N 1300371 TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE CAEN ------------------ RÉPUBLIQUE FRANÇAISE M. ------------------ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS DB M. M ondésert juge des référés Le juge des référés, Audience du 20 mars 2013 Ordonnance du 20 mars 2013 Vu la requête enregistrée au greffe le 28 février 2013 sous le n 1300371, présentée pour M. demeurant à par Me Gueguen-Carroll, avocat ; M. demande au juge des référés : Io) d ordonner, sur le fondement des dispositions de F article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la décision 48 SI en date du 18 janvier 2013 par laquelle le ministre de l intérieur a retiré deux points de son permis de conduire à raison d une infraction au code de la route commise le 23 novembre 2012 à La Fresnaye-au-Sauvage, a récapitulé cinq précédents retraits de points, l a informé de la perte de validité de son permis pour solde de points devenu nul et lui a demandé de le restituer ; 2 ) de mettre à la charge de l Etat la somme de 1.500 euros en application de l article L. 761-1 du code de justice administrative ; Il soutient : - que l exécution de la décision entrainerait des conséquences irréparables dès lors que la détention de son permis de conduire est indispensable à l exercice de sa profession de gérant de la société spécialisée dans le transport médical qu il assume seul ; qu il ne dispose d aucun autre moyen de transport ; qu il est père de deux enfant de quatre et deux ans et doit subvenir aux besoins de sa famille ; que compte tenu de la nature des infractions commises sur une période de trois années, la restitution de son permis de conduire n est pas inconciliable avec les exigences de la sécurité routière ; - que la condition relative au doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée est également satisfaite ; qu'en effet, la décision contestée est insuffisamment motivée ; qu il n est pas l auteur des infractions en cause ; qu en ce qui concerne le respect de l'obligation d information préalablement à la constatation des infractions en cause, le ministre chargé de F intérieur ne peut utilement se prévaloir des énonciations du relevé d information intégral relatif à la situation du conducteur ; que l'obligation d'information définie par les articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route n'a pas été respectée par l'administration ; qu'il n a pas reçu notification des décisions portant retrait de points ;
N 1300371 Vu la décision attaquée ; Vu le mémoire en défense enregistré le 6 mars 2013, présenté par le ministre de l intérieur qui conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 100 euros soit mise à la charge de M. au titre des dispositions de l article L. 761-1 du code de justice administrative ; Le ministre soutient : - qu il n existe aucune situation d urgence ; qu en effet, seul le comportement routier fautif du requérant est à l origine de la situation d'urgence qu il invoque ; que M ne pouvait ignorer que la détention de son permis de conduire était une condition substantielle pour l exercice de sa profession et qu il se devait au respect strict du code de la route ; que le comportement du requérant, compte tenu de la gravité des infractions commises, qui ont trait dans deux cas à des excès de vitesse, dans un cas au non-respect de l arrêt absolu à un feu rouge, dans un autre cas au non-respect de l arrêt absolu à un «stop», et dans deux cas à l usage d un téléphone par le conducteur en roulant, présente un danger pour lui-même et les autres usagers de la route ; que la réitération par un conducteur d infractions entraînant des retraits de points fait obstacle à la restitution du permis de conduire, qui serait incompatible avec les exigences de la sécurité publique ; - qu aucun moyen n est de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée ; que le moyen tiré du défaut d information préalable doit être rejeté ; que s agissant des infractions en date des 12 novembre 2010 et 8 novembre 2011, il ressort des procès-verbaux signés par le contrevenant que ce dernier a reconnu avoir reçu la carte de paiement et l avis de contravention sur lequel figurent les dispositions prescrites par les textes ; que s agissant des infractions commises les 9 janvier 2012, 22 mai 2012 et 23 novembre 2012 constatées par procès-verbal-électronique, le requérant n établit pas la preuve, qui lui incombe dès lors qu il a payé l amende forfaitaire, d une information insuffisante au regard des exigences prévues aux articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route ; que l administration doit être regardée, s agissant de l infraction du 14 janvier 2012 qui, selon les mentions du relevé d information intégral, a donné lieu à un paiement différé de l amende forfaitaire, comme ayant apporté la preuve qu elle a satisfait à l obligation d information ; que les décisions précédentes de retrait de points ont été systématiquement portées à la connaissance du requérant ; que les informations figurant au relevé d information intégral permettent d établir la réalité des infractions ; que la décision attaquée, ainsi que les décisions de retrait de points antérieures, qui comportent la date, l heure ainsi que le lieu de l infraction, le nombre de points retirés et les articles du code de la route dont il a été fait application, sont suffisamment motivées ; - que les conclusions du requérant au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative devront être rejetées ; qu'en revanche, il serait inéquitable de laisser à l Etat la charge des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; Vu le mémoire en réplique enregistré le 11 mars 2013 par lequel M. mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ; il soutient, en outre : conclut aux - qu en se bornant à produire les procès-verbaux de contravention établis à la suite des infractions relevées le 12 novembre 2010 et 8 novembre 2011 alors qu il a procédé au paiement de l'amende forfaitaire afférente à ces deux infractions le jour même de leur constatation, l administration, à laquelle il incombait de produire la souche de la quittance de paiement
N 1300371 3 dépourvue de réserve sur la délivrance de F information, n'établit avoir satisfait, en ce qui concerne ces infractions, à l obligation d information prévue aux articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code de justice administrative ; Vu le code de la route ; Vu la requête n 1300370 enregistrée le 28 février 2013, par laquelle M. demande l annulation de la décision 48 SI en date du 18 janvier 2013, par laquelle le ministre de F intérieur a retiré deux points de son permis de conduire à raison d une infraction au code de la route commise le 23 novembre 2012 à La Fresnaye-au-Sauvage, a récapitulé cinq précédents retraits de points, Fa informé de la perte de validité de son permis pour solde de points devenu nul et lui a demandé de le restituer ; Vu la décision en date du 2 janvier 2013 par laquelle le président du tribunal adm inistratif a désigné M. Mondésert, vice-président, pour statuer sur les demandes de référé ; Après avoir convoqué à l audience publique : - M e Gueguen-Carroll pour M. - le ministre de l intérieur ; Vu le procès-verbal de l audience publique du 20 mars 2013 au cours de laquelle ont été entendus : - le rapport de M. Mondésert, juge des référés ; - les observations de M e De Oliveira, avocat, représentant M. Après avoir prononcé, à l issue de l audience à 10 h, la clôture de l instruction ; Sur les conclusions à fin de suspension : 1. Considérant qu aux termes de l article L. 521-1 du code de justice administrative: «Quand une décision administrative, même de rejet, fait 'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de /' exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu 'il est fait état d'un moyen propre et créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant ci la légalité de la décision (...)» ; qu'aux termes de l'article L. 522-1 du même code : «Le juge des référés statue au terme d'une procédure contradictoire écrite ou orale. Lorsqu'il lui est demandé de prononcer les mesures visées aux articles L. 521-1 et L. 521-2, de les modifier ou d'y mettre fin, il informe sans délai les parties de la date et de l'heure de l'audience publique (...)» ; qu enfin, aux termes du premier alinéa de l article R. 522-1 du code de justice administrative : «L a requête visant au prononcé de mesures d'urgence doit contenir l'exposé au moins sommaire des faits et moyens et justifier de l 'urgence de l'affaire (...)» ;
N 1300371 4 En ce qui concerne la condition d urgence : 2. Considérant que l'urgence justifie que soit prononcée la suspension d'un acte administratif lorsque l exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre ; qu'il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte-tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l acte litigieux sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l exécution de la décision soit suspendue ; 3. Considérant qu il résulte de l instruction que M. est gérant d une société dont l activité, qui s'exerce sur cinq départements, est le transport de marchandises interurbain de moins de trois tonnes cinq ; que le fonctionnement de cette société est subordonnée à ce que le gérant ou l un de ses salariés soit titulaire d un justificatif de capacité professionnelle au transport de marchandises avec des véhicules légers ; q u il n est pas sérieusement contesté que est le seul au sein de la société à justifier des titres requis pour obtenir la délivrance de ce justificatif et que son entreprise ne peut durablement assumer les coûts de recrutement d un salarié disposant de ce justificatif ; qu ainsi, l exécution de la décision contestée par laquelle le ministre de l'intérieur a retiré deux points de son permis de conduire à la suite de l infraction constatée le 23 novembre 2012 à La Fresnaye-au-Sauvage et informé le requérant de la perte de validité de son permis de conduire doit être tenue comme portant une atteinte grave et immédiate à l'exercice par l'intéressé de son activité professionnelle et comme affectant très sensiblement les conditions d exploitation de cette société ; que la suspension de la décision contestée ne serait pas, dans les circonstances de l'espèce, inconciliable avec les exigences de la sécurité routière dès lors que, si les infractions ayant donné lieu à retrait de points présentent, il est vrai, une certaine gravité, elles ne sont pas de nature à établir, dans les circonstances de l espèce, une dangerosité avérée de leur auteur ; que dès lors, eu égard aux graves conséquences qu'aurait l'exécution de cette décision sur l'activité professionnelle de ainsi que sur sa vie personnelle, et alors que une suspension n'apparaît pas inconciliable avec les exigences de la sécurité routière, la condition d'urgence fixée à l'article L. 521-1 du code de justice administrative doit, dans les circonstances particulières de l'espèce, être tenue pour remplie ; En ce qui concerne la condition tenant à l existence d un doute sérieux : 4. Considérant qu à l appui de ses conclusions tendant à la suspension de l exécution de la décision référencée 48 SI du 18 janvier 2013, fait valoir qu'il n'a pas régulièrement bénéficié des informations prévues par les dispositions des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route ; 5. Considérant qu en l état de l instruction, le moyen tiré de ce que la décision attaquée est intervenue à l issue d'une procédure irrégulière dès lors que n a pas reçu les informations préalables prévues par les dispositions des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route pour les deux décisions de retrait de points prises à la suite des infractions respectivement commises les 12 novembre 2010 et 8 novembre 2011 est de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de cette décision ; que ;st donc fondé à demander la suspension de l exécution de la décision du 18 janvier 2013 par laquelle le ministre de l'intérieur a constaté la perte de validité de son permis de conduire pour solde de points devenu nul et lui a demandé de le restituer ; que cette suspension est ordonnée jusqu'à ce qu'il ait été statué au fond sur la demande d annulation de la décision en cause ;
N 1300371 5 Sur l application de l article L. 761-1 du code de justice administrative : 6. Considérant qu'en vertu de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le tribunal ne peut pas faire bénéficier la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par le ministre doivent, dès lors, être rejetées ; qu il y a lieu, en application des mêmes dispositions et dans les circonstances particulières de l'espèce, de mettre à la charge de l'état le versement à M. d'une somme au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;i ORDONNE: Article 1CI : L exécution de la décision du 18 janvier 2013 par laquelle le ministre de l'intérieur d'une part, a constaté la perte de validité du permis de conduire de pour solde de points devenu nul, d'autre part, lui a enjoint de restituer son permis au préfet du département de son lieu de résidence, est suspendue jusqu à ce qu il ait été statué au fond sur sa requête n 1300370 tendant à l annulation de cette décision. Article 2 : L État versera à M. L. 761-1 du code de justice administrative. la somme de 750 euros en application de l article Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à M. et au ministre de l'intérieur. Fait à Caen, le 20 mars 2013. Le juge des référés, La greffière, signé X. MONDÉSERT signé C. ALEXANDRE