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Transcription:

1. INTITULE DU PROJET Archéologie expérimentale : construire en pierre dans l Antiquité Responsable(s) scientifique(s) du projet ZUGMEYER Stéphanie BADIE Alain (IRAA-CNRS) SUCAL Marc LAHARIE Marie-Laure (LAMM-CNRS) 2. RESUME DU PROJET Les architectes de l IRAA et les compagnons du Tour de France Marc Sucal, responsable régional (Avignon, Vernègues) collaborent dans le cadre de l étude de la construction des monuments antiques L objectif scientifique du programme de recherche est d approfondir et de renouveler la connaissance de la mise en oeuvre de la pierre dans l architecture antique du Midi méditerranéen. Pour atteindre cet objectif, il convient d évaluer et de compléter les premiers résultats scientifiques obtenus par l analyse archéologique du bâti, en menant une opération de construction expérimentale en collaboration avec les Artisans Compagnons du Tour de France. 3. PRESENTATION SCIENTIFIQUE DU PROJET 3.1. Objectifs et méthodes L étude des modes de construction mis en oeuvre sur le temple romain de Vernègues et l amphithéâtre d Arles, a conduit les architectes de l IRAA en charge de ces dossiers à aborder les différentes techniques constructives. Cette approche de déterminer des questions pour lesquelles ni la seule analyse rigoureuse des vestiges et des traces archéologiques, ni l état de la bibliographie ne pouvaient apporter, de manière totalement satisfaisante, des réponses concernant les outils, les gestes, les modes opératoires et l organisation générale des chantiers. Comprendre les opérations d ajustage des blocs de grand appareil à joints vifs. L amphithéâtre d Arles et le temple de Vernègues constituent deux témoins privilégiés de la mise en oeuvre du grand appareil réglé à joint vif, utilisé en Provence depuis l époque hellénistique jusqu à l époque romaine. La principale contrainte induite par cette technique du joint vif était constituée par les risques de désordres dus à une mauvaise transmission des charges verticales entre les blocs superposés. Dans les périodes plus récentes, le grand appareil cédera le plus souvent la place à un moyen appareil mis en oeuvre, non plus à joint vif, mais généralement associé à des joints au mortier (appareil des parties basses des murs de la chapelle de Vernègues par exemple). L utilisation du Moyen Age jusqu à nos jours de mortier dans les joints des blocs de pierre de taille permit donc (et permet encore) de contourner la difficulté constructive inhérente au joint vif. Les constructeurs antiques, quant à eux, furent contraints de soigner particulièrement le traitement des surfaces de contact dans les joints verticaux mais surtout dans les joints horizontaux au prix d ajustements successifs des faces de blocs.

Différentes propositions de pinces à crochets utilisées pour la mise en place des blocs de grand appareil Comment interpréter précisément les différentes traces laissées par les outils qui permettaient ces différents ajustements? Les restitutions traditionnellement proposées rendent-elles suffisamment compte de la diversité des modes opératoires et des matériaux, révélée par l analyse archéologique des vestiges? Pour une opération d archéologie expérimentale de construction en pierre en collaboration avec les Artisans-Compagnons du Tour de France Les nombreux échanges établis par les architectes de l IRAA avec les artisans Compagnons du Tour de France sur les différents chantiers de restauration où nous intervenons, nous ont conduit à concevoir ensemble un projet d archéologie expérimentale de construction en pierre. En effet, les questions scientifiques rejoignent les propres travaux conduits par les Compagnons du Tour de France sur leurs pratiques et leurs savoir-faire. Pour développer ce programme de recherche et répondre au questionnement mis en évidence par l analyse archéologique, les différentes hypothèses de restitution des techniques de mise en œuvre seront validées ou non par l expérience pratique sur le terrain. En effet, seule une mise en œuvre dans des conditions réelles sera à même de faire évoluer les hypothèses, d améliorer les procédés et de susciter de nouvelles restitutions. En cela, la collaboration avec des artisans professionnels du bâtiment est essentielle. Elle permettra notamment de réaliser des prototypes d outils grandeur nature, qui pourront être utilisés par des ouvriers qualifiés et habitués au maniement de la pierre. 3.2. Les constructions programmées Le projet d archéologie expérimentale envisagé tentera, non pas de reconstruire un bâtiment entier «!à la façon de!», mais de manière, à nos yeux, plus pertinente, de répondre précisément à nos questions en associant les connaissances scientifiques aux savoir-faire pratiques. Nous nous limiterons donc à la construction! d une portion d une dizaine de mètres de mur en grand

appareil à joint sec sur trois assises. 3.3. Les protocoles expérimentaux En préalable à ces opérations seront constitués des protocoles expérimentaux assurant la pertinence et l enregistrement rationnel des résultats de l expérience. L établissement de ces protocoles bénéficiera grandement des premières opérations empiriques déjà menées par nos soins sur deux chantiers de restauration. Ainsi pour le grand appareil, l étude de la construction du temple de Vernègues et de l amphithéâtre d Arles, nous a déjà conduits à tenter de restituer un outil antique disparu, «la pince à crochet» dont un premier prototype a été forgé. Il a été testé in-situ lors de la restauration de l amphithéâtre d Arles sur des blocs voués à la destruction ; puis sur des blocs neufs taillés de manière mécanique à l atelier des Compagnons du Tour de France. Ces pré-expérimentations ont permis de concevoir un nouveau prototype en cours d élaboration.

Pré-expérimentation d un prototype de pince à crochet L objectif des protocoles est donc de réunir les conditions expérimentales qui permettent d éviter l anecdotique pour se concentrer sur le pertinent en focalisant l attention tout particulièrement sur les points suivants : - Evaluation des qualités et du comportement des matériaux. - Efficacité des outils. - Faisabilité et efficacité des gestes et de leurs séquences. - Contrôle et maîtrise des temps de mis en oeuvre. - Gestion des problèmes inattendus le cas échéant. Après la construction, un démontage partiel sera effectué afin d inventorier les traces laissées par les différentes manoeuvres. 3.4. Originalité et importance dans le domaine scientifique concerné 3.4.1. Une expérimentation ciblée à vocation scientifique L archéologie expérimentale à vocation scientifique s est largement développée dans les champs chronologiques de la préhistoire et de la protohistoire (taille des silex, méthodes de chasse, érection de mégalithes, céramique, maisons néolithiques ou village ibérique par exemple). Pourtant les expérimentations restent finalement peu nombreuses en architecture antique et médiévale. De telles opérations se heurtent en effet aux problèmes de coût et de faisabilité!; il est plus long, plus problématique et plus coûteux de construire un temple ou une église que de tailler un biface. En conséquence les expérimentations en architecture restent plutôt réservées à de l architecture vernaculaire (brique crue), et sont appliquées à de l habitat (Maison romaine de Doura Europos) ou à des points très spécialisés proches de la sculpture (taille des chapiteaux). Au demeurant lorsque l expérimentation est démesurée, elle est confrontée aux risques de devoir sacrifier, aux exigences et aux contraintes de l animation touristique (reconstruction du château de Guédelon). Notre programme de recherche expérimentale évitera ce principal écueil par son caractère ambitieux mais très ciblé, qui cherche à répondre à un questionnement précis. 3.4.2. et interdisciplinaire Pour mener l expérimentation, la collaboration entre les architectes de l IRAA et les artisans Compagnons du Tour de France, professionnels du bâtiment (tailleurs de pierre, maçons appareilleurs et forgerons) est primordiale. Pour des raisons pratiques et matérielles évidentes d abord, car les compagnons disposent d un outillage, des savoir-faire et d accès aux matériaux que le CNRS ne peut pas fournir. Pour des raisons méthodologiques aussi. Nous avons pu constater en effet dans les premières expériences communes que les Compagnons ne se placent pas dans la posture de l expert qui répondrait automatiquement à toutes les questions des archéologues mais avaient eux-mêmes une démarche de doute et de recherche concernant leurs pratiques. C est la conjonction des savoirs, mais aussi des questionnements, qui permettra d avancer significativement. En dépassant les cadres trop théoriques, les réponses apportées par l expérimentation permettront de mieux comprendre l organisation générale des chantiers et tout

particulièrement le nombre d équipes nécessaires, la position des engins de levage et la chronologie des différentes opérations (ordres de pose des blocs, succession des portions de murs dans le cas de murs à parements et blocage, avancement des voûtes). Mieux comprendre le détail, retrouver les outils et les gestes constituent un préalable indispensable à toute réflexion sur l économie de la construction.