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rencontre du non-lineaire 2002 1 Intermittence des instabilités petite échelle dans la convection de Rayleigh-Bénard forcée par un écoulement cisaillant V. Vidal, C. Crambes et A. Davaille Laboratoire de Dynamique des Systèmes Géologiques Institut de Physique du Globe 4 place Jussieu, 75252 Paris Cedex 05, France vidal@ipgp.jussieu.fr Résumé La convection petite échelle apparaît sous une couche limite thermique froide lorsque le nombre de Rayleigh local excède une valeur critique Ra δ [1]. Son interaction avec un écoulement cisaillant est étudiée expérimentalement dans une cuve chauffée par une paroi latérale et refroidie par le dessus. Deux échelles de mouvement sont observées: une cellule de convection grande échelle sur l ensemble de la cuve et, pour un nombre de Rayleigh suffisamment élevé, un mouvement de convection petite échelle. Ces instabilités sont piégées dans la zone de cisaillement et suivent un chemin hélicoïdal dont l axe est orienté dans la direction du cisaillement. La présence de ces instabilités sous la lithosphère terrestre serait en mesure d expliquer certaines observables géophysiques telles que la présence de linéations à courte longueur d onde dans le champ de gravité terrestre. 1 Introduction La tectonique des plaques est une preuve de la convection thermique du manteau terrestre. Lesplaques quise forment puis s éloignentdes dorsales océaniques, et enfin plongent dans le manteau supérieur au niveau des zones de subduction sont les couches limites thermiques associées à la plus grande échelle de la convection mantellique. Lorsqu un fluide est refroidi par le dessus, il va développer des instabilités de type Rayleigh-Bénard àlabasede la couche limite thermique supérieure froide. Cette convection petite échelle est susceptible de se produire lorsque la partie supérieure du manteau terrestre se refroidit en s éloignant de la dorsale. Elle se superpose alors au mouvement grande échelle de la tectonique des plaques. En présence d un cisaillement horizontal, la convection de Rayleigh-Bénard tend à s organiser pour minimiser l interférence convective avec le mouvement à grande échelle, formant des rouleaux de convection longitudinaux, ou rouleaux de Richter [1, 2, 3]. Les mécanismes de ce phénomène sont cependant encore mal connus. Nous avons étudié expérimentalement l interaction entre la convection à petite échelle qui se développe sous une couche limite thermique froide avec un écoulement cisaillant, pour des fluides à haut nombre de Rayleigh. 2 Dispositif expérimental Nos expériences sont réalisées dans deux cuves en plexiglas de dimensions 30 30 10 cm et 40 30 20 cm (longueur, largeur et hauteur respectivement). La paroi supérieure et l une des parois verticales latérales sont des plaques de cuivre maintenues àtempérature constante (on refroidit et on chauffe respectivement) par des bains thermostatés (Fig.1). c Non Linéaire Publications, Bât.510, Université de Paris-sud, 91405 Orsay

2 V. Vidal, C. Crambes et A. Davaille Le fond de la cuve correspond à une condition limite adiabatique, ou est maintenu àla même température froide que la plaque supérieure selon la cuve utilisée. Différents types de T sup laser λ=532nm lentille cylindrique plan de lumière observation T lat T inf ou condition adiabatique Fig. 1 Dispositif expérimental. Le plan de lumière laser peut être vertical ou horizontal, et la visualisation des isothermes se fait également dans un plan vertical parallèle àla plaque verticale chaude (à 90 du schéma ci-dessus). fluides ont été utilisés dans nos expériences: des mélanges d eau et d hydroxyéthylcellulose (polymère de viscosité constante), des sirops de sucre (forte dépendance en température de la viscosité) et de la cire (présentant une transition de phase, i.e. un saut de viscosité infini). Les nombres de Rayleigh sont compris entre 10 4 et 10 8, et les nombres de Prandtl sont grands (> 1000). Des profils de température verticaux sont enregistrés au cours du temps à l aide d une canne de thermocouples pouvant être placée à différentes distances de la plaque verticale chaude. Nous utilisons également une technique de visualisation non perturbative : des cristaux liquides micro-encapsulés sont introduits en petite quantité dans le fluide étudié. Cette méthode, développée à l origine pour observer le champ de température par éclairage en lumière blanche et analyse du spectre [4], est ici améliorée. On éclaire la cuve par un plan de lumière monochromatique (laser solide Nd:YVO 4, λ=532nm), ce qui permet de ne visualiser qu une isotherme bien particulière, correspondant aux propriétés optiques des cristaux liquides introduits. On atteint ainsi des précisions de l ordre de 0.1 C. Quatre types de cristaux liquides sont utilisés, permettant de visualiser les isothermes 10 C, 24 C, 31 Cet40 C. Toutes les observations sont faites dans le régime stationnaire. 3 Les deux échelles de convection La première observation est la présence d un rouleau de convection grande échelle, d axe parallèle à la plaque latérale chaude, avec présence d un coeur de température constant T m au centre de ce rouleau. Une étude expérimentale par interférométrie différentielle dans un cas similaire [5] prédit une dépendance de w/h, où w est la largeur du rouleau de convection grande échelle et h la hauteur de la cuve, en Ra σ lat. Ra lat désigne icilenombrederayleighlatéral Ra lat = αg(t lat T sup )h 3 /κν, où α est le coefficient de dilatation thermique, g l accélération de la pesanteur, κ la diffusivité thermique et ν la viscosité cinématique. σ est un coefficient déterminé expérimentalement. Cette relation empirique prévoit la formation d un unique rouleau de convection grande échelle dans toutes nos expériences, ce que l on observe effectivement. Cependant, on observe également

Instabilités petite échelle en convection forcée par un écoulement cisaillant 3 dans certains cas la formation d un rouleau secondaire, près de la plaque verticale chaude. Ce rouleau correpond toujours à l ordre 0 de la convection, au même titre que le rouleau grande échelle étendu sur l ensemble de la cuve. Il apparaît lorsque le nombre de Rayleigh latéral dépasse une valeur critique de 8.10 5 (Fig.2a). 10 1 (a) 30 (b) m=1 a=3 a=2 25 w/h 10 0 Tlat-Ti [ o C] 20 m=1 10-1 15 10-2 10 5 10 6 10 7 10 8 Ra lat 10 10 1 10 2 10 3 10 4 10 5 10 6 10 7 10 8 Ra z Fig. 2 Caractéristiques de la convection grande échelle. (a) Régime de formation d un rouleau secondaire pour des expériences réalisées dans la cuve de rapport d aspect a=3 avec des mélanges d hydroxyéthylcellusole (étoiles) et dans la cuve de rapport d aspect a=2 avec des mélanges d hydroxyéthylcellulose (croix), du sirop de glucose (carrés) et du sirop de sucre inverti (losanges). (b) Vérification de la loi de similitude: pour le sirop de glucose, très visqueux (carrés), on a toujours m<1 (pas de rouleau près de la couche limite verticale); un sirop de sucre moins visqueux (losanges) montre une déstabilisation de la couche limite thermique verticale, avec formation d un rouleau de convection supplémentaire (m >1). On peut expliquer sa formation par la déstabilisation de la couche limite latérale, due à une stratification de l environnement suffisamment importante pour forcer un écoulement vers le bas dans la partie extérieure de la couche limite [6]. Les équations de couche limite pour une convection 2D proche d une paroi verticale s écrivent: uw x + ww z = νw xx + αg(t Ti) ut x + wt z = κt xx où u et w sont les composantes de la vitesse selon les directions horizontale x et verticale z respectivement, T la température locale et T i (z) latempérature du fluide ambiant [7]. La température du fluide ambiant peut être écrite comme T i = T lat TRa m z où T = T lat T sup est l échelle caractéristique de température et Ra z = αg Tz 3 /κν le nombre de Rayleigh local. L introduction de la variable de similitude ξ = Ra 1/4(1 m) z x/z et de la fonction courant ψ telle que u = ψ z et w = ψ x montre que ψ augmente avec z pour 0 m<1etdécroît avec z pour m>1 [6]. La figure 2b montre l évolution de (T lat T i ) en fonction de Ra lat : le rouleau de convection secondaire (pour la convection à l ordre 0) apparaît lorsque la pente excède la valeur critique m = 1. C est donc la déstabilisation de

4 V. Vidal, C. Crambes et A. Davaille la couche limite associée à la paroi verticale chaude qui est responsable de sa formation. Le rouleau secondaire précédemment décrit reste cependant limité à une région proche de la plaque verticale, et ne semble pas modifier le comportement des autres échelles de convection. Pour des nombres de Rayleigh suffisamment grands, des instabilités à petite échelle se forment sous la couche limite supérieure froide à une distance x f de la plaque verticale chaude, et sont cisaillées par l écoulement grande échelle. Elles correspondent aux instabilités classiques de Rayleigh-Bénard, qui se développent sous une couche limite thermique froide [8]. Elles apparaissent quand le nombre de Rayleigh local dans la couche limite thermique instable atteint une valeur critique Ra δ = αg(t m T )δ 3 i /κν m [8]. Deux régimes ont été observés. Dans le premier régime, les instabilités sont piégées dans la zone de cisaillement et s enroulent en formant les rouleaux de Richter. Dans le deuxième régime, visible lorsque la vitesse de cisaillement est plus faible, le champ de température n est pas stationnaire au cours du temps, mais reflète le décrochement périodique de panaches froids qui se font emporter par l écoulement grande échelle sans s enrouler. 10-1 (a) 10 9 (b) λ=δ c 8 τ/(h 2 /κ) 10-2 10-3 10-4 10-5 10 4 10 5 10 6 Ra 10 7 10 8 Longueur d'onde λ (cm) 7 6 5 4 3 2 1 0 0 2 4 6 8 10 Epaisseur de la zone de cisaillement δ c (cm) Fig. 3 Périodicité de la convection petite échelle. (a) temporelle : τ Ra 0.81 ;ladroite en pointillés correspond à τ Ra 2/3. (b) spatiale : la longueur d onde des corrugations est directement proportionnelle àl épaisseur de la zone cisaillante δ c. L étude de la périodicité τ de formation de ces instabilités montre que : τ = d2 πκ ( ) 2 Rac 3 Ra Cette relation est vérifiéeexpérimentalement (Fig.3a). Ces instabilités présentent également une périodicité spatiale : leur longueur d onde est directement proportionnelle à la largeur de la zone de cisaillement δ c (Fig.3b). 4 Etude statistique des séries temporelles L étude de l asymétrie de la dérivée temporelle de la température est une méthode utilisée pour caractériser les fluctuations générées par la propagation de fronts thermiques

Instabilités petite échelle en convection forcée par un écoulement cisaillant 5 en turbulence dure [10]. Ce régime particulier de turbulence se caractérise par la présence d un écoulement grande échelle cohérent dans la cellule de convection, auquel se superpose les instabilités générées par le gradient vertical de température. Il est donc intéressant de faireleparallèle avec des expériences en écoulement cisaillant forcé. L asymétrie moyenne de la dérivée de la température est mesurée par sa skewness S,définie par: ( T ) 3 S = ( T t t ) 2 3/2 Contrairement au régime de turbulence dure, la dérivée de la skewness en convection forcée par un écoulement cisaillant ne présente pas la forme caractéristique d un front thermique. L enroulement des instabilités petite échelle dans la direction longitudinale (front thermique montant puis descendant) empêche toute caractérisation de ces instabilités par l étude de l asymétrie moyenne de l écoulement à une distance donnée de la plaque verticale chaude. On peut cependant calculer le minimum du paramètre τ θ,échelle de temps thermique définie par (T T ) 2 1/2 τ θ = ( T ) 2 1/2 t 21 10-2 20 T [ o C] 19 18 17 τ θ min /(L 2 /κ) 10-3 16 10-4 15 et fonction de la distance à la plaque froide supérieure [10]. Cette quantité, adimensionnée par le temps de diffusion thermique pour la cuve (h 2 /κ), correspond à l inverse de la puissance dissipative Q [11]. Même si la structure cohérente des fluctuations ther- 14 450 500 550 600 650 700 750 t [min] 10-5 10 5 10 6 Ra 10 7 10 8 Fig. 4 Etude statistique des séries temporelles. (a) Exemple de signal de température. (b) Echelle de temps thermique normalisée par le temps de diffusion. La droite en trait plein correspond à Ra 0.71, celle en pointillé à Ra 2/3. miques n est pas analogue au régime de turbulence dure, on retrouve cependant la loi d échelle τ θmin Ra 2/3. Ce comportement semble donc indépendant de la structure de l écoulement (rouleaux ou panaches turbulents), et caractéristique des instabilités thermiques de couche limite.

6 V. Vidal, C. Crambes et A. Davaille 5 Conclusion et implications géophysiques Nos expériences cherchent à caractériser de manière précise le comportement des instabilités qui se développent sous une couche limite thermique froide, lorsqu elles sont cisaillées par un écoulement à plus grande échelle. Ces instabilités sont périodiques dans l espace (rouleaux longitudinaux) et dans le temps. L analogie avec la convection dans le manteau terrestre ne peut se faire qu à condition que la vitesse dans l asthénosphère soit plus grande que la vitesse dans la lithosphère. Cette condition peut être remplie soit par l existence d une expansion latérale liée à une dorsale océanique, soit par la présence d un panache mantellique (point chaud). Si tel est le cas, nos expériences montrent qu une convection petite échelle peut se développer sous la lithosphère, et rester piégée dans l asthénosphère. Elle forme alors des rouleaux de Richter, d axe parallèle au mouvement des plaques, qui auraient une longueur d onde de 150-300 km. Ce phénomène est susceptible d être à l origine des linéations de courte longueur d onde (quelques centaines de kilomètres) observées dans les anomalies du géoïde et du champ de gravité dans certaines régions du Pacifique [12]. Références [1] E. Palm, Nonlinear thermal convection, Ann. Rev. Fluid Mech. 7, 39-61 (1975). [2] F.M. Richter, Convection and the large-scale circulation of the mantle, J. Geophys. Res., 78, 35, 8735-8745 (1973). [3] F.M. Richter, B. Parsons, On the interaction of two scales of convection in the mantle, J. Geophys. Res. 80, 2529-2541 (1975). [4] D. Dabiri, M. Gharib, Digital particle image thermometry: the method and implementation, Exp. Fluids 11, 77-86 (1991). [5] H.-C. Nataf, C. Froideveaux, J.L. Levrat, M. Rabinowicz, Laboratory convection experiments: effects of lateral cooling and generation of instabilities in the horizontal boundary layers, J. Geophys. Res. 86, 6143-6154 (1981). [6] M.G. Worster, A.M. Leitch, Laminar free convection in confined regions, J. Fluid Mech. 156, 301-319 (1988). [7] J.S. Turner, Buoyancy effects in fluids, Cambridge University Press (1973). [8] A. Davaille, C. Jaupart, Transient high-rayleigh-number thermal convection with large viscosity variations, J. Fluid Mech. 253, 141-166 (1993). [9] L.N. Howard, Convection at high Rayleigh number, Proceedings of the 11th International Congress of Applied Mechanics, 1109-1115 (1964). [10] A. Belmonte, A. Libchaber, Thermal signature of plumes in turbulent convection: the skewness of the derivative, Phys. Rev. E, 53, 5 (1996). [11] I. Procaccia, E.S.C. Ching, P. Constantin, L. Kadanoff, A. Libchaber, X.Z. Wu, Transition in convective turbulence: the role of thermal plumes, Phys. Rev. A. 44, 8091 (1991). [12] W.F. Haxby, J.K. Weissel, Evidence for small-scale mantle convection from SEASAT altimeter data, J. Geophys. Res. 91, 3507-3520 (1986).