareil photo lui a servi, dès lors, plus comme un véhicule pour accéder et participer à ce qui se passait dans les rues tous les jours, que comme un moyen d expérimentation photographique proprement dit. Cependant, ce sera par le biais du photojournalisme (et de ses collaborations en tant que freelance pour les agences Reuters et France Presse), que Tillim verra son travail largement répandu et primé internationalement. Néanmoins, son travail subit une inflexion décisive, car il commence à percevoir le photojournalisme comme un genre trop déterminé par ce qu il a appelé «des idées prescriptives», qui accompagnent les photographes notamment engagés à créer de «faux drames». Comme en est la preuve, «Petros Village», une série de portraits sobres qu il effectue, en réponse à une invitation, de documenter une grave famine au Malawi. Avec cette stratégie contenue, l artiste contredit intentionnellement les attentes, tout en refusant de construire - esthétiquement et moralement - la rhétorique de la victimisation et de la catastrophe. Dans la même ligne, les projets plus récents comme «Libreville», «Avenue Patrice Lumumba» ou «Congo Democratic», inaugurent également un nouvel intérêt du photographe pour l'étude de l idéologie et la puissance imprimées dans l expérience quotidienne et dans les paysages urbains de différents pays africains. Dans ces œuvres, Tillim réaffirme un regard opposé aux codes du reportage et à sa logique de «l événement». C est donc par ce photojournalisme silencieux que les photos de Guy Tillim offrent, après tout, un portrait oblique du photographe luimême et de sa position critique dans le monde. Libreville series 8

Jo Ractliffe Née au Cap, Jo Ractliffe appartient à une génération de photographes pour qui la photographie, plutôt que documentaire par défaut, était principalement une forme d activisme politique. Néanmoins elle a vite compris que cette stratégie, directe et factuelle, ne convenait pas à son travail. Ce sera donc la composante métaphorique de la photographie qui viendra motiver son désir de faire des images capables de transcender la particularité du moment précis et déterminé dans l espace et le temps. Ce fut aussi cette volonté motrice qui a guidé son travail vers une expérimentation formelle intense autour des possibilités techniques de la photographie. On le remarque dans les photomontages qui constituent la série «Nadir», dans les images floues captées avec un appareil-photo lo-fi pour l installation «reshooting Diana», ou dans les séquences photo-filmiques enregistrées avec un appareil Holga dans «Johannesburg Inner City Works». Tous ces projets, même s ils n abdiquent pas d un lien fort avec le réel, remettent en question le régime de vérité généralement attribué à l image photographique. Ultérieurement, dans le travail développé en Angola ou dans des lieux associés à la traumatique Guerre sud-africaine de la frontière qui a amenué l indépendance de la Namibie, Ractliffe fait une réflexion sur la mémoire des lieux particulièrement marqués par des histoires de perte ou de violence. Par son approche franche de paysages mystérieux, ses photographies transcendent la réalité, puisque elles se centrent sur ce qui est toujours présent, malgré le fait de ne plus être visible. Avec une longue carrière, reconnue internationalement, Jo Ractliffe à été l une des nominés au Prix Découverte, aux Rencontres d Arles en 2011 et, la même année, a vu son livre «As Terras do Fim do Mundo» joindre la liste des meilleurs œuvres au Festival international de livres photographiques à Kassel. From the Pomfret series 9

Kiluanji Kia Henda Kiluanji Kia Henda, né à Luanda, a développé une oeuvre qui évoque et reformule l histoire postcoloniale de l Angola. Avec une reconnaissance éblouissante à travers le monde, ses projets sont déjà passés par des lieux artistiques aussi importants que les Biennales de Venise et de São Paulo. Autodidacte et influencé par la photographie documentaire de Carlos Lousada et de John Liebenberg, il a grandi dans un Angola récemment indépendant et pratiquement aussi jeune que lui. C est dans cette période de grande expérimentation politique, également marquée par une guerre civile troublée, que l artiste puise son inspiration pour son travail. Dans un pays récent dont l histoire est encore à écrire, Kia Henda est particulièrement sensible à la force de persuasion de la photographie dans la construction de l identité nationale. C est peut-être pour cela qu il se munit des mêmes mécanismes l omission, le dépistage et la désorientation. pour raconter, photographiquement, ses propres récits. C est ce qui arrive dans les séries comme «Homem Novo» (référence à l hymne national angolais), où est suggérée une chronique réalisée par les piédestaux et les monuments coloniaux oubliés et abandonnés à Luanda ou, sous un autre aspect, dans «Icarus 13», la photo-installation afro-futuriste présentée à la Triennale de Guangzhou, dans laquelle l artiste documente les différentes étapes d un fantaisiste et utopique voyage spatial vers le Soleil, tenu par une mission angolaise. Plus récemment, dans «Self- Portrait as a White Man», une œuvre développée à Venise dans le contexte de la résidence Art Enclosures, Kia Henda revisite les canons de l art occidental, pour contester leurs hiérarchies et interroger la portée des phénomènes de migration et la Diaspora Africaine en Europe. Dans son œuvre multiforme, c est toujours par la fiction et la mise en scène des photographies qu il nous rappelle que la vérité historique est un concept aussi artificiel qu instable. Luanda in the Skies with Diamonds, 2007 10

Mack Magagane La carrière artistique de Mack Magagane commence par sa formation à Market Photo Workshop, une école prestigieuse et galerie de photo en Afrique du Sud, où il a développé les premiers projets sous la supervision de Mikhael Subotzky et de Jo Ractliffe. C est autour de Johannesburg, sa ville natale où il vit, qu il parvient à structurer son projet photographique, dans une recherche d identité particulière, spécialement attentive à l urbanisme et aux typologies architecturales de la ville. Dans sa première série «City Lights», le photographe surveille les rues de Johannesburg, du haut des toits, en prenant des allures voyeuristiques, où ce regard vigilant est accentué par la présence constante de barrières, de murs et de limites physiques. La vie nocturne est principalement une vie confinée à la sécurité des espaces intérieurs où la lumière, toujours encadrée par les formes architecturales, semble être le seul élément capable d attester l activité humaine. Dans le projet complémentaire «... in the City», Magagane abandonne les perspectives élevées et commence à photographier à un niveau plus proche du sol. Il y a donc une transition dans le regard du photographe - maintenant un observateur plus participant - ce qui rend aussi visible la vulnérabilité physique qui accompagne souvent l acte de photographier. Mack Magagane démontre que ce n est pas par la quête d'une ressemblance, mais plutôt par expérimentation, que la photographie accomplit sa représentation de la ville. Light Hours series 11

Malala Andrialavidrazana Malala Andrialavidrazana est née à Antananarivo et, bien que vivant et travaillant à Paris, revient souvent à Madagascar, poussée par la complexe poursuite d identité qui structure sa recherche artistique. C est par l architecture qu elle s est approchée du langage de la photographie, après son projet de recherche sur la culture funéraire à Madagascar qui a motivé, quelques années plus tard, deux de ses principales séries photographiques, «d Outre- Monde» et «The Ancestors Land». Dans ces oeuvres, l artiste poursuit l exploration du thème de la mort dans un regard presque ethnographique, où la photographie et l architecture se combinent. Plus tard, après avoir remporté le Prix HSBC de Photographie, en 2004, Malala Andrialavidrazana se lance dans le projet le plus ambitieux «Echoes (from Indian Ocean)» qui, initialement, était intitulé «Ny any aminay» (expression malgache qui signifie à la fois «intimité» et «lieu accueillant» ou «foyer»). Dans ce travail, l artiste propose de penser les multiples réalités d identité de l océan Indien en tant que territoire géographique de rencontre - à travers quatre lieux représentatifs de cette diversité: Antananarivo, La Réunion, Mumbai et Durban. À partir de photographies délicates prises dans des intérieurs domestiques, elle révèle le métissage culturel global d une classe moyenne absente des visions extérieures de l océan Indien, généralement situées entre l exotisme et la catastrophe. Dans des images qui résultent de rencontres personnelles, c est la confiance mutuelle qui permet le développement de ce complexe portrait de groupe qui prend forme à partir d un point de vue intérieur. Dans la collection visuelle de Malala Andrialavidrazana, la photographie renverse la logique du pouvoir historiquement associé au regard anthropologique: les objets de représentation sont plutôt les sujets, autour desquels l artiste construit une habile et subtile anthropologie de proximité. Echoes (from the Indian Ocean) series 12

Paul Samuels Le chemin de Paul Samuels dans la photographie s est consolidé à l Université de Witwatersrand à Johannesburg, où il a obtenu son diplôme en beaux-arts. Si, d une part, cette expérience formative a ancré de façon déterminante son futur parcours, d autre part, elle a également souligné son désajustement dans un milieu dont il ne partageait pas les références et les sensibilités. Motivé peut-être par cette non-appartenance, Samuels commence par photographier ses amis de toujours, fondant sa pratique artistique dans un territoire intentionnellement éloigné de l intellectualisation, si souvent politisé, du discours. Ainsi est né «Edenvale XVI X», le projet dont le titre fait directement référence à la petite ville du même nom (code postal 16 10), dans la périphérie de Johannesburg, où Samuels est né et a grandi. Les gens qui habitent cette série, également habitants de Edenvale, sont unifiés ici par ce puissant lien d identité. «Edenvale XVI X» configure un espace physique et profondément humain où Samuels définit, photographiquement, un territoire d appartenance, où il se retrouve et réaffirme qui il est. Poursuivant l idée de rencontre, la photographie de Samuels concrétise un fort sentiment de communauté, également présent dans la vigoureuse galerie de portraits qui constituent la série suivante, «31/201 Bataillon». Stylistiquement loin du photojournalisme, et en intégrant formellement certaines techniques de la photographie commerciale, les images de Samuels sont régies par une vérité éthique solide et définissent un regard photographique, qui souhaite élargir le lexique des thèmes privilégiés de la photographie. A travers la visibilité qu il apporte à différents groupes, différentes communautés et différents modes de vie, nous trouvons chez Paul Samuels une humanité rare et perspicace. En 2012, Samuels a été l un des artistes à recevoir le Tierney Fellowship, à New York. XVIX series 13

Pieter Hugo Pieter Hugo, né à Johannesburg, est un photographe dont la notoriété internationale a commencé avec la série «The Albino Project», un travail réalisé lors d une résidence d artiste à Fabrica, le centre de communication de Benetton en Italie. Depuis ce moment, son travail a été cimenté par une carrière artistique brillante, qui subvertit et réinvente les deux grandes traditions de la photographie de portrait et de la photographie documentaire. Concentrée principalement sur les singularités du continent africain, c est avec la photographie qu Hugo définit sa position dans le monde, à travers un regard qui, n étant pas ethnographique ou photo journalistique, reste profondément engagé. Parmi ses nombreux œuvres, «Permanent Error» se détache, où Hugo lance une question inquiétante au sujet de la durabilité de la planète, à partir de photographies réalisées au Ghana, dans un énorme dépotoir où les pays occidentaux industrialisés envoient leurs dépouilles technologiques. La documentation controversée de la vie dans cette terre aride et toxique lui a valu le Prix Seydou Keita aux Rencontres de Bamako en 2011. Plus récemment, et en dehors de l Afrique, le projet «Empire of the In-Between», publié dans le New York Times, avec le texte d Adam Davidson, parcourt photographiquement l itinéraire de la voie ferrée, jadis industrielle, qui relie New York à Washington. Entre les deux principaux pôles politiques et financiers des Etats-Unis, et le long d un itinéraire à la fois physique et historique, où la grande richesse alterne avec la pauvreté, le chômage et la criminalité, Hugo expose les contradictions étonnantes qui ont accompagné la transformation de l économie américaine, au cours du siècle dernier. En 2012, Pieter Hugo a vu son travail réunit dans la grande rétrospective «This Must Be the Place», présentée au Fotomuseum de La Haye et au Musée de l Elysée à Lausanne. Empire of the In-Between Series, 2012 14

Sabelo Mlangeni Sabelo Mlangeni a appris à manier l appareil photo dans la ville sud-africaine de Driefontein, où il est né. Cependant, ce n est qu après son arrivée à Johannesburg, en 2001, que ce premier contact se perfectionne et acquiert une nouvelle cohérence par son entrée dans la Market Photo Workshop. Engagé dans la tradition documentaire, il a recours à la photographie pour construire des essais visuels puissants qui se distinguent par le noir et blanc chargé, ce qui ajoute une dimension dramatique aux histoires qu il raconte ainsi. Son principal succès a eu lieu lorsque, dans sa première exposition individuelle, il présente «Invisible Women», un projet de plusieurs mois au cours desquels il a cherché à donner de la visibilité aux femmes qui travaillent silencieusement dans le nettoyage nocturne des rues de Johannesburg. Après avoir remporté en 2009 le Tollman Award pour les arts visuels avec ce projet, Mlangeni a continué à travailler sur les gens et les lieux souvent négligés et sous-représentés dans les sociétés actuelles. En particulier, des séries comme «Country Girls», sur la vie des communautés gay dans le contexte rural, ou «Men Only», un regard sur la cohabitation des migrants dans une auberge masculine à Johannesburg, ont consolidé sa projection internationale dans des villes aussi diverses que Bamako, Londres ou Chicago. De retour à sa propre expérience, le travail récent «Big City» dépeint les tensions complexes qui caractérisent la venue des populations rurales à la «grande ville» de Johannesburg. En se concentrant sur un large éventail de thèmes, de groupes ou de communautés, les projets de Sabelo Mlangeni proviennent principalement de la complicité et de la confiance solide que l artiste établit laborieusement dans les milieux humains, qu il cherche à enregistrer. Ainsi, l oeil du photographe est loin d être un simple point de vue unique, mais correspond toujours à une vision réciproque et intensément partagée avec ceux qu il photographie. Working Title series, 2012 15

Tsvangirayi Mukwazhi Tsvangirayi Mukwazhi vit et travaille à Harare, au Zimbabwe. Après des études en communication, journalisme et photographie, il commence à travailler comme photojournaliste dans le premier quotidien de son pays le Daily News - et monte rapidement au poste de rédacteur en chef de photo. Ses œuvres, publiées dans la presse internationale la plus prestigieuse, du Times au New York Times, lui ont valu des prix importants, dont le CNN African Journalist Photographic Award, en 2002, et le Prix Mohamed Amin, en 2007. Détenteur d un regard avide et scrutateur, c est surtout en tant que freelance pour l agence Associated Press que Mukwazhi a vu ses histoires sur l Afrique circuler dans le monde entier. Ses photos dépassent clairement les limites strictes du photojournalisme et ont obtenu une importante visibilité médiatique dans les milieux artistiques africains, asiatiques et européens. Un exemple est la série «Granite Mining in Angola», récemment exposée au cours des Rencontres de Bamako, en 2011. Dans ce travail, dont le but initial était de photographier la prospection des ressources naturelles en Angola, Tsvangirayi Mukwazhi décide de se concentrer non sur l exploitation minière du diamant ou pétrolière comme il serait prévisible, mais sur les exploitations de pierre. À cette fin, il se rend à la ville de Lubango, 1000 km au sud de Luanda, où il documente la vie des communautés locales dont les moyens de subsistance se situent entièrement dans l extraction artisanale de granit noir. Mukwazhi relève la difficulté de ce travail sur des images montrant comment la couleur et la dureté des corps se mélangent avec le granite lui-même et la façon dont le paysage change radicalement, dans ce prodigieux corps à corps avec la nature. En parallèle à ses projets, nombreux d entre eux réalisés avec des ONG, Tsvangirayi Mukwazhi est toujours activement impliqué dans l enseignement de la photographie, ayant été l un des fondateurs de Gwanza, une institution dédiée à la formation et à l exposition de la photographie au Zimbabwe. Granite Mining in Angola series, 2011 16

Filipe Branquinho Filipe Branquinho, natif de Maputo, a pris contact avec le monde de la photographie depuis son plus jeune âge. Au Mozambique, il a grandi à proximité de groupes d artistes, fréquentant des expositions et vivant auprès du photojournalisme à travers de grands noms de la photographie mozambicaine tels que Ricardo Rangel, José Cabral ou Kok Nam. La consolidation de son parcours arriva plus tard au Brésil, où Branquinho a optimisé sa technique photographique de prise de vue et de laboratoire à l Université de l Etat de Londrina, en parallèle avec sa formation en architecture. Dans ce contexte, son intérêt envers d autres domaines artistiques s est intensifié et Branquinho a commencé à travailler comme freelance dans deux voix distinctes : le dessin et l illustration, d une part, et la photographie de l autre. Lorsqu il photographie - souvent selon les opportunités que le hasard lui offre - l artiste cherche avant tout à enregistrer la vie de Mozambique et la façon comme elle se traduit dans la relation mutuelle qui s établit entre les villes et leurs habitants. La recherche approfondie de cette coïncidence, entre l espace physique et l espace personnel de ceux qu il photographie, est l élément le plus constant et structuré de tout son travail photographique. Si dans la série «Chapa 100» Branquinho part de l idée de déplacement, en tant qu agent caractérisant de l expérience urbaine, dans d autres oeuvres l accent est mis principalement sur la figure humaine. Un exemple est le projet «Ocupações», un ensemble de portraits d une classe ouvrière dignifiée par sa relation avec l espace qu elle occupe. Quelques photos de «Ocupações», agrandies à l échelle humaine, ont été présentées dans les jardins de la Fondation Gulbenkian, en 2012, et c est aussi avec cette série que l artiste a remporté, la même année, le prix Estação Imagem dans la catégorie de portrait. En 2013, Filipe Branquinho fut l un des nominés pour la 9ème édition de BESPhoto. Série Chapa 100 17

Mauro Pinto Mauro Pinto est l un des rares photographes mozambicains dont le travail est reconnu dans les circuits internationaux de l art. Né à Maputo, cet autodidacte commence à approfondir ses connaissances de photographie à la Monitor International School et avec José Machado. Il étudie également avec Ricardo Rangel, le photographe mozambicain légendaire, avec qui il devient très proche et réalise l exposition «Two Man Show» en 2008. Son travail, tributaire d'une esthétique documentaire, parfois en couleur, parfois en noir et blanc, est centré sur Maputo et d'autres villes de l'afrique australe. Mauro Pinto nous renvoie un regard particulièrement engagé à révéler ce que l on ne voit pas - l intérieur des maisons, les maladies, les institutions judiciaires pour enfants, les cimetières, la survie. Dans «Restos do Mundo», le photographe réalise une cartographie des «fous» qui peuplent la ville de Maputo et auxquels presque plus personne ne remarque. Cependant, dans «Portos de Convergência», il lance une réflexion sur la mobilité volontaire ou involontaire des populations africaines dans le monde, à partir des points chauds des routes historiques d esclaves : les villes portuaires. Ce travail s est élargi et à donné lieu à la série «Maputo - Luanda Lubumbashi». Mauro Pinto y cherche à créer des images fines et capables d étendre et de changer la perception extraordinairement réduite que le monde a de ces lieux. Ce sont ces photos qui lui ont valu la nomination pour BESphoto, prix qu il a remporté en 2012 avec le projet «Dá Licença», un portrait complexe de la société mozambicaine, fait à partir d images d intérieurs habités dans le quartier emblématique de Mafalala, où ont vécu nombreux de ceux qui ont fait l histoire du Mozambique. Toujours intéressé à clarifier ce qui se passe de l autre côté du miroir, pour Mauro Pinto la photographie est bien plus qu un instrument de vision, c'est un amplificateur de connaissance. Série Pique-nique 18

Sammy Baloji Sammy Baloji, né à Lubumbashi, en République démocratique du Congo, développe son travail autour de la mémoire collective de sa région d origine : la province minière du Katanga. Protagoniste d une carrière à l échelle mondiale, la grande projection de Baloji commence en 2007, année où il a emporté deux prix aux Rencontres de Bamako avec la série «Mémoire». Dans cette oeuvre, l artiste a eu recours au photomontage pour juxtaposer les différentes temporalités historiques qui coïncident dans sa région. Dans des images ostensiblement composites, les corps des travailleurs du passé (à partir d images d archives produites en noir et blanc, en pleine période coloniale), habitent les paysages actuels et coloré du Katanga, aujourd hui marqués par les ruines des complexes industriels miniers, abandonnés il y a longtemps. Dans la série suivante, «Kolwezi», Sammy Baloji vise à documenter la réalité actuelle de l exploration artisanale dans les anciens complexes miniers de cuivre et de cobalt, jadis industriels, et maintenant réactivés par le croissant investissement chinois. Dans une vision contenue, refusant des lectures univoques sur le phénomène de la Chinafrique, Baloji photographie cette nouvelle réalité et réalise des diptyques photographiques à partir des logements éphémères et précaires des travailleurs, intégrant également des affiches et des images chinoises, offrant des visions de luxe et de paysages oniriques de grandes métropoles occidentales et asiatiques. Par un effet de miroir formel, apparemment illogique, ces images révèlent une vision utopique d un «futur-né de la prospection artisanale, de l exportation de minerais et du déplacement permanent des populations». C est alors, à partir de l intérieur de son pays, que Sammy Baloji propose une lecture critique des relations qui forment la géopolitique mondiale. Baloji a reçu le Prix Prince Claus en 2009 et les Spiegelprijs en 2012. Série Kolwezi, 2011 19

Catalogue de l'exposition Publication en juin 2013. Edition Fondation Calouste Gulbenkian Textes de António Pinto Ribeiro (commissaire de l'exposition) et de Patricia Hayes Informations pratiques Fondation Calouste Gulbenkian - Délégation en France Du 18 septembre au 14 décembre 2013 Fondation Calouste Gulbenkian - Délégation en France 39, Boulevard de la Tour-Maubourg, 75007 Paris Entrée libre Horaires d'ouverture Du lundi au vendredi de 9h à 18h et le samedi de 11h à 18h Fermeture les dimanches et jours fériés Accès Métro : La Tour-Maubourg (ligne 8), Invalides et Varenne (ligne 13) ; RER : Invalides (RER C) ; Bus 28 Renseignements /81 www.gulbenkian-paris.org Retrouvez-vous sur Facebook : Centre Calouste Gulbenkian 20