LA SOCIÉTÉ PROFESSIONNELLE D ARCHITECTES : QUELLES SONT LES PERSONNES ASSURÉES CIVILEMENT EN SON SEIN ET CELLES QUI DOIVENT L ÊTRE?



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Transcription:

LA SOCIÉTÉ PROFESSIONNELLE D ARCHITECTES : QUELLES SONT LES PERSONNES ASSURÉES CIVILEMENT EN SON SEIN ET CELLES QUI DOIVENT L ÊTRE? 1. Introduction 1.1 La loi du 15 février 2006, relative à l exercice de la profession d architecte dans le cadre d une personne morale, qui modifie la loi du 20 février 1939 sur la protection du titre de la profession d architecte (ci-dessous «la Loi»), a notamment permis l exercice de la profession de l architecte par une personne morale et a également instauré une obligation d assurance pour couvrir la responsabilité du praticien. La personne morale étant comprise comme un être juridique disposant de sa propre personnalité et n engageant dans ses relations contractuelle que son propre patrimoine. Cette obligation légale se combine avec les obligations du règlement de déontologie approuvé par arrêté royal délibéré en Conseil des Ministres du 18 avril 1985 (ci-dessous «le règlement») et les dispositions de la recommandation concernant l assurance obligatoire approuvées par le Conseil National de l Ordre des Architectes le 24 avril 2009 (ci-dessous «la recommandation»). Enfin, ces obligations légales et déontologiques doivent également être analysées du point de vue du droit des sociétés. C est l objet de la présente note. 1.2 Il sera abordé dans la présente note que les questions en relation avec les sociétés pourvues d une personnalité juridique propre et non pas les sociétés sans personnalité juridique propre qui ne sont pas visées par l article 2 paragraphe 2 de la Loi et non inscrite au tableau 1. 2. Dispositions légales et déontologiques 2.1. L article 9 de la loi en son alinéa 1 instaure l obligation pour une personne morale autorisée à exercer la profession d architecte de faire couvrir sa responsabilité, en ce compris la responsabilité décennale, pour «les actes qu elle accomplit» et également ceux «de ses préposés». L alinéa 2 du même article 9 prévoit que les gérants, administrateurs, membres du Comité de Direction et de façon plus générale les mandataires indépendants qui interviennent au nom et pour compte de la personne morale sont solidairement responsables du paiement des primes d assurance. En outre, les administrateurs, gérants et membres du Comité de Direction sont solidairement responsables envers les tiers de toute dette qui résulte de la responsabilité décennale. 2 1 La Loi n abroge nullement la recommandation de l Ordre des Architectes du 28 novembre 1997, relative à l exercice de la profession d architecte dans le cadre d une société. Il est donc toujours possible pour les architectes de constituer une société répondant à cette recommandation, sans que celle-ci soit inscrite au tableau. 2 L alinéa 1 de l article 9 impose une couverture d assurance pour les actes de la personne morale et des actes des préposés. Nous verrons que l arrêté royal étend largement cette catégorie. Lorsque la personne morale a souscrit une assurance mais ne paie pas les primes y relatives, les personnes nommées ci-dessus sont tenues solidairement pour le paiement de la prime. S il n y a pas de couverture, les mêmes personnes, à l exclusion des mandataires indépendants, sont solidairement responsables envers les tiers de la responsabilité décennale. Il y a ici une 1/10

2.2. L arrêté royal relatif à l assurance obligatoire prévue par la Loi du 25 avril 2007 (ci-dessous «l arrêté royal») définit les garanties minimales auxquelles le contrat souscrit en vertu de la loi, doit répondre. L article 2 de l arrêté royal prévoit qu il y a une couverture de la responsabilité civile 3 et à contrario ne viserait pas la responsabilité pénale ou du moins les conséquences civiles de celle-ci. L article 3 définit les personnes assurées comme, d une part, celles mentionnées dans le contrat d assurance et, d autre part, ses préposés. Sont considérés comme des préposés de l architecte par l article 3 de l arrêté royal, le personnel, les stagiaires et autres collaborateurs lorsqu ils agissent pour son compte. Dans le cas d une personne morale, sont également couverts les administrateurs, gérants, membre du Comité de Direction et de tous les autres organes de la société chargés de la gestion ou de l administration de celle-ci lorsqu ils agissent pour le compte de la personne morale dans le cadre de l exercice de la profession d architecte. 4 Enfin, seules les activités liées à des travaux exécutés et des prestations délivrées en Belgique sont visés par l arrêté royal. 2.3. Le règlement, en son article 15, impose que l architecte travaillant seul, en association ou en société, assure sa responsabilité professionnelle, y compris sa responsabilité décennale, et que cette assurance verra ses effets perdurer pendant une période de 10 ans 5, à dater de la réception, et ce pour les ouvrages terminés au moment du décès de l assuré. 6 2.4. La recommandation indique en son point 2.2 que l article 15 du règlement reste d application et qu elle-même ne fait qu apporter de plus amples précisions à cette obligation d assurance, en application de l article 3, alinéa 2 du règlement. La recommandation en son point 2, indique que la couverture de la responsabilité professionnelle au sens de la loi s applique à l architecte indépendant, à l architecte appointé 7 et à l architecte personne morale. restriction par rapport à l alinéa 1 er de l article 9 qui prévoit que l assurance doit couvrir la responsabilité en ce compris la responsabilité décennale. La solidarité imposée aux organes de la société a donc une assiette légale différente de l obligation d assurance. 3 L article 9 de la loi prévoit quant à lui une couverture de la responsabilité, en ce compris la garantie décennale. Il y a ici, semble-t-il, une restriction dans l arrêté royal. La recommandation quant à elle prévoit en son point 4.5. que le contrat d assurance doit également couvrir les conséquences civiles d une condamnation pénale, en raison d actes professionnels posés par des architectes ou leurs préposés. 4 - L alinéa 1 prévoit que les personnes assurées doivent être mentionnées expressément dans le contrat d assurance, ce qui ne manquera pas d entraîner des difficultés pratiques. - Il faudra également démontrer que les personnes assurées agissaient pour compte du souscripteur de l assurance. - Les organes des sociétés ne sont couverts que pour les actes posés, d une part, pour la personne morale et, d autre part, dans le cadre de l exercice de la profession d architecte. Leur responsabilité d organe n est donc pas visée par cette disposition de l arrêté royal. 5 Durée qui n est pas reprise dans les dispositions légales. 6 Il faut remarquer que c est l architecte qui est visé et non pas la personne morale elle-même. 7 C est-à-dire travaillant dans un contrat de travail. 2/10

Les points 3.1. et 3.2. reprennent les dispositions de l arrêté royal mais ajoutent que, toutefois, les actes que le préposé pose en son propre nom et pour son propre compte doivent être couverts par un contrat d assurance spécifique. L architecte à l obligation de faire couvrir par une assurance ses collaborateurs, les membres de son personnel et les stagiaires (points 3.4. et 3.5.). Dans le cadre d une personne morale, sont également assurés les administrateurs, gérants, membres du Comité de Direction et autres organes de la société chargée de la gestion, lorsqu ils agissent pour le compte de la personne morale dans le cadre de l exercice de la profession d architecte 8. Le point 3.7 de la recommandation impose que les organes des sociétés soient couverts pour les actes qu ils posent pour leur propre compte. Le point 3.8. vise la situation des associations momentanées. L article 4 de la recommandation définit l objet de la garantie que doit fournir l assurance et les points suivants précisent : 1. celle de recouvrir la responsabilité civile découlant de l activité de l architecte. 2. par activité d architecte, la recommandation entend tout acte accompli à titre professionnel et qui concerne une activité dans le domaine de l architecture même si celle-ci n est pas rendue obligatoire par la loi et même si elle n est pas réservée exclusivement à la profession d architecte. 9 3. exclut les coordinateurs de sécurité. 4. par responsabilité civile, on entend toute forme de responsabilité contractuelle ou extracontractuelle pour des actes professionnels posés par les architectes ou leurs préposés, tant avant qu après la réception des travaux, en ce compris la responsabilité décennale et la responsabilité contractuelle de droit commun pour vice caché léger après réception des travaux. 10 5. l assurance doit également couvrir les conséquences civiles d une condamnation pénale en raison d un acte professionnel posé par des architectes ou leurs préposés. 3. Organes et préposés au sein d une personne morale 3.1. Gérants, administrateurs, membres du Conseil de Direction et organes 8 Il s agit d une reprise quasi complète de la disposition de l alinéa 3 de l article 3 de l arrêté royal. Ne sont cependant pas visés par la recommandation, les actes d administration. 9 La loi impose une assurance pour la responsabilité, en ce compris la responsabilité décennale, en raison des actes accomplis à titre professionnel. - L article 2 de l arrêté royal vise la responsabilité civile résultant de l activité d architecte. - La recommandation définit quant à elle ce qu il y a lieu d entendre, déontologique, par activité d architecte. 10 C est peut être cette définition que vise l arrêté royal. 3/10

L article 61 du Code des Sociétés dispose : «Les sociétés agissent par leurs organes, dont les pouvoirs sont déterminés par le présent Code, l objet social et les clauses statutaires. Les membres de ces organes ne contractent aucune responsabilité personnelle relative aux engagements de la société.» L organe est, d un point de vue pratique, le support nécessaire de l activité de la personne morale, de l expression de sa volonté et, il agit activement et passivement pour mettre en œuvre les moyens d action de la société. L organe est l incarnation de la personne morale. Il est le mandataire qui accomplit l acte juridique au nom et pour compte de la société. L organe dispose de pouvoirs délimités par la spécialité de sa fonction (gérant, administrateur, administrateur-délégué ou membre du Conseil de Direction). Cependant, au contraire du mandataire, l organe prend lui-même les décisions relatives à la gestion de la personne morale. C est ce qu exprime l article 61 du Code des Sociétés mais, il n y a pas d absorption de l individu représentant l organe par celui-ci. C est ce qu explique que si l article 61 du Code des Sociétés crée une immunité pour les membres des organes, il n en est pas moins vrai, qu en certains cas, il y a néanmoins une responsabilité personnelle des membres de l organe. En fonction de la personne morale, ou éventuellement des statuts, l organe sera ou non collégial. Ainsi, dans le cadre d une société anonyme, il y a une collégialité au sein du Conseil d Administration. Cette collégialité peut éventuellement être organisée par les statuts, comme par exemple au sein d une coopérative ou d une société privée à responsabilité limitée 11. L organe sera alors constitué d administrateur ou de gérant. Une société peut également, pour un ou des actes particuliers, désigner un mandataire qui, dans ce cas, ne sera pas un organe de la société. Ce type de contrat est organisé par les articles 1984 et suivants du Code Civil 12. Un Comité de Direction peut être créé au sein des sociétés anonymes (524 bis et 524 ter du Code des Sociétés). Il est un organe de la société composé d administrateurs et/ou d autres personnes. 3.2. Personnel, stagiaires et préposés Le terme de préposé couvre deux notions. 11 L article 2, 2 de la loi prévoit que les personnes morales pouvant être inscrite au Tableau des Architectes doivent disposer de la personnalité juridique. Sont donc exclues les sociétés de droit commun, la société momentanée et la société interne. 12 L article 9, 1, avant-dernier alinéa de la loi vise ces mandataires indépendants, dont le rôle et la définition mériteraient d être éclaircis. 4/10

La première est visée par l article 1384 du Code Civil qui instaure une responsabilité pour les dommages causés par le fait de personnes dont on doit répondre. La notion de préposé est définie par la Cour de Cassation de la manière suivante : «Attendu qu est considéré comme préposé, celui qui fournit ses services à celui qui le choisit ou l accepte librement et sous la surveillance ou les ordres de qui il exécute son travail ou sa mission, ou qui, du moins, à le droit de lui donner des instructions quant à cette exécution ; il suffit que l un puisse donner à l autre des instructions ou des ordres sans qu il soit exigé qu il ait effectivement exercé son autorité ou sa surveillance à l égard de son préposé.» 13 Dans ce cas de figure, le préposé est dans une relation contractuelle avec son commettant tout en sauvegardant sont statut de travailleur indépendant. La deuxième notion de préposé est celle qui renvoie à la caractéristique de la relation entre un employeur et son employé, c est-à-dire l existence d un lien de subordination. C est-à-dire l exercice de l autorité, la surveillance et le contrôle d une autre personne. Il s agit d une notion qui s apprécie en fait, c est-à-dire qu en fonction des éléments réels de la situation, un contrat d emploi pourrait exister, même si les parties concernées n avaient pas, au départ, voulu conclure pareil convention. De manière usuelle, le personnel (l appointé) est repris dans la deuxième notion de préposé. Quant au stagiaire, c est sa situation réelle qui définira le contrat qui le lie à son maître de stage. 4. Quelques notions relatives à la responsabilité civile et aux assurances 4.1. Quant à la responsabilité assurée L article 9, 1 de la loi indique que l architecte doit couvrir sa «responsabilité, en ce compris la responsabilité décennale», alors que l arrêté royal vise quant à lui, en son article 2, une assurance qui couvre «la responsabilité civile». La recommandation est quant à elle beaucoup plus précise. D une part, parce qu elle vise la définition des actes assurés, c est-à-dire qui concerne l activité dans le domaine de l architecture, même si celle-ci n est pas rendue obligatoire par la loi et même si elle n est pas réservée exclusivement à la profession d architecte. D autre part, la responsabilité civile est définie comme étant toute forme de responsabilité contractuelle ou extracontractuelle pour des actes professionnels posés par des architectes ou leurs préposés, tant avant qu après la réception des travaux, en ce compris la responsabilité décennale et la responsabilité contractuelle de droit commun pour vice caché léger après réception des travaux. 13 Cass. 24/12/1951, Pas 1952, I, p. 213 5/10

La loi vise l assurance de la responsabilité, c est-à-dire qui a pour objet de garantir l assuré contre toute demande en réparation fondée sur la survenance du dommage prévue au contrat et de tenir, dans les limites de la garantie, son patrimoine indemne de toute dette résultant d une responsabilité établie 14. Il faut rappeler ici l article 3 de l arrêté royal qui définit les personnes à assurer comme étant celles mentionnées dans le contrat, les préposés et les organes visés par cet article 15. 4.2. L action directe C est l action de la personne lésée contre l assureur 16. De cette manière, la personne lésée peut interpeller directement l assurance et, surtout, la solvabilité de l assuré ne devrait pas faire obstacle à son indemnisation. 4.4. L action récursoire L assureur peut se réserver un droit de recours contre le preneur d assurance ou l assuré 17. C est ce qui est appelé l action récursoire. Cependant, ce terme recouvre également une deuxième notion, plus générale, qui est la possibilité pour la personne interpellée de se retourner elle-même contre le responsable du dommage dont il assure luimême la responsabilité, c est-à-dire notamment ses préposés 18. 4.5. La responsabilité aquilienne, la responsabilité contractuelle et le concours de responsabilité La responsabilité aquilienne est fondée sur l article 1382 du Code Civil qui stipule que tout fait quelconque de l homme qui cause à autrui un dommage oblige celui, par la faute duquel il est arrivé, à le réparer. La faute contractuelle est quant à elle l irrespect d un engagement pris dans le cadre de l exécution d un contrat. Dans certaines circonstances, se posera la question du concours de ces deux responsabilités, notamment lorsque la responsabilité d un intervenant sera interpellé suite à un acte d un de ses préposés ou, encore, lorsque la faute contractuelle est éventuellement combinée avec une faute aquilienne. Il peut y avoir superposition de l obligation générale de ne pas commettre de faute aquilienne avec une faute contractuelle. 4.6. Faute commune et faute concurrente 14 Article 77 de la loi du 25 juin 1992 sur le contrat d assurance terrestre. 15 Voir supra. 16 Article 86 de la loi du 25 juin 1992 sur les assurances terrestres. 17 Article 88 de la loi du 25 juin 1992 sur les assurances terrestres 18 Voir supra. 6/10

Il y aura faute commune lorsque plusieurs personnes auront contribué sciemment à produire un fait dommageable. Il y aura faute concurrente lorsque différentes fautes commises par plusieurs personnes ont toutes contribué à créer le préjudice, de sorte que sans l une de ces fautes, le dommage ne se serait pas produit. Dans le premier cas, les fautifs pourront chacun être condamnés à réparer l entièreté du dommage alors que dans le second cas, il faudra démontrer que chaque faute a contribué à provoquer la totalité du dommage ou, à défaut, le Juge devra déterminer la participation de chacun au dommage. 4.7. Le tiers lésé C est la personne qui, suite aux comportements d un organe ou d un préposé de la société, aura subi un dommage. Ce dommage peut trouver son origine dans une faute aquilienne ou dans une faute contractuelle. Le tiers lésé pourra se retourner contre la société dans le cadre du contrat qu il aura conclu et, éventuellement, s il y a concours de responsabilité, il pourra interpeller également directement l organe ou le préposé pour sa responsabilité propre. Il peut également disposer de l action directe contre l assureur. 4.8 L abandon de recours C est l engagement d une personne à l égard de l autre de ne pas utiliser l éventuelle action récursoire dont elle disposerait à son encontre. Par exemple la renonciation par une personne morale de ne pas interpeller la responsabilité d un sous-traitant en cas d intervention de l assureur de l entrepreneur principal. C est un mécanisme contractuel qui particulièrement important dans la mise en œuvre des assurances et de la couverture des responsabilités. 5. Structure interne de la société et les personnes assurées 5.1. La question de la responsabilité individuelle Au sein de la société, il y a lieu de déterminer, d une part, l assuré interpellé par un tiers, la société elle-même ou l assurance. et, d autre part, qui peut être En ce qui concerne l assuré, il faut retenir que la recommandation impose que non seulement la société soit assurée mais également chaque intervenant architecte le soit également. Alors que l arrêté royal, quant à lui, impose que chacun qui intervient pour la personne morale dans le cadre de l exercice de la profession d architecte soit également assuré. Le dommage du tiers lésé est ainsi, en principe, couvert. Il reste dès lors à déterminer le recours du tiers lésé si la responsabilité du fautif n est pas couvert et la coexistence de responsabilité, ainsi que les éventuelles actions récursoires. 7/10

Une personne qui agit au sein de la société a une responsabilité contractuelle à l égard de celle-ci qu elle soit organe ou préposé. La société est quant à elle responsable à l égard des tiers lésés des engagements contractuels qu elles à souscrit. La société disposent, en principe, de l action récursoire contre ses les membres de ses organes ou ses préposés qui auraient commis une faute dans l exécution de leur contrat avec la personne morale. Les tiers lésés, si l organe ou le préposé a commis par ailleurs une faute aquilienne peuvent dans certaines conditions avoir une action directe contre ces derniers. En résumé, l immunité de l organe de la société ou d un de ses membres, ainsi que des préposés n est pas nécessairement complète et certaine. 5.2. L organe de gestion Le gérant ou le Conseil d Administration, lorsqu il agit comme gestionnaire et représentant de la société, est assuré par l assurance souscrite par la personne morale. Si dans l exercice de cette fonction, l individu commet une faute dans l exécution de son mandat à l égard de la société, celle-ci pourra, le cas échéant, introduire une action récursoire à l égard de son dirigeant, si celui-ci a commis une faute dans l exercice de son mandat c'est-à-dire le contrat qui le lie à la société. Le tiers lésé peut également, éventuellement, agir non seulement contre la personne morale dans le cadre de la responsabilité contractuelle mais, éventuellement aussi, contre le dirigeant si celui-ci a contrevenu également aux principes de la responsabilité aquilienne et a causé, ainsi, un dommage propre. 5.3. Les préposés dirigeants de la personne morale Le dirigeant de la société peut avoir au sein de celle-ci une autre fonction exercée soit dans le cadre d un contrat d indépendant ou d un contrat de travail. Dans ce cas, il faudra déterminer dans quelle fonction la faute éventuelle a été commise. Ce sera en cette qualité que le tiers lésé devra interpeller le fautif et que l assurance devra intervenir pour assurer sa couverture et, éventuellement, envisager une action récursoire. Cette question devra également être posée dans la relation entre la société et le fautif. 5.4. Les préposés a) Les indépendants L architecte sous-traitant de la personne morale n est pas nécessairement inclus dans l assurance responsabilité que doit souscrire la société. L indépendant sous-traitant n engage sa responsabilité, en principe, sauf concours de responsabilité, uniquement à l égard de son commettant. 8/10

Cependant, l article 3 de l arrêté royal précise en son paragraphe 2 que les collaborateurs sont considérés comme des préposés lorsqu ils agissent pour le compte d un architecte 19. En principe il devrait être inclus dans la l assurance pour autant qu il agisse pour le compte de la société b) L architecte dans les liens d un contrat d emploi Les dispositions légales en matière de responsabilité de l architecte prévoient que la responsabilité d un employé est couverte. En plus, il faut rappeler que l article 18 de la loi du 3 juillet 1978 impose quant à des dommages causés par le travailleur à l employeur ou un des tiers dans l exécution de son contrat, que le travailleur ne répond que de son dol et de sa faute lourde. Il ne répond de sa faute légère que si celle-ci représente dans son chef un caractère habituel plutôt qu accidentel. Ainsi, celui qui œuvre dans le cadre de son contrat d emploi, sera protégé dans la mesure des dispositions légales ci-dessus. 6. Conclusion Le but du législateur en autorisant l exercice de la profession d architecte dans le cadre d une personne morale était, à la fois, de protéger les tiers lésés au travers de l obligation de souscription d une assurance et de mettre le patrimoine privé de l architecte à l abri de revendications dans le cadre d une éventuelle indemnisation, suite à l interpellation de sa responsabilité. Le but poursuivit de la protection du tiers lésé semble réellement atteint, d une part, par les dispositions légales et, d autre part, certainement, par les obligations déontologiques contenues dans la recommandation. Si en introduisant la responsabilité contractuelle de la personne morale à l égard de son cocontractant, le législateur a fait un pas important pour protéger le patrimoine du professionnel, il ne faudrait pas en déduire que l immunité est globale et certainement acquise. L action récursoire de l assureur à l égard de l assuré ou de son préposé ne met pas nécessairement à l abri le fautif de toute revendication à son égard. Il en est de même d une éventuelle action récursoire de la personne morale à l égard de ses dirigeants ou de ses sous-traitants. Enfin, il ne faudrait pas sous-estimer la portée de la responsabilité à l égard des tiers dans le cadre d une faute concurrente ou conjointe qui pourrait aboutir à une déclaration de responsabilité commune avec la personne morale. 19 La question peut se poser ici de savoir si l arrêté royal ne dépasse pas l exécution de l article 9 en élargissant ainsi clairement le champ d application de l assurance. 9/10

Dans ces cas de figure, il est important pour le professionnel de souscrire une assurance responsabilité qui le couvre réellement dans son activité propre et de s interroger sur la pertinence d obliger son assureur et / ou son commettant d abandonner les recours récursoires. Il est également important, aussi bien pour les personnes morales que pour les architectes, en personne physique agissant comme dirigeant ou préposé, de s interroger sur les clauses de solidarité avec les autres intervenants dans l art de la construction. * * * 10/10