RAPPORT SUR L'INTERVENTION DE SAUVETAGE A LA POINTE DE SAINT-COLOMBAN (CARNAC, MORBIHAN) 27 Septembre 1978 par Jean Laurent MONNIER 1) Circonstances de la découverte. La découverte d'une seconde station paléolithique à St-Colomban (Carnac, Morbihan) (1) est due à Monsieur Robert LE CLOIREC. Des silex taillés sont apparus sur la coupe naturelle dans les formations meubles, en bord de mer. Convaincu de l'importance de ce nouveau site, Monsieur LE CLOIREC a averti la Direction des Antiquités Préhistoriques de Bretagne. Monsieur LE ROUX, Directeur, m'a chargé d'effectue une première intervention sur le terrain. 2) Localisation. Le second gisement paléolithique de St-Colomban est bien distinct du précédent découvert voici une vingtaine d'années (Figure 1). Il se situe précisément au lieu dit "La Pointe de St-Colomban" (IGN 1/25000 ème, feuille d'auray), donc à 1 'extrémité sud de la plage. La partie explorée se trouve dans le domaine public maritime. 3) Exécution de l'intervention. L'intervention a consisté à nettoyer le bas de la coupe encombré par des éboulis, à effectuer un bref sondage et à lever la partie visible de la section. Le travail a permis de récolter quelques outils lithiques supplémentaires venant s'ajouter à ceux trouvés précédemment. Une protection provisoire a été enfin installée à 1 'aide de gros galets de la plage. 4) La stratigraphie. La falaise de blocailles, haute de trois mètres environ, s'étend sur une quinzaine de mètres entre deux promontoires rocheux (granité tardi-migmatitique). En arrière de la coupe, on devine les limites des dépôts périglaciaires, marqués par (7) Un pfiemtea. gl^zmznt avait etz dzcouveat à l'ouest dz la plage, dz St-Colomban [SÏCARV J.C., Î 957, Le CheM.zo-acheulQ.zn zt LzvaULoU,lzn dz Salnt-Colomban zn Cannac. Bull. Soc. Volym. Morbihan, P.V., p. 30-32).
2 une légère dépression du terrain : guère plus de cinq mètres au-delà (Figure 2). La stratigraphie observée sur la coupe se présente comme suit (Fi'g. 1) : Couche 1 : limon arénacé lité avec un lit discontinu de blocs et de cailloux à la base. Couche 2 : limon arénacé jaune orangé terne (10 YR 7/4), assez compact ; accumulatior. de gros blocs de granité à la base. Epaisseur sensiblement constante. Couche 3 : head grossier à matrice sableuse jaune (10 YR 6.5/3). On observe de multiples lits durcis formés d'un matériel sableux brun vif (7.5 YR 5/5), mis en relief sur la coupe par 1 'érosion. On remarque de très nombreux gravier de quartz arrondis remaniés dans le head. Cette couche s 'épaissit considérablement vers le Nord-Ouest. Couche 4 : head à matrice sableuse, très friable, de teinte brun sombre (10 YR 3/4). Couche 5 : sable friable noir brunâtre (10 YR 2/3), englobant des gros blocs. La limite avec la couche 4 est soulignée par un horizon durci plus orangé (7.5 YR 5/6). Couche 6 5) L'industrie. : sable compact mais peu durci, de teinte brun rougeâtre (5 YR 4/6), englobant également des gros blocs qui paraissent disposés à plat. L'industrie est uniquement lithique. Elle se sépare en deux groupes stratigraphiquement distincts: - Une industrie sur galets de quartzite, de quartz et accessoirement de silex, portant les traces d'une éolisation très nette. - Une industrie à éclats de silex pour l'essentiel, d'aspect frais. La première série provient de la couche 5, tandis que la seconde provient de la couche 4. Cinq choppers sont faits à partir de galets de quartzite. Quatre d'entre eux sont des galets particulièrement plats, ce qui paraît résulter d 'un choix. Les tranchants, unilatéraux, sont en position distale pour trois objets, en position latérale pour le quatrième. Les enlèvements varient entre trois et quatre. Le tranchant de l'une des pièces se superpose à des traces de percussion. Des galets simplement utilisés comme percuteurs existent également.
La plupart des éclats récoltés, tant en quartz, quartzite qu'en silex, sont des éclats de taille de choppers. Quelques petits nucleus d'allure proto-levallois attestent cependant la présence d'une industrie sur éclats. L'outillage sur éclats, rencontré jusqu'à présent, est rare épais en silex à surface corticale : un perçoir atypique sur un fragment d'éclats ; un petit racloir à retouches frustes sur un éclat de silex à large réserve corticale sur un éclat de quartz. ; une sorte de denticulé à dos aminci, Le silex semble plus largement utilisé. Il n'y a pas de chopper pour autant que l'on puisse en juger sur une série aussi restreinte. Le débitage est maladroit, d'un type levallois très primitif dans quelques cas. Des talons facettés apparaissent mais les pièces retouchées observées jusqu 'à présent sont peu nombreuses. Il existe seulement deux encoches clactoniennes. 6) Situation des collections. Une partie des pièces récoltées se trouve pour étude au Laboratoire d'anthropologie préhistorique de l'université de Rennes (Campus de Beaulieu). L'ensemble sera déposé au Musée Municipal de Carnac. 7) Conclusion. Les observations stratigraphiques montrent qu 'il y a deux niveaux- archéologiques distincts. L 'industrie est très archaïque par son aspect. La position stratigraphique laisse penser que nous avons affaire à un gisement très ancien (Holteinien au minimum). Toutefois seules des études complémentaires de géologie, du Quaternaire pourront le confirmer. L 'importance du site justifiera une fouille complète ultérieurement. A RENNES, le 4 Décembre 1978 40NNIER Attaché de Recherche E.R. n 27 du C.N.R.S.
Figure 1 : Situation géographique du gisement. 1 : Premier gisement 2 : Second gisement
Figure 2 : Coupe du gisement de la pointe de St-Colomban. Les numéros des couches correspondent à la description dans le texte.