Bernard FONTAINE, médecin du travail, toxicologue industriel POLE SANTE TRAVAIL Métropole Nord, Lille 1
Un médecin du travail n est pas un gendarme et ne peut séparer drogues licites et drogues illicites, car les conséquences sont les mêmes. L activité d un médecin du travail se compose de consultations médicales et d actions en milieu de travail (AMT), avec un rôle préventif dans chacune de ces deux tâches. 2
La prévention au sein de la consultation du médecin du travail. Primaire Secondaire Tertiaire La dimension préventive au cours de l AMT. L avenir et la place du Service de Santé au Travail. Un grand écart permanent. 3
Même si l effet psychoactif de la consommation de tabac perturbe généralement peu l activité professionnelle, une dimension majeure à toujours prendre en considération est que le tabagisme est un facteur prédictif majeur des autres addictions. Odds Ratio du tabagisme : 6,5 [3,75 11,25] chez les hommes consommateurs de drogues illicites affectés à des postes de sécurité. (réf. S.Krippel et F.Kittel, Arch.Mal.Prof. 2011;72:181-188). Postulat :Toute action préventive sur le tabagisme aura un effet bénéfique sur les autres consommations. 4
Moins difficile,car mieux acceptée, que pour les autres produits, en particulier illicites, mais toujours très nécessaire Co-addictions de plus en plus fréquentes, avec des conséquences accidentogènes de mieux en mieux chiffrées Et de nouveaux modes de consommation alarmants. 5
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Hormis pour les apprentis, le médecin du travail est peu en contact avec les adolescents d où prévention primaire stricto sensu rarement effective. Largo sensu la détection précoce de cas de consommation freine le prosélytisme et donc le nombre de nouveaux consommateurs. 7
Savoir repérer les personnalités fragiles et les personnes fragiles. Ne pas juger Identifier le besoin en santé des individus et de la personne morale qu est l entreprise pour distinguer l œuf de la poule (et vice versa), dans le but d apporter une réponse adaptée aux situations 8
Le travail a un effet bénéfique sur la santé et sur la consommation. 9
RESULTATS : cannabis (prévalence 8,4%) Répartition en fonction du type de visite : 16 % 14 12 10 8 6 4 2 0 14,71 % VA VE VR Enquête de prévalence 2005 chez 1000 chauffeurs poids lourd TIR, sans conséquence sur l aptitude, groupe régional Toxicomanies et travail, ISTNF Lille. 10
Mais, et c est nouveau, le travail (travail de mauvaise qualité psychosociale) peut devenir plus pathogène que le chômage. (P.Butterworth & al., Occup. Environ. Med. Publié en ligne le 14 mars 2011). D où nécessité pour le MdT d intégrer au cours de son examen clinique un questionnement sur le vécu psychosocial au travail. 11
D autant plus active que précoce : Repérer le plus tôt possible l usage nocif par son sens clinique par la recherche du CO exhalé par l usage de questionnaires spécialisés Fagerström Audit CAST etc. (cf. rapport Reynaud Parquet 2002) Connaître le réseau de soins et orienter les cas détectés. 12
Avoir une connaissance systématique des états anormaux en entreprise pour une prise en charge dès le retour au travail dans l entreprise. 13
Rôle majeur, en particulier pour le maintien dans l emploi des patients sous traitement de substitution aux opiacés. 14
22 urines dépistées et confirmées positives en TSO (méthadone ou buprénorphine) Visite annuelle Visite d embauche TSO seuls 10 1 TSO + autres Addictions 5 6 Les addictions associées: - Méthadone + buprénorphine + opiacés (1) - Méthadone + opiacés + THC (2) - Buprénorphine + éthanol (1) - Buprénorphine + THC (5) - Buprénorphine + THC + BZD (1) - Buprénorphine + cocaïne (1) Enquête de prévalence 2005 chez 1000 chauffeurs poids lourd TIR, sans conséquence sur l aptitude, groupe régional Toxicomanies et travail, ISTNF Lille. 15
Aider à la prise de conscience du risque addictif, à sa formalisation dans le DUER et en parler régulièrement à tous les acteurs de l entreprise pour : «détabouiser» le sujet Vulgariser les questionnaires d usage nocif Amener les acteurs de l entreprise à raisonner puis décider comme pour l alcool. 16
Aider à l élaboration d un règlement intérieur pertinent sur le sujet, équilibré entre les libertés individuelles et le besoin collectif de sécurité. Participation aux enquêtes de prévalence dans le monde du travail. Obligation morale et déontologique d une FMC sur un sujet quasi inabordé dans le cursus d études. 17
2 ème mission donnée aux SIST par la loi du 20 juillet 2011, de prévenir la consommation d alcool et de drogue sur le lieu de travail. Le médecin du travail n est donc plus seul, il pourra mobiliser son équipe (et particulièrement les infirmières) Mais attendons les décrets d applications. 18
Nécessité d une définition réglementaire précise des postes de sécurité / sûreté. Distinguer les dépistages, pour ces postes, en embauche ou périodique des dépistages suite à accident, incident ou état anormal. Exclure le dépistage sauvage. Difficile maintien du fait que la décision d un dépistage est du ressort du médecin et ne peut lui être imposée. 19
ASPECTS MATERIELS ET LOGISTIQUES Démographie médicale en baisse Augmentation régulière des tâches à accomplir Prise en charge financière floue Interprétation plus délicate des tests de drogues par rapport à l éthylotest. 20
Textes juridiques parfois en contradiction : Dualité des fonctions médecin de prévention/ médecin d aptitude aux métiers de sécurité. (Arrêt du Conseil d état du 07 juin 2006) Avis 114 du CCNE mettant le dépistage sous la responsabilité des Services de santé au travail et non du médecin du travail Guide MILDT de bonnes pratiques en milieu professionnel non encore sorti Internationalisation du monde du travail avec des réglementations différentes suivant les pays. Manque de poids réglementaire des conseils donnés par le médecin à l employeur (en particulier sur le risque organisationnel) par rapport à la gravité pour le salarié des décisions d aptitude Evolution trop lente des mentalités et des textes sur le basculement de la faute vers l état pathologique, et donc sur le maintien dans l emploi. 21
2 nouveautés imminentes devraient permettre d y voir plus clair prochainement : Projet de Guide de bonnes pratiques présenté au COCT le 30/09/2011. Finalisations des dernières modifications avant remise à la Documentation française le 15 octobre pour une mise en ligne fin décembre 2011 sur les 2 sites (DGT et MILDT). Recommandations HAS sur le sujet en attente de relecture. 22