Traitements de fin de saison Source Santé de l Abeille du 20 août 2015 Utiliser des acides organiques dans la lutte contre le varroa permet aux abeilles de vivre dans une ruche aux cires exemptes de résidus de produits de traitement acaricides. Mes protocoles de traitement sont issus de la synthèse des travaux de recherche à ce sujet et de mon expérience personnelle, adaptés à la warré. J'utilise exclusivement des traitements Flash pour ne pas exposer les colonies trop longtemps aux acides. Quels acides organiques sont utilisés? Les deux principaux acides employés actuellement sont l'acide méthanoïque ou formique et l'acide oxalique.
ACIDE FORMIQUE : L'acide formique ( acide méthanoïque ) est un acide simple, produit par les fourmis, les abeilles et que l'on retrouve aussi en faible quantité dans le miel. Les vapeurs acides descendent plutôt vers le sol qu'elles ne montent dans les airs, d'où ma préférence pour les traitements par le haut de la ruche. Les traitement par le plancher ne donnent pas de bons résultats sur la warré qui s'établit souvent sur plusieurs étages à l'époque des traitements. Les vapeurs acides ont du mal à "grimper" dans le troisième étage. Pour procéder au traitement, il faut établir le bon dosage et la bonne concentration. Contrairement aux acaricides conventionnels, il ne laisse aucun résidu dans les cires et dans le miel. Il atteint les varroas emprisonnés dans les cellules. Le procédé d'application ne varie pas beaucoup d'une méthode à l'autre. Le principe est de faire évaporer l'acide en solution, soit rapidement par méthode flash, soit lentement à l'aide de diffuseurs d'acide formique. ACIDE OXALIQUE : L'acide oxalique ou "sel d'oseille", est un acide produit naturellement dans la nature où il est présent sous forme d'oxalate de potassium ou de calcium. On le trouve dans la rhubarbe, dans l'oseille, dans notre organisme. Il rentre notamment dans la composition du venin et du miel. C'est un acide organique qui, à des concentrations élevées, attaque mortellement le système respiratoire du varroa ( et de l'homme ) mais pas de l'abeille. Il n'atteint pas les varroas emprisonnés dans les cellules. Le procédé d'application varie beaucoup d'une méthode à l'autre. Il est possible de l'appliquer par dégouttement ( mélangé dans du sirop ) ce qui nécessite d'ouvrir la ruche en plein hiver. Certains apiculteurs l'appliquent en diffusion lente tout l'hiver en laissant un couvre cadre imbibé de solution sur la colonie. Enfin, la méthode flash est possible par sublimation de l'acide dans la ruche. L'acide formique est donc surtout utilisé en période où le couvain est présent alors que l'acide oxalique n'est pas efficace sur le couvain operculé.
Quelle concentration d'acide formique? La concentration dépend du mode d'administration : 85 % par le plancher. 60% pour le sommet des cadres. Pour diluer un acide, il faut connaitre la concentration initiale ( ci ) et la concentration finale ( cf ). Pour la dilution de l'acide formique, il est possible de s'en tenir à cette formule simple : dilution = ci / cf Par exemple, si je veux obtenir un acide à 60% à partir d'un acide à 85 % : dilution = 85/60 = 1,42% => Il faut ajouter 42% d'eau dans le volume initial. 100 ml d'acide à 85% + 42 ml d'eau = 142 ml d'acide à 60% Il est ensuite possible d'obtenir les volumes de dilution à l'aide d'une règle de 3. Rq : Prendre en compte la masse volumique de l'acide et de l'eau apporte une différence négligeable dans le résultat de l'équation ci dessus. Quelle dose d'acide formique? Le dosage dépend de la température extérieure et de la taille de la colonie. Chapeleau administre jusqu'à 50 ml d'acide par traitement pour une colonie établie sur 2 corps langstroh et 25 ml pour une colonie moyenne. Il est impératif de bien connaître l'état de développement des colonies pour apporter la quantité correcte d'acide. Pour une ruche Dadant, 20 à 30 ml est une dose cité dans de nombreux ouvrages. Pour la warré, j'utilise de 15 à 25 ml d'acide par élément warré rempli d'abeilles en fonction de la température extérieure. La dose d'acide est la même pour les concentrations à 85% ou à 60% car dans ce cas, seule la méthode d'administration change.
A quelle température appliquer l'acide formique? La température d'application est très importante et l'idéal se situe autour de 20 C. A 16 C, le traitement est inefficace, à 24 C la concentration de l'acide pourrait s'avérer dangereux pour les abeilles car l'évaporation de l'acide est alors trop rapide. Graphique : Plus la température est élevée au début du traitement, moins la dose d'acide administrée est importante. L'acide s'évapore complètement en 6 heures environ. Cependant, l'évaporation n'est pas linéaire. Elle atteint son maximum au début du traitement et décroit de façon exponentielle. La concentration d'acide évaporé dans la ruche ne doit pas être trop forte et celle-ci dépend de la température extérieure. L'acide s'évapore d'autant plus vite que la température est élevée. Je préfère, par sécurité, traiter aux heures les plus chaudes sachant que l'exposition aux vapeurs dure environ 6 heures. Comment appliquer l'acide formique en traitement Flash? Par le bas de la ruche (AF à 85%), c'est simple et rapide. Il suffit de placer un morceau de sopalin d'environ 15 cm X 15 cm et d'ajouter la dose d'acide à l'aide d'une seringue. Le plateau est repoussé sous la ruche et les effets de l'évaporation sont immédiats : Les abeilles ventilent pour tenter d'évacuer les vapeurs acides. Si le dosage est trop fort, elles sortent en masse sur les parois de la ruche. Les inconvénients sont nombreux à mes yeux : -La dérive pendant le traitement est importante à moins de traiter toutes les colonies. -L'acide semble atteindre difficilement les éléments supérieurs d'une warré sur 3 éléments, ce qui rend le traitement moins efficace.
Par le haut (AF à 60%), l'idéal est de créer une chambre d'évaporation qui permettra aux vapeurs d'atteindre une concentration uniforme. Un nourrisseur couvre cadre retourné peut faire l'affaire. Il faut placer une assiette sur le sommet des cadres et imbiber une feuille de sopalin avec la dose d'acide appropriée. Au bout de 6 heures, il est possible de retirer l'assiette et de replacer la ruche dans sa configuration initiale. Vérifier l'efficacité des traitements Plusieurs traitements à l'acide formique sont nécessaires pour réduire la population des acariens. Pour les colonies très infestées, il est possible de faire 3 traitements rapprochés de 4 jours et un dernier la semaine suivante par exemple. Le but étant de faire chuter brutalement la population de varroa tôt, et d'éliminer les survivants un peu plus tard. Après chaque traitement, il est intéressant de compter immédiatement les chutes de varroas. Ces données permettent de voir si le traitement a eu de l'effet et si la pression du varroa est encore forte dans le cas d'un traitement de suite. Il arrive fréquemment de compter plus de 500 varroas morts par jour par colonie traitée pendant deux ou trois jours. Dernière contrainte, il faut s'assurer qu'aucune colonie ne présente une chute naturelle de plus de 20 acariens par jour fin septembre. Les comptages s'effectuent 14 jours après les derniers traitements sur une période de 15 jours. Des traitements "d'appoint" peuvent-être réalisés jusqu'en octobre mais il est préférable de commencer fin-juillet pour terminer fin-août. L'acide oxalique en période hivernale Les traitements estivaux à base d'acide formique ont éliminé 80% à 95 % des varroas. Cependant, il est primordial de limiter la population de varroa au maximum avant le redémarrage de la ponte de la reine au printemps. Adepte des méthodes flash, je préfère la sublimation de l'acide dans la ruche : 1 à 2 grammes d'acide oxalique di-hydrate est passé directement à l'état gazeux par échauffement par le bas de la ruche. Le nuage envahi la ruche pendant environ 15 minutes et les chutes de varroas qui suivent cette opération laissent parfois dubitatifs tant ils sont encore nombreux. Lors de l'application, la température extérieure doit être supérieure à 4-5 C, la ruche doit être étanche pendant 15 minutes et il faut s'équiper d'un masque à gaz. Les vapeurs sont
inoffensives pour les abeilles mais pas pour les systèmes respiratoires des varroas et des humains. Bien utilisé, il permet d'éliminer jusqu'à 96% des varroas présents dans la ruche. Au printemps, les premiers comptages de chute naturelle des varroas sont nuls pour 90% des colonies traitées. Par expérience, toutes les essaims traités avec l'acide oxalique par sublimation au printemps n'ont plus de varroas à l'automne! Après le traitement à l'acide oxalique, il est nécessaire de vérifier l'efficacité du traitement pendant 3 semaines. Pour cela, je compte les varroas qui tombent sur la plaque de contrôle pendant cette période. Les premiers résultats sont parfois impressionnant. Il chute plus de 100 varroas/ jour, pendant 4 à 5 jours, sur certaines colonies. Voici un exemple de plaque de contrôle, 24h après l'exposition au traitement.
Les petits points noirs ovales sont des cadavres de varroas que l'on distingue parmi des déchets de cire d'opercules bruns. Sur cette planche, on dénombre une centaine de varroas, tombés 24 heures après le traitement. Sans traitement, il ne tombe à cette période de l'année, que 0 à 2 varroas par jour. Conclusion L'application de ces méthodes de traitements par acides organiques sont très contraignantes et leur application demande un équipement de protection adapté. Ces produits de traitements sont très bon marché et sont bien supportés par les abeilles. Il n'y a pas de résidus dans les cires ni dans le miel et pas d'accoutumance du varroa aux acides. Ces traitements laissent une chance aux abeilles de s'adapter par elles même au varroa. A mes yeux ce sont, avec la recherche d'abeilles résistantes au varroa, les seules techniques de lutte durable contre le varroa.