La protonthérapie. à l Institut Paul Scherrer



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La protonthérapie à l Institut Paul Scherrer

Protonthérapie au PSI pour les tumeurs de l œil (OPTIS). La tête des patients est immobilisée avec un masque et un porte-empreinte dentaire. L irradiation proprement dite de la tumeur de l œil dure moins d une minute. Il est nécessaire de pratiquer quatre irradiations durant quatre jours consécutifs.

3 La protonthérapie à l Institut Paul Scherrer L objectif de la radiothérapie à l Institut Paul Scherrer (PSI) est la destruction du tissu tumoral au moyen de particules chargées appelées protons. Les protons se prêtent particulièrement bien à la radiothérapie car ils exercent l essentiel de leurs effets dans les profondeurs de l organisme, au niveau de la tumeur. Grâce à une technique d irradiation unique au monde, la nouvelle installation de protonthérapie du PSI permet d adapter très précisément la dose de radiation à la forme de la tumeur, la plupart du temps irrégulière, et de préserver encore mieux le tissu sain qu avec les techniques modernes usuelles de radiothérapie. En 1984, pour la première fois, des tumeurs de l œil ont été irradiées avec des protons au PSI. L installation utilisée pour ce faire était la première de ce genre en Europe. Fin 1996 a été mis en service au PSI le premier bras isocentrique (Gantry)pour l irradiation des tumeurs profondes. Grâce au développement en cours de la technique d irradition, à l avenir également des tumeurs mobiles pendant la durée du processus d irradiation (p.ex. les cancers du sein ou des poumons) devront pouvoir être traitées avec une très haute précision. En matière d avancées technologiques de la protonthérapie, le PSI est numéro un mondial et c est donc lui qui donne les tendances pour le traitement des tumeurs cancéreuses par radiothérapie. Installation OPTIS pour l irradiation des tumeurs de l œil avec des protons. Une fois les faisceaux de protons ajustés avec précision sur la tumeur de l œil, l irradiation est réalisée. Jusqu à présent, plus de 5000 patientes et patients ont bénéficié de cette thérapie au PSI.

4 LA PROTONTHÉRAPIE À PSI La radiothérapie et son importance En Europe, une personne sur trois souffrira probablement d un cancer au cours de son existence. Chaque année, rien qu en Suisse, environ 30 000 personnes apprennent qu elles ont un cancer. Parmi elles, environ 70 % auront besoin pendant leur maladie de radiothérapie. Aujourd hui, un peu plus de 45 % de l ensemble des tumeurs diagnostiquées sont curables, ce qui signifie qu à l issue du traitement, les personnes concernées vivent plus de cinq ans sans récidive cancéreuse. Environ 22 % doivent leur guérison à la chirurgie, environ 12 % à la radiothérapie, environ 6 % à une combinaison de ces deux méthodes et environ 5 % (tumeurs métastasées et non localisées) à d autres techniques et combinaisons de traitements, chimiothérapie comprise. La radiothérapie constitue donc une forme de traitement importante, qui est souvent la seule possible pour les tumeurs non opérables. Le traitement des tumeurs primaires augmente les chances de guérison et donc l espérance de vie. Il est d autant plus important de procéder à la radiothérapie en ciblant les tissus malades avec la plus grande précision possible et en irradiant le moins possible les cellules saines de l organisme. Cela permet de réduire considérablement ou d éviter les effets secondaires à court et à long terme. La thérapie par rayonnement, aussi appelée radiothérapie, est, comme la chirurgie, une méthode de traitement locale qui lutte donc contre des tumeurs «géographiquement limitées». Elle ne peut pas être remplacée par des thérapies devant agir sur l ensemble de l organisme (notamment pour le traitement des métastases), comme, par exemple, la chimiothérapie et l immunothérapie (thérapies systémiques). La radiothérapie est une forme de traitement dans laquelle les cellules tumorales sont détruites soit par des rayons X ou gamma (thérapie par photons), soit par des faisceaux de particules (protonthérapie par exemple). Toutes les améliorations de la radiothérapie visent à détruire la totalité de la tumeur tout en préservant de mieux en mieux les tissus sains. Au cours des 20 dernières années, de grands progrès ont été faits dans le domaine de la radiothérapie conventionnelle. Cependant, avec la protonthérapie, il est possible de parvenir à des résultats encore nettement meilleurs pour certaines indications et localisations de tumeurs. De plus, les progrès faits au PSI montrent que les possibilités d amélioration sont encore loin d être épuisées. Comment agit la radiothérapie? Une meilleure radiothérapie signifie adaptation plus précise de la dose de radiation à la forme de la tumeur dose de radiation plus élevée dans le volume cible (tumeur plus marge de sécurité) diminution de l exposition des structures organiques saines aux rayons chances de guérison durable plus importantes effets secondaires moins importants meilleure qualité de vie coûts du traitement raisonnables Au PSI, protonthérapie des tumeurs de l œil avec un faisceau de protons spécial de faible profondeur de pénétration (OPTIS). Ces photographies de l intérieur de l œil, réalisées à travers la pupille, montrent un exemple de guérison: en haut avant le traitement protonique, en bas, un an après: la tumeur s est résorbée. Si une particule chargée, par exemple un proton, traverse une cellule ou s immobilise dans celle-ci, l énergie qu elle y dépose (dose) endommage le noyau de la cellule. Cependant, la cellule peut, dans certains cas, réparer ces dommages. Tout l art de la radiothérapie consiste à administrer une dose telle que les cellules tumorales n aient aucune chance de se réparer et meurent toutes, sans exception, et que les cellules saines subissent, par contre, le moins possible de dommages et puissent se remettre sans problème. La dose de radiation mesure l énergie absorbée dans un matériau, par exemple dans les tissus. Cependant, les effets biologiques des rayons ne dépendent pas uniquement de la quantité d énergie, mais aussi de la façon dont l énergie est

LA PROTONTHÉRAPIE À PSI 5 déposée dans les cellules. La dose d énergie est toujours mesurée en grays (Gy). Une dose thérapeutique typique pour la destruction d une tumeur est de 60 à 70 Gy environ. En radiothérapie, elle est administrée en plusieurs fractions (environ 30 à 40 fractions au total) sur plusieurs journées successives. La protonthérapie dans le monde et au PSI La protonthérapie repose sur plus de 50 ans d expérience des effets biologiques des faisceaux de protons sur les cellules malades et saines du corps. En 1954, un patient a été traité pour la première fois au Lawrence Berkeley Laboratory, en Californie (Etats-Unis), et le premier programme européen de protonthérapie s est déroulé de 1957 à 1976 à Uppsala (Suède). En 1961, l Harvard Cyclotron Laboratory et le Massachusetts General Hospital de Boston, aux Etats-Unis, ont lancé un projet de protonthérapie. En 1984, des traitements de mélanomes oculaires ont eu lieu pour la première fois en Europe, au PSI, dans l installation OPTIS spécialement conçue à cet effet. La première installation de protonthérapie mise en service dans une clinique l a été au Loma Linda City University Medical Center, en Californie, en 1990. Depuis 1999, après une phase de mise au point et d essais de presque 10 ans, quelque 1500 patientes et patients y bénéficient chaque année régulièrement de la protonthérapie. Aujourd hui, dans le monde entier, plus de 35 centres sont en service et plus de 80 000 patients ont déjà été traités par protonentherapie, presque 10 % d entre eux au PSI. Au début des années 90 a été développée au PSI la technique dite Spot Scan pour le traitement des tumeurs profondes par protonthérapie. La technique du PSI est supérieure aux méthodes d irradiation par protons utilisées dans les autres centres. Elle permet une meilleure préservation des tissus sains. Depuis 1996, sont traités au PSI grâce à cette méthode extrêmement précise des patientes et patients souffrant de tumeurs particulièrement difficiles à irradier. En Europe, outre le PSI, six autres installations de protonthérapie sont en service, trois d entre elles peuvent uniquement traiter les tumeurs de l œil. A l heure actuelle, dans le monde entier, plus de 30 projets de protonthérapie, dont une dizaine environ en Europe, sont en cours d élaboration ou à un stade avancé de planification. Aujourd hui, plus de 10 000 patientes et patients par an, essentiellement celles et ceux souffrant de tumeurs de l œil, de tumeurs au cerveau et dans la région de la tête, du bassin et de la colonne vertébrale, sont traités avec des protons dans environ 35 centres situés dans le monde entier. L expérience clinique acquise avec les protons a montré que la précision spatiale de l irradiation contribuait souvent de manière décisive au succès de la thérapie. Comme la technique développée au PSI permet une irradiation d une précision très élevée, c est elle qui, dans le monde entier, a donné l exemple pour l amélioration de la protonthérapie. La quasi-totalité des installations en phase de planification ou en cours de construction misent aujourd hui sur la technique Scanning, utilisée pour la première fois au PSI. Ce succès ne reposait pas seulement sur des accélérateurs appropriés et des spécialistes expérimentés, mais aussi, pour beaucoup, sur l environnement interdisciplinaire du PSI et sur le contexte expérimental particulier que constitue la recherche physique fondamentale. L équipe du PSI dispose aujourd hui de plus de 25 ans d expérience dans le domaine de la protonthérapie. Jusqu à la mi-2011, presque 6000 tumeurs de l œil et plus de 750 tumeurs profondes Protonthérapie des tumeurs profondes sur la Gantry 1.

Vue sur l intérieur du cyclotron COMET (photo d archives du temps de la construction). Dans cette machine, les protons sont accélérés de l intérieur vers l extérieur à 180 000 kilomètres par seconde sur des trajectoires en spirale.

LA PROTONTHÉRAPIE À PSI 7 ont été traitées au PSI. Avec un taux de guérison des tumeurs de plus de 98 % pour les mélanomes de l œil irradiés, la réussite de cette thérapie est particulièrement impressionnante. Pour les patientes et patients traités sur la Gantry protonique, dont environ un tiers d enfants et d adolescents, les résultats des thérapies sont également très encourageants, avec un taux de contrôle des tumeurs qui, dans la plupart des cas, dépasse 80 %. Physique et technique de la protonthérapie Les protons sont des particules élémentaires portant une charge positive. Ils peuvent donc être défléchis et focalisés dans des champs magnétiques pour former un faisceau de la forme voulue. Contrairement aux photons utilisés actuellement en radiothérapie, la profondeur de pénétration des protons dans l organisme est parfaitement déterminée et délimitée avec précision. Les photons cèdent l essentiel de leur dose d énergie immédiatement après avoir pénétré dans l organisme, entraînant ainsi une forte irradiation concomitante des tissus sains. La portée des protons dépend de leur vitesse initiale et du matériau qui les freine plus ou moins. Entre la surface du corps et le point d arrêt, le matériau n absorbe qu une dose relati- Atome d hydrogène e Electron p+ Proton vement peu importante, les protons perdant ainsi de plus en plus de leur vitesse. Parvenus au bout de leur portée, ils s immobilisent et libèrent l essentiel de leur dose. Ainsi se produit un pic de dose, le pic de Bragg, au-delà duquel la dose tombe à zéro sur une distance de quelques millimètres. Les protons déposent donc la plus grande partie de la dose de radiation directement dans la tumeur sous forme de tache ou de spot et affectent nettement moins que les photons les tissus sains situé entre la surface du corps et la tumeur. L évolution de ces doses est représentée dans le graphique ci-dessous pour un fin faisceaucrayon individuel de protons. La partie inférieure de la figure montre également qu avant d atteindre le volume cible, les protons libèrent une dose nettement moins importante que les photons. Au delà du volume cible, les tissus sont considérablement irradiés par les photons, et pratiquement pas par les protons. Les protons, chargés positivement, sont des composants de la matière. On obtient des protons libres en ionisant des atomes d hydrogène dont le noyau est composé d un proton (l électron de l enveloppe électronique est enlevé). γ Faisceau-crayon individuel de protons Surface du corps Volume cible Spot Photon p + Proton Arrêt Les photons (ondes électromagnétiques) et les protons (particules chargées) se comportent d une manière très différente. Dose 100% Photons 50% Pic de Bragg (spot) Protons 10% 0 10 20 30 40 cm Profondeur Dose de radiation d un faisceaucrayon de protons en fonction de sa pénétration dans l organisme. La portée de ces protons est de 25 cm. En haut, la répartition des doses sous forme de courbes de niveaux, en bas, les valeurs des doses en fonction de la profondeur, comparées avec l évolution d une dose de photons.

Le nouveau cyclotron accélérateur de protons compact COMET du PSI lors de son montage. C est la machine la plus compacte du monde de ce type pour la protonthérapie, conçue par des physiciens du PSI. Dans la partie inférieure de l image, le faisceau de protons est extrait du cyclotron et dirigé vers les lieux de traitement en quelques millièmes de seconde.

LA PROTONTHÉRAPIE À PSI 9 La technique Spot Scan du PSI Les protons accélérés par le cyclotron COMET sont concentrés dans un faisceau de 5 à 7 mm environ de largeur (spot). Des aimants dévient les protons vers l appareil d irradiation, la Gantry, et de là vers le patient, sur la tumeur. Les spots hautement dosés balaient pas à pas la tumeur dans chacune des trois dimensions de l espace (scanning). Sur la Gantry 1, la profondeur de pénétration du spot de protons est commandée par un système de plaques en matière synthétique, intercalées sur la trajectoire du faisceau. Ces mouvements ne durent que quelques millisecondes. Les différentes lignes de la tumeur sont irradiées couche par couche, et pendant que la table mobile du patient évolue lentement, par pas de 5 mm, dans la zone d irradiation, les spots balaient toutes les dimensions spatiales. Dans la nouvelle Gantry 2, une technique de scanning avancée est utilisée: la déflexion du faisceau vers la tumeur s effectue simultanément en deux dimensions et le changement d énergie a lieu dans ce que l on nomme le «degrader» (atténuateur), à la sortie du cyclotron, en quelques fractions de seconde. Avec la technique de traitement du PSI, le faisceau-crayon de protons est commandé par des ordinateurs de façon que le spot à forte dose se trouve exactement à l endroit voulu dans la tumeur pour une durée fixée avec une extrême précision. Grâce à la superposition de nombreux spots différents pour un volume d un litre, il en faut environ 10 000 la tumeur est exposée uniformément aux doses de radiation voulues, celles-ci étant contrôlées individuellement pour chaque spot. Cela permet une irradiation extrêmement précise s adaptant au mieux à la forme de la tumeur, irrégulière dans la plupart des cas. Nous appelons cette méthode une radiothérapie dynamique adaptée en trois dimensions technique Spot Scan. Utilisée au PSI depuis 1996 pour le traite- Le plan thérapeutique montre, sur l exemple d une tumeur au cerveau, la précision particulière de la technique Spot Scan. La dose est adaptée individuellement à tous les niveaux de la délimitation concernée (en jaune). Les tissus situés en dehors de la tumeur sont dans une large mesure préservés. Principe de la technique Spot Scan développée au PSI. Grâce au décalage et à la superposition des spots de doses d un faisceaucrayon de protons, il est possible d avoir des répartitions de dose de n importe quelle forme et la dose peut être adaptée en trois dimensions, d une manière particulièrement précise, à la forme de la tumeur.

En haut: Gantry protonique 1: vue du dessus des aimants de la Gantry, pesant plusieurs tonnes, qui focalisent le faisceau de protons et le guident vers le point thérapeutique. L installation pèse plus de 100 tonnes et peut, dans son ensemble, être pivotée au millimètre près. En dessous: la coupe longitudinale de la Gantry protonique 1 montre le principe du guidage du faisceau de protons et la position des trois éléments de guidage: aimant déflecteur pour la déflexion (balayage) du faisceau (1), plaques en matière synthétique pour la variation de la profondeur de pénétration des protons dans le corps (2), table mobile supportant le patient pour l irradiation par couches (3). 1 2 3

LA PROTONTHÉRAPIE À PSI 11 ment de patients cancéreux, elle est unique au monde et permet d irradier la tumeur avec une très grande précision tout en ayant un impact sur l environnement sain beaucoup plus faible que la thérapie par photons conventionnelle. Gantry 2 pour l irradiation des tumeurs mobiles A l avenir, sur la Gantry 2, les tumeurs qui bougent au cours de l irradiation (p. ex. les tumeurs des poumons ou des seins) pourront également être irradiées d une manière très précise grâce à la technique de scanning. Dans cette Gantry, des aimants de déflexion guident en deux dimensions, et avec une énergie fixée au préalable, le faisceau de protons vers la tumeur, et une couche de cette tumeur est ainsi irradiée. En quelques fractions de seconde, l énergie peut être modifiée, ce qui permet d irradier la couche suivante dans la tumeur. De la sorte, la tumeur est «scannée» en trois dimensions. Compte tenu de la vitesse élevée de la déflexion du faisceau et de la modification d énergie, la tumeur peut être irradiée plusieurs fois dans un temps minimum, la durée d irradiation totale restant courte. Le «scanning» multiple du volume de la tumeur permet une répartition très homogène de la dose, y compris lorsque la tumeur bouge au cours de l irradiation. La station d irradiation Gantry 2 en cours de montage.

La figure montre l ensemble technique de l installation de protonthérapie du PSI. Pour le traitement des tumeurs profondes, les protons sont accélérés de manière à atteindre environ 180 000 kilomètres par seconde dans l accélérateur, le cyclotron COMET. Grâce à un système de guidage des faisceaux, les protons accélérés traversent un tube d extraction pratiquement vide d air et sont dirigés en moins d un millième de seconde par des électro-aimants vers les stations thérapeutiques (Gantry 1, Gantry 2 et OPTIS 2), où ils sont guidés vers la tumeur du patient avec une énergie et une direction d irradiation fixées avec une extrême précision. Le faisceau de protons, guidé par ordinateur, dépose la dose prévue et calculée à l avance, détruisant ainsi les cellules tumorales. Cyclotron COMET Guidage du faisceau Optis 2 Gantry 1 Gantry 2

LA PROTONTHÉRAPIE À PSI 13 Déroulement de la protonthérapie au PSI A l instar de la thérapie par photons traditionnelle, la protonthérapie est pratiquée en plusieurs fractions jour après jour. En règle générale, un traitement dure six à huit semaines (environ 30 à 40 séances). Les patientes et patients sont, dans la plupart des cas, adressés par des cliniques universitaires et des hôpitaux suisses et étrangers. Au PSI, ils sont suivis par une équipe expérimentée formée de radio-oncologues, de physiciens médicaux et d autres professionnels spécialisés. Après la réalisation de la couche individuelle dans laquelle s allongera le patient et la prise des clichés de tomographie qui lui fait suite avec les appareils de tomodensitométrie, l équipe de médecins du PSI délimite les doses pour chacun des niveaux de la tumeur, c est-à-dire le volume cible en trois dimensions, avec une marge de sécurité. C est sur ces préparatifs que repose la planification de la thérapie, pour laquelle, à l aide des programmes informatiques développés à cet effet au PSI, chacun des réglages du dispositif d irradiation est calculé à l avance, optimisé et enregistré dans un bloc de données, ainsi que la répartition des doses qui en résulte. Lors de chaque séance thérapeutique, la position de la tumeur et celle du patient dans sa couche individuelle sont vérifiées par rayons X. A l issue de la thérapie, des contrôles de suivi périodiques sont réalisés pendant plusieurs années. La plupart des patientes et des patients suivent un traitement ambulatoire. Dans de rares cas, ils sont admis dans l un des hôpitaux situés à proximité du PSI. Pendant les fractions successives de la thérapie, les enfants en bas âge sont anesthésiés, une équipe d anesthésistes de l hôpital pour enfants de Zurich se rendant régulièrement au PSI pour ce faire et accompagner la thérapie. La sélection des patients est faite par l équipe de médecins du PSI sur la base de l avantage médical supplémentaire attendu, par expérience, de la protonthérapie. En Suisse, l assurance maladie obligatoire prend actuellement en charge le traitement des indications suivantes: mélanomes intraoculaires (irradiation des tumeurs de l œil dans l installation OPTIS) méningiomes (bénins et malins), gliomes peu avancés tumeurs situées dans la région de la base du crâne et dans la région du cou, du nez et des oreilles (tumeurs ORL) sarcomes, chordomes et chondrosarcomes tumeurs des petits enfants (incluant une anesthésie), des enfants et des adolescents D autres indications sont étudiées au PSI et dans d autres centres. Tumeur dans la région de la tête d un enfant de 7 ans traité par rayons au PSI. Plan d irradiation pour la radiothérapie avec thérapie par photons conventionnelle moderne (à gauche) et avec protonthérapie au PSI (à droite). L irradiation par photons génère un «bain de dose» dans une grande partie du cerveau et touche également le tronc cérébral et les nerfs oculaires. La protonthérapie permet d éviter cela.

Gantry 2, avec aimant de déflexion à 90 intégré et tête d irradiation (la personne sur la photo n est pas un patient).

LA PROTONTHÉRAPIE À PSI 15 Pour préparer et réaliser une protonthérapie, l équipe de médecins doit être en possession de la totalité des informations disponibles, y compris les examens préalables, l histoire du malade et les clichés radiographiques. De plus, un contact direct avec les médecins qui lui adressent le patient est très important car il permet de garantir un bon suivi avant et après la thérapie au PSI. Jusqu à la mi-2011, plus de 750 patientes et patients souffrant de tumeurs profondes à proxi- mité d organes critiques ont été traités sur la Gantry 1. Depuis 1984, presque 6000 patients souffrant d une tumeur oculaire ont été traités par protons avec succès sur l installation OPTIS. Depuis 2010, une nouvelle installation OPTIS (OPTIS 2) est à disposition. Après la mise en service de la Gantry 2 (à partir de 2012), environ 500 patients atteints de tumeurs pourront bénéficier de la protonthérapie au PSI chaque année. Le positionnement exact du patient, particulièrement important pour la protonthérapie, est garanti de plusieurs manières: grâce à une couche individuelle adaptée à sa morphologie, grâce à la table supportant le patient, guidée d une façon très précise, et grâce au contrôle du positionnement, réalisé par TDM (tomodensitométrie) et rayons X. Mentions légales Conception/rédaction Martin Jermann, PSI Dagmar Baroke, PSI Photos Institut Paul Scherrer H.R. Bramaz, Lieli Alain Herzog, Source: Conseil des EPF Maquette / impression Institut Paul Scherrer Réproduction avec indication de la source autorisée, exemplaire justificatif souhaité. Disponible auprès de Institut Paul Scherrer Services de communication 5232 Villigen PSI, Suisse Téléphone +41 56 310 2111 Pour l irradiation, les enfants en bas âge sont anesthésiés afin que la tumeur reste dans une position fixe. Chez eux, la protonthérapie présente des avantages particuliers car leur organisme réagit d une façon particulièrement sensible aux rayonnements. Internet www.psi.ch www.protontherapy.ch Villigen PSI, septembre 2011

Protonentherapie_f, 10/2011 Le PSI en bref L Institut Paul Scherrer PSI est un centre de recherche pour les sciences naturelles et les sciences de l ingénieur. Au PSI nous faisons de la recherche de pointe dans les domaines de la Matière et Matériaux, l Homme et la Santé, ainsi que de l Energie et l Environnement. Nous associons recherche fondamentale et recherche appliquée pour élaborer des solutions durables répondant à des questions centrales de la société, de la science et de l économie. Avec environ 1400 postes équivalents à plein temps, nous représentons l institut de recherche le plus important de Suisse. Nous développons, construison et exploitons de grandes installation de recherche complexes. Chaque année, nous accueillons environ 2000 chercheurs invités venant de Suisse, mais aussi du monde entier. Tout comme les scientifiques du PSI, ils effectuent sur nos installations uniques des expériences qu ils ne pourraient effectuer nulle part ailleurs. Contacts Centre de protonthérapie Interlocuteur pour les journalistes: Secrétariat Dagmar Baroke Tél. +41 56 310 35 24 Tél. +41 56 310 29 16, Fax +41 56 310 27 17 protonentherapie@psi.ch dagmar.baroke@psi.ch Paul Scherrer Institut, 5232 Villigen PSI, Suisse Tél. +41 56 310 21 11, Fax +41 56 310 21 99 www.psi.ch, www.protontherapy.ch