A S S O C I A T I O N L U X E M B O U R G E O I S E D E S F O N D S D E P E N S I O N, A S B L FLASH n 19 juillet 2014 LA PROCHAINE REFONTE DE LA DIRECTIVE IORP La directive 2003/41/CE a marqué une première étape dans la réalisation d'un marché unique dans le cadre des fonds de pension (que l on connaît aujourd hui sous la dénomination «institution de retraite professionnelle» (IRP) dans le jargon européen). Mais 10 ans après son adoption, il est devenu nécessaire de la réviser. Depuis plusieurs mois, on annonçait un projet en ce sens. Celui-ci a vu le jour à la veille des élections européennes. Si l on ne peut préjuger à ce stade de la durée du processus législatif devant mener à l adoption de la révision de la directive, les grands principes qui y sont définis, devraient vraisemblablement subsister. La Commission européenne a estimé nécessaire de revoir cette directive pour plusieurs raisons: 1. Le nombre trop limité de fonds de pension pan-européens : il subsiste encore trop d obstacles prudentiels qui rendent plus coûteuse, l adhésion d un employeur à un fonds de pension transfrontalier. 2. La tendance actuelle est au développement sensible des régimes à contributions définies, dans lesquels les risques sont déplacés depuis les organismes de pension et les employeurs vers les affiliés eux-mêmes. 3. Il existe aussi la nécessité, mise en évidence par les récentes crises financière et économique, d'améliorer le niveau minimum de protection des affiliés et des bénéficiaires. 4. Il y souvent impossibilité pour les affiliés de prendre des décisions en pleine connaissance de cause concernant le financement de leur retraite, faute de recevoir les informations nécessaires sous une forme compréhensible. 5. Les pouvoirs de surveillance sont à renforcer pour garantir que les IRP se conforment bien aux exigences en matière de gouvernance et de transparence. Il est à noter qu à ce stade, ce projet n'envisage pas l'instauration de nouvelles règles de solvabilité. Cette démarche a, en effet, été jugée prématurée. Le projet actuel se focalise donc plutôt sur des principes de gouvernance et d information des affiliés.
Au travers de cette proposition de nouvelle directive, la Commission poursuit quatre objectifs : 1. Lever les obstacles prudentiels subsistant pour les activités transfrontalières des fonds de pension A l expérience, il subsiste encore aujourd hui beaucoup trop d obstacles prudentiels qui freinent les activités transfrontalières des fonds de pension : Ce projet de directive prévoit ainsi qu à l avenir, l'état d une entreprise cotisante dont le régime de retraite est financé via un fonds de pension établi dans un autre Etat, ne pourrait plus imposer à ce fonds de pension étranger, des exigences d'information supplémentaires par rapport à celles s appliquant aux fonds de pension opérant sur son propre territoire. La proposition tend aussi à faciliter le transfert de régimes de retraite vers des fonds de pension établis dans d autres Etats membres, moyennant l'accord préalable des affiliés et des bénéficiaires concernés ou, s'il y a lieu, de leurs représentants. L'État d une entreprise cotisante ne pourrait plus imposer des règles de placement supplémentaires aux fonds de pension exerçant des activités transfrontalières, comme la possibilité lui en est donnée aujourd hui. Cela devrait faciliter l'organisation de la gestion du portefeuille de placements. En outre, le projet prévoit d autoriser le recours à des instruments ayant un profil économique à long-terme, ce qui se justifie pleinement eu égard à l horizon de placement des fonds de pension. Notons que la publication en juin 2013 d une proposition de règlement européen visant à favoriser l émergence et la diffusion de fonds d investissement à long terme, ELTIF («European Long-term Investment Funds»), ouvre, à n en pas douter, des perspectives intéressantes en matière d investissement pour les fonds de pension. La protection des affiliés et des bénéficiaires n'en pâtit pas pour autant, car en contrepartie, les règles en matière de gouvernance et de surveillance sont durcies (voir ci-après). Le projet de directive prévoit encore l obligation pour l institution de retraite de désigner une banque dépositaire qui peut être établie dans un autre Etat Membre que celui de l institution de retraite - pour chaque plan de pension à contributions définies. Cela concourt à renforcer les contrôles réalisés sur les transactions des fonds de pension et indirectement, à accroître le niveau de protection des affiliés et bénéficiaires. Enfin, il convient de faire état d un point d attention important, à savoir le maintien de l obligation de financement complet des plans à prestations définies établis auprès d institutions de retraite enregistrées dans un autre pays de l Union. Cette obligation peut décourager nombre d entreprises cotisantes de confier leurs plans à un fonds de pension étranger, étant donné le coût d un tel financement, là où les règles locales sont souvent plus flexibles et autorisent un sous-financement plafonné. 2
2. Système de gouvernance et de gestion des risques Le projet de directive définit de nouvelles exigences détaillées en matière de gouvernance pour les fonds de pension : Ainsi par exemple, il est prévu que l organe d administration, de gestion ou de contrôle du fonds est responsable en dernier ressort du respect par ce dernier des dispositions légales le concernant. Les fonds de pension seront également tenus de mettre en place un système de gouvernance efficace, qui garantisse une gestion saine et prudente de leurs activités. Ce système devra toutefois être proportionné à la nature, à l échelle et à la complexité des activités du fonds de pension, de manière à garantir que les exigences en matière de gouvernance ne représentent pas une charge trop lourde pour les petites institutions. Le fonds de pension devra aussi veiller à ce que toutes les personnes qui le gèrent effectivement ou y exercent des fonctions clés, possèdent des qualifications, connaissances et expériences professionnelles propres à permettre une gestion saine et prudente de l'institution et répondent à des critères d honorabilité. Les fonds de pension devront aussi prévoir - une fonction de gestion des risques liés aux retraites, qui soit efficace, nécessaire pour déceler, contrôler, gérer et déclarer, en permanence, tous les risques, y compris ceux liés aux activités externalisées, auxquels ils sont ou pourraient être exposés ; - une fonction d audit interne efficace qui évalue l adéquation et l efficacité du système de contrôle interne et les autres éléments du système de gouvernance, y compris les activités externalisées ; - et, le cas échéant, une fonction actuarielle efficace pour coordonner et superviser le calcul des provisions techniques ainsi que pour évaluer le caractère approprié des méthodes et des modèles sous-jacents, lorsque les affiliés et les bénéficiaires ne supportent pas tous les risques. 3
3. Devoir d information : harmonisation du «Pension Benefit Statement» Cet important chapitre précise les informations à fournir, par un fonds de pension, aux affiliés, aux affiliés potentiels et, après leur départ à la retraite, aux bénéficiaires. Pour les régimes dans lesquels les affiliés supportent un risque d'investissement (régimes à contributions définies) et qui prévoient plusieurs options, assorties de différents profils d investissement, les affiliés devront être informés quant à l éventail des options d investissement disponibles et à l'option d'investissement par défaut. Le projet de directive met également en place un «relevé des droits à retraite», comparable à ce qui a cours dans d'autres secteurs financiers, tels que le document d'informations-clés pour l'investisseur que l on retrouve dans les fonds d'investissement, mais adapté ici aux spécificités des retraites professionnelles. Ce «relevé des droits à retraite» devrait reprendre une série de données très précises, entre autres : une information quant à l existence d une garantie éventuelle : le fonds ou l entreprise garantit-elle, d une certaine manière, un niveau donné de prestations? les coûts supportés par l employeur ou l affilié, les cotisations versées et les droits déjà constitués; certaines projections en matière de retraite, variant selon le type de régime considéré; le profil d investissement dans les régimes où les affiliés supportent le risque d investissement; des informations sur les performances passées du régime; des informations supplémentaires sur quelques points pratiques comme, par exemple, sur les hypothèses utilisées pour estimer les montants exprimés en rente viagère (le taux de rente, le type de prestataire et la durée de la rente ), si l affilié le demande. Ou encore certaines informations sur la situation personnelle de l'affilié. Le fonds de pension devra aussi veiller à informer les affiliés potentiels de toutes les caractéristiques du régime de retraite et des options d investissement. Des informations seraient aussi fournies aux affiliés avant leur départ à la retraite. Ces informations seraient communiquées en plus du relevé des droits à retraite, sur demande ou au moins deux ans avant le départ à la retraite, pour les aider dans la liquidation de leur prestation. Pour leur part, les bénéficiaires recevraient des informations relatives aux prestations leur revenant et aux options de versement correspondantes. Enfin, la directive impose encore certaines informations spécifiques à fournir à la demande des affiliés et des bénéficiaires : par exemple, quant aux hypothèses utilisées pour établir les projections. 4
4. La surveillance prudentielle Cette proposition de directive fait de la protection des affiliés et des bénéficiaires d un régime de retraite, le principal objectif de la surveillance prudentielle. Sont ainsi précisément définis les domaines qui doivent être considérés comme relevant de cette surveillance prudentielle (le financement des provisions techniques, les règles d investissement, la gestion de portefeuille ) et ce, pour éviter des différences d appréciation entre Etats membres comme c est le cas aujourd hui. Le projet de directive reprend enfin les principes généraux de cette surveillance prudentielle : ainsi, celle-ci doit être prospective et fondée sur les risques, intervenir en temps opportun et être proportionnée. Rappelons qu il ne s agit encore que d un projet de directive qui devra encore parcourir un long processus législatif. Les grands principes développés ci-avant devraient probablement être confirmés. Par contre, leurs modalités d application pourraient encore évoluer durant cette procédure. 5