TEXTES DE LOI, CIRCULAIRES ET ACCORDS



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Transcription:

Le 2 juin 2013 Une question parlementaire interrogeant le gouvernement sur les difficultés rencontrées par les professionnels de " la médecine du travail ", un discours du ministre du travail au Coct et la 2 e conférence sociale avec les conditions de travail à l'ordre du jour L'avis du Conseil économique, social et environnemental sur la prévention des risques psychosociaux Les commentaires de deux articles parus dans la revue " Références en santé au travail " qui a succédé à " Documents pour le médecin du travail ". L'un reprend le rapport final de la première partie du travail du groupe des maladies professionnelles du Coct consacré aux psychopathologies et l'autre est consacré à la cigarette électronique relativement au milieu de travail Et un livre sur l'absentéisme en bibliographie TEXTES DE LOI, CIRCULAIRES ET ACCORDS Question parlementaire Conséquences de la réforme de la médecine du travail - 14 ème législature Question écrite n 02230 de Mme Christiane Demontès (Rhône - SOC) publiée dans le JO Sénat du 04/10/2012 - page 2134 " Mme Christiane Demontès attire l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social sur les difficultés croissantes rencontrées par les professionnels de la médecine du travail. En effet, depuis la loi n 2011-867 du 20 juillet 2011 relative à l'organisation de la médecine du travail, la situation ne cesse de se dégrader. Chacun peut observer la détérioration des conditions de travail au sein de ce secteur et la multiplication des tensions dans les rapports sociaux au sein des entreprises. Cette réforme va à l'encontre même des principes et des missions de la médecine au travail. Ainsi, elle n'a pas permis de faire évoluer positivement la question de l'indépendance du médecin du travail par rapport à l'employeur, bien au contraire. Désormais le système instauré par la précédente majorité est largement tourné vers les intérêts des employeurs. Conjointement la problématique du paritarisme demeure inopérante dans les services de santé au travail. Aussi, elle souhaiterait connaître les intentions du Gouvernement concernant le devenir de la médecine du travail dédiée à la santé des travailleurs. " Réponse du Ministère du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social publiée dans le JO Sénat du 23/05/2013 - page 1588 " Le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a pris connaissance avec intérêt de la question relative à l'indépendance des médecins du travail, à leurs conditions de travail et à l'effectivité du paritarisme dans les services de santé au travail après la réforme de l'organisation de la médecine du travail portée par la loi du 20 juillet 2011 et ses deux décrets d'application du 30 janvier 2012. Tout d'abord, la loi du 20 juillet 2011 a, pour la première fois, défini les missions des services de santé au travail qui sont donc confortées alors qu'avant n'étaient évoquées que les missions des médecins du travail. Les services de santé au travail ont pour mission exclusive d'éviter toute altération de la santé des travailleurs du fait de leur travail (article L. 4622-2 du code du travail). Elles sont assurées, dans les services interentreprises, par une équipe pluridisciplinaire de santé au travail et conduites par le médecin du travail en coordination avec les autres acteurs de l'entreprise dans les services autonomes. Cette organisation pluridisciplinaire doit permettre, tout en préservant les compétences exclusives du médecin sur les missions que lui seul peut conduire, de s'appuyer sur des compétences diverses pour accroître collectivement les capacités du service de santé au travail, et ainsi améliorer la prévention des risques professionnels. C'est alors au

médecin du travail, qui anime et coordonne une équipe pluridisciplinaire, en organisant le recours aux compétences variées, de veiller à la mise en œuvre effective de ces priorités en veillant non seulement à leur cohérence d'ensemble mais aussi à leur inscription dans une démarche globale et exclusive de préservation de la santé physique et mentale des travailleurs. C'est pour permettre au médecin du travail de remplir pleinement cette mission que la loi a conforté son indépendance et sa protection. Ce dernier conserve ses attributions propres, notamment le suivi de l'état de santé des salariés et exerce personnellement ses fonctions même s'il peut désormais confier certaines activités aux membres de l'équipe pluridisciplinaire dans le cadre de protocoles écrits. Les missions du médecin du travail, les modalités de son recrutement, de sa nomination, de son affectation, de l'exercice de ses missions et du suivi individuel de l'état de santé sont précisées par le décret n 2012-135 du 30 janvier 2012 : ces dispositions réglementaires valent tant pour les médecins du travail dans les services autonomes que pour les médecins du travail dans les services interentreprises de santé au travail. Il convient de rappeler les dispositions de l'article L. 4623-8 du code du travail introduit par la loi du 20 juillet 2011 relative à l'organisation de la médecine du travail : Art. L. 4623-8 : «Dans les conditions d'indépendance professionnelle définies et garanties par la loi, le médecin du travail assure les missions qui lui sont dévolues par le présent code». C'est la première fois que l'indépendance du médecin du travail est mentionnée dans la partie législative du code du travail, indépendance par ailleurs garantie par le code de la santé publique (art. 5 et 95). L'article L. 4623-8 s'applique à la fois aux services autonomes de santé au travail et aux services de santé au travail interentreprises. Ainsi, le principe d'indépendance du médecin du travail est bien affirmé pour les deux formes de services de santé au travail. Afin de lever toute inquiétude, le législateur a souhaité, en plus de l'article L. 4622-8 susmentionné, rappeler l'indépendance du médecin du travail au sein des services autonomes de santé au travail dans l'article L. 4622-4 du code du travail. Cet article indique qu'il exerce ses missions «en toute indépendance». Il ne doit bien entendu pas être lu a contrario pour l'exercice des missions du médecin du travail dans les services de santé au travail interentreprises. Le rôle majeur de la commission médicotechnique dans l'élaboration du projet de service pluriannuel, la mission régalienne de l'état à travers la politique d'agrément des services de santé au travail et l'extension, par la loi du 20 juillet 2011, de la protection du médecin du travail contre toute forme de rupture de son contrat de travail sont de nature à prévenir les atteintes à son indépendance. Il faut souligner les modifications importantes introduites par la loi du 20 juillet 2011 et ses décrets d'application, précisés par la circulaire DGT (direction générale du travail) du 9 novembre 2012 relative aux questions de pilotage et de gouvernance des services de santé au travail interentreprises. D'abord, la loi a instauré une gouvernance paritaire des services de santé au travail interentreprises, c'est-à-dire systématiquement à parts égales, entre les représentants des employeurs et ceux des salariés, assumée par un conseil d'administration paritaire sous la surveillance d'instances. Cette évolution profonde vise à renforcer l'implication des représentants des salariés et des employeurs dans leur pilotage effectif par de nouvelles modalités de désignation des membres et des instances dynamisées et mieux articulées entre elles. Ensuite, la réforme entend établir les conditions d'un meilleur pilotage de la politique de santé au travail au niveau régional en assurant la cohérence des actions menées par les différents acteurs institutionnels (DIRECCTE, CARSAT par exemple) et en dynamisant les services de santé au travail autour d'objectifs quantitatifs et qualitatifs partagés, notamment à travers les contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens et l'agrément. Enfin, les partenaires sociaux ont vu leur rôle renforcé au niveau régional dans le pilotage en amont comme dans le suivi de la contractualisation. Le comité régional de 2

prévention des risques professionnels, dans une formation restreinte, est ainsi consulté avant toute conclusion d'un contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens et est informé, au moins annuellement, de la politique régionale d'agrément par le DIRECCTE. Les partenaires sociaux ont donc une responsabilité particulière au niveau régional comme au niveau national qui est de veiller à la cohérence d'ensemble des différents niveaux de pilotage et des orientations stratégiques qui s'y expriment. Les modifications apportées au pilotage de la santé au travail comme à la gouvernance des services de santé au travail constituent en effet un changement important dans la mise en œuvre de la politique de santé au travail. Au-delà des textes, les partenaires sociaux doivent prendre toute leur place, au sein des conseils d'administration, des organes internes de contrôle (commissions de contrôle, comités d'entreprise) et des comités régionaux de prévention des risques professionnels, pour que la mise en place de cette réforme s'effectue au bénéfice réel de la préservation de la santé des travailleurs. Compte tenu de l'importance des modifications contenues dans cette réforme de l'organisation de la médecine du travail, que les services de santé au travail, les entreprises, comme l'administration du travail et les services de l'assurance-maladie viennent juste de commencer à mettre en œuvre, il apparaît prématuré d'envisager de nouveaux changements avant d'avoir pu en évaluer les réalisations et les effets dans un diagnostic partagé et formaliser en concertation les pistes d'amélioration possibles. Il convient notamment de pouvoir faire une première évaluation des contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens, d'analyser les projets pluriannuels de service, l'évolution du mode de gouvernance et l'effectivité de la pluridisciplinarité. L'analyse des politiques régionales d'agrément permettra également de s'assurer de la couverture territoriale des besoins en santé au travail, de l'adéquation et de la qualité des offres en santé au travail, et du bon fonctionnement des services de santé au travail, notamment au regard du respect de l'indépendance des médecins du travail et de leurs conditions de travail. " Complémentairement à cette réponse sur la santé au travail, vous trouverez, dans un document joint, le texte du discours prononcé par le ministre du travail lors de sa venue au Coct le 14 mai 2013. Ce discours marque un regain d'intérêt pour la question du travail, des conditions de travail et de la qualité de vie au travail. La prévention de la pénibilité semble constituer un axe important d'action pour le futur. Il faudra voir si ces propos sont suivis de dispositions concrètes. Par ailleurs, lors de la 2 e conférence sociale qui aura lieu les 20 et 21 juin 2013, principalement consacrée à l'emploi et aux retraites, six tables rondes seront organisées entre les partenaires sociaux avec les thèmes suivants : 1. Emploi et formation professionnelle 2. Conditions de travail et santé au travail 3. Filières d'avenir 4. Retraites 5. Services publics et modernisation de l'action publique 6. Europe sociale. JURISPRUDENCE L'inobservation des préconisations du médecin du travail peut mener à une résiliation judiciaire du contrat de travail Un arrêt de la Cour de cassation du 23 mai 2013 - Cass. Soc. n 12-12995, publié au Bulletin - justifie une résiliation judiciaire du contrat de travail pour discrimination liée à l état de santé suite à une inobservation des prescriptions du médecin du travail. 3

Les faits : une salariée d une mutuelle a été embauchée en 1998 en qualité d assistante commerciale puis est promue conseillère mutualiste en 2001. Elle est en arrêt maladie du 17 juin 2004 au 6 mars 2004 puis du 21 mars au 1 er septembre 2005. A la reprise, le médecin du travail la déclare apte à son poste de conseiller mutualiste à temps partiel. La mutuelle maintient la salariée à un poste d accueil et de standardiste au siège de la mutuelle. Malgré une demande de la salariée de retour à son poste initial, elle est maintenue à ce poste au siège de la mutuelle. Elle saisit la juridiction prud homale, dans un premier temps, pour demander réparation du préjudice lié à la discrimination subie en raison de son état de santé et ainsi qu'un rappel de salaire. En cours d instance, elle demande, pour les mêmes raisons, une résiliation du contrat de travail. La cour d appel reconnait qu il y a eu une discrimination liée à l état de santé, lorsqu on l a affectée à un poste d accueil et de standardiste en 2005, mais rejette la résiliation judiciaire en invoquant le fait qu un manquement ancien de l employeur ne peut justifier la résiliation judiciaire. Au visa des articles 1134 et 1184 du Code civil portant sur l exécution des contrats entre parties et des articles L. 1221-1 et 1132-1 du Code du travail, la Haute juridiction indique " Qu en statuant ainsi, alors que les faits de discrimination retenus dans le précédent arrêt constituaient un manquement grave de l employeur à ses obligations, peu important qu ils ne se soient pas poursuivis, la cour d appel a violé les textes susvisés ". Elle casse donc l arrêt de la cour d appel sur le fait qu il déboute la salariée de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail et renvoie l affaire devant une autre cour d appel. http://www.legifrance.gouv.fr/affichjurijudi.do?oldaction=rechjurijudi&idtexte=jurit EXT000027451886&fastReqId=1322349526&fastPos=1 La jurisprudence est un domaine très souvent sérieux et austère, mais il est exceptionnellement possible de faire mentir cela et de l'aborder sous un angle amusant. Je vous transmets donc une étude de jurisprudence réalisée par un avocat de Montpellier (dans un document Word) dont j'ai été informé par un collègue. Cet avocat a réuni de nombreuses jurisprudences ayant trait aux insultes et injures proférées par des salariés et des employeurs et il évoque leurs conséquences sur le contrat de travail. Vous pourrez constater que la justice n'est pas la même partout Vous pouvez aussi accéder à ce texte sur le blog de l'auteur. http://www.rocheblave.com/avocat-montpellier/petit-guide-des-grossieretes-au-travail/ PREVENTION DES RISQUES PSYCHOSOCIAUX (CESE) Une récente lettre d'information évoquait l'avis du Conseil économique, social et environnemental (Cese) sur la prévention des risques psychosociaux (RPS) dont il s'était auto-saisi. L'avis définitif et complet, publié le 29 mai 2013, est maintenant disponible et vous pourrez le télécharger sur le site du Cese à l'adresse ci-dessous et le consulter parmi les documents joints. La rapporteure de cet avis est Mme S. Brunet. Cet avis émet un certain nombre de recommandations que nous déclinerons. Il aborde les risques psychosociaux et leur prévention sous plusieurs angles dont nous ne retiendrons que certains qui apparaissent les plus intéressants. Tout d'abord, apparait à au moins deux reprises dans le texte un discours, qui paraît inspiré par le Medef, considérant que " les RPS sont multifactoriels, et que, sans nier en aucune façon le rôle de l organisation et des conditions de travail, ils se caractérisent parfois par une imbrication plus ou moins forte de facteurs professionnels et extraprofessionnels (familiaux, personnels). Cette porosité des risques psychosociaux, 4

mêlant fréquemment les sphères professionnelle et privée, y compris intime, ajoute à leur complexité dans l identification des causes. " (p. 12) On retrouve cette approche plus loin " Phénomène multiforme et plurifactoriel, les risques psychosociaux demeurent difficiles à identifier car ils se caractérisent en effet par une imbrication plus ou moins forte de facteurs professionnels et extraprofessionnels (familiaux, personnels). " (p. 65) Or, selon la définition donnée par le ministère du travail, et citée page 11 de l'avis, les risques psychosociaux sont des risques professionnels. L'imbrication qu'il peut y avoir avec la vie privée concerne donc les effets pathologiques des risques psychosociaux qui peuvent effectivement interagir avec des effets psychiques résultant du retentissement de situations personnelles. Les facteurs de risques psychosociaux sont eux assez bien identifiés selon les six axes définis par la mission du groupe d'experts présidé par Michel Gollac. Mais certains n'ont de cesse de vouloir tout mélanger afin d'éviter que les employeurs assument leurs responsabilités. On connait assez bien les discours sur la "fragilité" des salariés, le déni de l'origine professionnelle des suicides et la recherche systématique de causes extérieures à l'entreprise. Pourtant, selon ma propre expérience, les salariés indiquent assez bien quelle est la part du privé et du professionnel lorsqu'ils ont des problèmes psychiques et ils ne sont pas souvent à essayer d'attribuer au travail ce qui relève de la vie privée. Des atteintes sous-évaluées Une étude menée par la Cnamts a montré que les troubles mentaux et du comportement étaient à l'origine de 600 à 700 accidents du travail et de trajet ainsi que de 20 à 40 maladies professionnelles par an. Le réseau national de vigilance et de prévention des pathologies professionnelles (RNV3P) a évalué, en 2009, à environ 1000 cas les pathologies psychiques en lien avec le travail. Le directeur des risques professionnels de la Cnamts indique qu'il y a, par an, moins de 1000 situations reconnues comme liées à des risques psychosociaux mais que " Ces chiffres, qui peuvent sembler modestes, sont probablement très sous-évalués et traduisent avant tout une difficulté de reconnaissance de ces risques ". (p. 15) Et, parmi ces risques psychosociaux, le harcèlement sexuel est encore plus occulté que les autres risques psychosociaux tant dans le secteur privé que dans le secteur public, comme le rapporte l'association contre les violences faites aux femmes. (p. 16) Mais des risques présents qui constituent un enjeu majeur de santé publique Les RPS constituent, selon l'avis du Cese, " une question majeure de santé publique et figurent à ce titre dans le Plan santé au travail 2010-2014 ". Selon l'observatoire de la vie au travail, au vu des résultats de son baromètre 2011, 40.7% des salariés se sentent exposés au stress dans leur entreprise (contre 65% en 2010). Les RPS entraînent des troubles psychiques et psychosomatiques mais aussi des troubles musculosquelettiques, des maladies cardiovasculaires et des accidents du travail. (p. 16) Les auteurs évoquent des études en cours au niveau mondial afin de tenter de mieux préciser l'importance de ces facteurs de risques psychosociaux et leur intrication avec d'autres facteurs de risque de ces pathologies. Des études, moins nombreuses et moins abouties, s'intéressent aux effets d'un stress durable sur le fonctionnement du système immunitaire et, à terme, sur les risques d'apparition de diabète ou de maladie auto-immune. Les RPS ont en effet aussi des conséquences somatiques avec des relations avec les TMS et les atteintes cardiovasculaires assez bien documentées. Les premiers résultats de l'étude Sumer indiquent une augmentation de l'intensité du travail, une diminution de l'autonomie pour les cadres et davantage de "tension au travail". Il existe aussi une part importante des salariés se plaignant de comportements hostiles sur leur lieu de travail (22% en 2010 contre 16% en 2003). (p. 17) 5

D'autres enquêtes menées en France confirment la présence de facteurs de risques psychosociaux : l'enquête Santé et itinéraire professionnel (SIP), en 2007, montre que 11% des salariés vivent des tensions avec le public et 33% disent en vivre parfois ; l'enquête Changements organisationnels et informatisation (COI) de 2007 estime que 64% des salariés qui ont vécu des changements n'ont pas été consultés lors de leur mise en place ; l'enquête SIP indique que 6% des salariés sont toujours ou souvent confrontés à des conflits éthiques et qu'ils sont un tiers à l'être toujours, souvent ou parfois. Dans cette même étude, 15% des personnes se disent être, parfois ou toujours, empêchées de faire un travail de qualité. Le sentiment d'insécurité dans l'emploi, avec, parfois ou toujours, la peur de perdre son emploi, ceci ayant été mesuré avant la crise financière de 2008, concernait 23% des sujets. (p. 18) Le Réseau national de vigilance et de prévention des pathologies professionnelles, déjà cité, indique, dans son rapport 2011, que 22% des pathologies en relation avec le travail accueillies dans les consultations de pathologie professionnelle correspondent à des psychopathologies. Dans une étude réalisée auprès de 500 enseignants, 24% d'entre eux ressentaient au travail un état de tension permanent et 14% évoquaient une situation d'épuisement professionnel. (p. 20) Le coût du stress estimé par l'inrs, pour 2007, serait compris, en France, entre 1.9 et 3 milliards. (p. 21) Les mutations du monde du travail C'est le facteur explicatif du développement aussi important des risques psychosociaux et c'est aussi le chapitre de cet avis que j'ai trouvé le plus intéressant. Les auteurs de l'avis distinguent des mutations internes à l'entreprise et des évolutions externes. Les causes internes La charge de travail a augmenté du fait de l'intensification du travail dans un contexte de mondialisation et de concurrence accrue entre entreprises. (p. 22) Afin de répondre à cette concurrence accrue, les entreprises peuvent ressentir la nécessité de modifier leurs méthodes de travail et de mettre en place des organisations du travail visant à optimiser leurs ressources. Le développement du lean management [dont nous avons parlé dans la lettre d'information du 19 mai 2013], plus marqué en France que dans les autres pays européens, est susceptible de participer à la détérioration des conditions de travail et à la survenue d'atteintes de la santé. D'autant plus que l'aspect "participatif" de cette organisation du travail est souvent gommé au profit de la mise en oeuvre de dispositions décidées par la hiérarchie. Les relations de travail ont aussi été touchées par l'évolution des entreprises, tant dans les aspects des relations des salariés avec leurs supérieurs hiérarchiques qu'entre eux. Le maître mot est l'individualisation avec mise en oeuvre de pratiques très répandues d'évaluation individuelle qui peuvent avoir un effet pervers sur la santé mentale de certains salariés. La technique du benchmark visant à comparer les performances individuelles des salariés entre eux s'est aussi répandue dans de nombreux secteurs avec un coût humain certain. [NDR Voir dans la lettre d'information du 16 septembre 2012 le commentaire d'un jugement du tribunal de grande instance de Lyon qui a interdit la mise en œuvre d'un benchmark dans les Caisses d'épargne de la région du fait du risque que cela faisait courir à la santé des salariés.] Il y a aussi en France une faiblesse du dialogue social et des relations sociales au sein des entreprises. Or, des exemples étrangers montrent qu'un dialogue social de qualité est un 6

facteur important de performance économique de l'entreprise et de bonnes conditions de travail. La France a été longtemps marquée par un haut niveau de conflictualité au sein des entreprises, qui a baissé ces 30 dernières années, mais a été relayé par un phénomène de désenchantement des salariés qui se traduit par des effets délétères sur le fonctionnement des entreprises : retards, malfaçons, absentéisme et retentit sous forme de stress sur les salariés. (p. 24) Participe à ce climat dégradé le fait que l'expression des salariés sur leurs conditions de travail tend à se réduire. De même, d'ailleurs, que tous les espaces de discussion et d'autonomie dans le travail ont été restreints. La perte du sens du travail et les conflits de valeur jouent aussi un rôle dans le climat actuel dans les entreprises. Le fait que les salariés ont le sentiment de ne pas pouvoir "bien faire leur travail" ainsi que les conflits de valeur - lorsque les valeurs morales des salariés sont en contradiction avec ce que l'on attend d'eux - participent aux facteurs de risques psychosociaux. A noter le fait qu'il y a dans le secteur public une inquiétude particulière quant au risque de disparition du service public. Les réorganisations et restructurations d'entreprises peuvent aussi générer une insécurité et un mal être au travail et retentir sur la santé des salariés, surtout lorsqu'elles sont réalisées sans anticipation. Les mobilités subies accompagnant certaines réorganisations représentent une source de stress. [NDR Les mobilités "contraintes" ont été au cœur des difficultés ressenties par les agents de France Télécom au moment de la crise vécue par cette entreprise à la fin des années 2000.] (p. 25) Les restructurations destinées à améliorer la compétitivité ont augmenté cette dernière décennie et elles entraînent des réorganisations du travail et des réductions d'effectifs. Le rapport Hires (en 2009) avait montré le retentissement de ces restructurations sur la santé physique et psychologique des salariés. [NDR Rapport Hires : voir les effets sur la santé psychique et physique pages 37 et 38 - http://www.travaillermieux.gouv.fr/img/pdf/raphires.pdf.] Les effets des réorganisations et restructurations sont d'autant plus nocifs qu'elles sont répétées, mal accompagnées et peu expliquées aux salariés. La conception et l'aménagement des espaces de travail peuvent aussi représenter une source de gêne, d'insatisfaction et de stress au travail. (p. 26) A ce titre, les "open space" sont représentatifs du risque de générer ces difficultés. Les auteurs de l'avis citent une étude récente réalisée à partir des données de 18 CHS-CT qui a mis en évidence les effets plus souvent négatifs que positifs des espaces de travail de type "open space". Parmi les effets indésirables figurent une fatigabilité accrue en raison du bruit, les perturbations par les effets du bruit, en particulier du téléphone, l'impossibilité d'adapter son éclairage en fonction de ses besoins, etc Un architecte, interrogé par la rapporteure de l'avis, indique que la cause principale du stress ne résiderait pas en soi dans la notion d'open space mais dans la densification des espaces en termes d'occupation et l'absence d'espaces de retrait ou d'isolement. Les outils informatiques et les technologies de l'information et de la communication (TIC) peuvent aussi participer à la diffusion des risques psychosociaux car ils retentissent sur les organisations du travail facilitant leur rationalisation mais aussi leur complexification et les changements incessants. Les TIC peuvent ainsi augmenter l'intensité du travail, permettre un renforcement des contrôles qui joue sur l'autonomie des salariés et affaiblir les relations interpersonnelles et/ou les collectifs de travail. (p. 27) Les TIC peuvent aussi avoir pour effet pervers de brouiller les limites entre vie privée et vie professionnelle et créer ainsi une pression accrue de tous les moments. Ce qui amène un chargé de mission de la DGT à indiquer que " le défi à relever est bien aujourd hui 7

celui de la régulation des usages des TIC, d inscrire ces technologies dans un cadre de travail respectueux des salariés tout en réalisant des gains de productivité. Il souligne le fait que l effort de formation continue des entreprises concernant les TIC a singulièrement fléchi depuis les années 2000 alors même que les entreprises ont continué à investir dans leurs systèmes informatiques. " Un exemple de l'utilisation de ces TIC est le métier de la relation client, avec le risque d'exposition aux RPS des téléopérateurs. (p. 28) Les causes externes liées au contexte général Au premier plan figure l'environnement économique de plus en plus compétitif auquel les entreprises doivent s'adapter de plus en plus vite et elles doivent s'engager " dans une série de changements technologiques, managériaux et organisationnels, afin d augmenter leur productivité. " qui peuvent comporter certains risques pour la santé des salariés (stress, dépression, tension, anxiété, etc ). La mondialisation ainsi que la financiarisation croissante participent, de même, à créer une recherche de productivité qui retentit sur les salariés. La crise actuelle avec le risque de chômage génère aussi chez les salariés un sentiment d'insécurité et les rend plus démunis face aux difficultés rencontrées au travail [NDR - Il n'y a pas de possibilité d'échappatoire comme en période de plein emploi et, de plus, cela incite certains à accepter, pour pouvoir vivre, des emplois précaires avec des conditions de travail déplorables.] Les restructurations liées à la crise entraînent la mise au chômage de salariés et, de ce fait, on assiste souvent à une détérioration des conditions de travail de ceux qui restent en emploi du fait de l'augmentation de la charge de travail liée aux départs. (p. 29) L'arsenal juridique pour la prévention des RPS La France dispose d'un dispositif juridique assez dense orienté vers la prévention et la protection des salariés. Mais ce dispositif n'est pas stabilisé du fait d'une jurisprudence très évolutive et de dispositions légales encore imprécises. Le cadre légal L'article L. 4121-1 du Code du travail, transposant les principes de la directive européenne 89/391, prévoit que l'employeur doit prendre les mesures appropriées pour protéger la santé physique et mentale des travailleurs. L'article L. 4121-2 énonce les grands principes de la démarche globale de prévention et l'article L. 4121-3 impose à l'employeur l'évaluation des risques qui doit être retranscrite dans un document unique. (p. 30) Sur la base de cette évaluation, l'employeur doit mettre en œuvre les mesures de prévention adéquates afin de protéger la santé et la sécurité des travailleurs. Dans les entreprises de plus de 50 salariés, l'employeur doit présenter au CHS-CT un rapport écrit faisant le bilan de la situation générale de la santé, de la sécurité et des conditions de travail ainsi qu'un programme de prévention des risques professionnels et d'amélioration des conditions de travail. Pour les entreprises de plus de 300 salariés, le bilan social prévu à l'article L. 2323-70 fournit des données permettant d'apprécier l'état de santé et de sécurité dans l'entreprise (accidents du travail et maladies professionnelles, maladies à caractère professionnel, absentéisme, etc ). Des dispositions spécifiques sur les harcèlements moral et sexuel L'article L. 1152-1 du Code du travail dispose que " Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. " 8

La définition du harcèlement sexuel dans le Code pénal (article 222-33) a été modifiée et précisée par la loi du 6 août 2012 et aboutit à cette stipulation à l'article L. 1153-1 du Code du travail : " Aucun salarié ne doit subir des faits : 1 Soit de harcèlement sexuel, constitué par des propos ou comportements à connotation sexuelle répétés qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ; 2 Soit assimilés au harcèlement sexuel, consistant en toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d'obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l'auteur des faits ou au profit d'un tiers. " (p. 31) Les droits des salariés et de leurs représentants Les salariés, les délégués du personnel ou le représentant du personnel au CHS-CT doivent alerter l'employeur de toute situation de travail dont ils ont un motif raisonnable de penser qu'elle présente un danger grave et imminent pour la vie ou la santé du salarié (article L. 4131-1 du Code du travail). Un droit de retrait peut être mis en œuvre à cette occasion (article L. 4131-3). L'article L. 1152-6 du Code du travail prévoit une possibilité de médiation dans le cas d'une situation de harcèlement moral à la demande de la victime ou de la personne qui est mise en cause. L'obligation de prévention de la pénibilité au travail Cette nouvelle obligation issue de la loi de réforme des retraites du 9 novembre 2010 est codifiée à l'article L. 4121-3 du Code du travail. Elle ne prend néanmoins pas en compte, à l'heure actuelle, parmi les facteurs de pénibilité [article D. 4121-5], l'exposition à des facteurs de risques psychosociaux. (p. 32) L'exposition aux facteurs de pénibilité doit être mentionnée dans la fiche de prévention des expositions prévue à l'article L. 4121-3 du Code du travail. (p. 33) Une jurisprudence très évolutive D'un point de vue individuel, la jurisprudence a consacré l'obligation de sécurité de résultat qui incombe à l'employeur. L'avis du Cese tempère cette obligation : " En principe, l obligation de résultat s oppose à l obligation de moyens. Mais on ne saurait raisonnablement exiger d un employeur que tous ses salariés soient, à tout moment, dans un parfait état de santé physique ou mentale, celle-ci n étant qu en partie liée à leurs conditions de travail. Il faut plutôt voir dans cette obligation un principe d action, guidé par une exigence d «effectivité» qui a été énoncée par la chambre sociale dans l attendu de principe suivant : «Attendu que l employeur, tenu d une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l entreprise, doit en assurer l effectivité» (Soc., 28 février 2006). " [NDR - Sur ce thème, voir l'article écrit par S. Fantoni-Quinton et P.Y. Verkindt dans le n 74 des Archives des maladies professionnelles et de l'environnement : " Obligation de sécurité de résultat de l'employeur : blocage ou avancée? " (p. 153-155).] Au niveau collectif, des juges ont eu à se prononcer sur la mise en oeuvre de certaines mesures de gestion du personnel qui ont pu être considérées comme constitutives de harcèlement moral. (p. 33) Ainsi, les juges ont pu considérer qu'une méthode de management peut être la cause d'un harcèlement moral. Les juges ont aussi été amenés à suspendre des projets de réorganisation d'entreprise, en contradiction avec la règle de ne pas interférer avec le pouvoir de direction de l'employeur, lorsque cette réorganisation pouvait compromettre la santé et la sécurité des salariés. 9

Un cadre juridique imprécis pour les RPS Les RPS ne sont pas définis dans le Code du travail qui n'utilise d'ailleurs pas ce terme. Néanmoins, certains RPS - le stress, les harcèlements et la violence - ont été pris en compte dans des accords nationaux interprofessionnels avec des définitions assez consensuelles. Il n'existe pas, à l'heure actuelle, de cadre réglementaire spécifique traitant des RPS bien qu'ils soient devenus une priorité de santé publique. (p. 35) Ainsi, le Code du travail ne permet de gérer les RPS qu'à travers des obligations générales de prévention et de protection de la santé et de la sécurité des salariés et le traitement spécifique des harcèlements moral et sexuel. Encore que, à la différence de la jurisprudence, l'article L. 1152-1, visant le harcèlement moral, s'en tient à des notions de relations individuelles et ne prend pas en compte l'aspect organisationnel. (p. 36) LES RECOMMANDATIONS DE L'AVIS DU CESE Prévenir les risques psychosociaux en s'appuyant sur des principes d'action clairement affichés Les auteurs de l'avis indiquent que la prévention ne réside pas uniquement, ni même principalement, dans des évolutions législatives ou réglementaires mais dans des changements des pratiques de management et dans une bonne gouvernance. Parmi ces principes d'action : Principe d'action n 1 - Intégrer la santé au travail comme une composante de la stratégie globale de l'employeur. Les employeurs étant les premiers acteurs de la prévention, il est nécessaire qu'ils intègrent les questions de santé et de sécurité au travail dans la stratégie de l'entreprise. Et ceci doit être abordé au sein des plus hautes instances, au niveau de la gouvernance de l'entreprise, c'est-à-dire le conseil d'administration ou de surveillance. La présence de représentants du personnel dans les conseils d'administration des grandes entreprises devrait aussi faciliter la prise en compte de la santé au travail dans certaines entreprises. Principe d'action n 2 - Promouvoir un dialogue social de qualité autour de la santé et du bien-être au travail. Un management par la confiance apparaît être l'une des clés de la prévention des RPS. Mais il est aussi nécessaire que les salariés et leurs représentants soient associés à la démarche de prévention. Et il est essentiel de créer des espaces de discussion, d'autonomie et d'initiative dans le travail et de généraliser les espaces d'échanges sur les pratiques professionnelles. (p. 66) Principe d'action n 3 - Privilégier les actions de prévention primaire. Ceci revient à promouvoir des formes d'organisation qui préservent la santé et la sécurité des salariés. Et cette démarche doit inclure la question des facteurs de pénibilité, de l'usure professionnelle, du maintien dans l'emploi des seniors et des sujets handicapés. Principe d'action n 4 - Repenser le rôle et la formation initiale et continue de l'encadrement. Le rôle d'alerte et de prévention des managers face aux RPS s'avère essentiel. Ce qui implique que la formation initiale et continue intègre la dimension de la santé et de la sécurité au travail et que la rémunération soit en relation aussi avec la performance sociale. Le Cese considère comme prioritaire l'amélioration de la formation des managers en santé et sécurité au travail avec une sensibilisation aux RPS. (p. 67) Améliorer la connaissance et l'évaluation des RPS Ce chapitre comprend plusieurs recommandations. Recommandation n 1 - Améliorer le suivi statistique et épidémiologique. Une enquête spécifique aux RPS pourrait être réalisée régulièrement. Par ailleurs, le 10

Cese incite l'inrs à consacrer plus de moyens à l'étude des effets du stress sur la santé. Il incite aussi à la mise en place d'un Observatoire des suicides, qui a fait l'objet d'un avis récent du Cese. (p..68) Recommandation n 2 - Confier à un collège d'expertise la mission d'élaborer un outil d'identification et de suivi des RPS en entreprise. Il s'agirait, sur le modèle du collège chargé de préconiser des indicateurs de RPS, de confier à des experts, incluant l'inrs et l'anact, la tâche d'élaborer un outil d'identification et de suivi des RPS en entreprise. Recommandation n 3 - Identifier les RPS dans le document unique d'évaluation des risques (DUER). Pour le Cese, il serait opportun que le DUER comprenne systématiquement une évaluation des RPS par unité de travail, de préférence à partir d'une grille d'évaluation simple et opérationnelle. (p. 69) A ce titre, il serait intéressant de faire évoluer l'article L. 4121-3 du Code du travail, qui ne spécifie pas précisément l'évaluation des risques pour la santé physique et psychique, vers la formulation de l'article L. 4121-1 qui évoque la préservation de la santé physique et psychique. Recommandation n 4 - Associer systématiquement les acteurs de la prévention à l'évaluation et à la prévention des risques. Il s'agirait d'associer les instances représentatives du personnel, et en particulier le CHS-CT, de même que le service de santé au travail, à l'élaboration du DUER. Ce qui ne constitue pas actuellement une obligation. Le Cese souhaiterait rendre obligatoire la consultation du CHS-CT et des services de santé au travail sur le DUER. Recommandation n 5 - Réactiver le droit d'expression des salariés en l'articulant avec la prévention des risques professionnels. Le Cese préconise de réactiver le droit d'expression des salariés afin qu'il s'exerce prioritairement sur l'évaluation des risques professionnels, notamment psychosociaux, afin de réduire ces risques et d'améliorer les conditions de travail. Chaque salarié pourrait disposer d'un quota d'heures d'expression à cet effet. (p. 70) Recommandation n 6 - Faire du bilan social un outil de la performance sociale. Ce bilan social est prévu pour les entreprises de plus de 300 salariés. Le Cese préconise l'intégration dans ce bilan social annuel " d indicateurs sur la santé et la qualité de vie au travail, mais aussi de dispositions concernant les avis rendus par les préventeurs (CHSCT, services de santé au travail etc.), des mesures de prévention mises en oeuvre, permettrait de faire du bilan social un outil de la performance sociale. " Stabiliser er clarifier le cadre juridique de la santé au travail Recommandation n 7 - Prendre en compte dans le droit positif certaines évolutions jurisprudentielles. Le Cese considère que la France dispose, en matière de prévention et de protection de la santé, d'un dispositif juridique conséquent mais qui n'est pas encore stabilisé du fait d'une jurisprudence très évolutive et de dispositions légales dont certaines sont encore imprécises. Le Cese préconise donc d'intégrer dans le Code du travail les évolutions jurisprudentielles en matière de santé et de sécurité au travail. Il précise que cette préconisation n'a pas recueilli un large consensus! (p. 71) Recommandation n 8 - Renforcer la prévention des RPS en amont des restructurations ou réorganisations. Dans ce domaine, le Cese " préconise de renforcer la prévention des risques psychosociaux en amont des restructurations ou réorganisations, notamment en rendant obligatoire la réalisation - en lien avec les institutions représentatives du personnel - d une étude d impact afin d en évaluer les conséquences organisationnelles et humaines. " 11

Recommandation n 9 - Faciliter le recours à la procédure de médiation tant pour les salariés que pour les demandeurs d'emploi. Il est prévu dans le Code du travail une procédure de médiation en cas de situation de harcèlement moral [article L. 1152-6]. Le Cese suggère que les pouvoirs publics prennent toutes dispositions réglementaires afin que les victimes puissent mettre en œuvre la procédure de médiation tant pour le harcèlement moral que sexuel. (p. 72) Recommandation n 10 - Encadrer les démarches volontaires de certification en santé au travail. Il s'agirait en l'occurrence soit d'instaurer un label " Santé et qualité de vie au travail "délivré par l'anact, soit d'établir une procédure de certification volontaire à partir d'une référentiel élaboré par l'anses. Mobiliser davantage les différents acteurs de la prévention Recommandation n 11 - Mieux accompagner les PME/TPE en matière de santé et de sécurité au travail. Le Cese recommande de prêter une attention particulière aux PME/TPE afin de les accompagner dans la démarche d'évaluation des RPS [NDR Je rajouterais que ce serait important pour l'ensemble des risques!], y compris si elles sont en situation de sous-traitance. Dans les petites entreprises, le Cese constate le manque de formation des délégués du personnel au sujet de la santé et de la sécurité au travail. (p. 73) Il conviendrait donc d'augmenter les moyens, les missions et la formation des délégués du personnel afin qu'ils puissent assumer une fonction de conseiller de prévention. Il serait aussi envisageable de créer des CHS- CT interentreprises. Enfin, le Cese préconise un dialogue social territorial à l'instar des Commissions paritaires régionales interprofessionnelles de l'artisanat qui permettent des actions concrètes de prévention en santé au travail sur une zone géographique. Recommandation n 12 - Renforcer les moyens d'action du CHS-CT. Le Cese recommande une montée en puissance du CHS-CT, de mieux articuler son action avec celle du comité d'entreprise et de faire passer la durée du mandat de 2 à 4 ans. Le Cese recommande aussi la création d'un CHS-CT central ou de groupe pour les grandes entreprises, ce qui permettrait d'aborder les questions de santé et de sécurité au travail au plus haut niveau de l'entreprise. (p. 74) Recommandation n 13 - Renforcer la mission de veille sanitaire des services de santé au travail. Voici les termes exacts des attentes du Cese vis-à-vis des services de santé au travail : " D abord, il conviendrait de veiller à ce que soient bien systématiquement élaborées et mises à jour les fiches d entreprise - obligatoires pour toutes les entreprises quel que soit leur effectif - par le médecin du travail dans la mesure où elles constituent un document clé dans la démarche de prévention. En outre, ces fiches d entreprises doivent, autant qu il est possible, s articuler avec le DUER élaboré par l employeur. Ensuite, les services de santé au travail devraient être davantage sollicités en vue de réaliser des enquêtes annuelles, à l occasion des visites médicales, sur le stress au travail à partir de questionnaires anonymes. Enfin, partant du constat que les salariés en situation de souffrance au travail consultent plus spontanément leur médecin traitant que les services de santé au travail, il semble nécessaire de renforcer le travail en réseau des différents professionnels de santé, qu il s agisse de la médecine du travail, de la médecine de ville et des services hospitaliers. Les échanges entre ces professionnels gagneraient à être généralisés et davantage formalisés. De même, la formation initiale des professionnels de santé devrait intégrer les enjeux de la santé au travail. " 12

Recommandation n 14 - Promouvoir le bon usage des TIC. L'objectif serait d'éviter les effets délétères de l'utilisation des TIC et de réguler leur utilisation tant par l'employeur que par les salariés. (p. 75) Le Cese envisage deux pistes d'action. D'une part, l'ouverture d'un dialogue sur la mise en œuvre des process informatiques avec les représentants du personnel et les utilisateurs des outils informatiques et de communication lors de l'introduction d'un nouveau système d'information dans l'entreprise. D'autre part, il s'agirait de promouvoir le bon usage des TIC, en particulier des messageries électroniques, afin d'éviter qu'elles n'interagissent avec la vie personnelle et les temps de repos. Veiller à la mise en œuvre de l'accord de 2009 et prolonger les actions engagées dans la fonction publique (FP) Recommandation n 15 - Elaborer et mettre en œuvre pour chaque employeur public un plan d'évaluation et de prévention des RPS. Il s'agit de mettre en œuvre de façon effective l'obligation d'évaluation des risques au sein de la fonction publique. Recommandation n 16 - Renforcer le maillage des CHS-CT dans la fonction publique. La règle de création des CHS-CT à partir de 50 agents s'impose dans les FP territoriale et hospitalière mais obéit à des règles plus complexes pour la FP d'état. (p. 76) Le Cese préconise donc d'appliquer les règles de création des CHS- CT du privé à la FP d'état. Recommandation n 17 - Améliorer le fonctionnement des instances médicales. Le propos du Cese est d'améliorer les délais d'instruction des dossiers des agents par les comités médicaux et les commissions de réforme. Recommandation n 18 Faire évoluer le régime de l'imputabilité au service public des accidents et des maladies professionnelles. L'idée serait de rapprocher les règles de prise en charge, dans la fonction publique, des accidents et des maladies professionnelles de celles en cours pour le privé. Il faudrait donc une réflexion prioritaire sur le régime d'imputabilité. (p. 77) Recommandation n 19 - Elargir le droit à la protection des fonctionnaires aux faits de harcèlement. Le Cese propose d'élargir la protection apportée aux fonctionnaires par l'article 11 de la loi du 11 juillet 1983 aux faits de harcèlement moral et sexuel. L'article 11, à l'alinéa 3 stipule que " La collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l occasion de leurs fonctions, et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté. " (p. 77/78) Améliorer la détection et la prise en charge des victimes Recommandation n 20 - Détecter et mieux accompagner les salariés en situation de détresse. Le Cese préconise la création de dispositifs d'écoute dans les entreprises et dans les administrations pour faire bénéficier les salariés d'un premier soutien psychologique. Et il incite tous les acteurs de l'entreprise à la vigilance (managers, collègues, représentants du personnel, médecins du travail). [NDR On peut s'interroger sur l'efficacité des dispositifs d'écoute mis en place par les entreprises quand on sait que, par exemple, Renault disposait d'un tel système et que cela n'a pas empêché la survenue de graves problèmes.] Recommandation n 21 - Assurer un meilleur suivi médical post-licenciement des demandeurs d'emploi. Voilà une proposition a priori complètement irréaliste du Cese lorsque l'on connait déjà les difficultés qu'ont les services de santé interentreprises à assurer le suivi des salariés de leur effectif : " Dans une logique de «portabilité» des droits, et avec le souci de maintenir un lien avec le travail, le 13

Conseil propose que les demandeurs d emploi puissent continuer à bénéficier d un suivi médical par les services de santé au travail pendant une période, à déterminer par les partenaires sociaux, suivant la rupture du contrat de travail. " (p. 78) Recommandation n 22 - Adapter les règles de prise en charge par la branche AT/MP. Le Cese constate l'absence de tableau de maladies professionnelles pour les conséquences des RPS et évoque les travaux du groupe de travail des maladies professionnelles du Coct sur les psychopathologies rapportés ci-après dans le commentaire du rapport de ce groupe de travail. Le Cese souhaite que la reconnaissance des risques psychosociaux comme facteurs de maladies professionnelles ou d'accidents du travail puisse progresser rapidement et qu'une négociation interprofessionnelle s'engage sur cette question pour assouplir les critères de reconnaissance. Recommandation n 23 - Développer les unités hospitalières de consultations " santé psychologique et travail ". Le Cese évoque les consultations de pathologies professionnelles où " le médecin ou les médecins écoutent et établissent un diagnostic médical. Ils peuvent ensuite conseiller le salarié - ou le médecin traitant, le médecin du travail ou le médecin psychiatre - dans la prise en charge médicale et socioprofessionnelle et les démarches administratives. Enfin, le médecin peut rédiger un rapport médical - et si besoin un certificat médical initial - en vue d une éventuelle déclaration en maladie professionnelle. " Le Cese indique que ces équipes sont peu nombreuses et souhaiterait les développer " notamment sous la forme d équipes pluridisciplinaires (psychiatres, psychologues du travail etc.) qui auraient notamment pour mission d effectuer une première évaluation médico-légale et psychologique des personnes en souffrance, puis ensuite de les orienter dans un parcours de soins. " http://www.lecese.fr/sites/default/files/pdf/avis/2013/2013_12_prevention_risques_psych o.pdf PRISE EN COMPTE EN MALADIE PROFESSIONNELLE DES EXPOSITIONS AUX RISQUES PSYCHOSOCIAUX Vous pourrez trouver, en document joint, et à l adresse ci-dessous, l article de la revue Références en santé au travail - n 133 du 1 er trimestre 2013 (p. 75-86) - qui reprend le compte rendu de la première partie du rapport du groupe de travail des maladies professionnelles du Coct consacré aux psychopathologies. Cet article est intitulé " Pathologies d origine psychique d origine professionnelle Partie 1 : pathologies psychiques. " L objectif de ce groupe de travail était de faciliter la prise en charge au titre des maladies professionnelles des atteintes liées aux risques psychosociaux, en particulier les atteintes psychiques. Le groupe des maladies professionnelles du Coct a choisi de rester dans le cadre juridique actuel, c est-à-dire de ne pas viser, dans un premier temps, la création d un tableau de maladie professionnelle pour ces troubles mais de faciliter le passage devant les CRRMP (les comités régionaux de reconnaissances des maladies professionnelles) au titre de l alinéa 4 de l article L. 461-1 du Code de la Sécurité sociale. Aussi, un groupe de travail a reçu en janvier 2010 un mandat du groupe de travail qui comprenait l objectif suivant : " Réaliser une typologie descriptive et nosologique des pathologies d origine psychique susceptibles d être examinées par les CRRMP en précisant notamment pour ces pathologies les diagnostics des étiologies professionnelles et extra- 14

professionnelles, les critères de stabilisation permettant de fixer un taux d incapacité permanente et le niveau de gravité à partir duquel il est possible de fixer un taux d incapacité permanente au moins égal à 25%. Formuler des recommandations afin d aider les CRRMP à apprécier les liens entre ces pathologies et l activité professionnelle. Investiguer d autres voies d amélioration de la prise en charge des pathologies psychiques liées à l activité professionnelle. " Les problèmes majeurs qu avait à résoudre le groupe de travail pour aller dans cette voie étaient : la difficulté pour les salariés atteints de troubles liés aux risques psychosociaux à arriver devant le CRRMP. Pour cela, il faut en effet que le médecin-conseil détermine une incapacité permanente (IP) d au moins 25%. Or, jusqu à une lettre réseau du directeur des risques professionnels de la Cnamts en date du 4 avril 2012 [voir la lettre d'information du 6 mai 2012], la détermination d une IP nécessitait la consolidation de l état de santé et donc la coupure des indemnités journalières ; la grande hétérogénéité du traitement des dossiers de demande de reconnaissance en maladie professionnelle des atteintes dues aux risques psychosociaux liée en partie à la difficulté à établir " le lien essentiel et direct ", indispensable selon l'alinéa 4 de l'article L. 461-1, entre la pathologie et l'activité professionnelle. Après huit réunions, les partenaires sociaux membres du groupe de travail, présidé par le Pr Dally et soutenu par la présence de trois experts - deux psychiatres et une spécialiste de pathologie professionnelle - a établi un rapport, repris dans l'article de Références en santé au travail, dont nous allons aborder les points les plus importants. Les pathologies susceptibles d'être prises en compte Les pathologies psychiques graves suivantes ont été retenues car des études épidémiologiques en ont montré une prévalence élevée dans les situations de violence psychologique au travail : la dépression (représentant la plus grande partie des cas présentés aux CRRMP), l'angoisse généralisée, l'état de stress post-traumatique, non pas dans sa forme classique, qui peut être prise en compte au titre d'un accident du travail, mais dans ses formes suite à l'exposition à des "évènements traumatiques répétés et caractérisés ". Il est évident que l'état antérieur de la santé psychique revêt une grande importance, de même que la chronologie d'apparition des troubles par rapport à des difficultés professionnelles. L'appréciation de la gravité des pathologies pour la détermination du taux d'ip Celle-ci est nécessaire afin de permettre d'apprécier le taux d'ip. Le groupe de travail recommande d'apprécier la gravité en tenant compte du retentissement sur la qualité de vie, l'importance des altérations sur la vie relationnelle surtout en dehors du cadre professionnel [dont souvent le salarié est sorti]. Les critères suivants permettent d'avoir une approche de la gravité de la pathologie : le nombre et la durée totale des arrêts de travail, les hospitalisations éventuelles, les tentatives de suicide éventuelles, la prise de traitements psychotropes et le suivi par un psychiatre et le retentissement en dehors de la sphère professionnelle. Dès qu'il existe un retentissement significatif, un taux d'ip de 25% apparaît justifié. A la fin de l'article, en annexe 2, figure une échelle "Evaluation globale du fonctionnement" (EGF). A titre indicatif, un score inférieur ou égal à 60, sur cette échelle, peut justifier l'attribution d'une IP de 25%. Le taux d'ip provisoire doit être estimé au moment où le salarié a effectué sa demande de reconnaissance de maladie professionnelle. 15

L'établissement du "lien direct et essentiel" Le CRRMP doit établir le lien essentiel et direct entre la pathologie et l'environnement professionnel. Parmi les facteurs les plus souvent en cause, on relève les comportements agressifs avec violences verbales, humiliations, brimades, sanctions injustifiées de la part de la hiérarchie ou des collègues de travail ou de contacts professionnels. Peut aussi constituer un facteur causal la discordance entre les objectifs assignés à un salarié et les moyens alloués pour y parvenir. Pour établir le lien entre la pathologie et l'activité professionnelle, la qualité de l'enquête menée par la caisse d'assurance maladie et les éléments fournis par le médecin du travail sont particulièrement importants. Eventuellement, le CRRMP peut faire appel à un avis sapiteur. Le rapport précise certains facteurs en fonction des pathologies pouvant permettre de faciliter l'établissement du lien avec l'activité professionnelle : pour les états de stress post-traumatiques, la survenue d'un ou plusieurs évènements traumatiques caractérisés dans le cadre professionnel. Le manque de soutien social lors de la survenue d'évènements traumatiques constitue aussi un facteur de risque ; pour la dépression sévère et le trouble anxieux généralisé, les facteurs à prendre en compte sont les violences sous toutes leurs formes (verbales, physiques, humiliations, brimades, sanctions injustifiées) ainsi qu'une charge de travail excessive, une pression temporelle importante, une demande psychologique élevée avec une faible latitude décisionnelle ou un faible support social. En conséquence, des éléments d'information concernant les points suivants devront figurer dans le dossier soumis au CRRMP : la charge de travail avec les astreintes physiques et psychiques qu'elle entraîne. Les objectifs fixés et les moyens fournis, l'ambiguïté des tâches, l'existence de demandes contradictoires, de pression temporelle ou d'interruptions fréquentes lors de l'activité ; la latitude décisionnelle qui peut être appréciée par les relations hiérarchiques, les modalités de reporting, l'autonomie dans la prise de décision et l'influence sur son propre travail ; le soutien social apprécié selon la qualité des relations avec les collègues ou les supérieurs et le soutien de l'encadrement ainsi que des collègues. Dans ce cadre, le recueil de l'avis éclairé du médecin du travail, en termes de conseil apporté à l'employeur ou d'actions entreprises, apparaît tout à fait essentiel en complément de l'enquête administrative menée par la caisse ; enfin, l'existence de violences et menaces, de comportements insultants, intimidants ou humiliant par un supérieur ou un collègue devra être précisée. En annexe figurent l'échelle de dépression MADRS (Montgomery and Asberg Depression Rating Scale), l'échelle d'anxiété de Covi et l'evaluation globale du fonctionnement (EGF). Pour le rédacteur de ce résumé, les résultats de ce groupe de travail, repris dans ce rapport, représentent une amélioration certaine par rapport à la situation antérieure dans laquelle la reconnaissance des atteintes liées aux risques psychosociaux était difficile à obtenir. Le nombre de cas qui parvenait aux CRRMP était assez limité, un peu moins de 200 en 2012, ce qui est très faible lorsqu'on le compare au nombre important d'atteintes psychiques qui apparaît dans les quinzaines des maladies à caractère professionnel. Cette évolution permettra peut-être une estimation plus réaliste des effets néfastes de certaines organisations du travail ou comportements inadaptés en entreprise. 16

http://www.rst-sante-travail.fr/rst/sommaires/sommaire-133.html CIGARETTE ELECTRONIQUE ET MILIEU DE TRAVAIL? (ARTICLE "REFERENCES EN SANTE AU TRAVAIL") La réponse apportée dans le n 133 de Références en santé au travail (p. 140-143) sur la possibilité d'utiliser une cigarette électronique en milieu de travail par P. Hache et S. Basile dans l'article intitulé " Cigarette électronique Peut-on l'utiliser dans un bureau? " apparaît instructive et répond à une préoccupation très actuelle. Il m'est donc apparu intéressant d'en rapporter les éléments les plus intéressants et la conclusion. Sachant que l'afssaps recommande dans un communiqué du 30 mai 2011 (voir en document joint) de ne pas consommer de cigarettes électroniques. La cigarette électronique est un dispositif comprenant une résistance qui permet de chauffer un liquide dont la vapeur peut être inhalée par l'utilisateur (un "vapoteur"). Le liquide contient principalement du propylène-glycol ou du glycérol, des aromes et/ou de la nicotine. Ces produits ne sont pas anodins puisque, par exemple, le propylène-glycol inhalé à des valeurs dépassant celles que l'on trouve en environnement professionnel peut entraîner une irritation oculaire et des difficultés respiratoires [NDR C'est ce qui est indiqué dans la fiche toxicologique de cette substance.] La Direction générale de la santé indique que ce produit peut aussi entraîner des effets neurologiques à type d'ébriété. Il existe peu de données sur les effets du glycérol par inhalation chez l'homme. Les effets de la nicotine de ces cigarettes électroniques sont les mêmes que ceux des cigarettes classiques. Les auteurs rapportent quelques résultats d'étude sur les risques pour la santé et la qualité de l'air intérieur résultant de l'utilisation des cigarettes électroniques. Les effets sur la santé peuvent être pulmonaires (augmentation des résistances pulmonaires possiblement liée au propylène-glycol), cardiovasculaires (augmentation de la fréquence cardiaque liée à la présence de nicotine). La qualité de l'air est aussi modifiée car la cigarette électronique produit des composés organiques volatils et des particules fines ou ultrafines dans l'environnement. Cependant de nombreux paramètres influant sur l'impact sur la santé et l'environnement de la cigarette électronique ne sont pas encore connus et des études complémentaires s'imposent. Néanmoins, en l'état actuel de la législation, et en particulier de l'article L. 4121-1 du Code du travail créant pour les employeurs une obligation de préserver la santé des salariés et d'évaluation des risques, la dangerosité de ces produits doit être évaluée. Les auteurs concluent que " s'agissant de la consommation de la cigarette électronique, l'employeur, eu égard son obligation de sécurité de résultat, se doit de protéger tous les salariés d'une éventuelle exposition «passive» à ce produit qui, en raison des impuretés qu'il contient et des composés volatils et des particules libérées dans l'atmosphère, est susceptible d'être préjudiciable pour la santé. C'est pourquoi, sur la base de ce cadre juridique, l'employeur peut utiliser la voie du règlement intérieur pour interdire la consommation de cigarette électronique sur le lieu de travail (à usage collectif et bureaux individuels) et plus largement dans tous les lieux fermés et couverts qui accueillent du public. " http://www.rst-sante-travail.fr/rst/sommaires/sommaire-133.html Voici ce qui figure, au sujet de la cigarette électronique, sur le site "Service-public.fr" : " E-cigarette - Le point sur la cigarette électronique Publié le 30.05.2013 - Direction de l'information légale et administrative (Premier ministre) 17

Peut-on consommer les e-cigarettes dans son bureau, dans les boutiques ou restaurants, dans les transports en commun? Quelle est la réglementation en vigueur? En France, les cigarettes électroniques sont considérées actuellement, par défaut, comme des produits de consommation courante ordinaires dès lors qu elles ne revendiquent pas d effet bénéfique pour la santé et qu elles contiennent moins de 10 mg de nicotine avec une concentration inférieure à 20 mg/ml. Sur le lieu de travail, et par extension dans tous les lieux fermés et couverts accueillant du public (afin de protéger tous les salariés d une éventuelle exposition passive à ce produit), l employeur peut utiliser la voie du règlement intérieur pour interdire la consommation de la cigarette électronique. Cette mesure a été mise en œuvre dans certaines entreprises, s appliquant ainsi aux clients et salariés (transports en commun, grande distribution ). Le cadre légal de distribution et d utilisation de l e-cigarette reste cependant encore en discussion. Pour sa part, dans un rapport rendu public mardi 28 mai 2013, l Office français de prévention du tabagisme (OFT) a établi une liste de 28 recommandations concernant la cigarette électronique, parmi lesquelles notamment : ne pas interdire en France l utilisation de l e-cigarette, avec ou sans nicotine, ne pas freiner l accès des fumeurs aux e-cigarettes, prendre des mesures pour éviter toute promotion de l accès de l e-cigarette aux mineurs et aux sujets n ayant jamais fumé, réglementer l e-cigarette (produit, distribution, utilisation), fixer de nouvelles limites de contenus en nicotine des e-cigarettes et de leurs recharges, créer une catégorie de produits évoquant le tabagisme (PET), mieux appliquer l interdiction de la publicité en faveur de l e-cigarette interdire la vente des e-cigarettes aux moins de 18 ans, ne pas rendre possible la vente des produits évoquant le tabagisme dans les supermarchés et boutiques généralistes, indiquer clairement sur tous les emballages la composition des e-liquides, déclarer la liste des arômes et ingrédients utilisés, interdire l utilisation des e-cigarettes et de tout produit évoquant le tabagisme dans les endroits où il est interdit de fumer, ne pas promouvoir l utilisation des e-cigarettes dans les lieux non-fumeurs, déconseiller l utilisation des e-cigarettes aux femmes enceintes et allaitantes. À noter : la cigarette électronique (e-cigarette) simule l acte de fumer du tabac. Elle produit un brouillard de fines particules, appelé «vapeur» qui peut être aromatisée (tabac, menthe, fruits, chocolat...) et contenir ou non de la nicotine. À ce jour, il n y a que 3 pays européens qui interdisent d utiliser l e-cigarette partout où il est interdit de fumer (Belgique, Luxembourg et Malte). " Le Monde daté du 31 2013 mai rapporte, qu'à l'occasion de la journée sans tabac " La ministre de la santé a annoncé, vendredi 31 mai, qu'il sera interdit de vendre des cigarettes électroniques aux moins de 18 ans. Marisol Touraine se dit aussi favorable à la voir interdite, comme la vraie cigarette, dans les bars, restaurants, etc Pour ce faire, le gouvernement va saisir le Conseil d'etat pour avis. Une position radicale qui ne devrait pas faire l'unanimité parmi les Français. " 18

BIBLIOGRAPHIE Par : Thierry Rousseau " L'auteur Thierry Rousseau est sociologue du travail et des organisations. Après une thèse sur les controverses organisationnelles liées à l'implantation des nouvelles technologies en entreprise, il s'oriente vers les questions de santé et de prévention des risques au travail. Il rejoint l'anact en 2001 et rédige un ouvrage sur la régulation de la charge de travail. Il s'intéresse également aux questions d'organisation du travail. En 2012, il publie un ouvrage sur l'absentéisme. " " Résumé Pourquoi les salariés viennent-ils au travail? Pourquoi s absentent-ils s agit-il d un choix ou d une impossibilité de faire autrement? Si oui, qu est-ce qui motive ceux-ci? Thierry Rousseau est convaincu que les réponses passent par l analyse de l environnement et des conditions de travail dans lesquelles évoluent les salariés. A ses yeux, c est même le levier le plus déterminant, avec les conditions d organisation et de gestion de l entreprise. Fort de cette approche novatrice, son essai nous entraine vers un nouveau modèle d analyse de l absentéisme. Pour cela, il s appuie sur un tour d horizon critique et approfondi des différentes définitions et manifestations de l absentéisme. Et sur son expérience de terrain, au travers d analyses de cas d entreprise très fouillés. Ce faisant, l auteur nous montre qu un traitement efficace de l absentéisme est possible. " En espérant que ces informations pourront vous apporter des éléments concrets de réflexion face aux situations réelle que vous rencontrez dans votre pratique, ou votre confrontation, à la santé au travail Jacques Darmon Si vous souhaitez ne plus figurer sur cette liste de diffusion, vous pouvez m'en faire part à l'adresse suivante : jacques.darmon@club-internet.fr 19