Arsenal musée de Soissons Abbaye Saint-Jean-des-Vignes 19 septembre 15 novembre 2015 Vernissage le vendredi 18 septembre à 18 h MARTIN BISSIÈRE La Montée des extrêmes Oxygène Oxygène 55 2014 acrylique sur toile 200 x 200 cm Photo Jean-Louis Losi 1
L artiste dans son atelier à Paris. Photo Loup Lebreton Martin BISSIÈRE est né à Paris en 1962. Il vit et travaille à Paris. Dès le début des années quatre-vingt-dix, son travail tourne autour de l'accident, du désir et de la violence. En 1997, la découverte des travaux de l'anthropologue René Girard sur le désir mimétique l'amène à se reconnaître dans la description du désir humain en perpétuelle expansion qui débouche tôt ou tard sur la rivalité, puis sur la violence. Martin Bissière travaille sur et contre la peinture. Il cherche à débusquer son identité de peintre dans le «sacrifice» d'innombrables images qui sont autant des modèles que des obstacles. Ses œuvres sont traversées d'une gestuelle énergique, tachées de glacis colorés et de formes qui se construisent puis se disloquent, métaphores d'un «paradis instable».jour après jour, tableau après tableau, il tente de gagner sa place dans une hiérarchie de peintres toujours en mouvement. Les œuvres exposées à l'arsenal dessinent les tumultes d'une vingtaine d'années où les séries s'enchaînent. Baroque, Vénus, Décor pour un film américain, Shaolin Art Center, La Montée des extrêmes, toutes témoignent des multiples formes du désir d'un peintre appliqué au seul champ de la peinture. La dernière série, Oxygène, constate l'épuisement du moteur mimétique et s'éloigne de l'air vicié de La Montée des extrêmes. 2
BAROQUE (1993 / 1997) Au début des années quatre-vingt-dix, Martin Bissière est à la recherche d une voie picturale singulière, propre à renouveler sa figuration. Par analogie avec l analyse de Heinrich Wölfflin, on pourrait dire qu après une période classique, Martin Bissière entame le versant baroque d une peinture dont les fondements sont ceux de la représentation formelle des corps. La représentation est alors nécessaire à la construction de son tableau. L enfouissement du «motif» sous l impulsion décisive du geste lui révèle le champ de l abstraction par la dissolution relative de la figure. Il en résulte un fort sentiment d éclatement de la figure sous les coups de boutoir de la peinture. Baroque 15 1995 Huile sur toile 196 x 175 cm. Photo Nelly Blaya VÉNUS (1997 / 2000) Après la série Baroque, comme un ultime avatar de cette période classique, Martin Bissière explore le dernier champ de la figuration : celui de son évocation par l irruption du nom emblématique de Vénus. Désormais éloigné de la peinture formelle, l artiste explore davantage les fonds, les interstices entre les masses, et les détails des tableaux des artistes qui lui sont contemporains et, plus particulièrement, ceux qui composent la scène anglaise. Son travail se caractérise par l utilisation d une toile non préparée dont la couleur grise laissée apparente forme un cadre déchiqueté au tableau. Vénus 07 1997 Acrylique sur papier 160 x 240 cm. Photo Nelly Blaya 3
DÉCOR POUR UN FILM AMÉRICAIN (2000 / 2005) Dans cette série, Martin Bissière poursuit la quête d une identité fantasmée, celle d un artiste dont le langage pictural inscrit dans la contemporanéité serait susceptible de trouver un écho, comme une connivence, auprès d un public plus large. Cette recherche d un art décomplexé, qui propose des formes claires et assume un style en prise avec son époque, doit être articulée avec le regard de l artiste sur le cinéma et la peinture à l écran. Un décor pour des scènes où triomphe l expression du désir et de la violence d une façon paroxystique comme chez Soderbergh ou Tarantino. Cette monstration de la peinture par le cinéma lui confère un statut particulier. Celui de faire partie de la vie, d être porteur de codes partagés, un aspect «main stream» qui rend la peinture «acceptable». Décor pour un film américain 8 2005 Acrylique sur toile 194 x 146 cm. Photo Nelly Blaya Shaolin est un célèbre monastère bouddhiste chinois dévolu aux arts martiaux. L entraînement repose sur l apprentissage d enchaînements de gestes techniques par l imitation et la répétition. Au moment du combat, la posture mille fois éprouvée, est réévaluée dans un ensemble de coups singuliers qui vise à assurer la victoire. Par analogie, l artiste aborde des images multiples mises en œuvre par d autres peintres indépendamment de leur place sur la scène artistique, en analyse les composantes, et invente une réponse picturale. Cette relation ne s apparente pas à une imitation ou à une tentative d absorption de la peinture de l autre, mais à un combat entre rivaux dont la victoire à moins que ce ne soit la défaite! est constatée par l artiste, seul juge. SHAOLIN ART CENTER (2005 / 2008) Shaolin 12 2007 Huile sur toile 194 X 146 cm. Photo Nelly Blaya 4
LA MONTÉE DES EXTRÊMES (2009 / 2012) L appropriation et le détournement d un terme de Clausewitz stratège prussien du début du XIX e siècle, auteur d un ouvrage intitulé De la guerre, sont à l origine de cette série. L anthropologue René Girard aborde dans Achever Clausewitz, paru en 2007, ce mécanisme implacable de la violence qui s impose comme une fin et non plus comme le moyen de la politique : un emballement de la guerre au profit de la jouissance de la destruction. Martin Bissière traduit dans le champ de la peinture, ce moment paroxystique d une apocalypse qui commence dès sa première œuvre réalisée en 1985, et s achève avec la mort de son père, le peintre Louttre.B en 2012. La Montée des extrêmes 20 2012 Acrylique sur toile 160 x 160 cm. Photo Nelly Blaya OXYGENE (depuis 2013) En dix-huit mois, Martin Bissière peint plus de cent tableaux de grand format qui composent une série toujours en cours et dont le moteur de création a changé. Le peintre évolue du ressentiment vers le sentiment. Si la nécessité de regarder la peinture des autres perdure, elle trouve sa place dans une absence de rivalité : «la vie sans moi». La peinture en roue libre s émancipe du moteur mimétique et mène la toile sans la malmener. La brosse, outil emblématique du peintre, est reléguée au profit d une intervention directe avec la main, les doigts imprégnant directement la toile. Par analogie avec la sculpture, on pourrait dire que l artiste passe de la taille directe au modelage! Le geste promène la couleur et induit une relation au temps plus sereine. Oxygène 6 2015 Acrylique sur toile 200 x 200 cm. Photo Jean-Louis Losi 5
L Emergence de la peinture, texte de Laure JAUMOUILLÉ (extrait) «La peinture de Martin Bissière se caractérise par une profusion d expérimentations picturales de natures variées et pourtant cohérentes. Né en 1962, l artiste se consacre d abord à la musique, puis se tourne vers la peinture au milieu des années quatre-vingt. Attentif aux bouleversements esthétiques survenus à partir des années soixante, l artiste témoigne pourtant d une persévérance opiniâtre quant à la poursuite d une recherche plastique qui traverse sans encombres les tabula rasa minimales et conceptuelles. Ce dernier mène, depuis maintenant trente ans, une pratique picturale selon une infaillible exigence personnelle. Face à son œuvre, force est de constater que Martin Bissière est un peintre comme on en voit peu. Très tôt, il s émancipe du caractère anecdotique et narratif de la figuration pour s orienter vers une forme singulière de peinture abstraite, accueillant en son sein l enfouissement de motifs originels. Révélant la formation progressive d une manière originale, l artiste s affranchit d un savoir-faire trop impersonnel et d une technique trop maîtrisée. Perdre le contrôle du trait, voici le mot d ordre qui conduit Martin Bissière à un lâcher-prise empreint de virtuosité. Les formes et les couleurs se déploient, enrichies d une attention toute particulière à la densité de la matière picturale. La recherche abstraite, bien sûr, n est jamais totalement détachée d une figuration sous-jacente. On y observe la volonté accrue de faire émerger à la surface de la toile, la représentation d une réalité sensorielle et émotive. Les abstractions de Martin Bissière témoignent de la dextérité de l artiste, celle-là même qui l autorise à quitter la sphère d un réalisme trop restrictif. Oxygène 50 2014-2015 Acrylique sur toile 200 x 250 cm. Photo Jean-Louis Losi Tout en se délestant de l héroïsme romantique avant-gardiste qui caractérise souvent la peinture, Martin Bissière établit un dialogue décomplexé avec l histoire de l art. Il s agit là, non pas d un poids qu il aurait à porter sur ses épaules, mais d une conversation féconde, faite de rivalité, d exaspération, mais aussi de légèreté. Inspiré par le baroque, Martin Bissière développe une pratique apparentée à l écoulement d un fleuve, dont nous suivons les ressacs, les variations et les boucles selon un déroulement étranger à toute forme de finitude. L artiste envisage la peinture comme une manière d être au monde, animée par l énergie de la «Révolte». Présenté au public, le tableau apparaît comme une extension dotée d une dimension nouvelle, d une qualité d être supplémentaire. L artiste poursuit un œuvre empreint tout à la fois de violence et de finesse, dont il nous reste aujourd hui à apprécier la justesse.» 6
Oxygène 11 2015 Acrylique sur toile 200 x 200 cm. Photo Jean-Louis Losi «La beauté est un paradis instable.» «Apprendre à peindre, c est accéder aux lieux où le désir vous emmène. Et, peu à peu, réussir à les peindre.» «L espace est important, la couleur est importante, le dessin est important, les lignes sont importantes, les densités sont importantes, les taches sont importantes, les signes sont importants, mais au-dessus de ces singularités précieuses, il y a l attente.» Martin Bissière 7
L exposition Martin Bissière, La Montée des extrêmes Oxygène est réalisée par l ADACS (Association pour le développement de l art contemporain en Soissonnais) et le musée de Soissons, avec les concours du Ministère de la Culture / DRAC de Picardie, du Conseil Régional de Picardie, du Conseil départemental de l'aisne et de la Ville de Soissons. Commissariat : Dominique Roussel, conservateur en chef du Patrimoine et Érick Balin, président de l ADACS. Présentée du 19 septembre au 15 novembre 2015 à l Arsenal-musée de Soissons / abbaye Saint-Jean-des-Vignes Vernissage le vendredi 18 septembre à partir de 18h en présence de l artiste. Activités autour de l exposition Rencontre avec l artiste, samedi 19 septembre à 15h dans le cadre des journées Européennes du Patrimoine L ADACS organise des visites dialoguées gratuites de l exposition tous les dimanches, sans réservation. Ateliers pour les enfants, par le service éducatif du musée, sur réservation. Catalogue Martin Bissière, La Montée des extrêmes Oxygène, texte de Laure Jaumouillé, 96 pages, éditions Ceysson, Saint-Etienne, 25. Photos presse disponibles sur demande Renseignements Conservation du Musée et ADACS Logis de l'abbé - Abbaye Saint-Jean-des-Vignes, 02200 Soissons T. 03 23 93 30 50 Contact Musée : d.roussel@ville-soissons.fr ; p.langlais@ville-soissons.fr Contact ADACS : erick.balin@orange.fr INFORMATIONS PRATIQUES Accès Arsenal - musée de Soissons Abbaye Saint-Jean-des-Vignes, rue saint Jean, 02200 Soissons T. 03 23 53 42 40 www.musee-soissons.org Horaires : du mardi au vendredi de 9h à 12h et de 14h à 18h Les samedis, dimanches et jours fériés de 14h à 19h Tarif : 2 TP / 1 TR / gratuit pour les moins de 18 ans 8