Introduction Aujourd hui, le monde s est rétréci grâce à nos moyens de communication et de transports modernes. Les hommes, les capitaux, les marchandises sont devenus très mobiles. Les avancées technologiques ont permis cela. L aviation a connu un boum saisissant, de même que les transports maritimes, les télécommunications (on peut appeler aujourd hui de n importe quel lieu dans le monde). Les rapports humains virtuels se sont décuplés grâce aux réseaux sociaux, mais aussi à la téléphonie, et aux logiciels gratuits permettant de communiquer à moindre coût. C est le développement de l économie capitaliste à l échelle mondiale qui a favorisé l expansion des flux mondiaux. Ces flux ont un impact sur les territoires, ils les modifient, les restructurent, mais aussi les mettent en concurrence : les territoires vont tenter d être plus attractifs que l espace voisin, aménageant de nouvelles structures, tout en créant des réseaux mondiaux. Plan du cours 1. La multiplication exponentielle de tous les flux A/ La mobilité humaine s est accrue B/ Les échanges décuplés C/ Les capitaux mondialisés 2. Les interfaces : les espaces stratégiques des flux mondiaux A/ Les interfaces maritimes et leurs hinterlands B/ Les hubs portuaires, espaces relais des flux mondialisés C/ Les interfaces terrestres 3. L émergence de réseaux mondiaux A/ Des flux polarisés B/ Des flux redistribués C/ Des réseaux qui discriminent et spécialisent les territoires 1. La multiplication exponentielle de tous les flux Mots/personnages clés : La division internationale du travail (DIT) : est la répartition de la production mondiale de biens et de services entre des pays ou des zones économiques plus ou moins spécialisés. La DIT fut organisée pendant longtemps, sur l'échange de matières premières et de produits élémentaires, provenant des pays en développement (qui n avaient pas les technologies pour transformer ces matières premières), contre des produits manufacturés exportés par les pays industriels. 1
Fonds souverain ou fonds d Etat : est un fonds d'investissement contrôlés par un Etat. Ils sont souvent alimentés par des recettes provenant de revenus de matières premières (pétrole, gaz, diamant...), réinvestis dans une logique financière afin de procurer des ressources à cet Etat lorsque la matière première en question aura été épuisée. Le caractère opaque de certains de ces fonds laisse parfois à penser qu il n existe pas que des objectifs purement financiers mais qu'ils soient aussi le bras armé d'etats souvent peu démocratiques pour contrôler directement ou indirectement des entreprises du monde occidental. A/ La mobilité humaine s est accrue Au premier plan, des flux, la mobilité humaine, les migrations sont un phénomène ancien : depuis la préhistoire, les hommes se déplaçaient pour nourrir leur troupeau et subsister, aujourd hui les motivations sont plus hétéroclites : le tourisme et les conflits notamment. En 2014, l ONU a estimé les déplacements de population à 240 millions de personnes (ainsi qu environ plus de 40 millions de clandestins). Les espaces de départ sont naturellement les pays pauvres qui émettent les ¾ des migrants : l Asie, l Afrique, les pays du Moyen et Proche-Orient (Syrie, Irak, Lybie) les Caraïbes sont les principales zones d émigration. Les espaces de transit sont situés sur les parcours migratoires, non loin des espaces d accueil : notamment la Méditerranée (île de Lampedusa), ou encore le Mexique, ou au Maroc (l enclave de Ceuta). En revanche, les espaces d accueil sont les pays les plus développés de la planète : la Triade qui est constitué des trois centres d impulsion économique qui domine le monde (Amérique du Nord, Europe et Japon). Ces flux s inversent pour le tourisme : les espaces de départ sont les espaces de la Triade vers les pays en développement aux paysages exotiques, ils sont également riches entre pays de la Triade (particulièrement pour l Europe et les Etats-Unis, dont les espaces culturels sont riches). En 2000, on évaluait à 250 millions le nombre de touristes, en 2014, ce nombre a plus que quadruplé : environ 1,1 million de personnes se sont déplacées pour des motifs touristiques (en 1950, on ne comptait que 25 millions de touristes). La massification de ses flux est liée à l augmentation du niveau de vie de la population, mais aussi au développement des moyens de transport plus accessible. B/ Les échanges décuplés La hausse du niveau de vie a aussi engendré une hausse de la consommation. Cette consommation a été accélérée dès 1945, pendant les 30 glorieuses, elle a connu une nouvelle accélération au début du XXIème siècle. Cela est lié à : - la libéralisation des échanges qui a fait chuter les barrières douanières et baisser les tarifs de la valeur des marchandises (les accords étaient signés au sein du Gatt, puis de l OMC : les tarifs douaniers et les échanges peuvent prendre leur place dans la diplomatie internationale : ex : lors du conflit ukrainien, Poutine a protesté en bloquant l importation de nombreux produits, dont les céréales), - la division internationale du travail (DIT) a été réorganisée par l évolution technique dans les transports (avec les conteneurs et les porte-conteneurs : le plus grand du monde est le Jules-Verne (pavillon français construit en 2007 et 2014) : 396 mètres de long pour 53,6 mètres de large : il peut transporter 16 000 conteneurs). 2
Les échanges de services ont progressé plus rapidement que ceux des marchandises. Environ 20% des échanges concernent le conseil aux entreprises, le service financier, la technologie, les services culturels et touristiques. L intensification des échanges a créé des phénomènes d interdépendance entre les territoires et les économies : par exemple, le cacao fabriqué principalement en Afrique est à la base de beaucoup de nos produits d alimentation en Occident, lors d événements climatiques (sécheresse), la production diminue, ou est détruite, cela créé une rupture de la production sur toute la chaîne, en même temps qu une flambée des prix pour le consommateur. D où l intérêt de diversifier l approvisionnement lorsque cela est possible. La hiérarchisation des territoires repose sur le fait que 75% des échanges sont réalisés par 15 Etats (alors que l ONU en recense 193 sur les 197). Les pays de la Triade coordonnent et dominent ces échanges, mais la Chine vient modifier le système (elle est devenue depuis 2009, le 1 er pole commercial mondial avec 20% des échanges mondiaux, 11% les Etats-Unis, 8% pour l Allemagne, 4% pour le Japon, la France et le Royaume-Uni), elle est aussi devenue la 1 ère puissance mondiale en 2014 (avec un PIB de 19236 milliards de dollar, contre 16045 milliards de dollar pour les Etats-Unis qui sont la seconde puissance mondiale). Les migrations pour le travail se sont aussi beaucoup développées, la migration des cerveaux touche particulièrement les pays occidentaux, les populations jeunes et diplômés se tournent vers les BRICS (acronyme pour Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud ou South Africa), ou d autres pays développés plus attractifs (Amérique du Nord). C/ Les capitaux mondialisés Sous l effet de la déréglementation et la désintermédiation des années 1970, les capitaux ont commencé à circuler avec beaucoup plus de facilité. Les grandes places boursières génèrent des transferts colossaux de devises, de façons quasi instantanées. Ces flux sont difficilement contrôlables par les Etats, de ce fait, les pertes comme les gains peuvent être colossaux. La circulation de ces capitaux est massivement générée par les pays développés (3/4 des flux financiers sont destinés à la Triade), ou les paradis fiscaux, ou la taxation et la fiscalité sont faibles. En revanche, les fonds souverains circulent davantage dans le sens Sud-Nord. 2. Les interfaces : les espaces stratégiques des flux mondiaux Mots/personnages clés : Les hinterlands : ce sont les espaces de l arrière pays. Ce sont les zones d'attraction et de desserte continentale d'un port ou en termes économiques son aire de marché continentale. Sa superficie est fonction de l'avant-pays du port (foreland), des qualités et de la densité des réseaux de dessertes terrestres, de la qualité de ses services portuaires ou aéroportuaires. A/ Les interfaces maritimes et leurs hinterlands La croissance des échanges internationaux a favorisé le développement du transport maritime, mais aussi des ports ainsi que leurs hinterlands. Les marchandises sont transportées à hauteur de 2/3 des échanges en valeur et 3/4 en tonnage. On parle maintenant de «maritimisation de l économie», en même temps, les façades maritimes sont de plus en plus peuplées (par exemple le littoral chinois). La Chine littorale couvre les régions très densément peuplées de la région de Shenyang au Nord jusqu'à celle du Delta de la Rivière des perles au Sud (sur plus 2000 km face). 3
Le littoral constitue son centre économique, l interface active accueille l'essentiel des investissements étrangers (88 % des investissements étrangers en Chine) dans les principaux centres urbains du pays ainsi que la majeure partie des activités industrielles. C'est à partir de cette façade que la Chine réalise les 9/10 de son commerce extérieur, c'est donc une interface commerciale majeure avec un lien évident entre les activités industrielles et les exportations. La Chine possède 7 des 15 plus grands ports mondiaux, le premier étant Shanghai. Les principales interfaces sont celles d Asie du Sud-Est, de la Northern Range autour de Rotterdam, ainsi que la côte est américaine. Elles attirent la population périphérique des campagnes, créant des zones surpeuplées et polluées. B/ Les hubs portuaires, espaces relais des flux mondialisés Les axes connectés aux grands axes maritimes sont valorisés par le transport maritime. L activité du transbordement de conteneurs a permis à certains carrefours de devenir des hubs portuaire, c est par exemple le cas de Singapour (face au détroit de Malacca) qui voit transiter 25% du trafic mondial. L Asie étant devenue l usine du monde (particulièrement la Chine qui fabrique plus d'un ordinateur sur deux, plus de trois jouets sur quatre). C/ Les interfaces terrestres Les interfaces terrestres peuvent être des zones d échanges ou espaces de transit (si elles sont situées à côté d une zone frontalière). Elles existent et se développent en tirant profit des différents espaces en contact : par exemple autour de la Méditerranée où les pays/frontières limitrophes ne sont pas homogènes. C est aussi le cas pour la frontière mexicaine avec les Etats-Unis : les maquilladoras (les usines mexicaines), situées proches de la frontière, fabriquent à moindre coût des produits qui sont commercialisés aux Etats-Unis. Le coût de la main d œuvre au Mexique étant nettement moins élevé, les profits engrangés sont plus élevés. 3. L émergence de réseaux mondiaux A/ Des flux polarisés Les réseaux s articulent autour de pôles émetteurs et récepteurs : les villes mondiales, ces villes polarisent des flux en interne et externe, de même leur aire d influence tend à s accroître. Elles sont situées au sein de la Triade et connectés entre eux grâce aux moyens de transport et de communications. Les flux sont de toutes natures : humain avec les échanges de cerveaux, les capitaux avec les places boursières, d informations, etc. Ce réseau métropolitain est hiérarchisé en fonction de la capacité de commandement et d attraction des villes sur les autres territoires mondiales : ex : Jakarta en Indonésie (16 ème puissance économique mondiale) et New York aux Usa (2 ème puissance économique mondiale), la première appartient à un pays pauvre qui se développe énormément, elle a toutes les qualités d une métropole nationale et mondiale grâce à ses structures portuaires, administratives, financières, industrielles, commerciales, culturelles et politiques, mais elle n a pas de métro (15 millions pour la ville, 4
30 millions d habitants avec la «banlieue») : la ville s asphyxie littéralement, son manque d infrastructure bloque totalement la ville : les bouchons sont gigantesques et perpétuels, alors que New York a su développer un réseau de transport raisonné, son ascension n est pas freinée par ses infrastructures. Les villes mondiales telles New York, Londres, Tokyo, Shangai, et Paris ont une influence sur le reste du monde dans de nombreux domaines. Parallèlement d autres villes mondiales sont intégrées à ce réseau compte tenu de leur spécialisation : par exemple la bourse de Francfort, ou Los Angeles pour son port, ou encore Chicago pour sa bourse agricole. B/ Des flux redistribués Les grands pôles développent également une redistribution des flux (en France, la politique d aménagement du territoire a mis en place dès les années 1960 «les métropoles d équilibre» pour désengorger la capitale, aujourd hui la métropolisation se poursuit). Les flux sont redistribués à des échelles géographiques inférieures, comme le pays ou la région. Cette redistribution est possible grâce aux hubs portuaires (le port de Rotterdam pour Amsterdam et les Pays-Bas, ainsi que le nord de l Europe) et aéroportuaires (Roissy-Charles de Gaulle qui est la deuxième plus importante plate-forme de correspondance aéroportuaire d'europe, après l'aéroport de Londres Heathrow, le TGV, l autoroute et le RER constituent des points de jonction vers Paris et les autres régions). Ces zones constituent des plates-formes multimodales qui gèrent des flux provenant d échelles différentes et associant une multitude de types de transports, ainsi que de communication. C/ Des réseaux inégaux Les réseaux sont en effet inégaux, tout en discriminant et spécialisant les territoires. Les flux sont centrés sur la Triade (même si depuis quelques années, ils se sont également tournés vers les grandes métropoles chinoises : Shanghai, ou Singapour), et autour de villes mondiales, de grands ports, aéroports, permettant d offrir un vaste marché de consommateurs avec un niveau de vie élevé (autour de 30 000 $), une main d œuvre très hautement qualifiée, une stabilité politique, ainsi que des infrastructures performantes (le point négatif étant tout de même la pollution induite par l intensité des flux de toute nature). Ces flux s orientent également de plus en plus vers les pays émergents, qui prennent le chemin de l intégration à ces réseaux grâce à une main d œuvre nettement moins coûteuse et des atouts en ressources naturels. L inégalité touche également les flux numériques, soit Internet, la téléphonie mobile. 60% de la population mondiale ne constitue que 5% des utilisateurs. L accès aux nouvelles technologies est totalement inégal pour ces pays émergents, mais également pour certaines régions des pays développés, c est le cas de la Creuse, du Limousin, ou encore du Cantal, les habitants ne sont pas véritablement concernés par ces progrès, puisque les investissements sont trop coûteux au regard de la sous-population de ces départements. 5
La mobilité humaine a intensifié les flux et les réseaux. Nous sommes maintenant beaucoup plus connectés, interconnectés, tout est beaucoup plus rapide en Occident et dans les pays développés. On peut toutefois se poser une question par rapport à l intensification de ces flux : l intégration de tous les humains à ces flux est-elle possible autant que nécessaire? Ne sommes-nous pas arrivés à un niveau où aller plus loin, aurait pour conséquence la rupture de notre équilibre sur la terre? 6