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Transcription:

DECISION DCC 16-173 DU 03 NOVEMBRE 2016 Date : 03 novembre 2016 Requérant : Rachid Berti EKE Contrôle de conformité Procédure judiciaire Charte africaine des droits de l Homme et des peuples. Délai anormalement long Violation de l article 7.1.d de la Charte africaine des droits de l Homme et des peuples. La Cour constitutionnelle, Saisie d une requête en date du 29 mars 2016 enregistrée à son secrétariat le 04 avril 2016 sous le numéro 0697/037/REC, par laquelle Monsieur Rachid Berti EKE, introduit un recours pour violation du «principe de délai raisonnable» par la cour d Appel d Abomey ; VU la Constitution du 11 décembre 1990 ; VU la loi n 91-009 du 04 mars 1991 portant loi organique sur la Cour constitutionnelle modifiée par la loi du 31 mai 2001 ; VU le règlement intérieur de la Cour constitutionnelle ; Ensemble les pièces du dossier ; Ouï Monsieur Bernard D. DEGBOE en son rapport ; Après en avoir délibéré, CONTENU DU RECOURS Considérant que le requérant expose que dans l affaire de

revendication de droit de propriété opposant dame GBOGUE N Gnonso à Messieurs Alimi EDOU et Sylvain EDOU, la chambre civile de droit traditionnel du tribunal de première Instance de Lokossa a rendu le jugement n 812/00 le 02 octobre 2000 ; qu il précise que le 02 octobre 2003, appel a été interjeté contre ledit jugement par Monsieur Pascal Mawuli EDOU ; qu il fait observer «que le délai d appel est de un (1) mois alors que l appelant a fait appel trois ans après» ; que de plus l appelant n est pas partie au procès, la conséquence, il n a pas qualité pour interjeter appel, alors que la cour d Appel saisie ne fait que renvoyer le dossier» ; qu il ajoute : «que par principe, les citoyens ont droit à une justice équitable et dans un délai raisonnable. Le délai que la cour d Appel d Abomey met à rendre justice relativement audit dossier, est anormalement long» ; qu il demande à la haute juridiction de l aider afin que justice lui soit rendue ; INSTRUCTION DU RECOURS Considérant qu en réponse à la mesure d instruction diligentée par la haute juridiction, le président de la cour d Appel d Abomey par intérim, Monsieur Antoine GOUHOUEDE, écrit : «En réponse à cette mesure d instruction, j ai l honneur de vous indiquer que les prétentions du requérant ne sont pas sans fondement. En effet, la consultation du dossier de la procédure relève que suite à une action en revendication de droit de propriété sur un immeuble litigieux sis au lieu-dit Adakomè dans l arrondissement de Lokogba, commune de Lalo, introduite devant le tribunal de première Instance de Lokossa le 11 avril 1997 par dame N Gnonso GBOGUE, qui a ensuite donné procuration ad litem au sieur Berti Rachid EKE contre les nommés Alimi EDOU et Sylvain EDOU, cette juridiction a fini par rendre le 02 octobre 2000, le jugement n 812 au profit de la requérante. Par l acte n 24 du jeudi 11 septembre 2003, le nommé Pascal Mawuli EDOU, chauffeur à Cotonou a relevé appel contre ce jugement. Pour une raison inconnue de moi, la cause n a été enrôlée et appelée pour la première fois à la cour d Appel d Abomey qu à l audience du 12 mai 2010. Depuis lors, elle a subi divers 2

renvois pour empêchement du président de chambre, pour fait de grève des greffiers ou des magistrats, mais aussi du fait des parties ou pour d autres motifs. Les deux (02) derniers renvois opérés sont dus au défaut d assesseurs pour seconder le président de chambre afin de composer une formation collégiale» ; Considérant qu il ajoute : «J avais déjà eu l occasion d expliquer à la haute juridiction les difficultés actuelles de fonctionnement de la cour d Appel d Abomey caractérisées par une pénurie de personnel magistrat pour animer convenablement les diverses formations juridictionnelles. Force est de constater que plus de six (06) ans après sa saisine régulière et dix (10) ans après le jugement querellé, la Cour n est pas en mesure de vider ce dossier actuellement renvoyé au 19 octobre 2016 avec l espoir que d ici à cette date, la nomination de nouveaux conseillers lui permettra d être plus opérationnelle» ; ANALYSE DU RECOURS Considérant qu aux termes de l article 7 alinéa 1 de la Charte africaine des droits de l Homme et des peuples : «Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue. Ce droit comprend... d ) le droit d être jugé dans un délai raisonnable par une juridiction impartiale» ; Considérant qu il ressort des éléments du dossier, notamment de la réponse du président de la cour d Appel d Abomey, Monsieur Antoine GOUHOUEDE, à la mesure d instruction de la Cour, que par l acte n 24 du 11 septembre 2003, le nommé Pascal Mawuli EDOU a relevé appel du jugement n 0812 rendu le 02 octobre 2000 par la chambre civile de droit traditionnel du tribunal de première Instance de Lokossa ; que la cause n a été enrôlée et appelée pour la première fois à la cour d Appel d Abomey qu à l audience du 12 mai 2010 ; qu il précise que depuis lors, elle a subi divers renvois pour empêchement du président de chambre, pour fait de grève des greffiers ou des magistrats, mais aussi du fait des parties ou pour d autres motifs et que les deux (02) derniers renvois opérés sont dus au défaut d assesseurs pour seconder le président afin de composer une formation collégiale ; que selon la jurisprudence de 3

la Cour (DCC 00-007 du 02 février 2000), ces difficultés ci-dessus énumérées par le président de la cour d Appel d Abomey, pour réelles qu elles soient, ne sauraient exonérer les juridictions de rendre la justice dans un délai raisonnable ; Considérant que dans le cas d espèce, entre le 12 mai 2010, date à laquelle l affaire a été appelée pour la première fois devant la cour d Appel d Abomey, et le 04 avril 2016, date à laquelle la requête du requérant a été enregistrée à la Cour de céans, il s est écoulé près de six (06) ans sans que la décision ne soit rendue ; que ce délai mis pour connaître de l affaire est anormalement long ; qu en conséquence, il échet pour la haute juridiction de dire et juger qu il y a violation de l article 7.1.d de la Charte africaine des droits de l Homme et des peuples précité ; D E C I D E Article 1 er : Il y a violation de l article 7.1.d de la Charte africaine des droits de l Homme et des peuples. Article 2.- La présente décision sera notifiée à Monsieur Rachid Berti EKE, à Monsieur le Président de la cour d Appel d Abomey et publiée au Journal officiel. Ont siégé à Cotonou, le trois novembre deux mille seize, Messieurs Théodore HOLO Président Zimé Yérima KORA-YAROU Vice-Président Simplice C. DATO Membre Bernard D. DEGBOE Membre Mesdames Marcelline C. GBEHA AFOUDA Membre Lamatou NASSIROU Membre Le Rapporteur, Le Président, 4

Bernard D. DEGBOE.- Professeur Théodore HOLO.- 5