Comprendre les régimes totalitaires du xx e siècle FICHE 14 Trois exemples : l Italie fasciste, l Alle magne nazie et l URSS stalinienne. I. Les notions essentielles Totalitarisme Notion imprécise, employée pour caractériser certaines formes de dictature ayant des caractéristiques communes. Dans les dictatures de type totalitaire, il y a enrégimentement des masses dans les organisations officielles, emploi systématique de la terreur physique et psychologique ; l autoritarisme de l État s exerce dans les domaines de la vie publique des individus mais s immisce aussi dans leur vie individuelle, familiale, professionnelle et spirituelle. Ce type de dictature veut la soumission totale de l individu à l État et à l idéologie au pouvoir. Il a pour projet de fabriquer un homme nouveau et surtout une société homogène et libérée de ses «ennemis», contre lesquels une guerre totale est menée. L individu est nié et la collectivité magnifiée. Dictature Tous les pouvoirs sont concentrés dans les mains d un seul homme (le dictateur) ou d un groupe (l armée, le parti unique ). La dictature s installe et se maintient par la force. Elle est autoritaire et arbitraire dans tous les domaines de la vie publique : pas de partis d opposition, de journaux d opposition, de libertés de réunion, d association Mais la dictature ne se préoccupe pas de l individu dans sa vie privée ; elle ne porte pas le projet «révolutionnaire» de construction d un homme nouveau, d une société nouvelle. Le totalitarisme est à opposer à la démocratie Revoir la notion de démocratie (Fiche 1). Les démocraties s opposent aux régimes totalitaires, car elles sont pluralistes (pluralité des opinions, des partis et des associations) et libérales (grandes libertés publiques et individuelles, et liberté économique). Dans une démocratie, l individu n est pas nié et ses droits sont au contraire garantis. Idéologie d État ou idéologie officielle Système de croyances et de valeurs qui prétend expliquer le monde, lui donner un sens et qui, dans le cas des régimes totalitaires, porte Les régimes totalitaires au XX e siècle Histoire 31
le projet de construire un homme nouveau, une société nouvelle. Les régimes totalitaires se caractérisent par le recours systématique à une idéologie officielle et unique, car elle justifie l action politique autoritaire menée par l État. L idéologie est au cœur du système totalitaire, elle y tient une place centrale. Le dirigisme économique Nom donné aux politiques économiques des pays totalitaires et capitalistes, lorsqu elles sont marquées par une intervention nette de l État dans la vie économique. II. Vocabulaire Fascisme, nazisme, stalinisme. Partis uniques : PNF en Italie, NSDAP en Allemagne, PCUS en URSS. Administrations policières : OVRA en Italie, Gestapo en Allemagne, NKVD en URSS. III. Repères chronologiques Année et étapes d arrivée au pouvoir des trois dictateurs (Mussolini, Hitler, Staline). L État où ils exercent ce pouvoir. Année et circonstances de la perte du pouvoir. IV. Repères spatiaux Savoir localiser sur une carte de l Europe les trois États totalitaires étudiés (voir Repère 1 : l Europe en 1942). V. Des sujets pour s entraîner En quoi l Italie fasciste est-elle totalitaire? En quoi l Allemagne nazie est-elle totalitaire? En quoi l URSS de Staline est-elle totalitaire? 32 Histoire Les régimes totalitaires au XX e siècle
L idéologie dans les régimes totalitaires FICHE 15 Au-delà des différences profondes qui séparent les idéologies fasciste, nazie et stalinienne, quelles sont leurs caractéristiques générales communes? I. Au cœur des régimes totalitaires : l idéologie A. L idéologie est globalisante et simplificatrice Elle propose un système de valeurs, de croyances, qui donne un sens au monde. Elle a sa logique propre. Tout est expliqué conformément à la doctrine et tout s explique par quelque chose de simple, voire d unique, ce qui dispense d un effort d analyse et de critique. Élément d explication central : l ennemi «total», celui par qui tous les maux arrivent, celui qu il faut abattre pour assurer la survie et la cohésion du groupe social. B. L idéologie est justificatrice, officielle et unique L État se sert d elle pour justifier son action politique. L État se réclame d elle pour faire agir les individus, quelle que soit l action et quel qu en soit le prix. L État ne tolère donc pas d idéologies concurrentes ; celle prônée par l État est doctrine unique et officielle. C. L idéologie relève plus du domaine de la foi que du raisonnement Aspect quasi religieux : culte civique organisé autour du chef, liturgie de cérémonies très ritualisées (drapeaux, parades, défilés) avec leurs mythes, leurs héros. De cette sacralisation découlent le sens du sacrifice et la valorisation de la mort pour l idéologie. II. Des objectifs communs A. La construction d un homme nouveau Tous les moyens (école, sport et préparation militaire, organisations de jeunesse, art et même guerre) sont utilisés pour ce projet d homme nouveau. L individu doit se couler dans un moule unique. Les régimes totalitaires au XX e siècle Histoire 33
B. La construction d une société nouvelle Seul le groupe, le collectif importe : l individu est nié. L objectif final est la réalisation d une société totalement homogène et cohérente. III. Des différences cependant A. Des fondements idéologiques différents L idéologie fasciste est fondée sur l État tout-puissant et la nation ; l Italie est destinée à diriger l humanité. L idéologie nazie est fondée sur la race et la nation : le peuple allemand, représentant le plus pur de la race aryenne ou «race des seigneurs» doit, par la violence, assurer le maintien et l amélioration de sa pureté raciale, et se doter d un espace vital nécessaire à sa survie et à sa domination. L URSS stalinienne propose une idéologie, inspirée du marxisme, fondée sur la suppression des classes sociales et l avènement du prolétariat (ce projet passe par une transformation radicale des structures, ce qui suppose une phase transitoire de dictature et de violence. Ce nouveau modèle d organisation sociale et économique est destiné à vaincre le capitalisme et à s étendre au monde entier). B. Un ennemi «total» différent En Italie, c est l Italien réfractaire à la culture de la supériorité nationale, de la guerre et de la bonne race (racisme et antisémitisme se développent à partir de 1936). En Allemagne nazie, c est le juif, qui peut «polluer» la race aryenne et qu il faut d abord écarter puis éliminer physiquement. La spécificité profonde de ce régime est d avoir voué son ennemi, le juif, à la disparition parce que juif ; le point d aboutissement en a été la chambre à gaz. En URSS, l ennemi du peuple est le bourgeois et le koulak (paysan aisé) qui s opposent à la réalisation du projet d une société sans classes. L ennemi est condamné pour son origine sociale et le point d aboutissement est le Goulag. Ces idéologies totalitaires n ont pas réussi à modeler un homme nouveau et une société nouvelle. Mais, hélas l expérience en a été tentée aux prix d atrocités pour les populations concernées. 34 Histoire Les régimes totalitaires au XX e siècle
FICHE 16 États et sociétés dans les régimes fasciste, nazi et stalinien Au-delà des particularités profondes des idéologies fasciste, nazie et stalinienne, quelles sont les caractéristiques communes concernant les pratiques de gouvernement et les sociétés? I. Pratiques communes des États totalitaires A. Un chef charismatique Le chef est la clef de voûte de l État totalitaire : Un culte, destiné à mobiliser la population, est développé autour de lui : il est duce en Italie, Führer en Allemagne. Le chef concentre entre ses mains tous les pouvoirs (exécutif, législatif, militaire) et son autorité est sans limite. Le chef est infaillible : sorte de surhomme paré de toutes les qualités, ses décisions sont incontestables. B. Un État partisan Un parti unique domine la vie politique, économique et sociale : PNF (Italie), NSDAP (Allemagne) ou PCUS (URSS). Ce parti transmet l idéologie, encadre et surveille la population. L État est antilibéral (contre les libertés). L État est antiparlementaire. Il y a bien des élections au suffrage universel mais un seul parti, sans liberté de presse, ni de réunion : les consultations électorales tournent au plébiscite. C. Un État centralisé L État central organise tout et dirige tout, y compris en URSS où le fédéralisme est en principe conservé. D. Un État qui a le monopole De l information : l État censure, manipule et désinforme. Presse, radio, cinéma sont sous contrôle. De l économie : elle doit travailler à la réalisation du projet idéologique décidé par l État qui dirige l économie. C est vrai pour l Italie et l Allemagne, où l État oriente les entreprises vers la production d armes et l autarcie. C est encore plus vrai pour l URSS, où l économie est entièrement collectivisée et planifiée. Les régimes totalitaires au XX e siècle Histoire 35
II. Caractéristiques communes des sociétés A. La société est encadrée et embrigadée La jeunesse est endoctrinée et embrigadée dans des organisations contrôlées par le parti (Balilla en Italie, Jeunesses hitlériennes en Allemagne, Pionniers en URSS). Les adultes sont encadrés par le parti, les syndicats du régime, les organisations sportives et de loisirs. B. La société est soumise, voire séduite La société est soumise à une propagande de masse sous contrôle de l État : presse, affiches, films, fêtes, parades, tout est calculé pour susciter l émotion. La séduction est l un des rouages importants de ces régimes qui misent sur une adhésion des masses à leur projet. Pour cela, ces régimes assurent travail et loisirs. C. La société est terrorisée Par une justice aux ordres du pouvoir. Par une police politique toute-puissante : OVRA en Italie, Gestapo en Allemagne et NKVD en URSS. Par un système concentrationnaire pour les ennemis du régime (en Allemagne : les camp de concentration puis les camps d extermination pour les juifs ; en URSS, les goulags ; c est moins vrai en Italie, où le totalitarisme reste inachevé). D La société est conditionnée à la guerre et au sacrifice La guerre est valorisée. On prépare la société et surtout la jeunesse dans des organisations paramilitaires développant sens de l obéissance et esprit de sacrifice. L esprit guerrier gagne tous les secteurs d activité : ainsi, les objectifs économiques sont des batailles à gagner. La guerre à mener est une guerre totale devant mobiliser toutes les énergies du pays. Tout, bataille de la production, guerre extérieure, lutte contre l ennemi intérieur, est pensé sous forme de lutte à mort. Ces points communs furent à l origine de la notion de «totalitarisme». Mais il faudrait plutôt parler d «évolution totalitaire» pour certaines dictatures car, à réduire l étude à leurs points communs, on gomme trop leurs spécificités. 36 Histoire Les régimes totalitaires au XX e siècle
Comprendre la Seconde Guerre mondiale FICHE 17 Il faut connaître les causes et les grandes phases de la guerre en insistant sur l univers concentrationnaire. Le bilan permettra d analyser les ébranlements provoqués par le conflit. I. Les notions essentielles Génocide Il consiste en l extermination d un groupe humain. Les nazis ont tenté d éliminer les juifs et les tziganes (ghettos, massacres, camps). La Solution finale a été présentée lors de la conférence de Wannsee, en janvier 1942, par Heydrich. Le terme d Holocauste fait référence à l extermination des juifs ; Shoah signifie «catastrophe» en hébreu. Crime contre l humanité Notion élaborée lors du procès de Nuremberg (1945-1946). C est «l assassinat, l extermination, la réduction en esclavage, la déportation et tout acte inhumain commis contre toutes les populations civiles, avant ou pendant la guerre, ou les persécutions pour des motifs politiques, raciaux ou religieux». Ce crime est imprescriptible. Ce procès marque l ébauche d un droit international. Révisionnisme, le négationnisme Le révisionnisme est une démarche à prétention historique qui vise à nier l existence des chambres à gaz et à relativiser le génocide des juifs. Les historiens utilisent le terme de négationnistes pour désigner ceux qui affirment que les camps d extermination n étaient que des lieux de désinfection de vêtements et qui considèrent le génocide comme un coup monté au profit des juifs contre les Allemands et les Palestiniens. Devoir de mémoire Le décret du 3 juillet 1993 a institué le 16 juillet (en souvenir de la rafle du Vel d hiv à Paris le 16 juillet 1943) «journée nationale commémorative des persécutions racistes et antisémites commises entre 1940 et 1945». Nous devons transmettre la mémoire de ces événements. La Seconde Guerre mondiale Histoire 37
II. Vocabulaire Armistice, Axe, collaborationniste, collaborateur, camp de concentration, camp d extermination, CNR, drôle de guerre, Gestapo, GPRF, guerre-éclair, guerre totale, France libre, ligne Maginot, maquis, milice, Ordre nouveau, rafle, Résistance, Solution finale, STO. III. Repères chronologiques Sur une frise chronologique, savoir placer les événements suivants : Armistice entre la France et l Axe, opération Barberousse, attaque de Pearl Harbour, l opération Torch, débarquement de Normandie, libération de Paris, conférence de Yalta, capitulation allemande, capitulation japonaise, bombes atomiques sur Hiroshima et Nagasaki, conférence de Bretton Woods, conférence de San Francisco. Situer les hommes suivants par rapport à un événement : De Gaulle, Pétain, Laval, Churchill, Roosevelt, Jean Moulin. IV. Repères spatiaux Savoir localiser les lieux suivants sur une carte : Gibraltar, Normandie, El Alamein, Stalingrad, Vichy. V. Sujets pour s entraîner (en plus des trois abordés) Les causes de la Seconde Guerre mondiale. Les grandes phases de la Seconde Guerre mondiale. La Seconde Guerre mondiale, une guerre totale. Collaboration et Résistance. La France pendant la Seconde Guerre mondiale. 38 Histoire La Seconde Guerre mondiale