MEMENTO DE JURISPRUDENCE Sélection d arrêts parus aux ROATF, JT et SJ Avril 2015



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MEMENTO DE JURISPRUDENCE Sélection d arrêts parus aux ROATF, JT et SJ Avril 2015 I.DROIT CIVIL DROITS REELS. CONSENTEMENT DU CONJOINT POUR TRANSFERER UNE PART DE COPROPRIETE EN INSTANCE DE DIVORCE. COMPETENCE DU CONSERVATEUR DU REGISTRE FONCIER. ATF 141 III 13 (5A_240/2014, 18 décembre 2014) Art. 201 al. 2, 204 al. 2, 965ss CC, 83ss ORF Le pouvoir d'examen du conservateur du registre foncier est limité. En effet, il ne lui appartient pas de trancher une question de droit matériel, controversée en doctrine, pour déterminer si le consentement de l'époux copropriétaire est encore nécessaire une fois la procédure de divorce pendante. Lorsque le conservateur est confronté à un acte de disposition portant sur une part de copropriété, qu'il constate que les copropriétaires sont mariés, que l'autre époux n'a pas consenti au dit acte et qu'il a des doutes quant à la nécessité du consentement de l'époux copropriétaire, il ne viole pas le droit fédéral en procédant au rejet de la demande d'inscription. En effet, alors que l'exigence du consentement de l'art. 201 al. 2 CC est claire, reconnaissable à la simple lecture de la loi, et ne souffre aucune interprétation, la portée de la rétroactivité de l'art. 204 al. 2 CC est controversée (savoir si, en cas de divorce, la dissolution du régime ordinaire rétroagit au jour de la demande ou pas). En fondant sa disposition uniquement sur l'absence de consentement de l'épouse, le conservateur a par conséquent fait, à titre préjudiciel, un choix non critiquable en tant qu'il a ainsi exprimé l'idée selon laquelle il n'a pas à interpréter la loi civile et en l'occurrence l'art. 204 al. 2 CC dans son examen. Lorsque les conditions de l'inscription au grand livre ne sont pas remplies, l'office du registre foncier doit rejeter la requête (art. 87 al. 1 ORF). Il ne peut "suspendre" l'inscription que dans certains cas particuliers, qui ne sont pas réalisés en l espèce. II. DROIT DES OBLIGATIONS CONTRAT DE BAIL A LOYER. SOUS-LOCATION. DEFAUT D AUTORISATION. RESILIATION ORDINAIRE. JT 2014 II 418-ATF 138 III 59 (4A_227/2011, 10 janvier 2012) Art. 262 al. 1, 271, 271a al. 1 let. a CO La vague possibilité d user à nouveau soi-même, le cas échéant, de la chose louée, ne justifie pas une sous-location. La loi n exclut pas, sous réserve de l interdiction de l abus de droit, d alléguer ultérieurement à la procédure de conciliation, les motifs de résiliation ; une telle allégation peut éventuellement constituer un indice en défaveur de la partie qui a donné le congé ou avoir des conséquences sur les frais ; mais la prise en considération des nouveaux motifs 1

n est pas d emblée exclue. Enfin, le fait de compléter ou de préciser les motifs de résiliation déjà présentés est sans autre admis. Le fait que le père du recourant ait toléré pendant un certain temps pour quelque raison que ce soit un comportement du locataire contraire au contrat ou à la loi n exclut pas nécessairement que ce comportement incorrect du locataire ait porté durablement atteinte au rapport de confiance qui le liait au recourant et que, partant, un congé ordinaire ne soit pas contraire aux règles de la bonne foi. Ce qui est en jeu, ce n est pas un motif de congé extraordinaire que le père a tardé à faire valoir, mais bien le rapport de confiance entre le recourant et le locataire au moment de la résiliation. La mesure dans laquelle ce rapport de confiance a été atteint, et pour quels motifs, n ont pas été établis en l espèce. III. DROIT DE LA POURSUITE ET DE LA FAILLITE FAILLITE VOLONTAIRE. ABUS DE DROIT. SJ 2015 I 181 (TF, 5A_915/2014, 14 janvier 2015, n.p. + Note du prof. S. Marchand)) Art. 191 LP Aux termes de l'art. 191 LP, le débiteur peut lui-même requérir sa faillite en se déclarant insolvable en justice (al. 1); lorsque toute possibilité de règlement amiable des dettes selon les art. 333ss LP est exclue, le juge prononce la faillite (al. 2). La jurisprudence a eu l'occasion de préciser que cette disposition institue une procédure d'insolvabilité, dont le but est de répartir les biens du débiteur de manière équitable entre tous les créanciers. Celui qui requiert volontairement sa faillite doit donc avoir quelques biens à abandonner à ses créanciers. Certes, le débiteur en tire une certaine protection puisqu'il peut opposer son défaut de retour à meilleure fortune, retrouvant la possibilité de mener un train de vie conforme à sa situation sans être réduit au minimum vital. Mais, par cet art. 191 LP, le législateur n'a pas voulu introduire et n'a pas introduit une procédure de désendettement des particuliers, pour régler le problème du surendettement des débiteurs les plus obérés qui n'ont plus d'actifs et n'ont même pas les moyens d'avancer les frais de la procédure. Selon les circonstances, une déclaration d'insolvabilité en justice peut être constitutive d'un abus de droit manifeste et il appartient alors au juge de rejeter une telle requête. Tel est en particulier le cas, lorsqu'un débiteur sollicite sa mise en faillite volontaire, alors qu'il sait que la masse en faillite ne disposerait d'aucun actif. En l occurrence, c est à bon droit que la cour cantonale a rejeté la requête de faillite volontaire du recourant en considérant qu'elle relevait de l'abus de droit manifeste. IV. DROIT PENAL ET PROCEDURE PENALE DROIT PENAL. ESCROQUERIE EN MATIERE DE PARIS SPORTIFS. JT 2014 IV 227- TPF 2013 46 (SK.2011.33) Art. 146 CP L infraction d escroquerie exige notamment que l auteur procède à une tromperie et que celle-ci induise en erreur la victime ou conforte celle-ci dans son erreur. La personne trompée doit au moins être partie de l idée que les affirmations de l auteur correspondent à la réalité. La loi exige qu une «personne», c est-à-dire un être humain, soit induite en 2

erreur. L influence sur un processus de traitement de données dans lequel aucune personne physique n est impliquée ne remplit pas les conditions de l infraction d escroquerie au sens de l art. 146 CP, faute d une tromperie. Ceci est en particulier le cas des manipulations de paris qui sont automatiquement effectués à travers Internet, c est-à-dire sans implication d une personne physique. En l espèce, il n est pas possible de retenir sur la base du dossier que des personnes physiques ont été impliquées auprès des sociétés de paris lors de la réception ou du traitement subséquent des paris évoqués par l acte d accusation. Ainsi, il convient de considérer en faveur du prévenu qu aucune personne physique n a été induite en erreur au moyen d une tromperie en ce qui concerne les paris litigieux. CPP. CONSULTATION DU DOSSIER. COORDINATION AVEC LA LEGISLATION SUR LA PROTECTION DES DONNEES. JT 2014 IV 248-TPF 2013 132 (BB.2013.75) Art. 99 al. 1 CPP Entre l ouverture formelle de la procédure pénale et sa clôture définitive, la consultation du dossier est régie par le Code de procédure pénale. S agissant d une procédure pénale clôturée, la question de sa consultation est régie par le droit de la protection des données dans le cadre duquel le recours pénal n est pas ouvert. L instance inférieure évitera des lacunes dans la protection juridictionnelle en tenant compte des particularités de la procédure pénale dans sa pesée des intérêts selon la loi sur la protection des données. CPP. LANGUE DE LA PROCEDURE. DROIT DE L AVOCAT DE S ADRESSER AU MINISTERE PUBLIC DANS L UNE DES LANGUES OFFICIELLES. SJ 2015 I 152 (TPF, BB.2014.89, 22 décembre 2014) Art. 67, 68, 78, 110 CPP, 3 LOAP, 4, 5, 6 LLC S il est vrai que l art. 6 al. 6 LLC (Loi fédérale sur les langues nationales) réserve les dispositions de la procédure fédérale et que l art. 67 CPP permet au MPC de fixer la langue de la procédure, il n en résulte pas pour autant que cette dernière s imposerait aussi aux parties. La compétence attribuée au MPC de déterminer la langue de la procédure ne doit pas être considérée comme une «disposition particulière» au sens de l art. 6 al. 6 LLC, qui limiterait le droit des parties de s adresser à l autorité dans la langue officielle de leur choix. Le Tribunal pénal fédéral a d ailleurs déjà statué dans ce sens. Aucune disposition de la LCC n exclut l avocat du droit de s adresser à l autorité dans la langue officielle de son choix. Que les avocats pratiquant en Suisse soient censés connaître les langues officielles de la Confédération n a pas pour conséquence de les contraindre à utiliser la langue de la procédure dans leurs démarches à l égard de l autorité. En l occurrence, le MPC doit donc entrer en matière sur la requête qui lui est soumise par le conseil du recourant et il ne peut contraindre celui-là à en présenter une traduction. CPP. INDEMNISATION DU DEFENSEUR D OFFICE. JT 2014 IV 173-ATF 139 IV 261 (6B_151/2013, 26 septembre 2013) Art. 135 CPP 3

L art. 135 al. 1 CPP règle l indemnisation du défenseur d office en renvoyant au tarif des avocats de la Confédération ou du canton du for du procès. Si cette réglementation prévoit un tarif réduit, celui-ci s applique sans égard à l issue du procès. CPP. DROIT DE DEMANDER LA MISE SOUS SCELLES. JT 2014 V 206-ATF 140 IV 28 (1B_231/2013, 25 novembre 2013) Art. 248 al. 1 CPP Dans le but d assurer une protection efficace du secret, le droit de demander la mise sous scellés selon l art. 248 al. 1 CPP doit être coordonné avec le droit de s opposer au séquestre fondé sur l art. 264 al. 3 CPP. Sont légitimés à demander la mise sous scellés, selon l art. 248 CPP, les personnes qui ont un intérêt juridiquement protégé au maintien du secret des documents, indépendamment de leur maîtrise effective sur ceux-ci. L autorité pénale doit octroyer d office aux ayants droit, avant la perquisition, la possibilité de demander la mise sous scellés. CPP. PROCEDURE DE LEVEE DE SCELLES SELON LE DPA (DANS LE CADRE D UNE INSTRUCTION POUR SOUPCON D ESCROQUERIE FISCALE). COMPETENCES ET VOIES DE DROIT. DELAI POUR DEMANDER LA LEVEE DES SCELLES. JT 2014 IV 85-ATF 139 IV 246 (1B_637/2012, 8 mai 2013) Art. 31 al. 2, 50 al. 3 DPA, 37 al. 2 let. b LOAP, 50 al. 1, 248 al. 2 CPP Après l entrée en vigueur du CPP, le DPA reste applicable aux cas de juridiction fédérale dans les causes relevant de droit pénal administratif. Au contraire de la réglementation de la procédure de levée des scellés selon le CPP, la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral statue (définitivement) d après le DPA sur les demandes de levée des scellés de l autorité administrative requérante. Le recours en matière pénale au TF est ouvert contre la décision de la Cour des plaintes. La disposition sur les délais de l art. 248 al. 2 CPP (20 jours) n est pas directement applicable à la levée des scellés dans la procédure d enquête du DPA. L autorité administrative requérante a cependant l obligation de tenir compte de manière adéquate du principe de célérité régissant la procédure pénale. En l occurrence, la demande de levée des scellés a été formulée un mois après la perquisition et le séquestre. Ce faisant, l AFC a respecté le principe de célérité. CPP. PROCEDURE EN CAS D OPPOSITION. DEFAUT APRES UNE CITATION. FICTION DU RETRAIT. JT 2014 IV 301-ATF 140 IV 82 (6B_908/2013, 20 mars 2014) Art. 355 al. 2 CPP La fiction légale selon laquelle l opposition est réputée retirée en cas de défaut sans excuse ne s applique que si l opposant a effectivement eu connaissance de la citation et des conséquences du défaut. Demeurent réservés les cas d abus de droit. En l occurrence, la recourant n a pas eu connaissance de la citation et n était ainsi pas non plus informée des conséquences d un défaut non excusé. Faute de prise de connaissance effective du mandat de comparution, on ne peut déduire de son absence qu elle aurait retiré son opposition et renoncé ainsi à un examen de sa cause par un tribunal. Selon les principes généraux qui régissent les mandats de comparution (art. 201ss CPP), on ne doit pas s attendre à une telle conséquence juridique. 4

CPP. CITATION A COMPARAÎTRE DU PREVENU A L ETRANGER. JT 2014 IV 296- ATF 140 IV 86 (1B_377/2013, 27 mars 2014) Art. 201 al. 1 et 2 let. f, 205 al. 1 et 4, 355 al. 2 CPP L autorité suisse peut faire parvenir une citation à comparaître au prévenu qui séjourne à l étranger. En revanche, elle n est pas habilitée à l assortir de menaces ou de sanctions. La citation représente une invitation dans la procédure en cause. Le prévenu ne peut subir aucun préjudice de fait et de droit s il n y donne pas suite. L opposition formée contre l ordonnance pénale ne peut ainsi pas être considérée comme retirée en cas d absence du prévenu à l audition fixée en Suisse. CPP. PROCEDURE SIMPLIFIEE. JT 2014 IV 102-ATF 139 IV 233 (6B_513/2012, 24 juin 2013) Art. 358ss CPP Un jugement de procédure simplifiée suppose que l accusé confirme ses aveux à l audience de jugement de première instance. La procédure de confirmation est l un des mécanismes de protection de cette procédure spéciale. L éventualité que la personne accusée révoque son acquiescement à l acte d accusation doit être retenue lorsque le tribunal ne peut se convaincre personnellement qu elle reconnaît les faits qui lui sont reprochés. CPP. INTERDICTION DE LA REFORMATIO IN PEJUS. JT 2014 IV 182-ATF 139 IV 282 (6B_712/2012, 26 septembre 2013) Art. 391 al. 2 1 re phrase CPP De même que l aggravation de la peine, une qualification juridique plus grave des faits viole l interdiction de la reformatio in pejus consacrée par l art. 391 al. 2 CPP. Tel est le cas lorsque l infraction nouvellement qualifiée est sanctionnée par la loi d une peine, minimale ou maximale, plus lourde, que lorsque des infractions supplémentaires sont retenues. Il en va de même si, en appel, le condamné est déclaré coupable d une infraction consommée en lieu et place d une tentative ou encore comme coauteur au lieu de complice. L existence d une reformatio in pejus non conforme doit être examinée à l aune du dispositif. Il n est, en revanche, pas interdit à l autorité de recours de s exprimer dans ses considérants sur la qualification juridique lorsque le Tribunal de première instance s est fondé sur un autre état de fait ou sur des considérations juridiques erronées. LCR. SCOOTER REMONTANT UNE FILE DE VEHICULES SUR LA GAUCHE. FAUTES RESPECTIVES DE L AUTOMOBILISTE ET DU CONDUCTEUR DU SCOOTER. SJ 2015 I 157 (TF, 4A_581/2014, 12 septembre 2014, n.p.) Art. 58, 59, 65 LCR Le conducteur qui, en obliquant à gauche, heurte un scooter qui remontait la file de véhicules dans laquelle il se trouvait, ne commet aucune faute, lorsqu aucun espace libre ne séparait sa position sur la voie et celle du marquage de sécurité ; cela vaut tout spécialement lorsque la voie est séparée par une berme centrale, le conducteur ne pouvant alors pas s attendre à être dépassé sur la gauche. 5

La faute du conducteur d un scooter qui remonte une file de véhicules par la gauche à une vitesse inappropriée doit être considérée comme grave. Ce n est pas nécessairement le cas si ce conducteur roule à une vitesse appropriée. V. DROIT INTERNATIONAL PRIVE ET ARBITRAGE COMPETENCE DES TRIBUNAUX DU LIEU D ORIGINE POUR CONNAÎTRE D UNE REQUÊTE COMMUNE EN DIVORCE. CONDITION DE L IMPOSSIBILITE OU DE LA TRES GRANDE DIFFICULTE D ACCEDER A LA JUSTICE DANS LE PAYS DE DOMICILE. SJ 2015 I 185 (TF, 5A_706/2014, 14 janvier 2015, n.p.) Art. 60 LDIP Selon l'art. 60 LDIP, lorsque les époux ne sont pas domiciliés en Suisse et que l'un d'eux est suisse, les tribunaux du lieu d'origine sont compétents pour connaître d'une action en divorce ou en séparation de corps, si l'action ne peut être intentée au domicile de l'un des époux ou si l'on ne peut raisonnablement exiger qu'elle le soit. Cette règle a transformé l'ancien for ordinaire du lieu d'origine (art. 7g LRDC) en un for subsidiaire (la nouvelle conception est donc plus restrictive); elle concrétise un principe général applicable aux Suisses de l'étranger. Le législateur est en effet parti de l'idée que les Suisses vivant à l'étranger doivent s'adresser en priorité aux autorités compétentes de leur pays de domicile. L'art. 60 LDIP a pour but de prévoir le for d'origine, au premier chef, lorsque les époux ou l'un d'eux sont confrontés à «l'impossibilité» ou à une «grande difficulté» d'accéder à la justice dans le pays de leur domicile. En l espèce, le Tribunal de première instance a correctement relevé que la Thaïlande dispose d'une législation de droit international privé admettant notamment la possibilité pour des époux étrangers de saisir le juge du pays de résidence d'une demande en divorce, même par consentement mutuel, pour autant, dans cette dernière hypothèse, que cette institution soit admissible au regard du droit d'origine de chaque époux, ce qui est bien le cas du droit suisse. Dès lors, on ne voit pas en quoi la cour cantonale aurait fait preuve d'arbitraire ou violé le droit fédéral en considérant que les conditions prévues par l'art. 60 LDIP n'étaient pas entièrement réalisées et en déclarant son incompétence ratione loci pour statuer sur la demande en divorce. VIII. PROCEDURE CIVILE INTERDICTION D ALLOUER DES DEPENS EN PROCEDURE DE CONCILIATION. ATF 141 III 20 (4A_463/2014, 23 janvier 2015) Art. 113 al. 1 CPC Les avis divergent sur la question de savoir si le juge ordinaire saisi ensuite de l'échec de la conciliation est en droit d'allouer des dépens pour la phase de conciliation. Seule cette dernière question se pose en l'espèce. L'art. 113 CPC s'oppose à l'allocation de dépens "en" procédure de conciliation, et non pas "pour" la procédure de conciliation. Le texte légal ne fait donc nullement obstacle à l'allocation de dépens pour cette phase procédurale dans le cadre d'un jugement au fond rendu par le juge ordinaire. 6

En outre, hormis la question de la comparution à l'audience de conciliation, il devrait souvent être malaisé, voire impossible de distinguer dans quelle mesure le travail de l'avocat était utile pour la seule procédure de conciliation, respectivement dans quelle mesure il était de toute façon nécessaire pour la procédure au fond. En effet, la préparation de la cause, en fait et en droit, en vue de la procédure de conciliation est acquise et bénéficie ensuite à la conduite du procès au fond; à défaut, ce même travail devrait en règle générale être fait pour l'introduction de l'action au fond devant le juge ordinaire. Astreindre ce juge à ventiler les dépens afin d'éliminer ceux qui sont uniquement inhérents à la procédure de conciliation apparaît dès lors peu praticable et d'un impact limité. Il sied donc de retenir que l'art. 113 CPC n'interdit pas au juge ordinaire d'allouer, dans le cadre du jugement au fond, des dépens pour la procédure de conciliation. OBLIGATION DE RESTITUTION DES DOCUMENTS. PROCEDURE DE PROTECTION DANS LES CAS CLAIRS. ATF 141 III 23 (4A_343/2014, 17 décembre 2014) Art. 257 CPC, 321a, 321b, 339a CO Selon l'art. 339a al. 1 CO (droit absolument impératif), au moment où le contrat de travail prend fin, les parties se rendent tout ce qu'elles se sont remis pour la durée du contrat, de même que tout ce que l'une d'elles pourrait avoir reçu de tiers pour le compte de l'autre. Déjà en cours de contrat, ce devoir oblige l'employé à rendre compte et à remettre à son employeur notamment tous les documents qu'il reçoit pour le compte de celui-ci (art. 321b al. 1 CO) de même que tous les documents qu'il produit dans le cadre de son travail, le résultat de son activité professionnelle appartenant à l'employeur (art. 321b al. 2 CO). Puis, après la fin du contrat, le devoir de confidentialité, qui perdure après la fin des rapports de travail (art. 321a al. 4 CO), impose au travailleur la même obligation de restitution, laquelle s'étend aux copies de documents, afin notamment de prévenir un risque de violation de secrets d'affaires ou de détournement de la clientèle de l'employeur. Une telle prétention peut exister indépendamment de l'éventuel droit d'interdire à l'exemployé d'exercer une activité concurrente (art. 340b al. 3 CO). La procédure de protection dans les cas clairs prévue par l'art. 257 CPC permet à la partie demanderesse d'obtenir rapidement une décision ayant l'autorité de la chose jugée et la force exécutoire, lorsque la situation de fait et de droit n'est pas équivoque. En matière de droit du travail, lorsque les conditions de l'art. 257 CPC en sont remplies, l'employeur peut obtenir du travailleur, par cette procédure rapide, la restitution des documents qui lui appartiennent ou qui lui reviennent au sens de l'art. 339a al. 1-2 CO, la cause n'étant pas soumise à la maxime d'office. Lorsque les documents qui sont réclamés par l'employeur sont clairement identifiables pour l'employé, il n'y a pas lieu de poser des exigences trop élevées en ce qui concerne les conclusions à prendre par l'employeur. En revanche, il n'appartient pas au juge, saisi d'une telle requête, d'instruire et de faire un tri entre les faits allégués pour déterminer ce qui doit être admis ou rejeté, les conclusions devant en effet pouvoir être admises dans leur intégralité, sous peine d'irrecevabilité. En l'espèce, l'employeur peut certes faire valoir un droit à la restitution et à la reddition de compte en ce qui concerne les documents reçus par l'employé pour son compte (art. 339a al. 1 CO) ou les documents que celui-ci a produits (art. 339a al. 1 en relation avec l'art. 321b al. 2 CO), et ce, pendant la durée des rapports de travail. En revanche, il ne dispose pas d'un tel droit pour les documents ou informations obtenues par l'employé après la fin des rapports de travail. Le juge est dans l'impossibilité d'admettre les conclusions de la requête dans leur intégralité. Le requérant ne saurait exiger de lui qu'il fasse un tri entre ce qui pourrait être admis et ce qui devrait être rejeté. Il s'ensuit que la requête déposée par l'employeur est irrecevable. 7