TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE LA BANQUE AFRICAINE DE DÉVELOPPEMENT

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TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE LA BANQUE AFRICAINE DE DÉVELOPPEMENT QUORUM: Professeur Yadh BEN ACHOUR Président Juge Salihu Modibo Alfa BELGORE Vice président Juge Benjamin Joses ODOKI Membre Juge Anne L. MACTAVISH Membre Juge Leona Valerie THERON Membre I. LES FAITS REQUÊTE N 2013/01 N. K., Requérante, Banque africaine de développement, Défendeur Jugement N 86 du Tribunal administratif rendu le 20 juin 2014 1. La Requérante était, jusqu'à son licenciement, employée au Bureau Extérieur de la Banque à Lusaka (Zambie) en tant qu'assistante Finance et Administration, dans le cadre d'un contrat à durée déterminée au Grade de GS8. qui a été renouvelé en décembre 2012. 1 Son contrat aurait dû prendre fin le 17 décembre 2015 mais a été résilié le 20 août 2013, pour abandon de poste. 2. Le 22 octobre 2013, la Requérante a déposé une requête contre la Banque pour licenciement abusif. Le 20 janvier 2014, le Défendeur a soulevé une exception d'irrecevabilité de la requête, en vertu de l'article III (2) (i) du Statut et de l'article XIV (1) et (2) des Règles de procédure du Tribunal. 3. Le 3 mars 2014, la Requérante a soumis une Objection à l'exception d'irrecevabilité de sa requête soulevée par le Défendeur. Selon la Requérante, son licenciement sans préavis est intervenu sans tenir aucun compte de sa maladie et des preuves contenues dans ses certificats de maladie. Par ailleurs, la Banque n'aurait pas respecté les règles d'une procédure équitable? ni agi conformément aux pratiques internationales acceptées, qui la protègent en sa qualité de fonctionnaire internationale. 2 II. ARGUMENTS DES PARTIES Le Défendeur 4. Le Défendeur estime que la requête de la Requérante doit être rejetée au motif que toutes les voies de recours internes disponibles n'ont pas été épuisées. 3 5. À l'appui de l'exception d'irrecevabilité, le Défendeur invoque l'article III, paragraphes 1 et 2, du Statut du Tribunal, qui énonce que: 1 Exception d'irrecevabilité, paragraphe 2, annexe 1 Exception d'irrecevabilité 2 Objection de la Requérante à l'exception d'irrecevabilité, paragraphes 1 3 3 Exception d'irrecevabilité, paragraphes 26 27, 29 30

«1. Le Tribunal est compétent pour connaître et statuer sur toute requête par laquelle un membre du personnel de la Banque conteste une décision administrative pour inobservation de son contrat d'engagement ou de ses conditions d'emploi. 2. Une telle requête n'est recevable que si: (i) (ii) le requérant a épuisé toutes les autres voies de recours administratif existant à la Banque, à moins que le requérant et la Banque n'aient convenu de soumettre la requête directement au Tribunal; et la requête a été introduite dans les quatre vingt dix (90) jours qui suivent la dernière des dates ci après: (a) (b) (c) la date de l'événement qui a donné lieu à la requête; la date de réception de la notification (après que le requérant ait épuisé toutes les autres voies de recours existant à la Banque) indiquant que la réparation demandée ou recommandée ne sera pas accordée; ou la date de réception de la notification de la décision indiquant que la réparation demandée ou recommandée sera accordée, à condition que cette réparation ne soit pas intervenue dans les trente (30) jours qui suivent la réception de la notification. 4» 6. Pour le Défendeur, tous les différends avec des membres du personnel lésés doivent satisfaire l'obligation d'épuiser tous les mécanismes de recours internes au sein du système de résolution des conflits, notamment le Comité d'appel du Personnel. Il soutient donc qu'étant donné le caractère définitif et contraignant de la compétence du Tribunal, il existe une obligation pour le personnel d'épuiser ces recours avant de saisir le Tribunal. 7. Le Défendeur maintient par ailleurs que cette requête n'entre pas dans la catégorie des "circonstances exceptionnelles" qui pourraient justifier le non épuisement des recours internes. En effet, les éléments du dossier montrent que la Requérante a effectivement écrit à CSVP le 30 août 2013 et a également saisi le Responsable de l'éthique et le Médiateur, dans l'espoir d'une solution à son problème 5. Ces démarches sont conformes aux deux procédures alternatives visées à l'alinéa (a) de la disposition 103.04 du Règlement du Personnel, qui inclut la révision administrative ou la conciliation par le Médiateur. 6 8. Sans nier implicitement ces faits, le Défendeur 7 affirme néanmoins qu'ils ne dispensent pas la Requérante de l'obligation de saisir le Comité d'appel du Personnel, obligation qu'elle a contournée en saisissant directement le Tribunal administratif. 8 Il affirme par ailleurs que la jurisprudence de ce Tribunal, 9 du Tribunal administratif de la Banque mondiale et du Tribunal administratif de l'organisation internationale du travail, entre autres, soutient la proposition 4 Statut du Tribunal administratif de la BAD, 1998, Article 3 (2) (i) et (ii) 5 Exception d'irrecevabilité, paragraphes 24; requête de la Requérante, page 5 6 Exception d'irrecevabilité, paragraphe 23, and annexe 13 de l'exception d'irrecevabilité 7 Exception d'irrecevabilité, paragraphes 24, 25 8 Exception d'irrecevabilité, paragraphes 23, 26 9 Exception d'irrecevabilité, paragraphe 20 2

d'un strict respect de l'obligation d'épuiser les mécanismes de recours interne avant de saisir les tribunaux administratifs. 10 9. En particulier, le Défendeur estime que l'une des deux alternatives ouvertes aux membres du personnel qui s'estiment lésés en application de l'alinéa a) de la disposition 103.04 du Règlement du Personnel, constitue la première démarche à accomplir par le fonctionnaire qui souhaite contester une décision administrative. Ce sont: soit une demande de révision d'une décision administrative par le Vice président, CSVP, soit une demande de conciliation par le Médiateur. 11 Quelle que soit la procédure de recours choisie par le membre du personnel, l'étape suivante qui consiste à interjeter appel auprès du Comité d'appel du Personnel est obligatoire. Le Défendeur renvoie également le Tribunal à sa propre jurisprudence concernant l'alinéa a) de la disposition 103.04 du Règlement du Personnel. Statuant sur les requêtes N 1999/04 05 06, le Tribunal a rejeté les requêtes au motif que les voies de recours administratif disponibles n'avaient pas été épuisées. En conséquence, le Défendeur considère la requête comme prématurée et irrecevable, et demande au Tribunal de la rejeter. 12 10. Enfin, le Défendeur demande au Tribunal de rejeter la requête parce que la Requérante a omis ou négligé de révéler un accord à l'amiable conclu avec la Banque le 27 novembre 2013, dans le cadre d'un processus de conciliation mené par le Médiateur. Par conséquent, cet accord ayant été conclu après qu'elle ait déposé sa requête auprès du Tribunal, le 22 octobre, 2013, il a eu pour effet d'éteindre la plainte. 13 La Requérante 11. La Requérante conteste l'exception d'irrecevabilité de sa requête. Elle argue que d après les alinéas a) et b) de la disposition 103.01 du Règlement du Personnel, le Comité d'appel du Personnel "n'a pas compétence pour connaître des décisions administratives telles celle prise à mon endroit, à savoir une résiliation de contrat sans préavis". En outre, selon elle, "la décision ne concernait pas une cessation de service pour performance non satisfaisante, comme mentionné à l'alinéa (a) de la disposition 103.01 du Règlement du Personnel, pas plus qu'elle ne concernait le refus ou la suspension d un avantage, une promotion ou une augmentation de salaire au mérite, une mutation Ainsi, étant donné que la raison invoquée pour le licenciement était l'abandon de poste, la saisine du Comité d'appel du personnel était impossible. 14 Elle précise que la résiliation a eu lieu sans préavis, par une lettre qui a été signifiée le 20 août 2013. 15 12. La Requérante argue que l'alinéa a) de l'article 10.3 du Statut du Personnel mentionne un mécanisme interne mais ne cite pas spécifiquement le Comité d'appel du personnel. Ainsi, les références aux appels d'une mesure disciplinaire en application des alinéas b) et c) de l'article 10.3 du Statut du Personnel sont susceptibles d'un recours directement auprès du Tribunal 10 Exception d'irrecevabilité, paragraphes 21 22 11 Exception d'irrecevabilité, paragraphe 23 12 Exception d'irrecevabilité, paragraphes 26 27, 29 30 13 Exception d'irrecevabilité, paragraphes 27, 31 14 Objection de la Requérante à l'exception d'irrecevabilité, pages 1 et 2 15 Objection de la Requérante à l'exception d'irrecevabilité, paragraphes 11 3

administratif, en vertu de la disposition 102.09 du Règlement du Personnel. Constatant que cette disposition ne mentionne aucun autre organe ou institution, elle conclut qu'il était donc logique qu'elle saisisse directement le Tribunal. 16 13. La Requérante déclare en outre : "Je confirme que le processus de conciliation a été conclu le 27 novembre 2013 mais réfute l'affirmation du Défendeur selon laquelle la question aurait été réglée 17. Toutefois, bien qu'elle ait tacitement admis l'existence d'un processus de conciliation, elle affirme que la question n'a pas été réglée par l'accord auquel a abouti ce processus. Par ailleurs, même si elle devait soumettre son dossier au Comité d'appel du Personnel, les délais impartis pour ce faire avaient expiré. 18 Enfin, elle affirme que, en l'espèce, même si les délais pour saisir le Comité d'appel du Personnel étaient expirés, le fait que "..la décision administrative soit assortie d'une 'absence de préavis" avait pour effet d'ôter toute compétence au Comité d'appel du Personnel en la matière. 19 III. LES DEMANDES DES PARTIES Le Défendeur 14. Le Défendeur demande le rejet de la requête pour irrecevabilité au motif que toutes les voies de recours internes disponibles n'ont pas été épuisées. Le Défendeur ajoute qu un règlement amiable a eu lieu, ce qui, à son avis, met fin à la plainte. La Requérante 15. La Requérante demande que sa requête soit entendue et jugée au fond. IV. LE DROIT 16. Le Tribunal doit, en premier lieu, statuer sur l exception d irrecevabilité soulevée par le Défendeur. 17. Pour soutenir son point de vue sur l irrecevabilité de la requête, le Défendeur se fonde sur la règle de l épuisement des voies de recours interne, prévue par l article 3 1 et 2 du statut du Tribunal administratif, ainsi que par la Disposition 103. 04 du Règlement du personnel. La Disposition 103. 04 qui renvoie expressément à l Article 10. 3 du Statut du personnel intitulé «règlement des différends», prévoit, au choix du requérant, et avant toute action devant le Tribunal administratif, soit une procédure de révision devant le Vice président, soit une procédure de conciliation devant le Médiateur, suivies d un recours devant le Comité d appel du personnel, si besoin en est. 18. Le Tribunal tient à souligner que l ensemble de ces procédures s applique, comme le stipule l Article 10.3 du Statut du personnel, en matière de règlement des différends relatifs aux 16 Objection de la Requérante à l'exception d'irrecevabilité, paragraphes 16 et 20 17 Objection de la Requérante à l'exception d'irrecevabilité, paragraphes 17 and 21 18 Objection de la Requérante à l'exception d'irrecevabilité, paragraphe 27 19 Objection de la Requérante à l'exception d'irrecevabilité, paragraphes 11 et 18; annexe 2 de l'objection de la Requérante à l'exception d'irrecevabilité 4

«droits et indemnités contractuelles ou le développement de leur carrière». L Article 10.3 du Statut du personnel et les dispositions subséquentes du Règlement du personnel concernent les différends et requêtes relatifs au contrat d engagement ou aux conditions d emploi des fonctionnaires (art. 10.3.c). Il s agit par conséquent des litiges de nature contractuelle relatifs à l interprétation ou à l exécution du contrat d engagement qui lie la Banque et le fonctionnaire. 19. Le Tribunal doit par conséquent examiner si le cas présent rentre dans la catégorie prévue par l Article 10.3 du Statut du personnel pour pouvoir être soumis à l obligation de l épuisement des voies de recours interne. 20. La décision contestée dans la présente espèce, comme l admet le Défendeur lui même dans sa lettre de résiliation du 20 août 2013, est soumise aux Dispositions 33.04 et 610.04 du Règlement du personnel concernant les absences non autorisées. La Disposition 33.04 (a) précise que l absence non autorisée «est passible de sanctions disciplinaires». Quant à la Disposition 33.04 (b), elle précise qu une absence non autorisée dépassant une période de 10 jours ouvrables consécutifs est considérée comme un abandon de poste. 21. La Disposition 610.04 intitulée «cessation de service pour abandon de poste» précise au point (a) qu en cas d abandon de poste résultant d une absence égale ou supérieure à 10 jours ouvrables consécutifs: «l engagement du membre du personnel est donc réputé avoir été résilié». En conséquence, comme le précise le point (b) «un avis de licenciement sans préavis lui est adressé à sa dernière adresse connue». 22. De l ensemble de ces dispositions, deux conclusions fondamentales doivent être tirées : la première, c est qu en cas d absence non autorisée, la Banque est en droit de prendre les mesures disciplinaires qui s imposent. Cela veut dire qu en matière disciplinaire il faut revenir aux Dispositions du chapitre 10 du Statut du personnel concernant les «mesures disciplinaires, recours, indemnisation et responsabilité». La deuxième conclusion c est que dans les cas les plus graves, c est à dire les cas d absence non autorisée égale ou supérieure à 10 jours ouvrables et constitutive d abandon de poste, l Administration est en droit, sans passer par le mécanisme ordinaire du Comité de discipline prévu par le Chapitre 10 du Statut, de prononcer la peine disciplinaire la plus forte qui est la résiliation du contrat sous la forme d un licenciement sans préavis ni indemnité, comme le précise la Disposition 610.04 (c) du Règlement du personnel. 23. Or, les recours en matière disciplinaire sont soumis à la Disposition 102.09 du Règlement du personnel d après laquelle : «Tout membre du personnel contre qui une mesure disciplinaire a été prise a le droit de faire appel de cette mesure et peut former son recours auprès du Tribunal administratif dans un délai de 60 jours à compter de la date de notification de la mesure disciplinaire.» Il s en suit que le recours préalable devant le Comité d appel du personnel n est pas applicable en matière disciplinaire, mais uniquement dans les litiges mettant en cause l interprétation ou l exécution des clauses contractuelles qui lie la Banque à ses fonctionnaires. Ce principe est expressément confirmé par la Disposition 103.01 relative au Comité d appel du personnel. Le point (c) de cette Disposition précise en effet que : «le Comité d appel du personnel n est pas compétent pour connaître des affaires suivantes : (iii) appel contre une mesure disciplinaire, y compris le licenciement sans préavis.» 5

24. La décision litigieuse du 20 août 2013 ayant un caractère disciplinaire, il en résulte que, contrairement à ce que prétend le Défendeur, le recours au Comité d appel du personnel n est pas applicable en la présente espèce. 25. En conséquence, l exception d irrecevabilité soulevée par la Banque pour non épuisement des voies de recours interne doit être rejetée. 26. Au paragraphe 28 de son mémoire sur l exception d irrecevabilité et à titre de «complément d information», le Défendeur soutient qu un accord à l amiable a été conclu entre la Requérante et le Défendeur le 27 novembre 2013. Le Défendeur estime par conséquent que cet accord : «a mis fin à la plainte». La Requérante conteste l existence d un tel règlement. 27. Cependant, en l état actuel de l instruction du dossier, ce point ne peut être ni examiné, ni tranché. Il sera examiné au cours de la prochaine session du Tribunal administratif et si nécessaire, le Tribunal passera à l examen du fond. V. LA DÉCISION 28. Pour ces motifs, le Tribunal décide : 1. L exception d irrecevabilité soulevée par le Défendeur est rejetée. 2. Au cours de la prochaine session, le Tribunal décidera si un accord a été effectivement atteint entre les parties, mettant ainsi fin à la réclamation. 3. Le Tribunal ordonne la reprise de la procédure écrite. 4. Le Défendeur est invité à soumettre sa réponse au fond dans un délai de trente (30) jours à compter du prononcé du présent jugement. Yadh BEN ACHOUR Président Albertine LIPOU MASSALA Secrétaire exécutif LA REQUÉRANTE N. K. CONSEIL DU DÉFENDEUR Kalidou GADIO Almaz TADESSE Fathallah EL GUERNAOUI Conseiller juridique général Chef de division Conseiller juridique principal 6