Consultation à l égard du projet de Stratégie gouvernementale de développement durable Mémoire présenté par Lavigie conseil Avant-propos Tel que prévu à la Loi sur le développement durable, le Gouvernement du Québec soumet le projet de Stratégie gouvernementale de développement durable à la consultation du public. Le présent texte résume quelques idées et suggestions proposées par Lavigie conseil qui est une nouvelle entreprise de consultation en matière de gestion environnementale et de développement durable. Jacques Lavigne en est le fondateur. Celui-ci a œuvré, jusqu au début de 2007, au sein de la fonction publique québécoise, entre autres dans les secteurs du développement durable/environnement, de l aménagement et développement du territoire, du tourisme, de la sécurité du revenu et dans certains organismes centraux (Conseil exécutif et Conseil du Trésor). Le présent mémoire s inspire des questions proposées pour supporter la consultation. 1. Quels sont les points forts du projet de Stratégie? 1.1) Une structure d objectifs couvrant un large horizon La principale force du projet de Stratégie consiste à exiger des ministères et organismes (M/O) qu ils définissent leur planification en ayant une vision plus large. En effet, la série de 29 objectifs devrait favoriser une meilleure intégration des actions des M/O dans un processus plus cohérent de planification. Le développement durable est une démarche qui vise à amener les différents acteurs de la société à prévoir, entre autres les conséquences de leurs décisions en amont et en aval du processus de gestion des biens et services afin, d une part, de minimiser les conséquences péjoratives de leur production sur les ressources et, d autre part, d optimiser cette même production. 1 De ce point de vue, le fait que chaque M/O doive interroger ses actions en lien avec chacun des objectifs de la Stratégie constitue sûrement un des piliers de l amélioration de la gouvernance de l État afin de lui
donner plus de vision, en même temps qu un référentiel aidant le M/O à identifier là où il est concerné par une vision de développement durable. 1.2) Un projet découlant d un vaste processus de consultation Le projet de Stratégie repose entre autres sur deux démarches de consultation soit : La consultation publique tenue dans le cadre de la préparation de la Loi sur le développement durable. La consultation interministérielle élargie qui a permis de produire l essentiel du document de Stratégie soumis à la consultation publique. Les processus de consultation interne et externe à la fonction publique menés jusqu ici concernant le projet de Stratégie constituent une des principales forces du projet en ayant permis à un large éventail d acteurs de se faire entendre. La présente consultation publique ajoute encore plus de force au projet de Stratégie. 2. Quelles sont vos suggestions pour l améliorer? 2.1 Avoir un seul processus de planification Actuellement, chacun des ministères et organismes (M/O) doit établir une planification stratégique dont le processus est cadré par le Gouvernement. La mise en œuvre de la Stratégie gouvernementale de développement durable amènera les M/O à devoir produire un plan d action ministériel en développement durable constituant un nouveau processus de planification. Il faut absolument éviter que chaque M/O se retrouve avec deux processus de planification soit : plan stratégique ministériel. plan d action ministériel en développement durable. À cet égard, l adoption de la Stratégie gouvernementale de développement durable devrait amener le Gouvernement à revoir les directives définissant le cadre de réalisation de la planification stratégique afin d y intégrer la définition du cadre d élaboration du plan d action ministériel en développement durable. Il doit y avoir un seul processus de planification qui doit être revu pour l appuyer sur les principes de la Loi sur le développement durable et sur les objectifs de la Stratégie gouvernementale. L article 16 de la Loi sur le développement 2
durable spécifie à cet effet que le Gouvernement «peut notamment donner des directives sur la forme ou le contenu que doit prendre l exercice de planification envisagé». Dans cet esprit, le plan ministériel fusionné devrait être intitulé dorénavant «le plan ministériel stratégique en développement durable». Un guide de rédaction du plan ministériel stratégique en développement durable devrait être produit en conséquence. 2.2 Harmoniser le contenu du «plan ministériel stratégique en développement durable» avec le processus de «revue de programmes annuelle» Chacun des ministères et organismes (M/O) devra dorénavant planifier ses actions en fonction des principes de la Loi sur le développement durable ainsi que des orientations et objectifs de la Stratégie. L ensemble de la nouvelle gouvernance qu entraînera la mise en œuvre de la Stratégie devrait conduire à redéfinir des priorités d actions des M/O. Par ailleurs, le Conseil du Trésor a statué que la mise en œuvre de la Loi et de la Stratégie gouvernementale de développement durable devait s exercer sans demande supplémentaire de crédits. La remise en considération des priorités d actions devrait se traduire par une redéfinition des priorités budgétaires avec un réaménagement conséquent des budgets. Or, la définition des budgets repose sur le processus de «revue de programmes annuelle» relevant du Conseil du Trésor. Dans ce contexte, les processus de réalisation du «plan ministériel stratégique en développement durable» et du processus de réalisation de la «revue de programmes annuelle» devraient être harmonisés afin de permettre un réaménagement des budgets selon les priorités d action définis dans le plan ministériel stratégique en développement durable. 2.3 Impliquer les partenaires dans la réalisation, la mise en œuvre et le suivi du «plan ministériel stratégique en développement durable» La loi sur le développement durable (art. 11, par. 3 et 4) spécifie que la Stratégie doit notamment aborder les questions suivantes : «Les mécanismes de mise en place pour susciter la participation des différents intervenants de la société». 3
«Les moyens retenus pour viser une approche intégrée et la cohérence des différentes interventions en développement durable des autorités locales et régionales concernées». Le projet de Stratégie est peu précis concernant ces exigences. La planification gouvernementale, à recadrer en fonction des principes, orientations et objectifs définis par la Loi et la Stratégie, doit résolument faire en sorte que chacun des ministères et organismes mette en place un processus de planification (plan ministériel stratégique en développement durable) impliquant ses partenaires. Les partenaires devraient inclure les principaux représentants des organismes producteurs de biens et services du secteur concerné ainsi que des représentants des groupes de clientèles de ce même secteur. La Stratégie gouvernementale de développement durable doit spécifier que la planification de chacun des secteurs de la société implique non seulement la fonction publique mais également la société civile. L implication des partenaires est une des bases qui fera en sorte que le développement durable entraînera une nouvelle gouvernance de société. Dans ce contexte, le projet de Stratégie gouvernementale devrait spécifier clairement que chacun des M/O a à définir un processus de réalisation, de mise en œuvre et de suivi de son «plan ministériel stratégique en développement durable» en impliquant ses partenaires au niveau national, régional et local et ce, en utilisant divers moyens qu il devrait préciser. (ex : états généraux, assises annuelles, conseil de partenaires etc.) 2.4 Assurer une vision d ensemble des actions gouvernementales en matière de développement durable Le projet de Stratégie gouvernementale constitue un des éléments les plus importants pour assurer une nouvelle gouvernance du domaine public québécois. La préparation des quelque 150 plans ministériels stratégiques en développement durable (1 plan pour chacun des 150 ministères et organismes de l État québécois) constitue l assise de cette démarche. Il y a lieu cependant d assurer une intégration de tous ces plans. 4 La production indépendante des quelque 150 plans devrait être appuyée par une démarche en vue d assurer une intégration des grandes actions horizontales découlant de ces plans. À cet effet, le projet de stratégie
spécifie dans la section portant sur le plan de mise en œuvre, que l on doit prévoir «la mise en place, dès l adoption de la stratégie, de grands chantiers intersectoriels sur un certain nombre d orientations, de façon à créer la synergie nécessaire à la mise en œuvre de la stratégie». Ces grands chantiers à définir revêtent une très grande importance en vue d assurer une intégration des actions à travers l ensemble des M/O. Les dossiers horizontaux devraient être élaborés sur la base des neuf (9) orientations de la Stratégie. Annuellement, trois orientations devraient faire l objet d une intégration des actions des M/O de sorte que, après 3 ans, l ensemble des neuf orientations de la Stratégie auront fait l objet d une réflexion intégrée à l échelle pan-gouvernementale. 2.5 Préciser le rôle du ministère du Conseil exécutif et du BAPE En vue d assurer une nouvelle gouvernance de l État, la Loi et la Stratégie de DD devraient amener les M/O à mieux planifier leurs activités et ce, en intégrant la participation des partenaires. Par ailleurs, il est nécessaire d assurer une intégration horizontale des principales activités des M/O et, pour ce faire, les orientations de la Stratégie devraient être utilisées comme base, tel que mentionné au point 2.4. Les dossiers horizontaux basés, entre autres sur les 9 orientations de la Stratégie, devraient être sous la responsabilité du Comité interministériel sur la prospérité économique et le développement durable du Ministère du Conseil exécutif. Par ailleurs, ces grands dossiers horizontaux devraient faire l objet de consultation publique en vue d assurer une intégration de l ensemble des partenaires de la société sur les principaux enjeux sociaux. Pour réaliser ces consultations, nous suggérons que le Gouvernement revoie le rôle du Bureau d audience publique sur l environnement (BAPE). Cet organisme pourrait voir son rôle élargi en devenant le «Bureau d audience publique sur le développement durable (BAPDD)». En plus des consultations habituelles sur les dossiers environnementaux et sur les grands dossiers horizontaux (orientations de la Stratégie) en matière de développement durable, le BAPDD devrait se voir confier la consultation publique sur les grands dossiers politiques d intérêt public comme les suivants : les hôpitaux universitaires, l industrie éolienne, les investissements en matière d infrastructures, la réforme de l éducation etc. 5
2.6 Réaliser un plan de formation et un plan de communication en matière de développement durable dans chacun des ministères et organismes (M/O) Les M/O doivent voir à ce que progressivement, l ensemble de leur personnel soit habilité à gérer en fonction des principes, des orientations et des objectifs de développement durable. Afin d appuyer cette évolution de gouvernance à court, moyen et long terme, les M/O devraient se doter prioritairement d un plan de formation et d un plan de communication en matière de développement durable. Ces plans devraient être des outils pour appuyer la réalisation du «plan ministériel stratégique en développement durable». De plus, les membres du personnel de chacun des M/O devraient participer à la redéfinition de la description de leurs tâches en prenant en compte les principes, orientations et objectifs du développement durable ainsi que le contenu du «plan ministériel stratégique en développement durable». 2.7 Amener toutes les composantes organisationnelles de l État à revoir leurs processus de production de biens et services dans le respect des principes du développement durable La clé du développement durable est d amener tous les citoyens (individuels, corporatifs, communautaires etc.) à mieux prévoir les impacts de leurs gestes de production et de consommation de biens et services. Les organisations doivent pour leur part revoir leurs processus de production de biens et services en respectant les principes du développement durable. À cet égard, l orientation 3 de la Stratégie (Produire et consommer de façon responsable) en constitue une des pierres d assise. Dans ce contexte, on devrait préciser d une façon plus ferme dans la Stratégie que les M/O et leurs institutions affiliées doivent revoir les processus de production des biens et services relevant de leur compétence afin de les rendre compatibles avec les principes de développement durable. Cette responsabilité fondamentale devrait être appuyée, dès l adoption de la Stratégie, par la mise en place d un dossier horizontal sur l application de l orientation 3 de la Stratégie. 6
2.8 Mandater un organisme public pour promouvoir la consommation responsable Le projet de Stratégie gouvernementale de développement durable propose un virage vers la consommation responsable. Le Gouvernement doit prendre le leadership en vue d en faire la promotion. Il lui revient à la fois de faire la sensibilisation des employés de l État et de la population. Il doit également concerter les M/O, concernés par un domaine ou l autre de la consommation (MAPAQ, Santé, Transport etc.), et y associer les partenaires de la société civile. Un défi qui se pose, relativement à une coordination et promotion efficace en matière de consommation responsable, est le fait que le Québec ne dispose pas d un organisme dûment mandaté pour animer ce domaine sociétal. L Office de protection du consommateur dispose d un mandat se limitant à la protection légale du consommateur concernant certaines de ses transactions commerciales. 3. Quelles actions pourriez-vous envisager pour appuyer sa mise en œuvre? Pour assurer l implantation de la nouvelle gouvernance que le développement durable met de l avant, le Gouvernement devrait créer une banque de personnes ressources qui pourraient agir comme accompagnateurs des M/O dans la mise en œuvre de la Loi et de la Stratégie de développement durable. Ces personnes accréditées pourraient provenir indifféremment de la fonction publique ou du secteur privé. Il faudrait cependant éviter d en faire une structure corporative avec droits de pratique où un type de formation serait privilégié. Le développement durable est avant tout une démarche que les intervenants de tous ordres doivent comprendre et mettre en pratique. 4. Comment peut-il favoriser l intégration des actions des partenaires de la société québécoise? La Loi et la Stratégie gouvernementale de développement durable présentent une évolution indéniable de la gouvernance de l État. Cependant, dans leur forme actuelle, elles ne vont pas assez loin concernant l intégration des partenaires de la société civile dans la définition des actions du domaine public. Pris comme tel, le projet de Stratégie risque de demeurer une affaire de fonctionnaires intéressant peu le public et les partenaires sociétaux. La faible 7
couverture journalistique concernant la présente consultation liée au projet de Stratégie est caractéristique à cet égard. Il faut absolument revoir le projet de Stratégie afin de mieux y intégrer un cadre de mise en œuvre ouvrant les discussions sur les responsabilités du domaine public à l ensemble des partenaires tant de la fonction publique que de la société civile. Les suggestions formulées dans le présent mémoire visent à ouvrir un tel dialogue. 5. Commentaire d ensemble 5.1 Des processus à mieux définir Le développement durable constitue une démarche, un mode de gouvernance, qui devrait amener les partenaires de l ensemble de la société à s interroger sur les conséquences des projets et actions à entreprendre. Le cadre de contenu (orientations, objectifs) de la Stratégie a été interrogé déjà en long et en large. Ce cadre devrait permettre aux acteurs d interroger leurs activités et c est à l usage que l on pourra revoir la définition des orientations et des objectifs. Par ailleurs, le projet de Stratégie gouvernementale de développement durable devrait mieux définir les processus à la base de la démarche partenariale qui devrait être un des éléments clé de la nouvelle gouvernance. En matière de développement durable, la démarche impliquant les partenaires est toute aussi importante, sinon plus importante, que les objectifs eux-mêmes. 5.2 Revoir la présentation graphique de concept de développement durable L intégration des actions telle que proposée dans les suggestions précédentes met en évidence la nécessité de revoir la présentation graphique du concept de développement durable avec trois (3) cercles inter reliés représentant l environnement, la société et l économie. Le concept graphique devrait être revu afin d encadrer les 3 cercles dans un grand cercle unificateur tel qui suit : 8
VERSION INITIALE VERSION PROPOSÉE La présentation graphique du développement durable ainsi revue permettrait de démontrer l importance de la vision sociétale d ensemble chapeautant les trois domaines que sont l économie, la société et l environnement. Le cercle englobant démontre également l importance d avoir une concertation sociétale concernant les grands projets de société. La présentation graphique ainsi revue devrait être intégrée dans la section de la Stratégie portant sur la «Vision du développement durable». Jacques Lavigne Lavigie conseil 1007 rue de Bar-le-Duc Québec G1W 2N9 9