Recommandations pour la prévention de la transmission croisée des «Bactéries Hautement Résistantes aux antibiotiques émergentes»(bhre)

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Recommandations pour la prévention de la transmission croisée des «Bactéries Hautement Résistantes aux antibiotiques émergentes»(bhre) Présentation du travail Commission spécialisée Sécurité Patients (CsSP) Didier LEPELLETIER, Bruno GRANDBASTIEN, Philippe BERTHELOT.

C est quoi une BHRe? Bactérie hautement résistante aux antibiotiques émergente (BHRe) Commensale du tube digestif Résistante à de nombreux antibiotiques Mécanisme de résistance transférable entre bactéries Emergente selon l épidémiologie connue, n ayant diffusé que sur des modes sporadiques ou épidémiques limités En 2013 et depuis 2009 : Enterococcus faecium résistant aux glycopeptides (ERG) Entérobactéries productrices de carbapénémases (EPC) 2

Ce que ne sont pas les BHRe Les bactéries saprophytes comme A. baumanniiou P. aeruginosa, quelle que soit leur multi-résistance aux antibiotiques Bactéries non commensales du tube digestif, peu de risque de diffusion communautaire, diffusion hospitalière dans les services à risque Les autres bacilles àgram négatif résistants aux carbapénèmes sans production de carbapénémases Les bactéries multi résistantes (BMR) aux antibiotiques Staphylococcus aureus résistant àla méticilline (SARM) et sensible aux glycopeptides Les entérobactéries produisant des β-lactamases à spectre étendu (EBLSE) Enterococcus faecalis résistant aux glycopeptides E. faecalis est rarement impliqué dans les épidémies Il doit être gérécomme une BMR 3

Les enjeux Prévalence faible mais en augmentation EPC : environ 0,7 % des isolats cliniques d entérobactéries sont résistants aux carbapénèmes et environ 12% le sont par production de carbapénémases [enquête Trans-Réseaux ONERBA : SFM 2013] ERG : 1% des isolats cliniques d E. faeciumsont résistant aux glycopeptides [rapport 2011 de l ECDC, EARS-net] Beaucoup de cas sporadiques mais aussi des épidémies 4

La surveillance par le signalement en France

Evolution des EPC en France

Existant Nombreuses recommandations depuis 2005 Sources multiples : sociétés savantes, CTINILS, HCSP Cadre réglementaire Approche par Micro-organisme»: ERG, puis EPC Situation : rapatriement sanitaire, ATCD d hospitalisation àl étranger, filières spécifiques Différences de rédaction selon les textes Approches diverses Interprétation divergentes Lepelletier et al. Bull Acad Natl Med 2009 Lepelletier et al. J Travel Med 2011 Vaux S Euro Surveill 2011 Fournier S Euro Surveill 2012 7

Mais aussi

Pourquoi de nouvelles recommandations? Changement de l épidémiologie des EPC <1% 27% 68% 9

Expérience des ES français deux ans après la diffusion des recommandations 10

286 ES répondants Membres de la SF2H Résultats Enquête Repérage des patients «àrisque»±organisé - Surtout pour les rapatriements (57%) vs ATCD (47%) - Peu d utilisation du Système d Information Hospitalier (SIH) Expérience de gestion de patients àrisque ou de BHRe (38%) Peu de cas secondaires après mise en place des mesures spécifiques (13%) Lepelletier et al. http://www.sf2h.net/publications-sf2h/sf2h_enquete-bhr-2012.pdf 11

Nécessité Actualiserles recommandations de détection et de prise en charge des patients colonisés ou infectés par des BHR Harmoniser les recommandations françaises Rendre ces recommandations plus opérationnelles et compréhensibles pour les établissements de santé Fiches techniques (CAT) en fonction des risques et des circonstances de découverte 12

Organisation Commission spécialisée Sécurité Patient Autosaisine de juillet 2012 (Pilotée par B Grandbastien) Coordination : P Berthelot et D Lepelletier (rapporteur) Constitution d un GT représentatif Hygiénistes, infectiologues, bactériologistes Recrutement de 2 chargés de mission (bibliographie) Partenariat avec Sociétés savantes la SF2H, SFILF, SFM Autres structures ou réseaux : Réseau CClin/Arlin, InVS, ONERBA, AP-HP Auditions de responsables (ecdc, CNR) / Relecture par des experts 13

Méthodes Avis d experts Basés sur la revue de la littérature scientifique, des recommandations internationales, des interviews, du GT et des relecteurs Pas de méthode GRADE ou DELPHI Rédaction de chapitres synthétisant l ensemble des recommandations nationales existantes Introduction/Généralités sur la diffusion de la résistance bactérienne Définitions (BHRe, patient s cibles et contact, niveau de risque de diffusion, modalités de prise en charge, etc.) Les mesures de maîtrise de la diffusion (PS, PCC, PBHRe) L organisation de la surveillance/communication, le dépistage et le diagnostic microbiologique Les fiches opérationnelles (n=8) en fonction de la situation épidémiologique et de découverte du portage

Avant-propos du guide Ce guide synthétise l ensemble des recommandations préexistantes dans ce champ Différents niveaux de la maîtrise de la diffusion Recommandations adaptées aux connaissances connues en 2013 Deux cibles : les patients porteurs et les patients contact Application effective de ces mesures dans les services +++++ Expertise locale de l EOH (Cclin/Arlin) Différents temps auxquels a lieu la détection du patient porteur de BHRe (admission, cours d hospitalisation, etc.) Situation épidémiologique (cas sporadique, cas secondaire, épidémie) Filières de soins concernées

Une même situation pourra donc être prise en charge différemment selon le contexte mais dans tous les cas, la prise en charge doit éviter toute perte de chance pour le patient afin de garantir une qualitéet sécuritédes soins et une orientation dans la filière de soins adaptée àsa prise en charge.

Les différents niveaux de risque de devenir porteur d une BHRe pour un patient contact Risque faible lorsque le patient porteur a étépris en charge en PCC dès son admission Risque moyen lorsque le patient porteur a étéidentifiéen cours d hospitalisation, Le risque devenant faible si aucun cas secondaire n a été identifié après 3 dépistages Risque élevési au moins un patient porteur (cas secondaire) est identifié parmi les patients contact (situation épidémique) Le risque redevenant moyen si la situation épidémique est complètement maîtrisée 19

Expertise et stratégie de contrôle Plusieurs éléments permettent d apprécier le risque de survenue de transmission croisée entre le patient porteur et les patients contact: Nombre de patients porteurs de BHRe présents dans le service/unité; Typologie des patients présents dans le service/unité(autonomie et charge en soins); Ratio personnel paramédical/patients ; Leadership et travail en équipe de l unité de soins; Délai écouléentre l admission du patient porteur et la mise en place des mesures (durée d exposition des patients contact); Architecture du service, possibilitéde chambres individuelles, possibilitéde regroupement et de sectorisation; WC individuels, lave bassin, utilisation de douchettes rince-bassins; Organisation de soins, dotation en personnel, formation des personnels; Niveau d observance des PS notamment l hygiène des mains (consommation de SHA, audits, etc.), le bon usage des gants et la gestion des excrétad oùdécoule l intensitéde l exposition des contacts; application des PCC; Qualité de l entretien de l environnement; Disponibilitéde l EOH pour former et informer toutes les équipes soignantes, médicales et paramédicales, de jour et de nuit; pour accompagner les équipes soignantes àdavantage appliquer les mesures d hygiène. 20

Les fiches opérationnelles Conduite à tenir en fonction de la situation 21

Les différentes situations 1. Mesures quelle que soit la situation 2. Admission d un patient hospitaliséàl étranger dans l année précédente 3. Découverte «fortuite»d un patient porteur de BHRe en cours d hospitalisation 4. En cas de diffusion secondaire (épidémie) 5. Admission d un patient déjà connu porteur d une BHRe 6. Admission d un patient contact lors d une situation épidémique 7. Admission d un patient contact en dehors d une situation épidémique 8. Transfert d un patient porteur de BHRe du court séjour vers une structure d aval type SSR, HAD, EHPAD, domicile 22

EXEMPLES DE FICHES

En conclusion Simplifier la prise en charge des patients et les contraintes des ES Contrôle initial de la diffusion ++++ Détecter/Communiquer/Utiliser les ressources et expertises pour l analyse du risque initial et la stratégie de dépistage et de suivi des patients contact Adapter les mesures àla filière de soins Préserver le bénéfice du patient 28

Remerciements àtous les membres du GT, chargés de missions, experts interviewés et relecteurs Aux membres de la CsSP P. Berthelot, D. Lepelletier (Coordinateurs) B. Grandbastien (Président de la CsSP)