AVIS N 08 /2006 du 12 avril 2006



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ROYAUME DE BELGIQUE Bruxelles, le Adresse : Av. Rue de Haute, la porte 139, de B-1000 Hal, 5 - Bruxelles 8, B-1060 Bruxelles Tél.: +32(0)2/213.85.40 +32(0)2/542.72.00 E-mail : commission@privacy.fgov.be E-mail Fax.: : commission@privacycommission.be +32(0)2/542.72.12 http://www.privacy.fgov.be/ Fax.: +32(0)2/213.85.65 http://www.privacycommission.be COMMISSION DE LA PROTECTION DE LA VIE PRIVEE AVIS N 08 /2006 du 12 avril 2006 N. Réf. : SA2 / A / 2006 / 005 OBJET : Avis concernant l utilisation d un système de vidéosurveillance dans un milieu d accueil. La Commission de la protection de la vie privée ; Vu la loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée à l égard des traitements de données à caractère personnel (ci-après la LVP ), en particulier l article 29 ; Vu la demande d avis de la Ministre de l Enfance, de l Aide à la Jeunesse et de la Santé du 30 janvier 2006 ; Vu le rapport de Madame D Hautcourt ; Emet, le 12 avril 2006, l avis suivant : AV 08 / 2006-1 / 8

A. INTRODUCTION 1. Le 30 janvier 2006, la Ministre de l Enfance, de l Aide à la Jeunesse et de la Santé a demandé à la Commission d émettre un avis concernant l utilisation d un système de vidéosurveillance dans un milieu d accueil. 2. La demande d avis, émanant de la Ministre de l Enfance, de l Aide à la Jeunesse et de la Santé, est formulée plus particulièrement comme suit : Une initiative récente instaurant un système de vidéosurveillance (webcams) dans une maison d enfants (crèche «privée» pour des enfants de 0 à 3 ans) suscite un questionnement quant à la compatibilité d une telle initiative avec notamment la loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée à l égard des traitements de données à caractère personnel. Cette initiative offre aux parents la possibilité d observer le comportement de leur enfant, via Internet, à des moments déterminés par la direction de la maison d enfants. Ce faisant, elle offre en même temps aux parents la possibilité d observer les autres enfants et le personnel du milieu d accueil, ainsi que les intervenants extérieurs (travailleurs sociaux, inspecteurs, animateurs,...). Le personnel et les parents sont informés de cet élément du projet pédagogique de la maison d enfants, et sont même amenés à y consentir. La Commission se prononcera ci-après sur cette demande. B. LEGISLATION APPLICABLE 3. Tout d abord, on peut faire référence à la Convention internationale relative aux Droits de l'enfant du 20 novembre 1989, plus précisément à l article 16. 4. Etant donné qu il s agit d un traitement de données à caractère personnel, la LVP est d application. C. EXAMEN DE LA DEMANDE D AVIS C.1. La vidéosurveillance en général 5. La réglementation juridique de l usage de la vidéosurveillance fait l objet de discussions et d interrogations. Dans l'avis n 14/95 du 7 juin 1995, la Commission a mis l accent sur le fait que la loi du 8 décembre 1992 1 s applique au traitement d images à condition que ces images se rapportent à des personnes identifiées ou identifiables et qu'elles soient conservées. Dans l avis n 34/99 du 13 décembre 1999, la Commission insiste sur la nécessité d adapter les principes formulés dans l'avis n 14/95 à la lumière de l adoption de la loi du 11 décembre 1998 qui modifie celle du 8 décembre 1992 sur divers points essentiels. La principale nouveauté réside dans l élargissement concret du champ d application de la loi. Dorénavant, elle s applique dès que des images sont filmées, la conservation des données enregistrées ne constituant donc plus une condition nécessaire à l application de la loi. 6. Les principes fondamentaux examinés dans le cadre de l avis n 34/99 s appliquent incontestablement aux systèmes de vidéosurveillance qui sont utilisés dans un milieu d accueil. Les passages de l avis n 34/99 susmentionné les plus pertinents pour le cas qui nous occupe sont rappelés ci-après : 1 Loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée à l égard des traitements de données à caractère personnel, M.B., 18 mars 1993. Cette loi a été modifiée par celle du 11 décembre 1998 transposant la Directive 95/46/CE du 24 octobre 1995 du Parlement européen et du Conseil relative à la protection des personnes physiques à l égard du traitement de données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, à consulter dans le Moniteur belge du 3 février 1999. AV 08 / 2006-2 / 8

«En vertu de l'article 4 de la loi, le traitement doit se dérouler pour des finalités clairement définies et légitimes. a. La détermination de la finalité du traitement est un élément essentiel de la protection des personnes. Elle aura des conséquences directes sur les modalités d'application de la loi. Elle permettra en outre d'identifier les traitements qui ne tombent pas dans le champ d'application de la loi (article 3, 2 : traitement d'images effectué à des finalités exclusivement personnelles ou domestiques). Un traitement à des fins de journalisme, d'expression artistique ou littéraire se trouvera exempté de certaines obligations prévues par la loi (voyez supra et article 3, 3). b. Dès lors que la détermination de la finalité du traitement entraîne l'application de la loi, le responsable du traitement devra s'assurer du respect des différentes conditions de l'article 4 et en particulier du caractère légitime de la finalité. Il est par conséquent essentiel que la finalité soit déterminée de façon suffisamment précise par le responsable du traitement. La Commission rappelle que la légitimité des traitements d'images doit être jugée en application du principe de proportionnalité visé à l'article 4 de la loi : l'intérêt général ou les intérêts légitimes du gestionnaire du traitement doivent être mis en balance avec le droit à la protection de la vie privée de la personne enregistrée. En ce qui concerne par exemple l'utilisation de caméras de vidéosurveillance pour la protection des personnes et des biens, la collecte de données dans les lieux publics et accessibles au public peut être considérée comme proportionnelle lorsqu'elle se déroule dans le cadre de la prévention et de la constatation d'infractions dans des endroits particulièrement dangereux (par exemple dans le cadre de transferts de fonds). L'appréciation pourrait être plus stricte lorsque les caméras de vidéosurveillance sont utilisées dans des lieux non accessibles au public. L'exigence du consentement des personnes concernées pourrait ici entrer en ligne de compte dans l'appréciation du respect du critère de proportionnalité. Entre également dans l'appréciation du respect de ce critère la conservation ou l'absence de conservation des données par le responsable du traitement. Il convient en tout état de cause de garder à l'esprit qu'un traitement d'images doit être un moyen adéquat et nécessaire à la réalisation de l'objectif poursuivi. Il doit en outre rester un moyen subsidiaire de parvenir à cet objectif. Une installation de caméras de vidéosurveillance devra s'avérer indispensable pour atteindre l'objectif poursuivi, d'autres mesures moins attentatoires à la vie privée s'avérant insuffisantes dans le cas d'espèce. En ce sens, la sécurité d'un local pourra dans certains cas être aussi bien protégée par des mesures peu intrusives, telles qu'un verrouillage renforcé des portes et un système d'alarme, que par un système de vidéosurveillance. c. Le principe de finalité implique également que les images traitées ne peuvent être utilisées d'une manière incompatible avec le but clairement défini et légitime. En d'autres termes, les données ne peuvent être utilisées que dans le cadre de la finalité déclarée et ne peuvent donner lieu à d'autres utilisations. Une incompatibilité résulterait par exemple de l'utilisation d'un système de vidéosurveillance, dont la finalité annoncée est la prévention des vols dans l'entreprise, afin de contrôler la productivité des employés. d. Ce principe stipule encore que les images traitées par rapport aux finalités clairement définies et légitimes, doivent être adéquates, pertinentes et non excessives. L'enregistrement doit ainsi se dérouler de telle sorte que des images superflues ne soient pas prises. Ainsi, des caméras filmant la voie publique devront éviter que ne figurent dans leur champ des entrées ou des fenêtres de bâtiments privés. En outre, le nombre d'appareils d'enregistrement placés et leurs fonctionnalités, de même que la présence ou l'absence d'une fonction de suivi automatique, ne peuvent être excessifs en fonction des finalités poursuivies. Conformément à ce principe, un système de vidéosurveillance ne devra AV 08 / 2006-3 / 8

permettre l'identification des personnes filmées que lorsqu'une telle identification est nécessaire à la réalisation de l'objectif poursuivi. Un système de contrôle de la fluidité du trafic routier devrait ainsi être installé de façon à filmer les personnes d'une distance suffisante afin de préserver leur anonymat.» (Avis n 34/99, p. 6-7). 7. Enfin, on peut également faire référence aux avis du Groupe de Protection des données article 29 2 en matière de vidéosurveillance, plus particulièrement à l avis 3 n 4/2004 sur le traitement de données à caractère personnel au moyen de la vidéo-surveillance. C.2. Vidéosurveillance dans un milieu d accueil 8. En ce qui concerne le cas discuté au point 2, on évaluera d abord, au point A) ci-dessous, le traitement à la lumière des exigences d admissibilité telles que prévues à l article 4 de la LVP. Ensuite, on examinera au point B) dans quelle mesure, pour la vidéosurveillance visée, on peut faire appel à un des fondements légaux d un traitement, prévus à l article 5 de la LVP. A. Article 4 de la LVP : admissibilité du traitement 9. Un traitement valable de données à caractère personnel doit satisfaire aux dispositions de l article 4 de la LVP. En vertu de l article 4, 1, 1 et 2 de la LVP, les données à caractère personnel doivent être traitées loyalement et licitement et collectées pour des finalités déterminées, explicites et légitimes, et ne pas être traitées ultérieurement de manière incompatible avec ces finalités, compte tenu de tous les facteurs pertinents, notamment des prévisions raisonnables de l intéressé et des dispositions légales et réglementaires applicables. 10. Dans le cas présent, la finalité est la suivante : en installant des webcams, le milieu d accueil souhaite offrir aux parents la possibilité d observer - à des moments déterminés - le comportement de leur enfant dans la crèche, via Internet. La caméra filmera donc le milieu d accueil dans son ensemble et toutes les personnes présentes, des enfants au personnel, en passant par les visiteurs, Les images captées, y compris les ima ges d événements imprévisibles (accidents, etc.), seront diffusées en temps réel via Internet, pour être visibles par les parents. Toutefois, les parents pourront non seulement voir les images de leur(s) propre(s) enfant(s) mais également celles des autres enfants, des membres du personnel et des visiteurs du milieu d accueil. Cette forme de diffusion via Internet comporte en outre le risque que les images puissent être interceptées par des tiers légalement ou illégalement. Les images peuvent aussi être réutilisées par les parents ou des tiers pour d autres finalités que celles initialement visées par le milieu d accueil. En résumé, cela signifie que la perte du contrôle sur les images vidéo des enfants et du personnel est absolue et qu elle peut par conséquent conduire à une réutilisation illégitime des images. 11. Vu ce qui précède, il y a lieu dès lors de conclure que le traitement visé dans ce cas doit être considéré comme illégitime. 2 Ce groupe a été créé sur la base de l article 29 de la Directive 95/46/CE. Il s agit d un organe consultatif européen en matière de protection des données et de la vie privée dont les missions sont définies à l article 30 de la Directive 95/46/CE et à l article 15 de la Directive 2002/58/CE. 3 A consulter sur : http://europa.eu.int/comm/justice_home/fsj/privacy/workinggroup/wpdocs/2004_en.htm AV 08 / 2006-4 / 8

B) Article 5 de la LVP : caractère légal 12. Un responsable du traitement doit se baser sur un des éléments de l article 5 de la LVP 4 pour traiter des données à caractère personnel. En l occurrence, le milieu d accueil souhaite installer des webcams afin d offrir aux parents la possibilité de pouvoir observer, via Internet, leurs enfants dans la crèche à des moments précis de la journée. Pour ce traitement de données à caractère personnel, on ne peut se baser que sur l article 5 a) et f) de la LVP, les points b) à e) étant dans ce cas exclus 5. Le traitement de données à caractère personnel est dès lors autorisé, conformément à l article 5 a) de la LVP, lorsque la personne concernée a indubitablement donné son consentement, et conformément à l article 5 f) lorsqu il est nécessaire à la réalisation de l intérêt légitime poursuivi par le responsable du traitement ou par le tiers auquel les données sont communiquées, à condition que ne prévalent pas l intérêt ou les droits et libertés fondamentaux de la personne concernée qui peut prétendre à une protection au titre de la présente loi. B.1. Article 5 a) : le consentement indubitable 13. Pour établir le consentement indubitable, il est nécessaire de déterminer en premier lieu l identité des personnes concernées, c.-à-d. qui est visé par la vidéosurveillance projetée et cette personne doit-elle donner son consentement à cet effet? On peut distinguer deux catégories de personnes : - les enfants présents dans le milieu d accueil ; - les employés du milieu d accueil. 14. Comme la Commission l a déjà précisé dans son avis n 38/2002 relatif à la protection de la vie privée des mineurs sur l Internet, la Commission est d'avis que le mineur, et de façon plus spécifique l'enfant qui n'a pas encore une capacité de discernement suffisante, nécessite une protection particulière au regard de l'application de la loi relative à la protection de la vie privée. Dans ce cas, les enfants, vu leur âge de 0 à 3 ans, ne sont évidemment pas aptes à donner leur consentement pour le traitement projeté, étant donné qu ils sont mineurs et qu on ne peut pas considérer qu ils disposent de la capacité de discernement nécessaire. Par conséquent, dans ce cas, la possibilité de donner ou non le consentement au traitement projeté sera transférée aux parents, en tant que représentants légaux de leur enfant et en tant que composante de leur autorité parentale. Le consentement éventuel des parents devra être dicté par l intérêt de l enfant. En effet, l autorité parentale est un geheel van doelgerichte bevoegdheden die uitsluitend in het belang van de minderjarige gegeven zijn (ensemble de compétences ciblées qui sont exclusivement octroyées dans l intérêt du 4 Le traitement de données à caractère personnel ne peut être effectué que dans l'un des cas suivants : a) lorsque la personne concernée a indubitablement donné son consentement; b) lorsqu'il est nécessaire à l'exécution d'un contrat auquel la personne concernée est partie ou à l'exécution de mesures précontractuelles prises à la demande de celle-ci; c) lorsqu'il est nécessaire au respect d'une obligation à laquelle le responsable du traitement est soumis par ou en vertu d'une loi, d'un décret ou d'une ordonnance; d) lorsqu'il est nécessaire à la sauvegarde de l'intérêt vital de la personne concernée; e) lorsqu'il est nécessaire à l'exécution d'une mission d'intérêt public ou relevant de l'exercice de l'autorité publique, dont est investi le responsable du traitement ou le tiers auquel les données sont communiquées; f) lorsqu'il est nécessaire à la réalisation de l'intérêt légitime poursuivi par le responsable du traitement ou par le tiers auquel les données sont communiquées, à condition que ne prévalent pas l'intérêt ou les droits et libertés fondamentaux de la personne concernée qui peut prétendre à une protection au titre de la présente loi. 5 L article 5 b) est exclu étant donné que le traitement n est pas nécessaire à l exécution d un contrat. Le point c) n est pas non plus d application vu l absence d une obligation imposée par une loi, un décret ou une ordonnance. De plus, il n y a pas d intérêt vital de la personne concernée qui devrait être sauvegardé, conformément au point d). Le traitement n est pas non plus nécessaire à l exécution d une mission d intérêt public prévue au point e). AV 08 / 2006-5 / 8

mineur : traduction libre réalisée par le secrétariat de la Commission étant donné que cet ouvrage n a pas été traduit) 6 Ce consentement suscite toutefois les questions suivantes : 15. Tout d abord, le milieu d accueil a besoin du consentement de chaque parent concerné. Si un des intéressés refuse de donner son consentement, le milieu d accueil ne peut dès lors pas filmer les enfants présents. Divers problèmes pratiques peuvent se poser ici : par exemple que se passe-t-il si les parents ne sont pas tous les deux d accord? En outre, il semble probable que le milieu d'accueil retiendra davantage, lors de l'admission de nouveaux enfants, ceux dont les parents sont positifs à l'égard d'un tel système de webcams. Cela peut impliquer le fait que les parents, en raison également du manque de garderies, ne soient pas complètement libres au moment de donner leur accord pour le contrôle par webcam. Enfin, le consentement des parents doit pouvoir également être retiré à tout moment. On peut s interroger sur la réelle liberté d un tel retrait, étant donné les éventuelles conséquences négatives pour l enfant (par exemple renvoi). Vu ce qui précède, il semble y avoir des raisons de douter que l on soit tout à fait libre de refuser son consentement (a priori ou a posteriori) à la vidéosurveillance sachant que ceci pourrait avoir des conséquences négatives. 16. En ce qui concerne les employés du milieu d accueil, se pose également la question concernant l application des principes de la LVP. Bien que dans ce cas, la CCT n 68 du 16 juin 1998 relative à la protection de la vie privée des travailleurs à l'égard de la surveillance par caméras sur le lieu du travail 7 ne s applique pas, on peut quand même tenir compte des principes qui y sont repris. Ainsi, par exemple, selon la CCT, il est interdit de filmer les travailleurs en permanence et la surveillance par caméras dans l entreprise n est autorisée qu à des fins spécifiques. Par conséquent, la vidéosurveillance n est permise, selon la CCT, que dans des cas bien déterminés. Dans ce cas, l employeur doit dès lors veiller à ne pas violer les droits fondamentaux de ses employés en matière de protection de leur vie privée. 17. L employeur devrait donc, pour la légitimation de l installation d un système de webcam dans le milieu d accueil, invoquer un des éléments mentionnés à l article 5 de la LVP, dans ce cas, tel qu il ressort de la lettre de la Ministre, il souhaite invoquer le point a), le consentement des employés. Conformément à l article 5 a) de la LVP, le consentement donné doit être indubitable, c.-à-d. libre et spécifique, et également reposer sur une information suffisante. Cela signifie concrètement que les employés concernés devraient être tout à fait informés des finalités et des modalités spécifiques du traitement de données (cible des webcams, images filmées, formes de diffusion (par ex. qui a accès), ). 6 SENAEVE, P., «Compendium van het Personen en Familierecht» (Traduction libre réalisée par le secrétariat de la Commission étant donné que ce livre n a pas été traduit : Compendium du droit des personnes et de la famille), cinquième édition, p. 394, n 1040. 7 Le commentaire à l article 4 de la CCT n 68 stipule expressément que la CCT ne s applique qu à la «surveillance par caméras» par l employeur : c.-à-d. un système qui a pour but de surveiller le lieu du travail. Ainsi, l utilisation de caméras lors du recrutement et de la formation ne tombe pas dans le champ d application de la CCT n 68. Ceci n implique toutefois pas qu aucune procédure ne doit être suivie : dans certains cas, la CCT n 39 concernant notamment l introduction des nouvelles technologies peut s appliquer. Dans ce cas néanmoins, le système de caméras sert à offrir aux parents ( tiers dans la relation employeur-employé) la possibilité d observer leurs enfants, et également les employés du milieu d accueil, et ne sert donc pas à surveiller le lieu du travail. AV 08 / 2006-6 / 8

18. En ce qui concerne cet article 5 a), la Commission fait remarquer que ce dernier ne lui semble pas constituer une bonne base pouvant être invoquée par l employeur dans le cas présent. On peut en effet se demander en l occurrence dans quelle mesure les membres du personnel sont réellement libres de donner leur consentement ou non 8, sachant que ceci pourrait avoir des conséquences négatives. En tout état de cause, il faudrait prévoir la possibilité pour les employés de retirer leur consentement a posteriori, ce qui, dans ce cas, ne semble toutefois pas évident. A la lumière de ce qui précède, une autre alternative légale serait plus appropriée, à savoir l article 5 f) de la LVP, tel que recommandé également par le Groupe 29 dans un de ses documents de travail 9. B.2. Article 5 f) : l'intérêt légitime du responsable du traitement ou du tiers 19. Conformément à l article 5 f) de la LVP, «un traitement de données à caractère personnel est autorisé lorsqu il est nécessaire à la réalisation de l intérêt légitime poursuivi par le responsable du traitement ou par le tiers auquel les données sont communiquées, à condition que ne prévalent pas l intérêt ou les droits et libertés fondamentaux de la personne concernée qui peut prétendre à une protection au titre de la présente loi». On distingue ici également les enfants et les employés du milieu d accueil. 20. En ce qui concerne les enfants : La question qui se pose donc, concernant le cas présent, est de savoir si le fait que les enfants soient filmés dans le milieu d accueil au moyen d une webcam dont les images sont consultables par les parents, à des moments déterminés via Internet, ne porte pas atteinte, de manière disproportionnée, à l intérêt de l enfant. Tout d abord, on peut faire référence à l article 16 de la Convention internationale relative aux Droits de l Enfant du 20 novembre 1989 qui stipule que nul enfant ne fera l'objet d'immixtions arbitraires ou illégales dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance,.. Pour un mineur, et plus spécifiquement un enfant qui ne dispose pas encore d'une capacité de discernement suffisante, une protection particulière est par conséquent nécessaire à l'égard de l'application de la loi relative à la protection de la vie privée. Comme mentionné au point 10, le risque de perte de contrôle des images vidéo des enfants est dans ce cas absolu et peut conduire à une une réutilisation illégitime des images. En outre, on peut se référer, à titre d information, à l avis de l ONE 10 qui stipule que: «La séparation enfant-parent, bien que douloureuse parfois, fait grandir pour autant qu'elle se passe dans certaines conditions qui permettent la maturation de chacun. Une de ces conditions est que l'enfant se sente «autorisé» à s'investir ailleurs que dans la famille par le sentiment de confiance «porteur» que le parent transmet vis-à-vis de cet espace et des capacités de l'enfant à s'y investir en toute sécurité. 8 Voir à cet égard, par analogie, l article 27 de l arrêté royal du 13 février 2001 portant exécution de la loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée à l'égard des traitements de données à caractère personnel : Lorsque le traitement de données à caractère personnel, visées aux articles 6 et 7 de la loi, est exclusivement autorisé par le consentement écrit de la personne concernée, ce traitement est, néanmoins, interdit lorsque le responsable du traitement est l'employeur présent ou potentiel de la personne concernée ou lorsque la personne concernée se trouve dans une situation de dépendance vis-à-vis du responsable du traitement qui l'empêche de refuser librement son consentement.. 9 Voir à cet égard le document du Groupe 29 : Working document on a common interpretation of Article 26 (1) of Directive 95/46/EC of 24 October 1995 http://europa.eu.int/comm/justice_home/fsj/privacy/docs/wpdocs/2005/wp114_en.pdf 10 L avis 2005/03 du Conseil d avis de l ONE (Office de la Naissance et de l Enfance, Communauté française de Belgique) du 15 décembre 2005, relatif à l introduction de webcam en milieu d accueil. AV 08 / 2006-7 / 8

L'accès à l'autonomie pour un jeune enfant pourrait être remis en cause par l'immixtion «virtuelle» de parents désireux de voir le quotidien de leur enfant : «Si un parent accueille le soir son enfant en lui disant qu'il l'a vu pendant la journée jouer avec tel camarade ou tel jouet, le parent n'est plus seulement l'adulte sur lequel l'enfant prend appui, mais véritablement un dieu omniscient qui voit et qui sait tout. L'enfant pourrait aussi avoir un sentiment artificiel de sécurité induisant que même quand son parent n'est pas là physiquement, il peut veiller sur lui.» Compte tenu des éléments qui précèdent, l installation susmentionnée de webcams semble dès lors pouvoir être considérée comme disproportionnée au sens de l article 5 f) de la LVP. En l occurrence, l intérêt de l enfant doit prévaloir sur l intérêt du responsable du traitement. 21. En ce qui concerne les employés : Si l on prend pour référence les dispositions de la CCT n 68, on accepte que l employeur puisse filmer les employés pour des finalités de sécurité et seulement dans des cas spécifiques, ce qui motive que l intérêt du responsable du traitement prime sur celui des employés. Dans le cas des webcams dans des crèches, l intérêt du responsable du traitement et la finalité poursuivie, non dictée par des motifs de sécurité, ne justifie pas que l intérêt de ce responsable du traitement puisse prévaloir sur les droits et libertés fondamentaux des membres du personnel. Par conséquence, dans ce cas, l intérêt des employés filmés semble être de nature à mériter la priorité sur l intérêt du responsable du traitement. C.3. Conclusion 22. Il ressort de l évaluation qui précède que l installation de webcams dans un milieu d accueil afin d offrir aux parents la possibilité de pouvoir observer leurs enfants, via Internet, à des moments précis de la journée doit être considérée comme non-conforme à la LVP. 23. Ceci découle notamment de la constatation selon laquelle, dans le cas présent, la perte du contrôle sur les images vidéo des enfants et du personnel est absolue et peut donc conduire à une réutilisation illégitime des images, ce qui amène à devoir considérer le traitement comme problématique à la lumière de l article 4 de la LVP. PAR CES MOTIFS, la Commission de la protection de la vie privée émet un avis négatif concernant la demande d avis dont elle a été saisie. L administrateur, Le président, (sé) Jo BARET (sé) Michel PARISSE AV 08 / 2006-8 / 8