L amélioration des procédures de passation des contrats d emprunt Gabriel ECKERT Professeur à l Université de Strasbourg (Institut d Études Politiques Institut de Recherche Carré de Malberg)
Problématique Constat : Les collectivités locales ont été les principales concernées par la pratique des emprunts «toxiques» (un peu moins de 8 % du total de la dette locale) : Pourquoi? Élément de réponse : Elles ont perdu la maîtrise du processus de passation des contrats d emprunt. Conséquence : Nécessité de chercher des bonnes pratiques susceptibles de prévenir la conclusion de contrats présentant des risques excessifs en redonnant aux collectivités territoriales la maîtrise de la négociation et de la conclusion de leurs emprunts.
Opérer un retour aux procédures de droit public? Point de départ de la réflexion Rapport de décembre 2011 de la Commission d enquête parlementaire sur les produits financiers à risque souscrits par les acteurs publics locaux Proposition de loi déposée le 21 février 2012 et relative au développement, à l encadrement et à la transparence des modes de financement des investissements des acteurs publics locaux Deux séries de questions Les propositions formulées par ce texte Le silence gardé par ce texte sur la question de l instauration d une procédure de publicité et de mise en concurrence
Ce que dit la proposition de loi Trois séries de mesures sont proposées : limiter les possibilités de souscription de contrats présentant des risques importants, améliorer l information des élus locaux sur les choix effectués en matière d emprunt, renforcer le rôle du contrôle de légalité.
Limiter les possibilités de souscription de contrats présentant des risques importants Ajout de deux articles au sein du CGCT Art. L.1619-1. «Les collectivités territoriales et leurs établissements publics ne peuvent souscrire d emprunt dont le taux d intérêt variable présente des variations supérieures à celles de l indice sur lequel il est indexé». Art. L.1619-2. «Les collectivités territoriales et leurs établissements publics ne peuvent souscrire d emprunt dont le taux d intérêt variable peut, durant la vie de l emprunt, devenir supérieur au double du taux d intérêt nominal appliqué au cours de la première période de l emprunt ou à un taux dont la formule d indexation est déterminée par décret».
Améliorer l information des élus locaux sur les choix effectués en matière d emprunt Deux mesures sont proposées : Instaurer dans le cadre du DOB un point sur «l évolution et les caractéristiques de l endettement» de la collectivité territoriale (art. L.2312-1 CGCT). Limiter dans le temps les délégations de compétence en matière d emprunt, en leur faisant prendre fin «dès l ouverture de la campagne électorale pour le renouvellement» de l organe délibérant (art. L.2122-22 CGCT).
Renforcer le rôle du contrôle de légalité Proposition : étendre l obligation de transmission au préfet à tous les contrats d emprunt, de droit public comme de droit privé (art. L.2131-2 CGCT). Appréciation : Faible efficacité du contrôle de légalité. Absence de déféré préfectoral devant le juge judiciaire, seul compétent s il s agit d un contrat d emprunt de droit privé.
Ce que ne dit pas la proposition de loi La proposition de loi ne prend pas position sur le point de savoir s il faut soumettre la passation des emprunts à une procédure préalable de publicité et de mise en concurrence. Les raisons de ce silence : Au plan juridique strict : la compétence du pouvoir réglementaire Au plan politique : un débat délicat
L Etat du droit positif : l absence d obligation de mise en concurrence Article 3 point 5 CMP : ««les dispositions du présent code ne sont pas applicables aux accords-cadres et marchés de services financiers relatifs à l'émission, à l'achat, à la vente et au transfert de titres ou d'autres instruments financiers et à des opérations d'approvisionnement en argent ou en capital des pouvoirs adjudicateurs». Disposition permise par l article 16 de la Directive 2004/18/CE Disposition qui figure dans le CMP depuis le décret 2005-601 du 27 mai 2005 Antérieurement à cela, les emprunts entraient dans le champ du CMP (CE, 23 février 2005, Association pour la transparence et la moralité des marchés publics)
Faut-il faire évoluer le droit positif? Dans le sens de la soumission au droit des marchés publics : Proposition de Directive de la Commission européenne du 20 décembre 2011 sur la passation des marchés publics Dans le sens d une soumission aux seuls principes fondamentaux de la commande publique : Le Commission d enquête parlementaire La Cour des comptes (rapport de juillet 2011 sur la gestion de la dette publique locale)
Proposition : Qualifier les contrats d emprunts de marchés publics de services non-prioritaires Obligation d établir et de respecter un cahier des charges Conclusion du contrat suivant une procédure adaptée (permettant notamment la négociation directe) Qualification des emprunts de contrats administratifs (contrôle de légalité, compétence du juge administratif)
Merci de votre attention Gabriel.Eckert@unistra.fr