Contrôle des activités marketing Quel que soit le soin apporté à la préparation d'une stratégie ou d'un plan marketing, leur réalisation doit en être contrôlée ensuit en permanence. 1 Nécessité et principes du contrôle marketing Avant d examiner, d une manière plus détaillée, sur quels aspects principaux de ses activités de marketing une entreprise doit exercer des contrôles, et par quelles méthodes elle peut le faire, il convient de se demander, d une manière plus générale, quels sont les principes, quelle est la démarche générale du contrôle, quelles activités mentales il recouvre. Tout contrôle comporte nécessairement trois étapes : la première consiste à définir avec précision les objectifs poursuivis et les normes à respecter. la deuxième étape consiste à comparer la situation réelle, à un moment donné, avec la situation «normale», et à noter et expliquer les déviations éventuelles c est une étape d information, de comparaison et d explication. Enfin, la troisième étape consiste à prendre des mesures correctives, permettant de pallier les déviations constatées. Regardons d un peu plus près, et à propos du contrôle en marketing, en quoi consistent ces trois étapes. 1.1 Contrôle des ventes 1 La plupart des responsables marketing sont bien conscients de l importance des ventes, comme baromètre de leur activité. Mais ils se contentent trop souvent d une connaissance globale des ventes, alors qu un contrôle efficace suppose une connaissance analytique. En effet, pour que la connaissance des ventes de l entreprise soit un instrument de contrôle, c està dire d action, il faut en général qu elle remplisse trois conditions être 1 Voir, LEDREVIE LINDON, «MERCATOR» 6 e édition, 2000, p 121 123
décomposée en fonction de différents critères, être comparée aux normes et être comparée à l ensemble du marché. 1.1.1 Décomposition analytique Le volume total des ventes peut être trompeur. Il se peut, par exemple, que le chiffre d affaires d une entreprise, au cours d une période déterminée, soit satisfaisant c est à dire conforme aux objectifs, mais qu il dissimule une situation mauvaise, dans certaines régions ou pour certains produits, compensée par une situation excellente dans d autres. Il est donc nécessaire d analyser les ventes en fonction de différents critères, dont les plus importants sont : vente par produits ou modèles, vente par régions ou même par secteurs de représentants, vente par types de clientèle, ou même par clients, si l entreprise vend à un petit nombre de clients. 1.1.2 Comparaison des ventes aux normes L analyse détaillée des ventes ne doit pas se faire dans l absolu, mais toujours par référence aux prévisions ou aux objectifs. En effet une augmentation de 20%, par exemple, du volume des ventes d un certain produit dans un certain secteur n a pas la même signification si l objectif qui avait été fixé était de 15% ou de 40 %. De même une baisse des ventes en hiver, pour un produit comme les boissons, peut être parfaitement normale si elle correspond aux variations saisonnières connues et prévues. 1.1.3 Comparaison des ventes de la firme avec celtes de l ensemble du marché Enfin, très souvent, il est préférable de s intéresser à la part relative du marché, plutôt qu au volume absolu des ventes de la firme. C est ainsi que, pour un fabricant d automobiles, comme Citroёn, une baisse des ventes, au cours d un mois donné, peut avoir une signification très différente selon qu elle reflète une baisse générale des ventes d automobiles pour tout le secteur ou une diminution de la part de Citroёn sur ce marché. Il peut même
arriver, dans une période d expansion générale du marché, qu une firme voie ses ventes augmenter mais moins vite que celles de la concurrence, ce qui entraîne une baisse de sa position relative. Pour le savoir, il est nécessaire, ou du moins souhaitable, d analyser les ventes de la firme par référence à l ensemble de la profession. L analyse des ventes peut se faire à partir de deux sources principales d information les statistiques internes de l entreprise établies par les services commerciaux ou comptables qui donnent des indications précises sur la décomposition des ventes par produits, modèles, sections et clients et les données d origine externe. 1.2 Contrôle des coûts et de la rentabilité des activités marketing Autant les responsables du marketing sont généralement intéressés par l analyse des ventes, autant ils sont souvent réticents à faire une analyse des coûts et de la rentabilité de leurs activités. Cette réticence tient, d une part, à la difficulté plus grande que comporte, l analyse des coûts et de la rentabilité, d autre part, à l insuffisant intérêt qu ils attachent à cette analyse. Bien souvent, en effet, les responsables du marketing croient que leur responsabilité principale, presque unique, est de vendre. Ils oublient que, comme toute autre activité de l entreprise, la vente doit être soumise à des impératifs de rentabilité : il est très bien de réaliser ses objectifs de vente, mais pas si c est au prix d un dépassement important des dépenses prévues. Ces dépenses, ou coûts marketing, sont de plusieurs types : frais de personnel du siège ou de vente), commissions et ristournes, budgets publicitaires, frais de distribution physique des produits, etc. il est relativement facile d en connaître le montant total. Mais la difficulté commence lorsqu on cherche à les analyser, c est à dire à les «imputer». C est pourtant nécessaire. Il ne sert pas à grand chose, en effet, de savoir que les coûts de marketing sont globalement de x millions et que les ventes sont de y millions. Le rapport entre y et x, certes, donnera une bonne idée de la rentabilité de la politique marketing dans son ensemble, mais il ne permettra pas d avoir une connaissance de la rentabilité relative des
différents produits, secteurs, clientèles, etc. Pour connaître cette rentabilité relative, il faut pouvoir imputer les différents coûts aux produits, secteurs ou types de clientèles auxquels ils correspondent. C est parfois facile. Si, par exemple, une entreprise emploie des équipes de représentants distinctes pour ses différents types de clientèle, elle peut facilement imputer ses coûts de représentants aux différentes clientèles. En revanche, certains coûts marketing, comme les charges salariales de la direction commerciale, ou le loyer des bureaux occupés par cette direction, ou le budget publicitaire (lorsque la publicité porte sur tous les produits de la firme et s adresse à toutes ses clientèles) sont très difficiles à ventiler entre produits, secteurs, ou clientèles. Cette ventilation nécessaire comporte une grande part d arbitraire, mais peut être facilitée par la méthode d analyse «marginale», qui consiste à se demander, à propos de chaque produit (ou clientèle, ou secteur) «si nous le supprimions, de combien pourrions nous réduire notre publicité, nos frais de vente, nos frais de distribution physique, etc.» Grâce à l analyse et à la ventilation des coûts, la direction du marketing est en mesure d évaluer la rentabilité (ou productivité) de ses efforts, pour chaque produit, clientèle ou secteur géographique. Sur la base de cette analyse, elle peut décider d abandonner certains produits ou clients non rentables, ou d allouer ses efforts, donc ses coûts, d une manière différente entre les produits ou les clientèles, de façon à améliorer la rentabilité globale. 1.3 Les audits marketing Le contrôle de la politique globale de marketing, par l analyse des ventes et des coûts (donc de la rentabilité), peut et doit se faire d une manière permanente, ou du moins avec une périodicité très courte chaque mois, chaque trimestre, ou à la rigueur chaque année. Mais il peut être utile, à des intervalles plus éloignés, de se livrer à un examen critique plus approfondi de cette politique, en remettant éventuellement en cause non seulement ses moyens, mais aussi ses grandes orientations et ses objectifs. C est là l objet
d une méthode de contrôle connue sous le nom de «audit marketing». Nous nous poserons, à propos des audits marketing, quatre questions. Quand faut il les faire, sur quoi doivent ils porter, comment les conduire et qui doit en être chargé? Quand faut il faire? Initialement, les entreprises n entreprenaient un réexamen de leur politique marketing que lorsque les choses allaient mal, c est à dire en général trop tard. On a tendance maintenant, dans les grandes sociétés, à le faire périodiquement, même si tout va bien, en vertu du principe qu elles paveraient toujours aller mieux encore et qu il ne faut jamais s endormir dans la routine. Sur quoi doivent ils porter? On peut faire un audit marketing soit sur l ensemble de la politique marketing, soit sur un aspect particulier ; politique de produit, de distribution, de publicité, etc. Mais de toutes façons, le réexamen doit être total, en ce sens qu il doit porter à la fois sur la définition des objectifs, sur le choix des moyens, sur les méthodes et procédures de travail et de contrôle, etc. Une check list des principales rubriques à retenir dans un audit marketing est présentée dans la figure. Comment les faire? Il faut désigner une équipe, un commando d inspecteurs qui doivent s instal1er dans les services soumis à l audit pendant plusieurs jours, plusieurs semaines et parfois plusieurs mois. Qui? Il est essentiel que les «auditeurs» soient objectifs, désintéressés et aient un oeil neuf. Il faut donc les choisir de préférence en dehors du service qui sera examiné. On peut les prendre soit dans un autre service, soit à la
direction générale, soit parmi des consultants extérieurs à la firme. Toutefois, dans certaines entreprises, ce sont les responsables marketing eux mêmes qui sont invités, chaque année, à effectuer sur les produits ou les marchés dont ils ont la charge une sorte d audit marketing sommaire, dont ils présentent les résultats à leurs supérieurs hiérarchiques. Ces opérations périodiques d auto analyse et parfois d autocritique sont souvent appelées «Revues de marques». 2 Contrôle portant sur des aspects particuliers de la politique marketing Indépendamment du contrôle qui doit s exercer sur la politique de marketing prise dans son ensemble, des contrôles doivent aussi être effectués sur certains aspects particuliers de cette politique, et ceci pour deux raisons principales. La première, c est que ces contrôles partiels sont indispensables pour expliquer les déviations (ou écarts) éventuels qu aurait fait apparaître le contrôle global : si les ventes réalisées ou la part du marché obtenue ne sont pas conformes aux objectifs, il faut savoir si cela est dû à des insuffisances de la politique de distribution, ou de promotion, ou de qualité du produit, etc. La deuxième raison, c est que chaque responsable de l entreprise doit être jugé par rapport à ses objectifs propres et non à la lumière de la réalisation ou de non réalisation de ceux de l entreprise prise dans son ensemble. Les contrôles partiels les plus fréquents concernent l activité de l équipe de vente, la politique de distribution, la politique de publicité, la politique de produit et les opérations spéciales. 2.1 Contrôle de l équipe de ventes Le contrôle de l équipe de vente incombe normalement au directeur commercial ou au chef des ventes. Il consiste à déterminer le degré de conformité entre les résultats effectifs des vendeurs et leurs objectifs, et à expliquer, s il y a lieu, les écarts constatés. Il s appuie souvent, naturellement, sur l analyse des ventes réalisées par chaque vendeur par rapport à leurs quota et sur l analyse de leurs coûts (notamment frais de déplacements). Mais les représentants n ont pas toujours pour unique
mission de vendre. Il faut donc contrôler aussi la réalisation de leurs autres objectifs fourniture d informations à leur entreprise (sur le marché, les concurrents, la distribution), fourniture de services de merchandising 2 aux détaillants, prospection de nouveaux clients, etc. 2.2 Contrôle de la distribution Un fabricant de chocolat, ayant constaté que ses ventes souffraient d une insuffisance dans la rotation des stocks, entraînant une détérioration de la qualité de produits, s est fixé pour objectif d être présent à la fin de l année dans 70 % des points de vente (au lieu de 55 % au début de l année) et de réduire le stock moyen des points de vente de 3,5 mois à 3 mois de vente. En outre, pour éviter des difficultés avec le commerce indépendant, il a décidé de faire respecter autant que possible, par la grande distribution, son prix conseillé. Pour contrôler la réalisation de ces objectifs, il pourra s appuyer, soit sur les rapports de ses représentants et inspecteurs, soit sur une enquête auprès d un échantillon représentatif des points de vente, soit sur un panel de détaillants de type «Nielsen». 2.3 La politique de publicité Le contrôle de la publicité est l un des plus difficiles, d une part parce que les objectifs assignés à la publicité sont souvent mal définis, d autre part parce que les informations nécessaires au contrôle sont difficiles à obtenir. Ce contrôle peut s exercer à trois niveaux distincts, de difficulté croissante. En premier lieu, on peut se borner à contrôler la réalisation matérielle de la campagne publicitaire qui avait été prévue, c est à dire vérifier que les annonces ont bien paru aux dates et dans les supports prévus ce contrôle est souvent effectué par des sociétés spécialisées de «pige» publicitaire. En second lieu, on peut contrôler par des enquêtes de type post test «l impact» de la publicité, c est à dire le nombre de personnes ayant été touchées par la 2 Merchandising : ensemble de techniques de mise en avant du produit sur le lieu de vente
campagne. Enfin on peut, dans certains cas, mesurer la réalisation des objectifs spécifiques de la campagne, par exemple l accroissement de la notoriété de la marque, ou la transformation de son image, ou même (mais plus rarement) l accroissement des ventes consécutif à la publicité. 2.4 La politique de produit On peut être amené parfois aussi à contrôler d une manière spécifique l efficacité de la politique de produit de l entreprise. C est ainsi qu une grande banque de dépôts mène périodiquement des enquêtes auprès de sa clientèle et de la clientèle des banques concurrentes, pour mesurer et comparer leur degré de satisfaction à l égard des services qui leur sont fournis par leur banque fiabilité des relevés de comptes, amabilité et compétence du personnel des guichets, services annexes, etc. De même, la société Danone contrôle systématiquement et d une manière permanente la qualité de ses produits à l aide de trois méthodes principales. En premier lieu, au stade de la fabrication en usine, un contrôle statistique rigoureux est effectué à la sortie des chaînes, en vue de s assurer de la conformité des produits avec les normes de fabrication. En second lieu, des tests consommateurs sont menés périodiquement sur tous les produits de la société en vue de comparer leur qualité perçue avec celle des produits concurrents. Enfin, un service spécialisé de la société dépouille et exploite toutes les réclamations en provenance des distributeurs et des consommateurs. 2.5 Les opérations spéciales Enfin, chaque fois qu on lance une opération spéciale (opération de promotion, marché témoin, commando de prospecteurs), il convient, en même temps qu on définit les modalités de l opération, de mettre en place un système de contrôle permettant de suivre le déroulement de l opération de très près (parfois même au jour le jour).
CONCLUSION Le concept «marketing» s est développé d une façon remarquable suite aux changements qu a connut l environnement et aux exigences d un client qui devient de plus en plus déterminant dans la conduite stratégique de l entreprise. Ainsi, le rôle du marketing n est plus accessoire, comme il l était, mais devenu primordial. La plupart des firmes ont intégré cette nouvelle fonction dans leurs structures organisationnelles, ont concentrés leurs efforts sur son amélioration et n ont jamais cessé de contrôler son réalisme afin de renforcer les opportunités et de corriger les faiblesses.