GENIE CLIMATIQUE ET ENERGETIQUE FICHE DE LECTURE PERFORMANCES SAISONNIERES DES MACHINES THERMODYNAMIQUES Olivier GANGLOFF Tuteur COSTIC : JJ. LENOTTE Tuteur CIAT : Y. ROUSSEAU
Lorsque l on parle de performances des systèmes thermodynamiques, il faut distinguer les performances nominales et les performances saisonnières. Les performances déterminées pour des conditions nominales ne sont pas représentatives des performances réelles, qui dépendent de façon importante des conditions sur les sources intérieure et extérieure, et doivent donc être déterminées sur une année complète. Afin notamment de réduire les consommations d énergie, l Union Européenne impose des règlementations sur tous les produits liés à l énergie. En particulier, les machines thermodynamiques sont ou seront soumises à des exigences d efficacité énergétique saisonnière. Les constructeurs seront tenus de déclarer les performances saisonnières de leurs appareils. La société CIAT va devoir fournir les performances saisonnières de ses pompes à chaleur (PAC), en application des règlementations et des normes européennes. Les objectifs de ce Projet de Fin d Etudes (PFE) sont d étudier et synthétiser les exigences et échéances règlementaires, et de réaliser des calculs de performance saisonnière pour les machines prochainement soumises aux règlementations. 1. Contexte règlementaire et normatif Directives européennes ERP (Energy Related Product) Pour le moment, les règlementations imposant des exigences de performance saisonnière pour les machines thermodynamiques ont été publiées uniquement pour les pompes à chaleur, à travers deux règlements concernant les systèmes de production de chaleur utilisant une boucle d eau de chauffage (chaudières, pompes à chaleur, systèmes solaires). Le règlement ERP 813/2013 donne des exigences d éco-conception pour le produit, notamment une efficacité énergétique minimale (avec mise en place de seuils minimaux en 2015 puis 2017). Le règlement ERP 811/2013 impose de fournir avec le produit une étiquette énergétique spécifiant la classe énergétique du système. Le respect de ces exigences conditionne le marquage CE de l appareil, et donc sa vente en Europe. L efficacité énergétique saisonnière (η s ) des PAC est calculée à partir du coefficient de performance saisonnier de référence (SCOP), ramené en énergie primaire afin d avoir un rendement saisonnier, pouvant être comparé avec celui des autres systèmes de chauffage. Norme EN 14825 La norme EN 14825, créée pour les besoins de la règlementation, donne les méthodes de calcul pour la détermination des coefficients de performances saisonniers. On définit : - Des climats de référence, pour lesquels peuvent être effectués le calcul. Le seul climat imposé par la règlementation des PAC est le climat «moyen». - Des applications pour la machine, correspondant à des régimes d eau sur les échangeurs. Les applications exigées par la règlementation en chauffage sont les applications «basse température» (régime nominal au condenseur 30/35 C) et «haute température» (régime nominal au condenseur 47/55 C). - Des conditions de charge partielle, correspondant à des températures aux sources. Ces conditions dépendent du climat et de l application. Les puissances thermique et absorbée sont déterminées par mesures ou simulations pour ces différentes conditions. On tient alors compte des besoins d un bâtiment fictif dans lequel se trouverait l appareil. Etudiant : Olivier Gangloff Performances saisonnières Page 1
- Les coefficients de performances ou efficacités énergétiques saisonniers de référence. A partir des performances obtenues dans les conditions de charge partielle, on réalise des interpolations sur les puissances et les COP sur l ensemble du climat, avant de faire un bilan énergétique annuel donnant les coefficients saisonniers. Le SCOPnet traduit les performances de la PAC seule, tandis que le SCOPon prend en compte un appoint éventuel intégré. Le SCOP tient en plus compte des auxiliaires de fonctionnement de la PAC. - Des modes de fonctionnement de la machine, afin de tenir compte des auxiliaires. On définit le mode veille, le mode arrêt, le mode de dispositif de chauffage de carter, et le mode arrêt par thermostat. Certification des données Jusqu à présent, l organisme certificateur Eurovent certifiait des COP (coefficient de performance en chauffage) et EER (ratio d efficacité énergétique en refroidissement) nominaux, ainsi que des efficacités saisonnières en refroidissement très simplifiées, les ESEER. L organisme va dès 2015 certifier les nouvelles performances saisonnières. 2. Calcul d efficacités énergétiques saisonnières Méthode de calcul La première étape du calcul de l efficacité saisonnière correspond à des simulations thermodynamiques réalisées à l aide d un logiciel interne, pour obtenir les puissances brutes dans les différentes conditions de charge partielle définies par la norme. Ces puissances brutes sont ensuite corrigées en puissances nettes, afin d avoir des valeurs s approchant au mieux de ce que l on obtiendrait par mesure. On prend alors en compte les pertes de charge du circuit hydraulique intégré à l appareil, ainsi que pour les PAC air/eau, la dégradation des performances due au dégivrage par inversion de cycle de l évaporateur. Dans le cas des machines à plusieurs étages de compression, il faut réaliser plusieurs simulations pour chaque condition de charge partielle. Sur la figure suivante, les deux droites en rouge correspondent aux puissances calorifiques nettes obtenues pour les différentes conditions normatives (A,B,C,D,E). On est ici dans le cas d une PAC air/eau bi-étagée. E A F B C D Droites de charge et de puissances fournies par la machine (PAC air/eau bi-étagée), pour une température de bivalence de -5 C Etudiant : Olivier Gangloff Performances saisonnières Page 2
La droite en bleu correspond à la charge (besoins) d un bâtiment dans lequel l appareil serait placé. Le constructeur est libre du choix de la température de bivalence (point F), audessous de laquelle la PAC seule ne suffit plus à couvrir les besoins. La position de la droite des besoins, et donc la puissance de dimensionnement de référence Pdesign (charge pour la température limite du climat), sont déterminés par le choix de la température de bivalence. Les puissances thermiques (droites rouges) sont mises en relation avec la charge dans le but de calculer pour chaque condition la puissance thermique et le COP effectivement fournis par l appareil. Si la charge est supérieure à la puissance maximale (zone jaune), on prend directement les performances à l étage 100%, et un appoint électrique (COP de 1) sera pris en compte plus tard dans le calcul. Si la charge est inférieure à la puissance du plus petit étage (zone verte), le compresseur réalise des cycles marche/arrêt, ce qui se traduit par une minoration du COP à l aide d un coefficient de dégradation, ou coefficient de cyclage. Enfin, si la charge se trouve entre deux étages de compression, le COP est obtenu par interpolation entre les performances aux deux étages encadrant la charge. La puissance thermique et le COP ainsi obtenus pour différentes températures extérieures sont ensuite interpolés ou extrapolés pour l ensemble des températures du climat. On réalise alors des bilans énergétiques annuels, en prenant en compte les heures attribuées aux tranches de température, pour obtenir le SCOPnet (machine seule) et le SCOPon (prise en compte de l appoint électrique). Le calcul du SCOP tient en plus compte des auxiliaires de la machine, à travers des modes de fonctionnement auxquels la norme attribue des heures annuelles. Il faut alors déterminer pour une machine donnée les auxiliaires intervenant dans chaque mode, ainsi que les puissances correspondantes. Ces calculs ont été réalisés à partir de fichiers Excel. Parallèlement, une aide a été apportée pour la création par le service informatique d un outil spécial plus automatisé. Par ailleurs, un fichier répertoriant pour chaque taille de machine la présence et la puissance des auxiliaires utilisés dans les modes de fonctionnement de la norme a été créé. Etudes comparatives Bien que les exigences et échéances soient bien définies par la règlementation, la manière de calculer les performances n est pas tout-à-fait définitive. Certains points d incertitudes subsistent. Il a fallu lister tous les paramètres entrant en jeu dans le calcul des SCOP mais pas encore fixés, puis effectuer pour quelques machines représentatives de la gamme des calculs en faisant varier ces paramètres. Le but est de prévoir le positionnement des différentes machines vis-à-vis des seuils réglementaires, en fonction des cas de figure, et de quantifier l impact de chacun de ces paramètres dans le but de définir des stratégies d entreprise. Les paramètres variables principaux sont les suivants : - Température d eau de chauffage : sortie fixe ou sortie variable. Ce paramètre influe sur les conditions de charge partielle. En sortie fixe, la consigne de température d eau de chauffage reste maximale quelle que soit la température extérieure. La sortie variable prend en compte une loi d eau sur la température extérieure. - Choix de la température de bivalence : si la température de bivalence augmente, les besoins augmentent : la puissance d appoint augmente mais le cyclage est moins important. Etudiant : Olivier Gangloff Performances saisonnières Page 3
- Coefficients minorateurs de dégivrage. L impact du dégivrage, faute de nombreux résultats d essais, est quantifié de façon très incertaine. Il convient de prendre une hypothèse favorable et une hypothèse défavorable. - Coefficients de cyclage : ils peuvent soit être pris par défaut, soit mesurés (calculés en estimant le résultat que l on obtiendrait par mesure) Les résultats obtenus peuvent être illustrés par des courbes de la forme suivante, montrant la variation de l efficacité saisonnière η s en fonction de la température de bivalence et des différents paramètres. L exemple pris est celui d une PAC air/eau mono-compresseur, fonctionnant en régime Basse Température (30/35 C au condenseur). Efficacité η s en fonction des différents paramètres, régime BT (gauche : Cc = 0.9, valeur par défaut; droite : Cc = 0.98, valeur estimée) Les deux courbes bleues correspondent aux résultats en sortie fixe ; la courbe bleue supérieure à l hypothèse de coefficients de dégivrage forts, la courbe bleue inférieure à l hypothèse de coefficients de dégivrage faibles. Idem pour les courbes vertes qui représentent les résultats en sortie variable. Les droites rouges représentent les seuils réglementaires de η s à atteindre. L ordre de grandeur de l impact de ces différents paramètres est listé dans ce tableau : Paramètre coefficient de cyclage Cc Valeur favorable calculé Valeur défavorable par défaut (Cc = 0.9) Cas de figure pour le calcul de ηs gain ηs machines air/eau gain ηs machines eau/eau mono-ét. Tbiv=-10 C 18% - mono-ét. Tbiv optimale 10% - multi-ét. Tbiv=-10 C 2% - sortie d'eau sortie variable sortie fixe régime BT 12% 15% dégivrage hyp.faible hyp. forte - 4% - température Tbiv > -10 C Tbiv = -10 C - 8% 2% de bivalence (avec appoint) (sans appoint) Incidence représentative des paramètres non figés sur l efficacité énergétique saisonnière Etudiant : Olivier Gangloff Performances saisonnières Page 4
Positionnement et stratégies Ces résultats ont été présentés à différentes personnes de l entreprise, dont le service Offre et Développement stratégique, afin de dégager des stratégies et des axes de développement. Ainsi, on peut voir que la sortie d eau variable est bien plus avantageuse ; en aucun cas les machines CIAT, disposant d une loi d eau, ne seront déclarées en sortie fixe. Les coefficients de cyclage Cc ont un impact considérable dans le cas des machines mono-compresseur. Le problème provient du fait que les valeurs de Cc utilisées pour ces calculs sont estimées et non réellement mesurées. Il faudrait effectuer des mesures pour estimer réellement ces coefficients Cc et valider ces valeurs de calcul estimatif. De la même manière, pour les coefficients de dégivrage, il y a un besoin d essais pour quantifier de manière précise, par famille de batterie d air, l impact du dégivrage pour les points de fonctionnement normatifs. Concernant la température de bivalence, la réponse à la question suivante n est pas encore définie dans les textes règlementaires : si on déclare une température de bivalence supérieure à -10 C, faut-il fournir physiquement un appoint électrique avec la machine, ou simplement le préconiser sans le fournir? La deuxième possibilité est quasiment acquise, après plusieurs mois de lobbying de la part des fabricants de PAC. Pour le choix de la température de bivalence, il faut trouver un compromis entre les performances et le choix markéting : cela influe sur la charge et donc sur le prix de la machine rapporté aux besoins ( /kwh), et également sur la puissance d appoint et donc sur d éventuelles réticences du client. Calculs définitifs Pour certaines gammes de PAC, les différents paramètres ont été fixés. Des calculs définitifs ont alors été réalisés, ainsi que la préparation de la mise en forme réglementaire. Celle-ci et très lourde, puisqu elle comporte une fiche produit détaillée et une étiquette. Conclusion Ce PFE a permis de synthétiser les informations publiées par les instances européennes et d analyser la méthode de calcul des performances saisonnières afin de développer des outils de calcul efficaces. La déclaration des performances saisonnières représente un travail de calcul et de publication conséquent. Il faut prendre en compte un grand nombre de paramètres, dont certains sont mal quantifiés ou encore laissés au choix du constructeur. Un travail d études comparatives a été réalisé, rendant compte du positionnement des pompes à chaleur CIAT et permettant de dégager des stratégies d entreprise et des axes de développement. Ces nouvelles règlementations, qui accélèreront la sortie du marché des appareils peu efficaces, ont un impact économique et commercial important. En particulier, pour les fabricants de machines thermodynamiques, elles conditionnent directement la vente de l appareil, à travers le marquage CE mais aussi la valeur de l efficacité énergétique saisonnière, qui deviendra avec le prix le principal critère de choix pour le client. Ces règlementations laissent au constructeur la possibilité de se positionner sur certains paramètres. Il faut en tenir compte lors de tout développement ou amélioration de machines. Etudiant : Olivier Gangloff Performances saisonnières Page 5