Achat groupé d'intrants pour le maraîchage



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Septembre 2015 Achat groupé d'intrants pour le maraîchage Le cas des Unions de Coopératives de Producteurs Maraîchers de l'atacora-donga Théodore Hountondji (FAFA/AD), Mouhamadou A. Soulemana (URCooPMA), Wilma Baas (CTB) et Bertus Wennink (KIT) Points clés Le maraîchage de contre-saison se développe davantage dans les bas-fonds du département de l Atacora-Donga et occupe surtout les femmes et les jeunes sans emploi formel. Pourtant, ils n arrivent pas à satisfaire une demande croissante en produits maraîchers qui, pour l heure, profite surtout aux producteurs du Togo et du Burkina Faso. Les intrants agricoles sont des facteurs déterminants pour la compétitivité de la culture maraîchère, mais ces intrants spécifiques sont peu disponibles dans la région. Dans la pratique, ce sont les intrants pour le coton, principale culture de rente, qui sont utilisés pour le maraîchage tandis que les quelques commerçants d intrants spécifiques vendent des produits frelatés non homologués et à des prix élevés. L Union Régionale des Coopératives de Producteurs Maraîchers (URCooPMa), avec l appui de la FAFA-AD, a mis en place un service d achat groupé d intrants. Le dispositif repose sur cinq piliers : l expression des besoins en intrants par les membres des coopératives villageoises ; la centralisation des demandes par l union régionale pour constituer un volume attractif pour les fournisseurs ; les commandes par l union auprès des fournisseurs spécialisés ; le paiement des fournisseurs à l aide d un fonds de roulement ; et la vente au comptant des intrants à travers un réseau de boutiques des unions communales. Pendant la première campagne (2012-2013), les gérants volontaires des boutiques n ont pas tenu les outils de gestion correctement en raison de leurs faibles connaissances élémentaires et de leur manque de compétences en comptabilité. De plus, ils ont vendu des intrants à crédit suite aux pressions sociales qu ils ont subies. Les unions communales ont tout de même continué à travailler avec des volontaires tout en renforçant les contrôles internes (comités) et externes (prestataires comptables) pendant les campagnes suivantes. Les expressions des besoins en intrants dépassent actuellement les capacités financières de l URCooPMa. Les unions doivent donc prioriser les intrants à acheter. De plus, elles sensibilisent les producteurs à ouvrir des comptes d épargne auprès des caisses locales. L épargne réalisée peut servir pour l achat d intrants au comptant. Une autre possibilité explorée est le crédit d intrants selon un système de caution solidaire portée par les coopératives. Ce mécanisme permettrait au fonds de roulement de tourner plus vite et donc d augmenter les capacités de préfinancement d achat d intrants. La facilité d appui aux filières agricoles dans les départements de l atacora et de la donga. Le développement des filières riz, anacarde et de maraîchage est la base de l intervention de la Facilité d Appui aux Filières Agricoles dans les départements de l Atacora et de la Donga (FAFA-AD), qui est une intervention de la coopération bilatérale entre le Bénin et la Belgique. La FAFA-AD vise à contribuer à la sécurité alimentaire et à l augmentation des revenus de la population rurale de l Atacora et de la Donga associée à ces trois filières. Son objectif spécifique est l amélioration de la productivité et de la rentabilité des filières riz, anacarde et de maraîchage. La FAFA-AD s intéresse particulièrement au fonctionnement des organisations de producteurs, au développement des services pour leurs membres et à l articulation des acteurs des filières ainsi qu au rôle régalien des services agricoles publics. Elle facilite les interventions des acteurs institutionnels sans qu elle-même intervienne directement dans le développement des filières. Mise en place pour la période 2010-2015, la FAFA-AD est dotée d un budget global de 5.500.000, financé par la Belgique dans le cadre de sa coopération bilatérale avec le Bénin. L Agence belge de développement (CTB) fournit une assistance technique pour la mise en œuvre des activités. Après trois campagnes, l URCooPMa et les unions communales ont pu développer un service de proximité (boutiques) qui fournit des intrants de qualité à des prix abordables et adaptés aux cultures maraîchères de la zone. Les principaux défis de l union régionale pour rendre le service durable sont : l augmentation des volumes

d intrants vendus (économie d échelle), la maîtrise des coûts réels du dispositif et la définition d un mode de financement durable. Le dispositif s approvisionne en engrais minéraux auprès des services agricoles locaux, qui sont des services de proximité et permettent donc des coûts de transport relativement bas. L État fixe les prix des engrais, souvent subventionnés, ce qui peut perturber le marché local. Cette situation décourage les unions qui la perçoivent comme un risque d investissement. Introduction Les départements de l Atacora et la Donga, dans la partie nord-est du Bénin, sont parcourus par un chapelet de rivières et de cours d eau temporaires qui, ensemble, forment des zones inondables (Figure 1). À la faveur de ces bas-fonds, il se développe dans les zones rurales et aux périphéries des centres urbains un maraîchage en contre-saison qui occupe prioritairement les femmes et les jeunes diplômés sans emploi formel. La vente de la production maraîchère contribue de façon substantielle au revenu des ménages. Cependant, la contribution de la filière maraîchage à l offre de produits agricoles dans les deux départements demeure faible malgré une demande croissante et l existence d un marché porteur qui profite, pour le moment, surtout aux producteurs des pays voisins (Togo, Burkina Faso). Dans la pratique, ce sont les engrais et les produits phytosanitaires destinés à la culture du coton qui sont utilisés pour le maraîchage, car ce sont les seuls disponibles dans la région. De plus, quelques producteurs s approvisionnent auprès de commerçants qui vendent des produits frelatés non homologués et à des prix élevés, souvent en provenance des pays limitrophes. Tous ces intrants ont peu d effet réel sur le rendement des cultures maraîchères. C est la raison pour laquelle l Union Régionale des Coopératives de Producteurs Maraîchers de l Atacora-Donga (URCooPMa-AD), avec l appui de la Facilité d Appui aux Filières Agricoles dans les départements de l Atacora et de la Donga (FAFA-AD) du Programme Agriculture de l Agence belge de développement (CTB), a mis sur pied un mécanisme d achat groupé d intrants (semences, engrais et produits phytosanitaires) au profit des producteurs maraîchers organisés en Coopératives villageoises de Producteurs Maraîchers (CooPMa). Treize Unions Communales de Coopératives Maraîchères (UCCooPMa) sont membres de l URCooPMa-AD qui représente au total 105 coopératives villageoises, avec un effectif total de 2.174 membres. Le dispositif d'achat groupé d'intrants Dans la zone, la culture maraîchère de contre-saison est pratiquée de septembre à juin. Au début de la campagne de production, les producteurs reçoivent une formation dispensée Figure 1 : Carte des départements du Bénin par des chercheurs de l Institut National des Recherches Agricoles du Bénin (INRAB) sur les maladies et les ravageurs des cultures maraîchères et sur les pratiques appropriées de traitement phytosanitaire. Cette formation permet aussi aux producteurs de mieux connaître les produits phytosanitaires recommandés au Bénin. À travers un réseau de champsécoles paysans, ils apprennent ensemble comment appliquer ces produits. Lors de ces sessions d information organisées par les coopératives et unions, chaque producteur exprime sur une fiche, par culture, ses besoins en intrants (semences, produits phytosanitaires, engrais minéraux) en fonction des superficies qu il envisage d emblaver. Un animateur de l union régionale vérifie les fiches d expression des besoins. En cas de doute, il rend visite aux producteurs pour leur fournir un appui afin d effectuer des calculs plus réalistes selon les cultures et les superficies (avec l aide d un GPS). Une fois les besoins validés par les producteurs et l animateur, chaque coopérative centralise les demandes et les transmet à son 2

union communale. Chaque union communale envoie alors les demandes compilées à l union régionale, accompagnées d un bon de commande signé du président de l union communale. Le dispositif repose sur un fonds de roulement qui permet le paiement des fournisseurs d intrants. Les intrants sont ensuite vendus au comptant à travers le réseau de boutiques des unions communales pour enfin reconstituer le fonds de roulement. Les expressions consolidées des treize unions communales dépassent généralement les capacités financières de l URCooPMa (fonds de roulement) pour satisfaire toutes les demandes en intrants. C est pourquoi l union organise une réunion de synthèse en présence de tous les présidents des unions communales pour analyser les demandes exprimées et prioriser les intrants à acheter. À cet effet, ils appliquent plusieurs critères : les intrants les plus demandés par les producteurs ; la disponibilité de l intrant sur le marché ; les intrants recommandés pour le maraîchage au Bénin ; le rapport qualité-prix (selon l expérience des producteurs) et l enveloppe financière disponible au niveau de l union régionale. Par la suite, l union régionale lance les commandes auprès de plusieurs fournisseurs (Tableau 1). À réception des commandes, le conseil d administration de l URCooPMa se réunit pour contrôler la conformité des produits livrés par rapport aux commandes effectuées. Les prix de vente aux producteurs sont calculés selon les charges liées à l acquisition de chaque type de produit (prix d achat, transport, pertes, etc.). C est également l occasion pour l union d actualiser son barème de prix d achat pour chaque produit afin d avoir une situation de référence pour la prochaine commande. Par la suite, l union régionale distribue les produits dans les boutiques d intrants installées dans les communes. Les prix de vente, affichés dans les boutiques, sont les mêmes pour toutes les communes. Les boutiques d intrants ne font aucune vente à crédit, ni aux membres ni aux non-membres. Les prix de vente des produits qui sont effectivement appliqués varient suivant le niveau d engagement des producteurs maraîchers dans les coopératives villageoises. Conformément aux règlements intérieurs des dépôts, les producteurs membres qui ont réglé leurs cotisations et frais d adhésion et qui achètent collectivement pour plus de 30.000 FCFA d intrants, bénéficient d une réduction de 2 %. Afin de favoriser l accès équitable aux intrants, les femmes membres des coopératives qui ont respecté les paiements d adhésion et de cotisation et qui achètent collectivement pour au moins 20.000 FCFA d intrants bénéficient d une réduction de 3 % sur le prix d achat. Types d intrants Fournisseurs préférés Modes d obtention Semences de pommes de terre* Opérateur privé (individu), France. Réception de la marchandise au port de Cotonou par un transitaire. Transport vers Natitingou (siège de l URCooPMa) pour le compte de l union régionale. Semences de tomates, oignons, poivrons et autres cultures maraîchères** Société BÉNIN SEMENCES, Cotonou. Bon de commande. Transport vers Natitingou pour le compte de l URCooPMa. Semences de choux, la variété Oxylus*** Société PROCHIMAT, Parakou Bon de commande Transport vers Natitingou pour le compte de l URCooPMa. Insecticides : Pacha 25 EC et Acarius Insecticide biologique : Afriquya Fongicide : Topsin M et Coga 80 WP Société SAVANA LANTANA, Cotonou****. Bon de commande. Transport vers Natitingou pour le compte de l URCooPMa. Engrais : NPK et urée***** Services agricoles (SCDA) du Ministère de l Agriculture. Bon de commande. Paiement direct au Trésor Public. Engrais : K2SO4 et KCL****** Programme Cadre d Appui à la Diversification Agricole (ProCAD), qui a encore un ancien stock. Bon de commande. Paiement direct au programme. *Toutes les variétés de pommes de terre souhaitées ne sont pas toujours disponibles. **Le fournisseur n a pas la variété Oxylus de choux qui est souvent demandée par les producteurs. ***D après les producteurs, c est le seul fournisseur de cette variété. ****Un des rares fournisseurs agréés à vendre des produits phytosanitaires qui sont adaptés au maraîchage et recommandés par l INRAB. *****Il s agit d engrais destinés à la culture du coton et non adaptés au maraîchage. Le prix de ces engrais monte après la campagne de production cotonnière. ******Ces engrais ne sont pas adaptés à la culture maraîchère de la zone. Tableau 1 : Les types d intrants, les fournisseurs et les modes d obtention 3

La vente des intrants au comptant réalisée par les boutiques permet de renouveler et d élargir le fonds de roulement. Cela permet de répondre aux demandes des producteurs membres, plusieurs fois pendant une même saison, en plaçant de nouvelles commandes auprès de l union régionale. Le cycle d achat groupé et de vente d intrants se répète, en moyenne, une à deux fois pendant une campagne de production maraîchère en fonction de la vitesse de rotation du stock. Cette répétition varie d une boutique à l autre. Le maximum relevé est trois et quatre fois par campagne pour les boutiques installées à Djougou et Ouaké, respectivement. minéraux vendues semblent, elles, être en diminution (Tableau 3). Les semences de pommes de terre ont connu plusieurs problèmes. Premièrement, les commandes sont faites en France et le vendeur exige paiement avant livraison, ce qui n est pas toujours à la portée des unions. Deuxièmement, les variétés commandées n ont pas toujours été livrées et les variétés livrées ont souvent été la proie d attaques de ravageurs sans que la recherche propose des solutions idoines aux producteurs. Par conséquent, les producteurs commencent à se détourner de la culture de la pomme terre. Une réponse pertinente à une demande croissante en intrants Les résultats des trois campagnes (2012-2013, 2013-2014 et 2014-2015) montrent que le nombre de coopératives qui participent au dispositif a globalement augmenté, surtout depuis l ouverture d une boutique à Ouaké (six coopératives) et de nouvelles adhésions au mécanisme à Bassila (deux coopératives, Tableau 2). Néanmoins, le nombre de producteurs et productrices qui ont visité les boutiques a diminué alors que le nombre d acheteurs effectifs n est pas connu. Après la campagne 2012-2013, des producteurs ont adhéré aux coopératives afin de pouvoir bénéficier du service et des prix de vente d intrants plus bas pour les membres que pour les non-membres. Engrais en stock au dépôt intrant Les unions ont adopté une attitude prudente envers les engrais minéraux, car ils sont achetés auprès des services d État qui en fixe le prix. En effet, les unions ont appris, d'expériences précédentes, que l État peut décider de baisser le prix de cession, ce qui les laisse avec des stocks invendus. Par conséquent, les unions ne constituent pas de grands stocks. Lors de la campagne 2014-2015, le dépôt de Tanguiéta a connu une situation particulière. L animateur URCooPMa de la zone a démissionné en emportant la clé du dépôt avec lui. De surcroît, la zone est la moins apte à la culture maraîchère (contrainte d eau) et constitue donc un marché incertain pour les intrants. Dépôt intrant Djougou servant un client Les résultats de la deuxième (2013-2014) et troisième campagne (2014-2015) indiquent une augmentation globale de la vente d intrants aux producteurs, notamment des semences maraîchères (Tableau 3). Les maraîchers expliquent cette hausse par la différence dans les résultats observés (taux de germination et rendements plus élevés) entre les semences de qualité et les semences achetées auprès de vendeurs non agréés. Les quantités de semences de pommes de terre et d engrais Malgré des problèmes de gestion et de vente à crédit, toutes les unions ont pu reconstituer leur fonds de roulement. Cependant, une première simulation des coûts de fonctionnement du dispositif indique que la marge nette réalisée ne permet pas encore de faire face aux coûts ni à l agrandissement du fonds de roulement à moyen terme (Tableau 4). Seul un volume considérable d intrants, et par conséquent un chiffre d affaires important, permet de réaliser une marge nette suffisante pour augmenter le fonds de roulement. C est notamment le cas à Djougou. Les producteurs ont tous confirmé que l accès amélioré aux intrants a eu des effets positifs sur le rendement des superficies emblavées et, par ricochet, sur leurs revenus. Toutefois, les unions ne disposent pas de chiffres pour évaluer ces effets. 4

Communes Bassila Djougou Natitingou Campagnes 2012-2013 2013-2014 2014-2015* 2012-2013 2013-2014 2014-2015* 2012-2013 2013-2014 2014-2015* Nb. de coopératives villageoises 12 12 12 21 21 19 20 20 18 Nb. de coopératives participantes 10 12 10 17 17 16 16 16 16 Nb. de membres ayant fréquenté les boutiques (acheteurs + non-acheteurs) 480 120 135 164 391 241 261 206 155 Hommes 285 79 78 95 322 192 105 92 87 Femmes 195 41 57 69 69 49 156 114 68 Nb. de non-membres ayant fréquenté les boutiques (acheteurs + non-acheteurs) 294 60 62 179 162 92 131 53 46 Hommes 136 25 20 160 76 61 85 21 19 Femmes 158 35 42 19 86 31 46 32 27 Communes Ouaké Péhunco Tanguiéta Totaux Campagnes 2012-2013 2013-2014 2014-2015* 2012-2013 2013-2014 2014-2015* 2012-2013 2013-2014 2014-2015* 2012-2013 2013-2014 2014-2015* Nb. de coopératives villageoises Nb. de coopératives participantes Nb. de membres ayant fréquenté les boutiques (acheteurs + non-acheteurs) - 12 10 26 26 27 22 22 17 101 113 103-6 6 23 23 21 16 16 15 82 90 84-112 81 714 804 895 444 298 413 2.063 1.931 1.920 Hommes - 35 61 136 170 155 86 76 95 707 774 668 Femmes - 77 20 578 634 740 358 222 318 1.356 1.157 1.252 Nb. de non-membres ayant fréquenté les boutiques (acheteurs + non-acheteurs) - 117 75 130 89 147 146 65 48 880 546 470 Hommes - 56 42 101 33 52 110 19 16 592 230 210 Femmes - 61 33 29 56 95 36 46 32 288 316 260 * Chiffres pour le premier trimestre 2015. NB : 100 FCFA = 0,15 euro. Tableau 2 : Le nombre de coopératives et producteurs ayant participé à l achat groupé par commune et par campagne 5

Communes Bassila Djougou Natitingou Campagnes 2012-2013 2013-2014 2014-2015* 2012-2013 2013-2014 2014-2015* 2012-2013 2013-2014 2014-2015* Semences améliorées (kg) 4 7 45 3 5 449 15 19 87 Semences pommes de terre (kg) 15 10 0 29 39 0 29 31 0 Engrais (nb. de sacs 25 kg) 130 78 43 240 117 157 134 145 102 Produits sanitaires (lt) - 47 37-111 352-50 110 Achat (FCFA) 2.046.675 1.028.800 812.870 3.246.300 7.055.455 6.000.145 2.682.175 1.463.600 1.788.600 Vente (FCFA) 2.160.650 1.126.800 897.000 3.442.400 7.641.800 6.706.600 2.823.850 1.589.400 2.027.600 Marge brute (FCFA) 113.975 98.000 84.130 196.100 586.345 706.455 141.675 125.800 239.000 Communes Ouaké Péhunco Tanguiéta Totaux Campagnes 2012-2013 2013-2014 2014-2015* 2012-2013 2013-2014 2014-2015* 2012-2013 2013-2014 2014-2015* 2012-2013 2013-2014 2014-2015* Semences améliorées (kg) Semences pommes de terre (kg) Engrais (nb. de sacs 25 kg) Produits sanitaires (lt) - 16 4 4 6 136 10 16 0 37 68 721 - - 0 13 57 0 - - 0 86 137 0-180 137 297 212 68,3 171 79 6 972 811 513,3-65 102-47 21-35 0-355 622 Achat (FCFA) - 3.883.900 2.135.300 4.398.775 1.998.600 1.835.125 2.515.275 736.125 60.000 14.889.200 16.166.480 12.632.040 Vente (FCFA) - 4.327.300 2.225.600 4.635.600 2.180.500 2.092.000 2.681.400 822.100 69.000 15.743.900 17.687.900 14.017.800 Marge brute (FCFA) - 443.400 90.300 236.825 181.900 256.875 166.125 85.975 9.000 854.700 1.521.420 1.385.760 * Chiffres pour le premier trimestre 2015. Tableau 3 : Les quantités d intrants commercialisées et les montants d achat et de vente concernés par commune et par campagne Communes Bassila Djougou Natitingou Ouaké Péhunco Tanguiéta Achat 1.028.800 7.055.455 1.463.600 3.883.900 1.998.600 736.125 Location boutique 80.000 80.000-50.000 80.000 - Prime aux gérants 20.000 20.000 20.000 20.000 20.000 20.000 Transport 10.000 77.500 8.000 152.500 10.000 3.500 Autres charges 5.000 5.000 5.000 5.000-5.000 Total des charges 115.000 182.500 33.000 227.500 110.000 28.500 Coûts de revient 1.143.800 7.237.955 1.496.600 4.111.400 2.108.600 764.625 Chiffre d affaires 1.126.800 7.641.800 1.589.400 4.327.300 2.180.500 822.100 Marges -17.000 403.845 92.800 215.900 71.900 57.475 Charges CLCAM* 246.912 1.693.309 351.264 932.136 479.664 176.670 Marges nettes des charges CLCAM (2 % par mois) -263.912 1.289.464-258.464-716.236-407.764-119.195 *Caisse Locale de Crédit Agricole Mutuel (CLCAM). Tableau 4 : Les charges, chiffres d affaires et marges nettes par boutique communale (situation fin 2014) 6

Sur un autre plan, ce dispositif a permis de réduire de façon considérable les tracasseries et les peines des producteurs pour se fournir en intrants de qualité au moment opportun. En outre, le service a suscité l adhésion de nouvelles structures pré-coopératives à l union. Vingt-cinq d'entre elles ont formulé des demandes formelles pour devenir coopératives. L'accompagnement des producteurs par la FAFA AD L union régionale a pu négocier un fonds de roulement de treize millions FCFA avec la FAFA-AD pour préfinancer l achat groupé des intrants. Elle a ensuite ajouté deux millions FCFA comme participation financière. Cette contribution a facilité la création de cinq dépôts de livraison des intrants au cours de la campagne 2012-2013 à Bassila, Djougou, Natitingou, Péhunco et Tanguiéta. Avec l appui de l équipe FAFA- AD, l union régionale a développé des outils de gestion et formé les membres des coopératives villageoises et unions communales à leur utilisation. Les coopératives et unions ont évalué le fonctionnement du dispositif (organisation de l expression des besoins, fonctionnement des boutiques) afin de tirer les enseignements de son fonctionnement pour la campagne 2013-2014. Sur le plan technique, la FAFA-AD accompagne l ensemble du processus, depuis la réflexion stratégique sur le dispositif jusqu à l auto-évaluation et la prise en compte des enseignements, en passant par la mise en œuvre. Cet accompagnement met un accent particulier sur l accessibilité des intrants de qualité à travers un système transparent, durable et géré par les unions elles-mêmes. L apprentissage et l amélioration continue du dispositif grâce à l élaboration d'outils simples, à des visites sur le terrain et des ateliers d auto-évaluation étaient une exigence tout au long de cet accompagnement. Pour favoriser une gestion comptable et financière correcte des boutiques d intrants, la FAFA-AD a recruté des prestataires comptables chargés de contrôler les stocks et les caisses. La finalité reste un transfert de capacités vers les unions pour qu à terme, elles puissent éventuellement recruter leur propre gérant comptable. L appui financier de la FAFA-AD a été décisif : il a consisté en la mise en place du fonds de roulement ainsi qu en la prise en charge des animateurs et du coordonnateur technique de l URCooPMa. Ce financement a permis le contrôle de la gestion des boutiques ainsi que l organisation des formations. Les leçons à retenir Etagère dépôt intrant L URCooPMa a amorcé une phase expérimentale d achat groupé d intrants (avant la campagne 2012-2013). Cette phase consistait à acheter de petites quantités de semences et de produits phytosanitaires avec les fonds propres de l union. L expérience a montré que les prix, majorés des coûts de transport, pertes, etc. restaient attractifs pour les producteurs, ce qui a permis d'enregistrer une demande croissante en intrants. L auto-évaluation du dispositif d achat groupé des intrants a révélé des défaillances dans la gestion des boutiques. Les gérants volontaires n ont pas tenu correctement les outils de gestion en raison de leurs faibles connaissances élémentaires et d un manque de compétences en comptabilité. De plus, ils ont vendu des intrants à crédit suite aux pressions sociales qu ils ont subies. D autres problèmes, comme des stocks d intrants invendus et par la suite la perte des produits périmés, sont les principales conséquences d une mauvaise estimation des besoins réels au début de la saison. La gestion des boutiques par des producteurs volontaires n a pas donné de résultats satisfaisants. Les unions communales continuent à opter encore pour le volontariat, mais avec 7

plus de contrôles internes (comités) et externes (prestataires comptables). À cet effet, chacune des unions communales ayant charge de la gestion d une boutique a mis en place un comité de gestion de la boutique composé de cinq membres (un président, un trésorier, un secrétaire, un gérant principal et un gérant adjoint). Ce comité est surveillé par un comité de suivi régional composé d un responsable aux intrants et à la commercialisation, du chargé de programme et du gestionnaire comptable de l URCooPMa. Ce dispositif n implique pas directement les animateurs qui n ont pas un rôle prépondérant dans la gestion des intrants. Les deux comités sont désormais appuyés par les animateurs de l union régionale et les prestataires comptables contractualisés à la tâche par la FAFA-AD. Les unions communales ont également amélioré le règlement intérieur de la gestion des boutiques qui est désormais affiché dans chacune d'entre elles. La vente à crédit est interdite pour permettre de renouveler systématiquement le fonds de roulement et, ainsi, l achat de nouveaux intrants. L union régionale, à travers des séances d information, invite les producteurs à ouvrir des comptes d épargne auprès des caisses locales d épargne et de crédit. L épargne réalisée sur ces comptes peut servir à terme à l achat d'intrants au comptant. Le dispositif d achat groupé est accompagné par la formation des producteurs sur la détection des maladies et leur traitement. La synergie entre la formation, les champs-écoles paysans et l achat groupé des intrants augmente la demande en produits homologués d un côté et permet aux producteurs d améliorer les rendements des cultures maraîchères de l autre. L achat groupé et la revente des engrais minéraux à travers des boutiques communales comportent des risques pour les unions communales. Dans la pratique, l approvisionnement en engrais minéraux est encore le quasi-monopole de l État, lequel fixe les prix, souvent subventionnés, notamment par le biais de ses services agricoles. Par conséquent, les unions vendent l engrais à perte ou se retrouvent avec des stocks invendus sur les bras, dont la qualité se dégrade au fil du temps. Les perspectives Actuellement, l URCooPMa explore les options afin de rendre le dispositif durable. Une option serait d'augmenter les volumes d intrants, ce qui permettrait de réduire la part relative des coûts de fonctionnement dans le dispositif. Pour ce faire, l union régionale compte multiplier les boutiques d intrants et stimuler l intérêt des producteurs à adhérer aux coopératives. Le dispositif de champs-écoles paysans sera également élargi pour susciter plus de demandes d intrants. Une éventuelle collaboration peut se faire avec les organisations de producteurs des cultures vivrières. Ces dernières pourraient utiliser les boutiques mises en place dans les communes par l URCooPMa pour l acquisition d intrants. Ensemble, ces organisations peuvent organiser un marché direct adapté et à moindres coûts (effet d économie d échelle). Il est également important de renforcer la capacité d intelligence de l union régionale sur les marchés (internationaux) d intrants. Pour obtenir des propositions de prix et de produits plus attractives et être ainsi moins dépendants du nombre limité de fournisseurs, les appels d offres pourraient être ouverts à l international. Une collaboration avec les instituts de microfinance est envisagée pour permettre aux producteurs et aux coopératives d obtenir des crédits pour l achat d intrants selon un système de caution solidaire. Cela permettra au fonds de roulement de tourner plus vite et donc d acheter et de vendre plus d intrants. À l heure actuelle, l union régionale doit encore maîtriser les coûts réels du dispositif pour définir la répartition des bénéfices entre les différents niveaux de l organisation et pour faire face aux frais de fonctionnement du dispositif. Beaucoup d activités de gestion du dispositif sont encore subventionnées ou basées sur le bénévolat. À terme, la gestion des boutiques deviendra plus exigeante (connaissances, compétences) et les unions communales devront recruter leur propre gérant ou leur propre comptable ou déléguer toute la gestion, y compris l achat, le transport et la vente, à des opérateurs privés spécialisés. Notes 8

Notes La CTB, l agence belge de développement, appuie et encadre des programmes de développement pour le compte de l État belge et d autres donneurs d'ordre. Cette note est publiée sous Licence Creative Commons «by/nc/nd» 9