À la différence des modules 2 et 3 qui proposaient des cas pratiques, ce module est relativement statique.

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Transcription:

Notes pour le formateur / la formatrice À la différence des modules 2 et 3 qui proposaient des cas pratiques, ce module est relativement statique. Néanmoins, il pourrait être utile de solliciter la réaction des participants et notamment de leur demander pour chaque thème ou sous thème (voir ci après), ce qu ils savent de la législation et surtout de la pratique malgache. Le formateur/la formatrice pourra ainsi utilement compléter la présentation PowerPoint grâce aux interventions des participants qui pourront être notées sur un tableau. 1

Le module précédent (garanties fondamentales) a mis l accent sur les mesures de nature à prévenir les actes de torture. Sans remettre en cause l efficacité de ces mesures, nous devons tout de même reconnaître que la torture continue d être pratiquée dans le monde entier. Il importe donc qu en parallèle des mesures soient prises d une part pour sanctionner les responsables de tels actes et d autre part prendre en charge les victimes. Il est intéressant de noter que ces mesures «curatives» ont aussi un rôle de prévention, et ce de deux manières différentes. Tout d abord, le fait pour les auteurs (potentiels) d actes de torture de savoir qu ils pourront être poursuivis, jugés et sanctionnéspourleursagissementspeutavoir uneffet dissuasif quant à leur passage à l acte. Ensuite, la prise en charge effective des victimes et la satisfaction de leurs besoins peut permettre de contribuer au rétablissement d une forme de paix sociale. D une part, parce que les victimes retrouvent plus facilement leur place dans la communauté. D autre part parce qu en reconnaissant ainsi l existence de cette pratique, la communauté ne se place pas dans une situation de déni propice à la répétition. Dans ce module nous allons donc explorer la lutte contre l impunité, qui sera abordée sous trois angles : l angle pénal à travers l incrimination et la sanction de la torture (1), l angle procédural relatif aux poursuites judiciaires des actes de torture (2), et enfin la prise en charge des victimes (3). 2

Avant d aller plus loin il importe de souligner que ces trois aspects sont évidemment liés. Au delà du fait qu ils participent l un et l autre à une approche essentiellement curative, il est clair que la lutte contre l impunité est un élément essentiel de la prise en charge des victimes. Celle ci ne se comprend que si effectivement les responsables de ces actes sont poursuivis, jugés et sanctionnés. Il est donc important de garder ce lien à l esprit. 2

L incrimination de la torture est un élément fondamental pour donner plein effet à l interdiction de la torture et des autres formes de mauvais traitements. En effet, cela semble évident, mais il est nécessaire de le rappeler. Si l interdiction est simplement posée dans la loi nationale voire même dans la Constitution, mais que parallèlement les auteurs de ces actes ne sont pas inquiétés et bénéficient de jure et/ou de facto d une forme d impunité, l interdiction perd tout son sens et se révèle parfaitement inutile dans une perspective de prévention de la torture. Note au formateur/formatrice : Il peut être utile d expliquer d abord ce que signifie «Incrimination». Pour les juristes c est souvent clair, mais pour les non juristes cela ne veut pas forcément dire grand chose. Donc l incrimination consiste pour le législateur à faire en sorte qu un comportement constitue une infraction pénale consacrée dans une loi notamment dans le code pénal. Double nature de la torture On peut être surpris de constater qu on parle d incrimination à l égard de la torture alors que dans votre esprit c est une violation des droits de l Homme. L une des caractéristiques de la torture, c est d être àlafoisuneviolationdesdroitsdela personne et une infraction pénale. C était une volonté des auteurs de la Convention des Nations Unies contre la Torture de s assurer de cette double nature. Pour eux, faire de la torture une infraction pénale était un moyen d être plus directement efficace dans la répression de ces actes. En effet, même si des procédures existent, notamment au niveau international, il est plus difficile de faire valoir ses droits, au niveau interne, lorsqu on est victime d une violation des droits de l Homme qui n est pas érigée en infraction. 3

Au contraire, si un acte est constitutif d une infraction pénale alors c est tout le système policier et judiciaire qui se met en mouvement pour enquêter, poursuivre, juger et sanctionner. Ce qui est intéressant, c est que les auteurs de la Convention ont été plus loin. C est àdire qu ils ont posé dans la Convention un véritable régime juridique lié à la nature d infraction pénale de la torture. C est ce régime juridique que nous allons maintenant découvrir ensemble. Note pour le formateur/formatrice : Il peut être utile pour les participants d avoir sous les yeux le texte de la Convention des Nations Unies contre la torture et la loi malgache. Cela devrait les aider à suivre les développements qui suivent. Infraction autonome Il y a deux éléments sur lesquels il convient d insister : D abord la torture doit être une infraction. Ensuite la torture doit être une infraction autonome. Infraction C est l article 4.1 de la Convention des Nations Unies contre la torture qui pose cette exigence que la torture soit une infraction. Article 4 1. Tout Etat partie veille à ce que tous les actes de torture constituent des infractions au regard de son droit pénal. Il en est de même de la tentative de pratiquer la torture ou de tout acte commis par n'importe quelle personne qui constitue une complicité ou une participation à l'acte de torture. Dans son commentaire de cette disposition, le Comité considère que le fait de codifier ainsi cette infraction permet de : «a) souligner la nécessité de prévoir un châtiment approprié qui tienne compte de la gravité de l infraction, b) de renforcer l effet dissuasif qu a en soi l interdiction de la torture, c) d améliorer l aptitude des fonctionnaires responsables à repérer l infraction particulière de torture, et d) de permettre au public, en lui en donnant les moyens, de surveiller et, si nécessaire, de contester l action de l État ou son inaction lorsque celle ci viole la Convention». Infraction autonome L autre point sur lequel insiste régulièrement le Comité contre la torture, c est que la torture soit une infraction autonome. Comme vous l avez vu à la lecture de l article 4, ce n était pas explicitement prévu dans la Convention elle même. Certains États disaient qu ils remplissaient leurs obligations dans la mesure où les actes de torture faisaient effectivement l objet de poursuites pénales notamment en tant que «coups et blessures». 3

Mais le Comité considère qu une telle pratique n est pas satisfaisante notamment pour les victimes, parce que cela ne dit pas la vraie nature de l acte. Bien sûr certains agents de l État ont pu être condamnés sous ce chef d inculpation, mais une fois encore cela ne dit pas la réalité des actes ni le facteur aggravant de l implication d un agent de l État. Donc le Comité insiste pour que la torture soit une infraction pénale autonome posée dans le code pénal des États parties. Incrimination de la torture dans la loi malgache: Crime ou délit? Types d infractions pénales Dans les systèmes de droit comme à Madagascar on distingue 3 grands types d infractions pénales (par ordre de gravité) : les contraventions, les délits et les crimes. La question se pose donc de savoir si la torture doit être un délit ou un crime. Les enjeux sont symboliques et juridiques. Symboliques d abord, parce que dire que la torture est un crime, c est reconnaître la gravité d un tel acte. C est donc important pour les victimes et pour la société qui, ainsi souligne le caractère inacceptable de tels actes. Mais les enjeux sont juridiques aussi, parce que le régime juridique des délits et des crimes sont différents notamment si on considère les délais de prescription ou encore les sanctions pénales y associées. Aussi, le Comité contre la torture insiste pour que la torture soit un crime, mais surtout (et nous le verrons plus tard) insiste pour qu au moins les sanctions relatives à cette infraction soient en rapport avec la gravité de l acte. La torture dans la loi malgache : crime ou délit? La loi de 2008 prévoit un régime de sanction qui ne fait pas de doute sur le fait que la torture est une infraction pénale. En effet, si vous regardez les articles 10 et 11 de la loi, vous trouverez ce qui suit : Article 10 Quiconque aura commis l acte visé à l article 2 de la présente loi sera puni de 2 à 5 ans d emprisonnement. Article 11 I La peine encourue est de 5 à 10 ans d emprisonnement : 1 si l acte de torture a été commis sur un mineur de moins de 18 ans ou sur une femme enceinte, en état de grossesse apparente ou connue de l auteur ; 2 si l acte de torture a été commis à l aide d appareils spécifiquement destinés à la torture. II La peine encourue est celle des travaux forcés à temps : 3

1 si l acte de torture a entraîné l infirmité de la victime ; 2 si l acte de torture a été suivi de mutilation, amputation, privation de l usage d un organe de sens, de la perte de l organe de reproduction. III L auteur encourt la peine des travaux forcés à perpétuité si l acte de torture a entraîné la mort de la victime ou s il a été suivi ou précédé d un viol. En conclusion on peut affirmer que la loi de 2008 consacre la torture comme une infraction autonome, qu elle lui attribue des sanctions sévères, mais qu elle ne clarifie pas si elle considère que c est un crime ou un délit. Cependant, au regard du droit pénal général malgache dans ses articles 1 er et9,latortureestàlabaseundélitquiévolueen crime au regard de l échelle des sanctions consacrées dans l article 11 de la loi de 2008 établit selon les circonstances aggravantes. Par ailleurs, le code pénal malgache devrait être mis à jour pour y insérer des disposition de la loi de 2008 car, comme l a souligné le Comité contre la torture lors de l examen du rapport périodique de Madagascar, cette loi souffre de n avoir jamais ou pas assez été invoquée devant les juridictions malgaches depuis sa promulgation. Son insertion dans le code pénal lui donnerait plus de visibilité et encouragerait son application car les praticiens ont parfois tendance à faire plus facilement références aux lois regroupées dans un code à usage plus quotidien qu à des lois isolées dans l ensemble de l arsenal juridique national. 3

Autermeduprocessusjudiciaire,ilimportequelasanctionpénalereflètelagravitéde l acte incriminé. La sanction, un révélateur de la gravité de l acte En général la sanction pénale est révélatrice de la gravité de l infraction. La torture ne doit pas échapper à cette règle. À ce sujet deux éléments doivent être pris en considération pour «apprécier» la gravité de l acte. Tout d abord, la souffrance infligée à la victime. Ensuite, le fait que l acte soit infligé par un représentant de l État alors même que l État doit protéger les personnes dont il a la charge.aussi,silasanctionliéeàlatorturenerévélaitpascettegravité,ceseraitun mauvais signal de la part de l État concerné qui d une certaine manière ne prendrait pas en considération cette gravité. C est justement pour éviter cette situation et pour bien souligner la gravité des actes de torture que la Convention des Nations Unies contre la Torture a été très claire à cet égard. Peines proportionnelles à la gravité de l acte L article 4.2 de la Convention dispose en effet que : «2. Tout Etat partie rend ces infractions passibles de peines appropriées qui prennent en considération leur gravité.» 4

Si la Convention ne précise pas davantage, le Comité des Nations Unies s est montré très clair sur ces questions. En effet, il considère inacceptable qu une personne reconnue coupable d acte de torture ne soit condamnée qu à une amende et/ou ne fasse pas l objet d une peine de prison au moins égale à celle encourue par une personne jugée coupable d un «meurtre» ou de «coups et blessures aggravés». Débat : Quid de la loi malgache (Articles 10 et 11 de la loi de 2008) En tenant compte de ces éléments, considérons maintenant la loi malgache. Que prévoitelle en terme de sanction? Comme expliqué dans la diapositive précédente, il faut regarder le contenu des articles 10 et 11 de cette loi. Elle prévoit donc, en fonction de la gravité des actes incriminés des peines de prison ou des peines de travaux forcés. On peut considérer que la loi malgache répond aux exigences de l article 4 de la Convention des Nations Unies contre la Torture. 4

Pour donner toute sa dimension à l interdiction de la torture, il faut évidemment que la torture soit érigée en infraction autonome et que des sanctions appropriées tenant compte de la gravité de l acte y soient associées. Mais en plus de cela, il faut s assurer que les poursuites judiciaires soient effectives. A cet effet, il est fondamental que soient clairement définies les compétences juridictionnelles nécessaires pour poursuivre, juger et sanctionner les auteurs des actes de torture. En effet, de la compétence judiciaire dépend la mise en mouvement de l action pénale. Si les juges ne sont pas compétents pour juger des actes de torture et des autres formes de mauvais traitements, les mesures relatives à l incrimination et aux sanctions ne seront d aucune utilité. D une certaine manière elles n existent et ne produisent des effets que si l action pénale est enclenchée. Par ailleurs, si les juges ne sont pas compétents cela signifie également que les victimes ne peuvent pas porter plainte et/ou que les policiers ne peuvent pas mener des enquêtes relatives à la commission de tels actes. Cette question est donc vraiment importante et elle sera abordée sous deux angles successifs : question de savoir qui est compétent et en quoi consiste cette compétence. Compétence universelle Les auteurs de la Convention des Nations Unies contre la torture ont voulu faire en sorte que les tortionnaires ne soient jamais à l abri de poursuites pénales quel que soit l endroit où ils se trouvent dans le monde. C est pourquoi ils ont eu recours à ce qu on appelle la «compétence universelle» qui est prévue à l article 5 de la Convention : 5

«Article 5 1. Tout État partie prend les mesures nécessaires pour établir sa compétence aux fins de connaître des infractions visées à l'article 4 dans les cas suivants : a) Quand l'infraction a été commise sur tout territoire sous la juridiction dudit État ou à bord d'aéronefs ou de navires immatriculés dans cet État ; b) Quand l'auteur présumé de l'infraction est un ressortissant dudit État ; c) Quand la victime est un ressortissant dudit État et que ce dernier le juge approprié. 2. Tout État partie prend également les mesures nécessaires pour établir sa compétence aux fins de connaître desdites infractions dans le cas où l'auteur présumé de celles ci se trouve sur tout territoire sous sa juridiction et où ledit État ne l'extrade pas conformément à l'article 8 vers l'un des États visés au paragraphe 1 du présent article. 3. La présente Convention n'écarte aucune compétence pénale exercée conformément aux lois nationales.» Concrètement cela signifie qu une personne soupçonnée d actes de torture peut être poursuivie, jugée et sanctionnée n importe où dans le monde indépendamment de savoir si elle se trouve dans le pays de commission des actes, si la victime est ressortissante de ce pays ou si l auteur est ressortissant de ce pays. L exemple le plus concret pour bien comprendre cette compétence universelle c est le cas d Hissène Habré. Hissène Habré était un dictateur tchadien. À la suite de sa chute dans les années 1990 il s est réfugié au Sénégal. Là, des victimes tchadiennes ont saisi les juridictions sénégalaises, sur la base de la Convention des Nations Unies contre la Torture, pour qu elles poursuivent, jugent et sanctionnent Hissène Habré pour les actes de torture commis par lui au Tchad contre des victimes tchadiennes. La procédure a été assez longue pour que finalement les autorités sénégalaises acceptent. En 2014 s est ouvert au Sénégal le procès d Hissène Habré! Il existe d autres exemples moins connus mais tout aussi significatifs de la volonté des États de s assurer que les tortionnaires n aient nulle part où ils puissent bénéficier d une certaine impunité. Evidemment ces cas restent relativement exceptionnels et les hypothèses principales d exercice de la compétence judiciaire à l égard des auteurs présumés d actes de torture sont celles qui sont prévues à l article 5 1. Ces différentes compétences juridictionnelles posées par la Convention des Nations Unies contre la Torture sont très exactement reprises dans la loi malgache de 2008 à l article 18 : 5

Compétence ordinaire «Article 18 : Les juridictions malgaches sont compétentes pour poursuivre, juger et punir toute personne qui aurait commis un acte de torture si : 1 l acte est commis sur le territoire de la République de Madagascar ; 2 l acte est commis à bord d un navire immatriculé suivant la loi malgache ou à l égard duquel un permis ou un numéro d identification a été délivré en conformité avec une telle loi ; 3 l acte est commis à bord d un aéronef : (i) soit immatriculé à Madagascar ; (ii) soit loué sans équipage et mis en service par une personne remplissant, les conditions d inscription comme propriétaire d un aéronef à Madagascar ; 4 l auteur a la nationalité malgache ; 5 le plaignant ou la victime a la nationalité malgache ; 6 l auteur de l acte se trouve à Madagascar après la perpétration de celui ci.» En quoi consiste concrètement l exercice de cette compétence? Fondamentalement il y a trois axes principaux : Enquêter ; Poursuivre ; Juger. Enquêter L article 12 de la Convention des Nations Unies impose aux États l obligation de procéder immédiatement à une enquête indépendante et impartiale s il y a des motifs raisonnables de croire qu un acte de torture a été commis. Cela signifie que cette enquête doit être initiée soit à la suite d une plainte déposée par une personne qui se dit victime de tels actes, ses ayants droit ou une tierce personne intéressée telle que des organisations de défense des droits de l homme, soit d office par les autorités ellesmêmes. «Article 12 : Tout État partie veille à ce que les autorités compétentes procèdent immédiatementà une enquête impartialechaque fois qu ily a des motifs raisonnable». Cette obligation n est pas reprise telle quelle dans la loi malgache, mais on peut toutefois considérer que dans la mesure où l article 13 alinéa 5 de la Constitution garantit le droit de tout individu de se faire rendre justice, les victimes d actes de torture ont le droit de porter plainte. La question de la mise en œuvre de ce droit reste ouverte. En tout état de cause cette enquête doit être prompte, effective, indépendante et impartiale. Cette enquête est importante avant tout pour clarifier les faits et établir des responsabilités individuelles et celles de l État vis à vis des victimes et de leurs familles. Mais elle doit également se placer dans une perspective de non répétition en identifiant les mesures à prendre pour éviter que de tels faits se reproduisent. 5

Un des enjeux lié à cette enquête tient à son impartialité. En effet, dans de nombreux pays, comme à Madagascar, c est le Procureur de la République qui est compétent pour initier une telle enquête. Or, il existe un risque que le Procureur soit lui même (ou ses services) impliqué dans la commission de ces actes. Il faut alors mettre en place des procédures permettant à une autre institution ou à un autre Procureur de se substituer au Procureur initialement désigné. Quelle que soit l institution compétente elle doit pouvoir mener à bien son enquête sans aucune entrave et pouvoir interroger les témoins et les personnes mises en cause, accéder aux documents officiels et aux locaux de détention, etc. 5

Poursuivre L étape suivante de la procédure consiste à engager des poursuites contre l auteur présumé des actes de torture. C est une étape classique passant par la désignation d un juge d instruction, l instruction du dossier et la saisine du tribunal de jugement. Si les actes n ont pas été commis sur le territoire de l État concerné celui ci peut décider d extrader la personne vers son État d origine ou vers l État où la plainte a été initiée, à condition de s être assuré qu il sera effectivement jugé et que ses droits à la défense seront bien respectés. Juger La dernière étape c est le procès pénal. À la suite de l enquête, puis de la phase d instruction, la personne visée peut faire l objet d un procès pénal devant un tribunal correctionnel ou une cour d assise. La personne mise en cause doit pouvoir bénéficier d un procès équitable, après quoi le tribunal décidera de sa culpabilité et prononcera la sanction ou alors décidera de son innocence. Débat La loi de 2008 n ayant pas eu jusque là les résultats escomptés, il sera important au formateur/formatrice d initier un débat pour partager des informations sur de cas éventuellement jugés pour torture. Ensuite il faudra engager une discussion pour identifier les défis, les blocages et les raisons pour lesquels la loi de 2008 ne connait pas l effectivité souhaité. Le formateur/la formatrice pourrait donc poser une question ouverte suscitant réflexion et discussion. Question possible : Quels sont, selon vous, les défis et/ou blocages d ordre pratique, procédural, administratif, politique ou autre rendant la loi de 2008 ineffective et comment les surmonter? 6

Introduction Une fois de plus, il importe de bien faire le lien entre la lutte contre l impunité et la prise en charge des victimes. En effet, comme expliqué au début de cette présentation, la prise en charge des victimes ne peut pas se concevoir sans que des mesures ne soient prises pour lutter contre l impunité. Les éléments qui vont être étudiés dans cette partie ne prennent toute leur dimension que dans la mesure où effectivement les responsables de tels actes sont poursuivis, jugés et sanctionnés. Le Comité des Nations Unies contre la Torture a identifié deux éléments qui concourent àlapriseenchargedesvictimes: La reconnaissance et la protection des victimes, ainsi que Leur droit à la réparation. Notes pour le formateur/la formatrice Pour commencer cette diapositive il est suggéré de poser la question aux participants de savoir d après eux ce qu ils entendent par victimes de torture. Victimes : définition De manière évidente, les victimes en premier lieu sont les personnes qui ont été soumises à des actes de torture ou à d autres formes de traitements cruels, inhumains ou dégradants. 7

Le Comité contre la torture donne la définition suivante : «On entend par «victimes» les personnes qui, individuellement ou collectivement, ont subi un préjudice, notamment une atteinte à leur intégrité physique ou mentale, une souffrance morale, une perte matérielle ou une atteinte grave à leurs droits fondamentaux, en raison d actes ou d omissions constituant des violations de la Convention». (voir Observation générale N 3 du CAT : 13 décembre 2012 doc. N CAT/C/GC/3) Mais il est important de bien garder à l esprit que la torture est un phénomène qui produit des effets négatifs bien au delà des personnes directement visées. En effet, en premier lieu, la famille des personnes soumises à la torture est également affectée par ces actes. D abord parce que la victime «directe» revient blessée, physiquement, mentalement ou moralement et que cela peut avoir un impact sur la vie de famille. Soit parce que la personne n est pas capable de reprendre sa place dans la famille, soit parce qu elle souffre de dépression ou de stress post traumatique, ce qui peut entraîner des comportements inhabituels, dérangeants voire violents parfois. Ensuite, parce que la torture peut stigmatiser une personne en tant qu opposant politique ou en tant que délinquant, cela peut également avoir des conséquences sur sa famille qui peut se trouver à son tour stigmatisée ou rejetée. Bienconscientdeceteffetricochetdelatorture,leComitécontrelatortureabien souligné que : «Le terme de «victime» inclut également les membres de la famille proche ou les ayants cause de la victime ainsi que les personnes qui ont subi un préjudice alors qu elles intervenaient pour venir en aide à la victime ou pour empêcher qu elle ne devienne victime.» (voir Observation générale N 3 du CAT : 13 décembre 2012 doc. N CAT/C/GC/3) Situation de vulnérabilité des victimes Il est également important de bien garder à l esprit que les victimes de torture et d autres formes de mauvais traitements se trouvent dans une situation de vulnérabilité particulière. Au delà des blessures physiques, elles se trouvent souvent profondément affectées psychologiquement par les actes qu elles ont subis. Il est très important que l ensemble des personnes (policiers, juges, avocats, ONG, ) qui est en contact avec ces personnes soit bien conscient de cette situation particulière. Notamment dans l hypothèse d une enquête judiciaire ou plus largement pour recueillir de l information auprès des victimes, il est très important d éviter un nouveau 7

traumatisme ou de remettre la victime dans une situation qui lui fait revivre les actes de torture ou les autres formes de mauvais traitements. Il faut également que les personnes concernées acceptent et comprennent que les victimes peuvent ne pas être toujours très claires ou très cohérentes dans leurs déclarations. Ces incohérences ou ces «trous de mémoire» ne doivent pas être perçus comme une volonté de dissimuler de l information ou d inventer des faits, mais bien davantage comme une conséquence directe des mauvais traitements subis. Protection des victimes Les victimes doivent être protégées non seulement contre de possibles attaques, menaces et autre genre de représailles, mais également contre les effets de la torture et des mauvais traitements. Ces actes ont des conséquences psychiques, physiques et sociales qui, dans les cas plus graves, marquent à vie. Les mesures protectrices quant à elles, doivent viser à protéger contre la violence, les menaces de violence ou toute autre forme d intimidation ou de représailles en raison de plaintes déposées, d auditions ou de déclarations faites, de rapports effectués ou de l enquête. Les mesures protectrices doivent également tenir compte de la vulnérabilité d autres personnes nécessitant protection. Dans cette perspective l article 20 de la loi de 2008 offre le cadre d une protection des victimes, témoins, enquêteurs ainsi que leurs familles contre la violence, les menaces, intimidations, représailles en raison des plaintes, d auditions ou de déclarations faites ou de rapports effectués dans le cadre de l enquête. 7

C est notamment l article 14 de la Convention des Nations Unies contre la torture qui prévoit le droit à réparation des victimes de le torture ou d autres mauvais traitements. Art. 14 «1. Tout Etat partie garantit, dans son système juridique, à la victime d un acte de torture, le droit d obtenir réparation et d être indemnisée équitablement et de manière adéquate, y compris les moyens nécessaires à sa réadaptation la plus complète possible. Encasdemortdelavictimerésultantd unactedetorture,lesayantscausedecelle ci ont droit à indemnisation. 2. Le présent article n exclut aucun droit à indemnisation qu aurait la victime ou toute autre personne en vertu des lois nationales.» Cet article est repris dans la loi malgache de 2008 à l article 21. Ce qui est intéressant c est que le Comité contre la torture a récemment expliqué ce qu il entendait par ce droit à réparation des victimes. Nous allons donc suivre les recommandations et raisonnement du Comité sur cette question. Satisfaction équitable et complète Le principe à la base de cette conception est le principe de la «satisfaction équitable et complète». L idée c est que la ou les mesures prise s compense nt le tort ou toutes les conséquences de la torture ou des mauvais traitements infligés à la victime. 8

Il peut s agir de mesures générales et/ou individuelles à adopter dans l ordre juridique interne pour mettre fin à la violation, pour en effacer les conséquences et rétablir autant que possible le statu quo ante. Ce principe implique plusieurs composantes : une reconnaissance du statut moral et juridique de la victime, une prise en compte des besoins spécifiques de la victime ainsi que la gravité des violations commises contre elle. L État doit donc adopter une approche individuelle qui tient en considération la qualité de la personne et des circonstances afin de respecter ses obligations. Restitution La restitution est une forme de réparation qui vise à rétablir la situation qui était celle de la victime avant que la violation de la Convention ne soit commise, compte tenu des spécificités propres à chaque cas. L obligation de prévention faite dans la Convention exige que l État partie garantisse que la victime qui bénéficie de la restitution ne soit pas placée dans une position où elle risque de subir de nouveau des tortures ou des mauvais traitements. Dans certains cas, la victime peut considérer que la restitution n est pas possible en raison de la nature de la violation ; toutefois l État doit lui assurer l accès sans réserve à une réparation. Pour que la restitution soit effective, des mesures devraient être prises pour s attaquer aux causes structurelles de la violation, notamment toute forme de discrimination fondée par exemple sur le sexe, l orientation sexuelle, le handicap, l opinion politique ou autre, l origine ethnique, l âge et la religion ou tout autre motif. Indemnisation Evidemment on pense tout de suite à une indemnisation financière. Elle est très souvent nécessaire et légitime, mais dans bien des cas, pour ne pas dire dans tous les cas, elle ne suffit pas. Cette indemnisation peut prendre plusieurs formes. Par exemple : le remboursement des frais médicaux engagés la mise à disposition de fonds pour couvrir les services médicaux ou les services de réadaptation l indemnisation du dommage pécuniaire et non pécuniaire résultant du préjudice physique et mental subi (la perte de gains et de potentiel de gains entraînée par les incapacités causées par la torture ou les mauvais traitements; les occasions perdues en ce qui concerne notamment l emploi et l éducation) assistance juridique ou spécialisée permettant de couvrir d autres frais afférents à l action engagée pour obtenir réparation. Réadaptation La réadaptation c est le rétablissement des fonctions ou de l acquisition de nouvelles 8

compétences rendues nécessaires par la situation nouvelle dans laquelle se trouve la victime à la suite des tortures ou des mauvais traitements. Cela comporte très souvent une prise en charge médicale et psychologique ainsi que l accès à des services juridiques et sociaux. Cela peut comporter une gamme étendue de mesures interdisciplinaires, comme des services de réadaptation médicaux, physiques et psychologiques, des services de réinsertion et des services sociaux, une assistance et des services axés sur la communauté et la famille, une formation professionnelle, des études, etc. Satisfaction et droit à la vérité La satisfaction et le droit à la vérité sont évidemment intimement liés à l exercice de poursuites et au jugement d auteurs présumés d actes de torture. Ces deux éléments constitutifs de la réparation ne peuvent pas être satisfaits si les auteurs bénéficient d une totale impunité. Donc, en plus des mesures de nature à lutter contre l impunité, d autres mesures ont été identifier, comme par exemple : divulguer de manière publique la vérité quant à des agissements de la force publique ; rechercher des personnes disparues ; faire des déclarations officielles ou rendre des décisions de justice rétablissant la victime et les personnes qui ont un lien étroit avec elle dans leur dignité, leur réputation et leurs droits ; prendre des sanctions judiciaires et administratives à l encontre des responsables des violations ; faire des excuses publiques ; faire des commémorations et hommages aux victimes. Garantie de non répétition Parmi les mesures à prendre pour garantir la non répétition de tels agissements et ainsi concourir à la réparation des victimes, le Comité contre la torture a identifié les suivantes: établir un contrôle effectif des forces armées et des forces de sécurité par l autorité civile ; veiller à ce que toutes les procédures soient conformes aux normes internationales relatives à la régularité de la procédure, l équité et l impartialité ; renforcer l indépendance de la magistrature ; protéger les défenseurs des droits de l homme et les professionnels du droit, de la santé et autres, qui portent assistance aux victimes de torture ; mettre en place des systèmes d inspection régulière et indépendante de tous les lieux de détention ; dispenser, à titre prioritaire et de façon suivie, aux membres des forces de l ordre ainsi que des forces armées et des forces de sécurité un enseignement sur les 8

droits de l homme qui traite des besoins particuliers des populations marginalisées et vulnérables et dispenser une formation spécifique sur le Protocole d Istanbul aux professionnels de la santé et du droit et aux membres des forces de l ordre ; promouvoir le respect des normes internationales et des codes de conduite par les agents de la fonction publique, y compris par les membres des forces de l ordre et des services pénitentiaires, médicaux, psychologiques et sociaux et par le personnel militaire; réexaminer et réviser les lois qui permettent ou favorisent la torture et les mauvais traitements ; garantir le respect de l article 3 de la Convention qui interdit le refoulement ; veiller à ce que des services temporaires soient disponibles pour les individus ou les groupes d individus, comme des foyers accueillant les victimes de violence sexiste, de tortures ou de mauvais traitements. Ce dernier point offre une belle conclusion à ce module et fait le lien avec d autres points que qui ont également été soulignés dans les modules précédents. En effet, il apporte la preuve que toutes les obligations contenues dans la Convention contre la torture et la loi malgache sont complètement connectées et qu elles doivent se considérer d une manière intégrée. En effet, s engager à prendre des mesures pour éviter que de tels actes ne se reproduisent n est possible que si des enquêtes judiciaires ont effectivement été menées et qu elles ont permis d identifier des dysfonctionnements. Le lien entre lutte contre l impunité et prise en charge des victimes (réparation) est ainsi clairement établi. De la même manière, parmi les mesures identifiées pour garantir la non répétition de tels actes, on voit bien qu on est bien davantage dans une logique préventive que dans une logique currative. Ou plutôt que pour des mesures curratives (en l occurrence la réparation) soit pleinement efficaces, elles doivent s appuyer sur des mesures préventives. Cette approche holistique ou intégrée de la lutte contre la torture doit vraiment être mise en avant. 8