La Princesse de Montpensier

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1 La Princesse de Montpensier un film de Bertrand Tavernier Dossier pédagogique Lycée Français

2 La Princesse de Montpensier Un film de Bertrand Tavernier Dossier conçu par le site Zérodeconduite.net. Rédacteur en chef : Vital Philippot Rédactrice du dossier : Geneviève Belleflamme et Florence Salé, professeures de Lettres (Activités), Philippine Le Bret, journaliste (entretien avec Nicolas Le Roux) Sommaire p. 02 Introduction p. 03 Fiche technique du film p. 04 Dans les programmes p. 05 Entretien avec Bertrand Tavernier Crédits et Sommaire Ce dossier est strictement réservé aux établissements acquéreurs du DVD avec ses droits auprès de la boutique DVD Zérodeconduite. Pour tout renseignement : info@zerodeconduite.net p. 09 Entretien avec Nicolas Le Roux p Dissertations p Analyses de séquences NB : L édition employée pour les citations du présent dossier est l édition «Classiques Garnier» (Garnier-Flammarion, 2017). Les repères temporels pour situer les scènes ou plans du film sont donnés à titre indicatif, ceux-ci pouvant varier d un lecteur à l autre. Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 2

3 Fiche technique Fiche technique La Princesse de Montpensier Un film de : Bertrand Tavernier Année : 2010 Langue : Français Pays : France Durée : 139 minutes Date de sortie en salles en France : 3 novembre 2010 Éditeur du DVD : Studio Canal Synopsis 1562, la France est sous le règne de Charles IX, les guerres de religion font rage Depuis son plus jeune âge, Marie de Mézières aime Henri, Duc de Guise. Elle est contrainte par son père d épouser le Prince de Montpensier. Son mari, appelé par Charles IX à rejoindre les princes dans leur guerre contre les protestants, la laisse en compagnie de son précepteur, le Comte de Chabannes, loin du monde, au château de Champigny. Elle tente en vain d y oublier sa passion pour Guise, mais devient malgré elle l enjeu de passions rivales et violentes auxquelles vient aussi se mêler le Duc d Anjou, futur Henri III. Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 3

4 Enseignement Niveau Français Terminale L Classe terminale de la série littéraire Programme de littérature pour l année scolaire Domaine d étude «Littérature et langages de l image» 1 1 Voir le Bulletin Officiel : Dans les programmes Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 4

5 Entretien avec Bertrand Tavernier Propos recueillis par Vital Philippot (octobre 2010) Quelle a été la principale difficulté pour transposer à l écran la nouvelle de Madame de La Fayette? Entretien avec Bertarnd Tavernier Nombre de vos films sont des films historiques ou des adaptations, parfois les deux à la fois. Dans quelle catégorie situez-vous La Princesse de Montpensier? Tout d abord je voudrais préciser qu au mot «adaptation» je préfére celui de «lecture». La Princesse de Montpensier est une nouvelle d à peine vingt pages, et les trois quarts du film sont constitués de scènes totalement originales. «Adaptation» est un mot qui donne à un film une étiquette d académisme, même s il fait preuve d une grande liberté par rapport à l œuvre originale. Au contraire il y a certains films qui adaptent des romans à la ligne près sans que personne ne le remarque, parce qu il s agit de livres que personne n a lus. Ce travail de «lecture» est-il très différent de celui fait sur le roman de James Lee Burke, Dans la brume électrique, votre précédent film? Pas tant que cela en fait. Dans Dans la brume électrique l ordre des scènes n est pas du tout le même que dans le livre, il y a plein de séquences qui ne sont pas dans le livre, dont beaucoup ont été écrites par Tommy Lee Jones, nous avons situé le film à une époque différente que le livre, tous les lieux décrits dans le film ont été modifiés. Il fallait retrouver la source des sentiments et des passions qui animent les personnages de Madame de la Fayette, enlever les filtres qui les rendraient trop étrangers aux spectateurs d aujourd hui : la langue bien sûr, mais aussi les codes sociaux. J essaye de rendre mes films historiques doublement contemporains : à la fois du spectateur d aujourd hui, mais aussi des personnages. Cela pousse à rechercher des équivalences entre les époques. Je me demandais par exemple comment faire comprendre le basculement du personnage de Chabannes, qui en pleine guerre de religion passe d un camp à l autre, au péril de sa vie (pour l époque, cela équivaut à passer de Vichy à la Résistance, ou de l OAS au FLN!). Madame de La Fayette passe très rapidement là-dessus, expliquant que Chabannes «ne pouvait se résoudre à être opposé en quelque chose à un homme qui lui était si cher», son ami le prince de Montpensier. Mais on se dit qu il aurait pu y penser avant la guerre! En interrogeant des historiens, j ai appris qu en temps de guerre, il y avait trois péchés mortels (on parlerait aujourd hui de «crimes de guerre») : la destruction d un four à pain, la destruction d une charrue, le meurtre d une femme enceinte. Donc nous avons imaginé cette scène où Chabannes passe une femme enceinte par le fil de son épée : c est le déclic qui lui fait abandonner la guerre. Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 5

6 Entretien avec Bertarnd Tavernier A cela s ajoute une autre difficulté : la nouvelle de Madame de la Fayette est écrite un siècle après les faits! Oui, or le XVII e siècle est un siècle très puritain, ce que n était pas le XVI e. Cela interdisait à Madame de La Fayette de parler de certaines choses. On sait par exemple que dans le fait divers dont elle s est inspiré, Guise a fait un enfant à la jeune femme dont il s était épris (qui n était pas Marie de Montpensier, personnage totalement fictif). Comment vous y prenez-vous pour retrouver cet esprit d une époque. Quelle documentation utilisez-vous? Je lis tout ce que je peux lire, récits de l époque, romans, historiens, j interroge les spécialistes C est une de mes passions : arriver à comprendre au sens fort, à «absorber», le monde du film que je suis en train de préparer. C est aussi vrai pour les films dits «historiques» que les films contemporains : je ne fais aucune différence entre La Princesse de Montpensier et L 627, ou Ça commence aujourd hui. D une certaine.manière les policiers de L 627 me sont aussi étrangers que les nobles de La Princesse Je me pose les mêmes questions concrètes : comment ces gens vivent, mangent, aiment, rient? Et en faisant ces recherches je découvre parfois un fait inédit qui va éclairer mes personnages. Il y a une scène particulièrement frappante qui illustre votre propos, c est celle Une de mes passions est d arriver à comprendre le monde du film que je suis en train de préparer. de la nuit de noces de Marie. Cela se passait comme ça à l époque dans les familles riches (pas seulement chez les nobles) : la nuit de noces était publique! Il y avait un côté «on vient tester la marchandise». Ce genre de scène m intéresse doublement : à la fois parce que c est quelque chose qui a été très peu filmé, et parce que ça caractérise mes personnages. Je ne cherche pas la «scène à faire», il faut que ça apporte quelque chose au film. Comment ces très jeunes gens vont surmonter cette épreuve? Comment leurs rapports de couple vont-ils être conditionnés par cette première nuit? De la même manière, on est frappé par les scènes qui se passent au Louvre N imaginez pas que le Louvre était comme le musée d aujourd hui, fait de couloirs immenses et vides! Il n y avait pas d hôtel à Paris à l époque, les gens se logeaient où ils pouvaient. A la cour les gens s entassaient les uns sur les autres pour être plus près du roi et de la reine. De même, les chateaux comportaient peu de chambres : les gens dormaient ensemble à l époque, et cela n avait rien de sexuel. C était une époque assez libre au niveau des mœurs, il n y avait pas de code de bienséance Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 6

7 Entretien avec Bertarnd Tavernier Utilisez-vous également les représentations picturales de l époque comme inspiration visuelle? Je questionne la peinture, mais toujours de manière critique : il ne faut pas oublier qu elle montre une réalité enjolivée. J ai appris à le faire sur La Passion Béatrice (1987), qui se passait au XIV e siècle. Claude Duneton m avait fait remarquer que les gens qui se faisaient peindre posaient dans des habits qui les mettaient au dessus de leur condition. Ce serait comme tourner une histoire sur les paysans au XIX e siècle, et les mettre en scène dans les habits qu ils portaient pour se faire photographier. C est pour cela par exemple que je n ai mis aucune fraise dans le film : il n y a que quand ils se faisaient peindre que les gens en mettaient. Allez vivre au quotidien avec une fraise! En revanche j ai pu m inspirer de l esprit de certains tableaux : il y a par exemple au Louvre un célèbre tableau montrant Gabrielle d Estrées et la duchesse de Villars au bain. C est un tableau qui montre bien la liberté des mœurs du XVI e par rapport à celles du XVI e Jamais Madame de La Fayette n aurait pu se faire peindre nue! Je questionne la peinture, mais toujours de manière critique : il ne faut pas oublier qu elle montre une réalité enjolivée. Quels sont les films qui vous ont inspiré pour La Princesse de Montpensier? Et bien pour La Princesse de Montpensier, j ai pensé aux westerns! En fait cela n a rien à voir avec la cinéphilie, c est très pragmatique : je me suis demandé comment mettre en scène les chevaux, et notamment des discussions entre personnages à cheval. Des grands maîtres du western comme Budd Boetticher ou Delmer Daves le font très très bien, alors que le cinéma français n a jamais trop su le faire. Dans la grande majorité des films historiques français (jusqu aux années soixante en tout cas) on filme très mal les cavalcades : ça se passe toujours dans un champ tout plat, il n y a jamais d obstacles. Par commodité (et par paresse!) ces scènes étaient toujours filmées sur d anciennes pistes d aéroport! Moi au contraire je voulais des obstacles, filmer les chevaux en montée, sur des durées assez longues Votre mise en scène privilégie la fluidité, les plans-séquence, notamment à la steadycam. Oui, j aime laisser de l espace et du temps aux comédiens. J avais dit aux acteurs que je ne voulais pas de doublures : ils avaient intérêt à savoir monter à cheval, et à savoir se battre! Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 7

8 Entretien avec Bertarnd Tavernier Je n aime pas les cinéastes qui multiplient les plans, notamment dans les scènes d action. J ai appris que la mise en scène de cinéma c était la dramatisation du rapport entre le temps et l espace. Quand on voit Gaspard Ulliel affronter deux ou trois adversaires successifs dans le même plan, cela nous donne une idée de l effort qu il doit fournir. Dans les scènes de combat il est important de pouvoir situer les personnages, de savoir s ils sont seuls ou entourés, s ils sont loin ou s ils sont proches. Il faut savoir qu à l époque il était très difficile de se reconnaître sur le champ de bataille : les combattants ne portaient plus d armures comme au Moyen-âge, et l uniforme n avait pas été encore inventé. Les historiens m ont confirmé qu il était assez fréquent que des soldats du même camp s entretuent On pense également au western pour la façon dont vous filmez les grands espaces Ah ça c est quelque chose qui m importe beaucoup : donner aux paysages une J aime donner aux paysages une importance émotionnelle et dramaturgique. importance émotionnelle et dramaturgique. J aime beaucoup filmer les extérieurs. C est très fastidieux au moment du tournage : il faut emmener l équipe dans des coins pas possible, se lever très tôt pour obtenir la meilleure lumière. Mais c est très important pour la dramaturgie : la lumière a un sens émotionnel, elle fait partie de l écriture du film. Dans les films historiques hollywoodiens les intérieurs sont beaucoup trop éclairés : les torches et les bougies coûtaient très cher à l époque, on les réservait pour les grandes réceptions. Cette rareté de la lumière donne un éclairage proche des films noirs, que je trouve plus intéressant que les pièces inondées de lumière des films hollywoodiens. La Princesse de Montpensier est un film sur la jeunesse. Il n y a pas tant que ça dans votre filmographie Il y a L appât (1995) qui est un peu l antithèse de La Princesse de Montpensier! Les personnages de La Princesse de Montpensier sont des idéalistes, même si leurs idéaux les mènent à des actes parfois terribles (le massacre de la Saint-Barthélémy). Ceux de L Appât sont soumis à ce que le magistrat Antoine Garapon appelait «la dictature de l instant», ils sont prêts à tout pour s acheter des gadgets ou des vêtements à la mode. Je pense qu il en existe à toutes époques : il y avait sûrement des ambitieux à la cour, il y a des idéalistes aujourd hui! Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 8

9 Entretien avec l historien Nicolas Le Roux Entretien avec l historien Nicolas Le Roux Propos recueillis par Philippine Le Bret Nicolas Le Roux est historien moderniste et professeur à l université Paris XIII. Ses recherches se concentrent sur les guerres de religion. Parmi ses publications : «Les Guerres de Religion», collection Que sais-je, PUF, 2016 ; «La Faveur du roi. Mignons et courtisans au temps des derniers Valois (vers 1547-vers 1589)», Seyssel, Champ Vallon, 2001 Quel regard portez-vous sur la reconstitution de l époque par Bertrand Tavernier? Je trouve le projet audacieux, car le XVI e siècle n est que rarement représenté au cinéma. On ne peut guère citer que La Princesse de Clèves (Jean Delannoy, 1961) ou Michael Kohlhaas (Arnaud des Pallières, 2013). Les enjeux politiques et religieux de l époque sont difficiles à faire comprendre. Il faut donc saluer l audace de Tavernier. C est courageux de s attaquer au XVI e siècle! Mais, d un point de vue strictement historique, je qualifierais le résultat d un peu bancal. Tavernier fait appel à de nombreuses références extérieures au XVI e siècle. Sa représentation du duc de Guise par exemple emprunte beaucoup aux films de samouraï : Gaspard Ulliel a les cheveux longs attachés en queue de cheval, et se bat même au bâton, ce qui n existait absolument pas au XVI e siècle! Mais Tavernier est obligé de passer par d autres imaginaires car le XVI e siècle est un angle mort culturel. Les spectateurs n ont aucune idée de ce à quoi ressemblait la période. La princesse de Montpensier du film est donc, elle aussi, anachronique? Elle nous est dépeinte comme une femme rebelle, qui cherche à être indépendante. Ce n est pas tellement conforme aux pratiques du XVI e siècle. Mais c est intéressant, car la morale de Tavernier diffère fortement de celle de M me de la Fayette. Dans le film, la passion amoureuse devient un facteur d émancipation, alors que dans la nouvelle, la princesse est punie pour avoir mal agi. Qu en était-il justement de la passion amoureuse dans la noblesse du XVI e siècle? Les jeunes gens de haut rang pouvaient-ils se marier par amour? Absolument pas. Les garçons et les filles étaient mariés de force. Leurs parents décidaient pour eux, en vertu d une diplomatie matrimoniale extrêmement importante à cette époque-là, dans toute l Europe. Parfois même, c est le roi lui-même qui dictait les unions! Le mariage était l objet premier de la politique, il permettait de donner aux uns et aux autres des droits pour des terres ou des seigneuries. Il ne fallait absolument pas rater le mariage de ses enfants, on ne pouvait pas les laisser se charger d une affaire aussi importante. Certains ont tenté d arracher plus de liberté matrimoniale. Marguerite de Valois, à l époque où elle n était pas encore la reine Margot, a essayé de mener une vie sentimentale autonome. Mais elle a échoué, ce qu évoque d ailleurs le film : elle a vécu une idylle avec le duc de Guise, qui lui a valu de sévères remontrances de sa mère, Catherine de Médicis. Le XVI e est un angle mort culturel. Les spectateurs n ont aucune idée de ce à quoi ressemblait la période. Aucun prince, aucune princesse de cette deuxième moitié du XVI e siècle n a donc Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 9

10 Entretien avec l historien Nicolas Le Roux réussi à échapper à ces mariages forcés? Il y a quelques exceptions. Henri III par exemple (qui est encore duc d Anjou dans le film de Tavernier) a épousé Louise de Lorraine, une toute petite princesse qui n avait ni argent ni terre. Sa mère, Catherine de Médicis, qui était obsédée par le mariage de ses enfants, était furieuse. Mais elle n a pas pu empêcher cette union. Mariés de force, les jeunes nobles avaientils au moins le droit de divorcer? Chez les catholiques, le mariage est un sacrement. Il est donc impossible de divorcer. Dans de très rares cas, des mariages ont pu être annulés, au motif qu ils n avaient pas été consommés, qu ils n étaient pas consentis, ou qu on avait découvert un lien de parenté trop proche entre les époux. C est notamment le cas du mariage entre Henri IV et la reine Margot. Mais seul le pape pouvait annuler un mariage, ce qui était donc réservé aux princes et aux rois. Certains époux ont pu également obtenir une séparation de corps et de biens, qui reconnaît le droit à ne plus vivre ensemble mais n autorise pas à se remarier. Mais c était là aussi une exception. C est pour cela que, dans le film, quand la princesse de Montpensier assure au duc de Guise qu elle va quitter son mari pour se remarier avec lui, cela paraît peu plausible. Qu en était-il de l adultère? L adultère était pratiqué. Mais il n était pas toléré par la société, sauf pour le roi! L adultère était bien sûr pratiqué, dans la noblesse comme ailleurs. Cela a d ailleurs donné lieu à quelques affaires publiques retentissantes, et à des assassinats. Mais il n était pas toléré par la société. Sauf pour le roi! De nombreux rois de l époque ont vécu des situations de concubinage ou de ménage à trois. La maîtresse d Henri II, Diane de Poitiers, avait même un rôle de représentation officiel, à côté de la reine qui était, elle, chargée de donner des héritiers au trône de France. Cette tolérance envers les compagnes du roi est d ailleurs une des raisons pour lesquelles Henri III a surpris ses contemporains. Il n a qu une femme, aucune maîtresse officielle, et surtout aucun enfant. Or, avoir un héritier est le premier devoir du roi. D où les nombreuses rumeurs sur sa virilité. D où viennent ces rumeurs autour de l homosexualité présumée d Henri III? La légende des mignons apparaît dès la fin des années Des textes et des poèmes satiriques dénoncent les mœurs de la cour, présentée comme une école de débauche. Mais ces rumeurs ne visent au départ pas Henri III. Ce sont les protestants, hostiles à Catherine de Médicis et à son entourage italien qui font courir des bruits sur la pratique de la sodomie par les Italiens. À la fin des années 1580, ces moqueries Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 10

11 Entretien avec l historien Nicolas Le Roux migrent sur l entourage d Henri III, puis sur le roi lui-même. Cette fois, ce sont les catholiques ligueurs, hostiles à Henri III, qui sont à la manœuvre. Cette légende des mignons est donc avant tout d ordre politique. La sexualité était-elle une question taboue au XVI e siècle? Non, les gens parlent de sexualité à cette époque-là. Le poids des interdits n est pas encore trop écrasant, comme ce sera ensuite le cas au XVII e siècle. De plus, il faut bien imaginer que, chez les gens du peuple, on dort à plusieurs dans un même lit, pour se tenir chaud. On en sait donc beaucoup très tôt. Mais c est moins vrai dans les milieux aisés. Et il ne faut pas non plus imaginer le XVI e siècle comme une période où les gens vivent à l état de nature, car cet état de nature n existe pas. Simplement, on a jusqu au milieu du XVI e siècle un rapport au corps très simple. Les fonctions corporelles ne sont pas encore totalement privatisées, même si elles sont en train de le devenir. On peut encore recevoir dans sa baignoire, ce qui sera inconcevable au XVII e siècle. Le film met en scène l introduction de la princesse de Montpensier à la cour Le poids des interdits n est pas encore trop écrasant, comme ce sera ensuite le cas au XVII e siècle. royale. Que représentait la cour à cette époque-là? Au XVI e siècle, les Valois ont fait de la cour le centre politique et social de la grande noblesse. François I er pensait qu il fallait attirer la noblesse à la cour pour la connaître et la contrôler. Une idée à laquelle se ralliera ensuite Catherine de Médicis, qui collectionnait les portraits, en buste, de tous les nobles de la cour! La grande noblesse, elle, est à la fois attirée et effrayée par la cour. Y aller, c est se ruiner, littéralement. Mais tout se décide à la cour : les grands mariages, les charges, les commandements, les pensions La cour est donc un lieu flamboyant? Oui, d ailleurs dans les années , la cour est systématiquement montrée du doigt comme un lieu de dépenses inconsidérées. On la voit aussi comme un lieu de perversion, puisqu on y a introduit des femmes, ce qui n était pas le cas avant. Et la cour est aussi un lieu de violence. On s y bat beaucoup, ce que montre bien le film. Les nobles passent leur temps les uns sur les autres, et se jalousent constamment. Forcément, des explosions surviennent. D autant que ces années-là ( ) sont marquées par une brutalisation des mœurs, liée aux guerres civiles successives. Le duel est une pratique très courante, et très meur- Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 11

12 Entretien avec l historien Nicolas Le Roux trière. C est aussi une spécificité française! Le film rend bien cette impulsivité. On le voit par exemple dès que le duc d Anjou arrive dans une pièce : sa garde rapprochée écarte rapidement ceux qui s approchent trop près de lui et n hésite pas à mettre la main à l épée. Revenons sur le contexte politique et religieux du film. Comment se sont déroulées les guerres de religieux? C est vrai que le contexte n est pas extrêmement développé par Tavernier. Mais il ne l est pas non plus dans la nouvelle. Madame de La Fayette parle seulement de la guerre pour évoquer les questions de loyauté et de fidélité mais ça ne va pas plus loin. Il faut dire que la période est complexe! En janvier 1562, Catherine de Médicis fait signer au roi, son fils, un premier édit de tolérance. Cet édit accorde aux protestants la liberté de culte, à certaines conditions. Mais le massacre de Wassy, perpétré en mars 1562 par le duc Les nobles passent leur temps les uns sur les autres, et se jalousent constamment. de Guise (le père de celui du film) et ses hommes, marque le début de la première guerre de religion, qui durera jusqu en Catherine de Médicis parvient en effet à obtenir la paix. Son principal souhait est que l autorité de ses fils soit respectée dans tout le royaume. Elle considère par ailleurs que les consciences sont à Dieu et que le devoir du roi (en l occurrence, à l époque, le roi, c est elle), c est la paix civile. Cette idée que la paix doit venir d abord et la conversion des protestants ensuite est une grande révolution. Catherine de Médicis négocie avec les deux camps et finit par réussir à imposer la paix en S en suivent quatre années de trêve. Mais en 1567, Condé et d autres chefs protestants reprennent les armes. Ils ont peur que se trame en secret leur perte et préfèrent donc se soulever. Surpris par cette insurrection, les catholiques ne leur feront plus jamais confiance. Les guerres reprennent, en puis entre 1568 et Elles sont de plus en plus dures. En 1569, Condé est tué à Jarnac. Tuer un prince du sang est un crime extrême : le choc est inouï, et les deux communautés comprennent qu elles ne pourront plus jamais se réconcilier. Pourtant, en 1570, la paix de Saint-Germain est miraculeusement négociée par Catherine de Médicis. Comme à chaque trêve, une amnistie est prononcée, les prisonniers sont libérés, le roi ordonne à tout le monde d oublier ce qu il s est passé et la liberté de culte est accordée aux protestants. Le mariage entre Marguerite de Valois, catholique, et Henri IV, protestant, est célébré en août Il doit parachever cette paix. Mais quelques jours plus tard, le 22 août, l amiral de Coligny échappe de peu à un attentat à Paris. Les protestants réclament la tête du duc de Guise, persuadés qu il est derrière cet attentat. Le 23 août, la cour, craignant que les protestants ne reprennent les armes, décide de couper la tête du parti protes- Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 12

13 Entretien avec l historien Nicolas Le Roux tant. Il est question de tuer une vingtaine de personnes, pas d un massacre. Mais quand la milice parisienne prend les armes, le 24 août, plus personne ne peut la maîtriser. Ce que montre donc bien le film, c est qu il y a eu une succession assez rapide des périodes de guerre et de paix. Oui mais il ne faut pas imaginer que tout le monde se battait tout le temps et que, de temps en temps, tout le monde se figeait! La guerre coûte cher, elle est compliquée sur le plan logistique. Et on ne peut pas se battre en hiver car les routes sont impraticables. On n est donc pas dans un chaos permanent. D autant que les armées sont très prudentes. Elles évitent le plus possible la bataille, en misant plutôt sur des sièges ou des mouvements pour couper l ennemi de ses bases-arrières. Quelles armes étaient utilisées? Les chevaliers se battaient avec des lances, qui faisaient environ 4m de long. Ils avaient également des épées, et l on apportait sur le champ de bataille des canons, bien qu ils soient moins utiles qu aux moments des sièges. Mais la grande nouveauté du XVI e siècle, ce sont les pistolets : en tirant à bout portant, on peut tuer n importe qui. Cela révolutionne la guerre car même un cavalier couvert de fer Pour les batailles, Tavernier a voulu faire du Kurosawa! ne peut rien contre un pistolet. Comment les princes combattaient-ils? Se mêlaient-ils à la piétaille comme on le voit dans le film? Pour les batailles, Tavernier a voulu faire Kurosawa! Dans la réalité, les grands seigneurs étaient tous capitaines, ils étaient couverts de fer, ne combattaient pas tête nue et ne descendaient jamais de cheval. Quand, dans le film, on voit Mayenne descendre de cheval pour rejoindre son frère, le duc de Guise, au combat, c est sociologiquement impossible. Par contre, les princes allaient en effet sur le champ de bataille, et donnaient de leur personne dans la guerre. Un homme de la noblesse pouvait-il décider individuellement de ne pas prendre part au conflit, comme le fait le comte de Chabannes? Bien sûr. Dans la noblesse, seuls 15 à 20% des hommes combattaient. Les autres restaient chez eux. On les appelait les «rieurs» : ceux qui riaient en attendant que ça passe. La noblesse du XVI e siècle était beaucoup moins militaire que sous Louis XIV. Chabannes passe également d un camp à l autre, des protestants aux catholiques. C est là aussi quelque chose de vraisemblable? Tout à fait. Revenir servir le roi est perçu comme totalement légitime. D ailleurs, après la première guerre ( ), nombreux sont ceux qui retournent dans le camp royal et se reconvertissent au catholicisme. Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 13

14 Dissertation Le travail de l adaptation Dissertation : Le travail de l adaptation Introduction Si les questions de la transposition cinématographique et de la fidélité à l œuvre originale, se posent pour tout film adapté d une source littéraire préexistante (roman, pièce de théâtre ), elle est rendue d autant plus aigüe ici par la distance temporelle qui sépare les deux œuvres : La Princesse de Montpensier, film de Bertrand Tavernier, produit et réalisé au XXI e siècle, est postérieur de plus de trois siècles à La Princesse de Montpensier, nouvelle de Mme de Lafayette. Cette distance se trouve doublée par la nature même de La Princesse de Montpensier, nouvelle écrite par une femme du XVII e siècle mais portant sur des événements datant du siècle précédent (la période des guerres de religions). Bertrand Tavernier s est frotté de nombreuses fois au film d époque : du Moyen-Âge dans La Passion Béatrice à l Occupation dans Laissez-passer, en passant la Régence (Que la fête commence!), le temps des colonies (Coup de torchon) ou la Première Guerre Mondiale (La Vie et rien d autre, Capitaine Conan). Analyser la manière dont il transpose à l écran la nouvelle de Madame de La Fayette nous renseigne sur sa lecture du roman : a-t-il été séduit par la matière romanesque de l intrigue? Par le style de la nouvelle? Par la morale de celle-ci? Autant de points qu il faudra aborder pour évaluer la question de la fidélité de l adaptation, question d autant plus centrale, qu elle rejoint les préoccupations d une princesse déchirée entre son cœur et son devoir. I. Fidélité, infidélités? a. Fidélité dans l intrigue? Une fidélité globale À première vue le scénario de Jean Cosmos suit fidèlement la nouvelle de Mme de Lafayette : les statuts et les noms des personnages sont conservés, ainsi que l époque et les lieux (seul le toponyme de Champigny est transposé en Mont-sur- Brac) de l intrigue. Les principaux temps de l intrigue sont restitués dans l ordre de la nouvelle : l éducation de la Princesse par Chabannes qui en tombe amoureux pendant que son jeune époux combat, la rencontre sur le lac, «une chose de roman» qui réunit tous les protagonistes (en ajoutant un quatrième soupirant en la personne du duc d Anjou), la rencontre avec la Reine à Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 14

15 Dissertation : Le travail de l adaptation la Cour, les rumeurs de mariage entre Guise et Marguerite de Navarre, et le quiproquo lors du bal. S il ne retranche rien, Betrand Tavernier procède souvent par amplification : les tractations liées au mariage de Marie et de Philippe ou à celui entre Catherine de Lorraine et le duc de Montpensier, l éducation de Marie de Montpensier par Chabannes, évoqués en quelques phrases ou quelques mots dans la nouvelle, font l objet de scènes plus développées dans le film. L alternance des temps de guerres et les trèves est également respectée, même si elle est moins justifiée que dans la nouvelle, contribuant à en donner une image confuse et chaotique. Le réalisateur choisit d ailleurs de commencer son film par une scène de combat : les premiers plans du film montrent successivement un champ de bataille secoué d ultimes soubresauts et une cavalcade qui se terminera par un sanglant règlement de compte. Cette séquence n est pas tirée de la nouvelle, mais elle lui a été directement inspirée par son incipit : «Pendant que la guerre civile déchirait la France sous le règne de Charles IX, l amour ne laissait pas de trouver sa place parmi tant de désordres, et d en causer beaucoup dans son empire.» Cette séquence d exposition ancre le film dans le contexte historique (les guerres de religion) mais aussi dans ce qui sera le thème même du film, la violence. et des écarts signifiants Bertrand Tavernier souligne qu il a procédé à deux changements principaux par rapport à l intrigue de la nouvelle : la première séquence, destinée à expliquer pourquoi Chabannes quitte le camp huguenot (en inventant le meurtre d une femme enceinte), et la modification du quiproquo lors du bal (qui a lieu non lors du bal mais dans ses coulisses), scène charnière de l intrigue. Dans les deux cas, il s agit de rapprocher de rendre les motivations et comportements de ses personnages plus lisibles et «vraisemblables» pour un spectateur contemporain, sans trahir l Histoire (le prétexte du meurtre de la femme enceinte lui a été soufflé par l historien Didier Lefur). Le film s écarte à nouveau de la nouvelle lorsqu il s approche de son dénouement : Bertrand Tavernier offre une nuit d amour à Marie et Henri, à l hôtel de Montpensier à Paris (tandis que dans la nouvelle l entrevue chaste a lieu à Champigny, écho de la visite que Nemours rend à Coulommiers dans La Princesse de Clèves). Il la laisse survivre (alors que la nouvelle s achève sur la mort de Marie), nous la montrant portant le deuil de son ami Chabannes, tué lors de la Saint Barthélémy. On constate donc que le principal écart par rapport à la nouvelle, réside dans le traitement des personnages de Chabannes et de Marie de Montpensier : le film s ouvre et se referme sur le premier et en fait ainsi un de ses personnages principaux, alors que la nouvelle le maintenait dans un statut de personnage secondaire ; la seconde n est pas «punie», en tout cas pas aussi radicalement que dans l excipit de la nouvelle : «Elle mourut en peu de jours dans la fleur de son âge, une des plus belles princesses du monde et qui aurait été la plus heureuse si la vertu et la prudence eussent conduit toutes ses actions.» Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 15

16 Les photogrammes montrent quelques exemples des changements apportés à la nouvelle : ajout de scène (première et dernière séquence), amplification (les tractations matrimoniales), modification (le quiproquo lors du bal). Dissertation : Le travail de l adaptation b. Fidélité à la langue? Le style de Mme de Lafayette est caractéristique du classicisme du XVII e siècle. Il tient de l épure, marqué par la concision du vocabulaire, la complexité de la syntaxe, la prééminence du discours indirect («le duc de Guise, qui savait à quel point ce comte était ami du prince de Montpensier, fut épouvanté qu elle le choisît pour son confident mais elle lui répondit si bien de sa fidélité qu elle le rassura» p. 67). On y retrouve des figures telles que l hyperbole («toute la cour se trouva à Paris. La beauté de la princesse de Montpensier effaça toutes celles qu on avait admirées jusques alors.» p. 55) la symétrie, l antithèse («le duc abandonnait son âme à la joie et à tout ce que que l espérance inspire de plus agréable, et le comte s abandonnait à un désespoir et à une rage qui le poussa mille fois à donner de son épée au travers du corps de son rival.» p. 73) et surtout la litote («Mais il n avait pas peu de peine à la guérir de la jalousie que lui donnait la beauté de Madame.» p 60). Sur le plan de l esprit, on y respire les ambiguïtés des maximes de La Rochefoucauld et la condamnation des passions propres à l esprit classique («l on est bien faible quand on est amoureux.» p. 69 «Comme sa passion était la plus extraordinaire du monde, elle produisit l effet du monde le plus extraordinaire» p. 68). Naturellement le récit et les dialogues rapportés sont nécessairement transformés dans un film qui met en scène les personnages aux prises les uns avec les autres, en discours direct. Avec son dialoguiste Jean Cosmos, Tavernier a tenu à conserver la Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 16

17 palette des sentiments condensée dans cet art de la rhétorique qui a abouti à ce qu on nomme la littérature d analyse, tout en abandonnant certains tours trop éloignés de la langue d aujourd hui. Si l on compare les deux extraits ci-dessous, quand Marie prend Chabannes pour confident, on voit combien le dialoguiste est resté en effet fidèle aux effets de style de Mme de Lafayette : Dissertation : Le travail de l adaptation «La confiance s augmenta de part et d autre, et à tel point du côté de la princesse de Montpensier qu elle lui apprit l inclination qu elle avait eue pour M. de Guise, mais elle lui apprit aussi en même temps qu elle était presque éteinte et qu il ne lui en restait que ce qui était nécessaire pour défendre l entrée de son cœur à tout autre, et que la vertu se joignant à ce reste d impression, elle n était capable que d avoir du mépris pour tous ceux qui oseraient lever les yeux jusques à elle.» (p ) Marie, tout à trac : Je n aurais pas honte de parler d une personne pour qui j aurais éprouvé un sentiment. Chabannes : Mais qui vous dit que? Marie : J ai subi l épreuve. Et j en suis guérie. Chabannes : Mais, Madame, jamais je ne Marie : J en suis guérie. Chabannes : C est donc que vous aviez bien peu souffert. Marie : Suffisamment souffert. Chabannes : Avant le prince? Marie : Le prince a été le remède. Nous étions encore presque des enfants. Celui auquel je pense était le plus beau des garçons autour de moi. Il m effrayait un peu dans nos débuts, car il se battait sans cesse pour l honneur et peut-être aussi pour le plaisir et ces batailles l avaient marqué au visage. La très légère réaction de Chabannes l instruit qu il a deviné. Elle réagit pour désamorcer cette découverte. Marie : Il ressemblait à Henri de Guise. Chabannes l aidant : mais ce n était pas lui. Marie, soutenant son regard : Mais ce n était pas lui. Ce court extrait de dialogue montre comment Jean Cosmos a réussi, tout en simplifiant et en modernisant la syntaxe, à reproduire les subtilités de la langue de Madame de la Fayette et a retranscrire la profondeur psychologique. Marie y apparaît à la fois intelligente (elle feint de pousser Chabannes à se confier pour mieux se confier elle-même) et naïve (quand elle affirme qu elle est guérie de son amour pour Guise, on entend exactement le contraire). De manière symétrique, Chabannes révèle lui aussi son expérience des jeux de l amour, et la sagesse de l homme qui en est revenu. En reconnaissant que l amour fait souffrir, il se livre aussi, peut-être a-t-il même envisagé, comme en témoigne son hésitation et ses questions, que Marie l avait mis à nu, ce que Marie ne peut comprendre, trop à l écoute d elle-même et de sa passion. Le réalisateur souligne aussi, dans les commentaires du DVD, combien il a pu s appuyer sur le jeu extrêmement vif des comédiens, Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 17

18 capables de passer d une émotion à une autre, ce qui sert l expression des ambivalences du cœur. Ainsi la simplification de la syntaxe, la modernisation de l expression des sentiments sans ôter de la complexité à celle-ci, reproduit les complexités de la langue de Mme de Lafayette. c. Fidélité dans la mise en scène Dissertation : Le travail de l adaptation Là où le réalisateur est le plus infidèle au style de la nouvelle, c est bien en ce qui concerne la mise en scène, et plus particulièrement en espace. La nouvelle se déroule en effet quasiment en intérieurs, d ailleurs très peu décrits. Bertrand Tavernier leur a substitué de nombreuses séquences en extérieur. Pourtant l effet rendu est similaire car il s agit d exprimer la solitude des personnages et leur emprisonnement, qu ils soient pris en train de chevaucher ou deviser dans des paysages immenses ou bien figés et se querellant dans les cours des châteaux, leurs passions sont extériorisées. Ces plans en extérieur concernent bien évidemment aussi les scènes de bataille et expriment la symétrie initiale tissée entre les ravages de l amour et les déchirements de la guerre. Le réalisateur et cinéphile ne cache pas que cette prédilection lui vient de son admiration pour le western, John Ford d une part et Akira Kurosawa d autre part, grands réalisateurs, ayant orchestré des scènes de batailles magistrales. Betrand Tavernier a donné un rôle très important aux paysages, à la fois en déplaçant en extérieurs des scènes intimes (les dialogues entre Marie et Chabannes) et en intercalant des scènes de chevauchées qui extériorisent les passions des personnages (Montpensier ou Marie). Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 18

19 On pourra enfin dire un mot sur la musique de Philippe Sarde. Elle privilégie l atmosphère du XVI e siècle par rapport à celle du XVII e siècle, en s inspirant des compositeurs baroques de l époque comme Rolande de Lassus, mais s attache à faire résonner l Histoire dans le présent, en ajoutant les percussions qui lui donnent une dimension plus contemporaine. II. Comment le film historique relit-il la nouvelle historique? Dissertation : Le travail de l adaptation a. Madame de la Fayette : une nouvelle qui s appuie sur l Histoire La question de la fidélité nous conduit à comparer aussi la représentation de l Histoire dans la nouvelle et dans le film. Madame de Lafayette inscrit à dessein sa nouvelle dans un cadre historique, se démarquant en cela du roman précieux, comme l indique l avertissement au lecteur de l édition de 1662 : «L auteur ayant voulu, pour son divertissement, écrire des histoires inventées à plaisir a jugé plus à propos de se servir des noms connus dans nos histoires que de se servir des noms connus dans nos romans». On sait qu elle s est inspirée de l Histoire des guerres civiles (1644) de Davila mais aussi de l Histoire de France depuis Faramond de Mézeray ( ), notamment pour cerner la biographie du duc de Guise : Guise avait aimé Marguerite de Navarre et espérait l épouser, puis il s éprendra de la marquise de Noirmoutiers, et son son frère Mayenne devait épouser l héritière et la fille unique du duc de Mézières. C est à partir de ces éléments, qu elle imagine la passion contrariée entre Guise et Marie de Mézières, personnage semi-fictif, et qu elle invente le personnage de Chabannes. On sait aussi que sa proximité avec Mademoiselle de Montpensier, la descendante de son héroïne, lui a fourni des indications sur Champigny, devenu château de Richelieu en 1635 puis restitué à mademoiselle de Montpensier en 1658 après une longue bataille judiciaire (Elizabeth Goldsmith, «Les lieux dans l Histoire de la Princesse de Montpensier», revue XVII e siècle, n 181, oct-déc 1993, p. 712). On voit donc que la nouvelle s appuie sur un substrat historique, celui des guerres de religion et du règne de Charles IX, avec un souci d exactitude renforcé par la proximité entre les faits relatés et le lecteur (séparés d à peine un siècle). Pour autant, Mme de Lafayette ne s intéresse pas à l Histoire en tant que telle (à la différence d un Dumas dans La Reine Margot par exemple), celle-ci ne sert que de toile de fond et de deus ex machina qui permet d organiser l éloignement ou la rencontre des personnages selon les besoins de l intrigue. Elle ne porte pas non plus de point de vue moral sur la guerre et ses ravages (ses «désordres» mis sur le même plan que ceux de l amour) : celle-ci forme le quotidien et l ordinaire des princes, et les personnages masculins y voient moins un danger (à l exception d une mention entre la deuxième et la troisième guerre de religion quand la narratrice glisse : «Ce ne fut pas sans une douleur extrême qu il quitta la princesse, qui de son côté demeura fort triste des périls où la guerre allait exposer son mari.» p. 47) que l occasion d y acquérir la «gloire» qui va les distinguer. Ce n est qu à la fin de la nouvelle que la narratrice imprime son point de vue, à l occasion de la Saint Barthélémy : «horrible dessein», «pour les mieux tromper», «exterminer les huguenots», «horrible massacre», «le pauvre comte de Chabannnes», Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 19

20 «ruine des huguenots», «cette même nuit qui fut funeste à tant de gens». On peut risquer l hypothèse que c est parce que le massacre des protestants lors de la Saint Barthélémy est un acte barbare qui n obéit à aucune des règles de guerre, jusqu alors établies. b. Le seizième siècle retrouvé par Bertrand Tavernier Dissertation : Le travail de l adaptation Bertrand Tavernier est un cinéaste féru d Histoire, qu il a mis en scène à de nombreuses reprises dans ses films. Il cherche chaque film à plonger les spectateurs dans la réalité concrète et sensible d une époque, et se méfie d une reconstitution guindée et monumentale (dans le commentaire audio du film, il se réjouit que ses acteurs se débarassent de leurs costumes en les jetant par terre, montrant qu ils ne les considèrent pas comme des pièces de musée mais bien des habits de leur quotidien.) Au-delà de la source première que constitue la nouvelle, il a donc tenu à se documenter sur l époque à laquelle évoluaient ses personnages. Le cinéaste cite à plusieurs reprises l expertise décisive de l historien Didier Le Fur pendant la phase d écriture du scénario : c est ainsi l historien qui lui donne l idée de justifier la désertion de Chabannes par le meurtre d une femme enceinte. Pour se montrer plus proche de l esprit du XVI e siècle, le film s affranchit ainsi du respect de la «bienséance» propre à la littérature du siècle classique, notamment dans la mise en scène de la nudité (celle de Madame de Montpensier) et de la sexualité, et celle de la violence («Madame de Lafayette décrivait une époque de violence. ( ) Mais on ne parlait pas de choses horribles en littérature, surtout quand l auteur était une femme.») (Entretien avec Yves Alion, L Avant-scène cinéma n 646, octobre 2017). Dans la représentation des guerres de religion, le cinéaste prend un parti inverse à celui de Madame de Lafayette : s il reste muet sur les noms, les dates et les raisons des batailles, il nous plonge au cœur même des combats. On peut y voir l influence moderne de Stendhal (quand il décrit Fabrice à Waterloo dans La Chartreuse de Parme, perdu entre les fumées des boulets de canon, ne sachant quel camp il doit rejoindre), mais d une certaine manière Bertrand Tavernier est aussi fidèle à l Histoire (le fait que dans les batailles on ne puisse identifier les deux camps est attesté par l historien Didier Lefur). Le cinéaste montre En nous plongeant au cœur des combats, Bertrand Tavernier montre la guerre civile comme un chaos fratricide. Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 20

21 Dissertation : Le travail de l adaptation aussi l horreur et l absurdité d une guerre civile, se gardant de prendre fait et cause pour un camp ou un autre. S il montre le massacre de la Saint Barthélémy, la première tuerie est bien l œuvre de protestants, conduits par Chabannes. Mais autant que dans la représentation des batailles, l Histoire chez Tavernier se loge dans les arrière-plans et les détails : au détour d un plan, on aperçoit des femmes plumant des volailles ou travaillant en cuisine, des enfants qui jouent, des draps qu on plie dans la cour. Ce sont aussi des herbes que l on ramasse, du gibier qu on découpe, une rose dans un jardin. Il s agit en effet de rendre visible et sensible la vie au XVI e siècle, vie quotidienne qui n apparaît pas chez Mme de Lafayette qui ne s intéresse qu à l intrigue amoureuse et à ses personnages aristocratiques. Ces détails donnent son épaisseur historique au film, ils permettent également d enrichir sa lecture : voir Chabannes s essuyer avec la nappe nous rappelle qu il est assis à la table des domestiques, signe de son statut d infériorité par rapport aux autres personnages ; l arrière-plan des femmes plumant une oie peut être lu comme un commentaire ironique de la scène au cours de laquelle le cardinal de Guise se fait «plumer» par le duc de Montpensier et le marquis de Mézières. c. Des inspirations diverses Les détails signifiants, au premier ou à l arrièreplan, peuvent passer inaperçus. Mais ils donnent de l épaisseur à la représentation de l Histoire tout en enrichissant la lecture des personnages. On peut lire de nombreuses références culturelles au XVI e siècle dans le film de Bertrand Tavernier : la mise en scène de la guerre, avec sa dimension absurde et bestiale, retrouve le climat fratricide qui se dégage parfois de la poésie d Agrippa d Aubigné ou même de Ronsard, lorsqu ils décrivent les guerres de religion. Le personnage de Chabannes apparaît lui comme un modèle d humaniste, poète, musicien, astronome plus qu astrologue, précepteur à la «tête bien faite» comme dirait Montaigne. Mais le cinéaste ne se prive pas d enrichir la lecture de la nouvelle par en puisant son inspiration dans la littérature des siècles suivants : celui de Madame de La Fayette bien sûr, mais aussi le XIX e siècle. - Les références au XVII e siècle Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 21

22 Tavernier retrouve le XVII e siècle de Mme de Lafayette dans certaines séquences, celles par exemple qui mettent en scène les pères de Marie et de Philippe. Michel Vuillermoz campe en effet un paterfamilas tout moliéresque, égoiste et imbu de luimême, évoquant tour à tour Harpagon ou M. Jourdain. De la même façon le duel entre Montpensier et Guise interrompu par Anjou évoque à la fois la fable Les Deux coqs de La Fontaine et les duels du Cid de Corneille. Dissertation : Le travail de l adaptation - Les apports du XIX e siècle Tavernier s est aussi plongé dans Les Quarante-cinq de Dumas pour trouver ci et là des recettes ou des répliques qui donnent corps à ces dialogues ou monologues odieux et comiques. Surtout, il envisage les passions des personnages d un point de vue stendhalien. «Mme de Lafayette a consulté avant d écrire nombre d ouvrages historiques, travaillant comme un peu plus tard Alexandre Dumas. Elle annonce aussi Stendhal. Nous avons souhaité donner une dimension stendhalienne, sous-jacente dans le texte, aux personnages, car, si le langage est profondément différent, les passions sont identiques, prises entre désir et remords, peur et amour.» (p. 134). De fait ces quelques notes de Stendhal dans De l Amour, permettent de mesurer l apport presque inconscient dont il a pu nourrir le réalisateur, en dehors des grands héroïnes telles que Mme de Rênal ou encore La Sanseverina : «L amour- physique. À la chasse, trouver une belle et fraîche paysanne qui fuit dans les bois.» ; «Une valse rapide, dans un salon éclairé de mille bougies, jette dans les jeunes cœurs une ivresse qui éclipse la timidité, augmente la conscience des forces et leur donne enfin l audace d aimer.» ; «Rien n est plus favorable à la naissance de l amour que le mélange d une solitude ennuyeuse et de quelques bals rares.» Toutes ces références permettent de rendre la nouvelle plus lisible pour un public contemporain. III. Les buts du réalisateur sont-ils différents de ceux de Mme de Lafayette? a. Une nouvelle à visée moralisatrice chez Mme de Lafayette Avec sa nouvelle, Mme de Lafayette entend démontrer les conséquences néfastes de la passion, conformément à l esthétique classique du «Movere, Placere, Docere». La princesse de Montpensier, comme la comtesse de Tende sont des anti-princesses de Clèves, puisqu elles ne renoncent pas à l amour dans un geste sublime. De fait leur exemplarité est négative. Dans la nouvelle, les caractères sont ainsi beaucoup moins nuancés que dans le film. La princesse paraît souvent orgueilleuse, et bien cruelle à l égard de Chabannes dans sa froideur. Montpensier est décrit comme jaloux par nature («et par le sentiment d une jalousie qui li était naturelle» p. 46), Anjou comme un dissimulateur (il est souvent associé au verbe «feindre»). Guise Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 22

23 Dissertation : Le travail de l adaptation ne paraît pas sincère («il se mit à lui exagérer sa passion, et à lui faire comprendre qu il mourrait infailliblement s il ne lui faisait obtenir de la princesse la permission de la voir.» p. 71), quant à Chabannes c est sa faiblesse qui est pointée («L on est bien faible lorsqu on est amoureux.» p. 69). Tous cependant sont frappés par la passion qui les anime comme en témoigne le champ lexical de la violence lorsqu ils se découvrent rivaux. Cette peinture qui assigne à des puissants tant de défauts, vise à décrire l humain comme les moralistes du XVII e siècle à travers les célèbres formules «L esprit est toujours la dupe du cœur» (La Rochefoucauld) ou «Le cœur a ses raisons que la raison ne connaît point» (Pascal). b. Chez Bertrand Tavernier, des personnages nuancés Bertrand Tavernier refuse quant à lui, la portée moralisatrice de la nouvelle : «Je voulais gommer cette dimension de thèse, cette volonté moralisatrice. Et en corollaire, j ai refusé de faire mourir Marie à la fin.» (p. 132) Chez lui, c est la nuance qui prédomine. Ainsi Montpensier est-il décrit comme un jeune époux incapable d exprimer ses sentiments, ne sachant se faire aimer, maladroit et plein de colère rentrée. Guise est un homme d action impétueux, dont on devine qu il a du mal à réfréner son désir, mais capable de renoncer à ses amours avec Marguerite de Valois pour Marie, capable de sentiments comme lorsqu il pleure un de ses capitaines devant Anjou, Montpensier et Chabannes. Anjou, le fin politique, le séducteur qui pourrait passer pour un cynique, est sincèrement touché par Marie dont il interdit à l un de ses «mignons» de se moquer. Chabannes reste constamment à sa place, il paraît moins torturé que dans la nouvelle sans que pour autant sa passion soit démentie. La lettre finale inventée par le réalisateur révèle la maturité dont il fait preuve. Marie est constamment déchirée entre sa vertu et sa passion, le film s attache à montrer que ce sont les maladresses et la brutalité de son époux qui la jettent dans les bras de Guise. Ainsi ces personnages «ni tout à fait coupables, ni tout à fait innocents» (là encore conformément à l idéal classique) se retrouvent à jouer une tragédie, moins lointaine et plus sincère que ne le laissait présager le projet d adaptation. c. Et la condamnation d une société Le film ne condamne pas la passion éprouvée par ses personnages, mais bien la violence d une société qui les opprime. Ce que le film dénonce quelque chose, c est le patriarcat qui réduit les femmes à de simples marchandises (comme Marie et Catherine de Lorraine), qui privé d éducation et de liberté ces jeunes âmes bien nées. Les seuls personnages négatifs sont ainsi les parents, et surtout ces pères dénaturés qui ne pensent qu à leur intérêt et à leur bon plaisir, auxquels ils sacrifient femmes et enfants. Ainsi en adaptant la nouvelle, à la manière d une «éducation sentimentale», Tavernier rend sensibles les échos contemporains qu entretient son film avec notre époque. On pourra aller jusqu à dire que contrairement à la nouvelle qui condamne exclusivement la passion, le film défend celle-ci à travers le personnage de Chabannes dont la voix résonne par delà les frontières de la mort, scène qui porte au sublime le Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 23

24 renoncement. S il y a bien une princesse de Clèves chez Tavernier, c est Chabannes. Le dernier regard que semble jeter Marie au spectateur vaut comme une leçon de la part de celle, qui aveuglée par sa passion, accède finalement à une connaissance supérieure, celle de soi et des autres. Conclusion Dissertation : Le travail de l adaptation On voit que tout en restant globalement globalement fidèle à la narration de la nouvelle, Bertrand Tavernier parvient à y glisser sa passion de l Histoire (par une représentation riche et pittoresque du XVI e siècle) et ses goûts cinématographiques (John Ford et Akira Kurosawa). Mais il modifie aussi sensiblement le sens de la nouvelle et de ses personnages : en mettant au premier plan de personnage de Chabannes, modèle de «l honnête homme» et du sacrifice amoureux, et en ne portant pas de condamnation morale sur le personnage de la Princesse, il en livre une lecture beaucoup plus proche du spectateur du XXI e siècle. Ce faisant, il ne procède pas différemment de Madame de Lafayette, qui puise dans l Histoire du siècle précédent pour créer un nouvelle adaptée aux attentes et au goût de ses contemporains. Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 24

25 Dissertation : Guerre et amour Pour commencer : 1. Situez, décrivez et analysez les photogrammes suivants : Dissertation : Guerre et amour Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 25

26 2. Quels sont les séquences dans le film qui mettent en scène des combats? Correspondent-ils aux épisodes dans la nouvelle? Quels sont leurs enjeux? 3. «Pendant que la guerre civile déchirait la France sous le règne de Charles IX, l amour ne laissait pas de trouver sa place parmi tant de désordres, et d en causer beaucoup dans son empire.» Commentez cet incipit de la nouvelle. Quelle métaphore est tissée? Quelle portée peut-on lui donner dans le texte et son adaptation? Introduction Dissertation : Guerre et amour L incipit introduit les deux thèmes majeurs de l œuvre : la guerre et l amour. L un est conditionné par le choix de la période historique, l autre par la mode littéraire de l époque. Ce n est pas par hasard si Madame de La Fayette situe l intrigue sous Charles IX, l un des derniers Valois : les années vivent dans la nostalgie de cette époque, où les grands personnages semblent briller aussi bien à la guerre que dans les passions amoureuses. La premier phrase de la nouvelle construit en réalité une métaphore qui réactive un topos. En effet, il est courant, dans la tradition littéraire, de comparer l amour à la guerre. On retrouve d ailleurs souvent, dans la nouvelle, le lexique guerrier pour évoquer l amour, comme par exemple à la page 44 : «il lui donna l envie de parler, et, après tous les combats qui ont accoutumé de se faire en pareilles occasions, il osa lui dire qu il l aimait.» Cependant, Madame de La Fayette va plus loin : elle semble sous-entendre que l amour est plus sanglant que la guerre. Dans le film, la guerre aussi est première : la séquence d ouverture se situe sur un champ de bataille. Blessés, morts, fantassins frappés par derrière, civils massacrés, enfants, femme enceinte poignardée : Bertrand Tavernier illustre ici ce qui le frappe dans le début de la nouvelle, en l occurrence les mots «guerre civile» «déchirait», «désordres». Chabannes, fil conducteur du film, y est montré commettant un crime de guerre, à partir duquel son existence bascule : il se retire de la guerre, comme la princesse se retirera de l amour à la fin du film (comme le souligne Marie en voix off). Chabannes, valeureux guerrier, devient ainsi l amant parfait, avant de redevenir un guerrier. Il en va donc de la guerre comme de l amour : ils s apaisent et reprennent «avec la soudaineté d un feu de broussailles mal éteint». Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 26

27 I. La structure Cette relation intime entre la guerre et l amour se construit tout au long de la nouvelle comme du film. Cependant, là où Madame de La Fayette respecte rigoureusement les données historiques pour rythmer sa nouvelle, le réalisateur se fait plus suggestif, en réduisant la place des scènes de bataille. a. La guerre empêche l amour Dissertation : Guerre et amour L intrigue est rythmée par l absence des hommes : lorsque la guerre fait rage, l amour est mis en suspens. De fait, la guerre empêche le prince et la princesse de faire connaissance et de bâtir une vie conjugale digne de ce nom. Ainsi, peu de temps après les noces, Marie est-elle privée de son mari parti à la cour «où la continuation de la guerre l appelait» p. 43, puis le retrouve «après deux années d absence, la paix étant faite» p. 45, mais «la paix ne fait que paraître» et «le prince de Montpensier fut contraint de quitter sa femme» p. 47, puis de nouveau «après que les deux armées se furent fatiguées par beaucoup de petits combats», «le prince de Montpensier [ ] s en alla à Champigny» p. 48. Lorsque la période de paix se prolonge et favorise les noces, le mariage entre le prince et la princesse est trop fragilisé pour durer. Dans le texte, les extraits qui rapportent les événements historiques apparaissent comme des intermèdes, qui obéissent à des lois différentes de l intrigue principale. Non seulement ces passages offrent un cadre qui répond à l intérêt de l époque pour la chronique, tout en permettant une contamination qui sape le caractère purement fictionnel, et donc condamnable, de la nouvelle, mais surtout ils correspondent à une sorte de pause qui retarde le nœud de l action en dilatant le temps, et avive l intérêt du lecteur. Bertrand Tavernier, quant à lui, simplifie ce schéma en alternance, sans doute autant pour des raisons d efficacité dramaturgique que pour des raisons de production. Les scènes de guerre sont courtes, peu nombreuses et de peu d ampleur. La première et la dernière concernent Chabannes, mais leur qualification de scène de guerre est discutable. En effet, la première se situe alors que les combats sont terminés, et la dernière est mise en scène dans une ville il s agit davantage d un combat de rue. Le seul épisode de scène de guerre dure à peine cinq minutes, et interrompt, avec cette logique d intermède, la vie de Marie à Montsur-Brac. Le spectateur revient une fois sur le champ de bataille, mais côté coulisses, dans la tente royale, lorsque Chabannes rejoint le prince. Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 27

28 b. La guerre stimule l amour Dissertation : Guerre et amour Si la guerre sépare les amants, elle entretient tout aussi bien le désir. En effet, le retour du prince est un événement pour la princesse. Celle-ci, tout sourire, domine la campagne et guette la chose depuis la terrasse du château. Mais surtout, la guerre stimule l amour, car l épique provoque l admiration de la femme aimée et ravive le désir par l éclat des hauts faits. C est la gloire d un Rodrigue qui permet à Chimène d épouser l assassin de son père chez Pierre Corneille. Dans la nouvelle de Madame de La Fayette, l héroïsme est partagé : par exemple, «le prince de Montpensier revint trouver la princesse sa femme tout couvert de la gloire qu il avait acquise au siège de Paris et à la bataille de Saint-Denis.» p. 46. De même, alors que la princesse est avec Chabannes à Champigny, «elle lui reparla [ ] de l inclination qu elle avait eue pour M. Guise, et la renommée commençant alors à publier les grandes qualités qui paraissaient en ce prince, elle lui avoue qu elle en sentait de la joie, et qu elle était bien aise de voir qu il méritait les sentiments qu elle avait eus pour lui.» p. 45. Dans la film, la séquence où l on apprend ces hauts faits par un colporteur, montre l intérêt que prend la princesse aux exploits de Guise. (à la 59 e minute) Le prince monte rapidement la première partie des escaliers, et ralentit en arrivant auprès de sa femme : son attitude et son regard disent son respect, son bonheur, son impatience, mais aussi sa timidité. S ensuit une nuit d amour. c. La guerre et l amour révèlent les personnages : sur le champ de bataille comme dans l intimité (à la 49 e minute) Marie sourit aux exploits de Guise. Déjà Chabannes met en doute l absence de sentiments que Marie prétend avoir. Les deux circonstances semblent a priori opposées : la guerre sépare les sexes, là où l amour les réunit. Cependant, les hommes ont tendance à adopter le même comportement dans les deux cas. Autrement dit, ils mènent leurs combats guerriers comme ils mènent leurs intrigues amoureuses. Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 28

29 Guise contre Montpensier Dissertation : Guerre et amour L opposition la plus radicale concerne les deux rivaux : le mari et l amant. L opposition apparaît la plus éclatante dans le film. En effet, dès que Montpensier rencontre Guise, c est pour se battre. Le premier duel, qui n est qu une guerre sur le mode mineur, est prémonitoire même s il est amical : les séquences où ils se côtoient sont toujours des scènes de confrontation violente. D ailleurs, le deuxième duel, alors qu ils sont à la Cour à Blois, constitue l acmé de leur opposition. Le film met aussi en scène efficacement les jeux de regard. Le jeu de Grégoire Leprince-Ringuet est à ce point de vue remarquable : sa jalousie maladive le présente sans cesse aux aguets. De manière générale, le film est fidèle aux péripéties contées par la nouvelle. La seule exception concerne la fin : dans le film, c est le prince qui annonce à Marie la trahison de Guise, ce qui renforce cette haine décrite au début de la nouvelle ( «il en naquit entre eux une haine qui ne finit qu avec la vie» p. 41). Cette opposition qui prend pour objet l héroïne, est surtout le fait de deux caractères diamétralement antagonistes. De fait, le prince est un jeune homme timide, maladroit avec sa femme. De même, il est mal à l aise avec ses officiers : c est ce qu il confie à Chabannes qu il fait venir auprès de lui comme secrétaire. De son côté, Guise est passionné, séducteur et bouillant chef de guerre. Il se présente «fidèle à ses sentiments», qu il s agisse de sa foi ou de son roi, lors du repas à Mont-sur-Brac ; face à Marie, l implicite est limpide. Il n hésite pas d ailleurs à caresser le visage de Marie dans l antichambre de la reine. Cette fougue sonne en réalité comme un avertissement pour la princesse. De la même manière que le prince prépare la paix en incarnant l idéal, quelque peu anachronique, d amour conjugal, Guise est toujours en guerre, sur le champ de bataille ou dans des duels. Son visage souvent ensanglanté incarne la passion mortifère et dangereuse. Anjou avertit ainsi Marie lors de leur première rencontre : le cousin «excelle» dans la chasse et à la guerre, autrement dit c est un chasseur dans tous les sens du terme. Relance-t-il la princesse par orgueil personnel? Lorsque la princesse vient l entretenir pour la dernière fois, le duc de Guise lui explique : «Vous étiez comme une biche apeurée au milieu de nous.» Anjou contre Chabannes Une autre opposition se fait jour, mais beaucoup moins violente dans les faits : le prince et l humaniste. C est un couple célèbre dans la vie intellectuelle du XVI e siècle : la plupart des humanistes ont rédigé un manuel à l usage du prince afin de le guider dans le délicat exercice du gouvernement. L opposition entre le comte et la famille royale est racontée dès le début de la nouvelle : la bonne foi de Chabannes est mise en doute par la reine mère («la reine mère Catherine de Médicis en eut de si grands soupçons que, la guerre étant déclarée par les huguenots, elle eut dessein de le faire arrêter.» p. 43) Peut-être que cette méfiance est imaginée par le narrateur pour rendre plus vraisemblable le retrait du comte à Champigny. Mais c est sans doute dans le film que cet antagonisme prend toute sa dimension, puisque Chabannes en humaniste est une «invention» de Bertrand Tavernier. Lors de la première rencontre d Anjou et de Chabannes, le sujet de la trahison construit au début est réactivé : le prince y joue au chat et à la souris avec le comte. Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 29

30 Dissertations : Guerre et amour Henri d Anjou est présenté dans cette séquence comme le chef des armées. De manière générale, la solitude de Chabannes contraste avec ce prince sans cesse entouré de ses mignons, comme en témoigne par exemple la séquence à Mont-sur-Brac, où Henri partage sa chambre avec ses hommes. Dans ce monde, Chabannes n est rien. Il incarne une voix discordante dans ce monde belliqueux, celle de l humaniste, en commentant son expérience parmi les Huguenots, lors du dîner à Mont-sur Brac. Le relativisme dont il fait preuve, teinté de pacifisme, rappelle ainsi Montaigne et Erasme. En matière de galanterie, le caractère d Anjou et de Chabannes suit la même logique : l un incarne un amour platonique idéalisé, où une oreille fidèle succède à un seul aveu, et ce jusqu au sacrifice, l autre ne cesse d «attaquer» Marie par de multiples compliments au vu et au su de tous, en homme qui se sait supérieur. De plus, dans l intrigue amoureuse principale, il se présente plutôt comme un adversaire de Marie, contrairement à Chabannes : dans la nouvelle, il attise la jalousie de Marie par son discours («Il vous trompe, Madame, et vous sacrifie à ma sœur comme il vous la sacrifie.» p. 63), dans le film, il l humilie en présence de son mari, en révélant à demi-mot sa trahison. Il agit donc en chef et maître du jeu, habitué à diriger les destinées, implacable dans ses décisions, tout en entier dans l action. (à la 58 e minute) Anjou accorde finalement sa confiance à Chabannes, avec ces sauts d humeur que Raphaël Personnaz rend si bien. La prédominance de la couleur rouge, celle du costume et celle de la tente royale, met en valeur la supériorité d Anjou, maître de tous par son statut. Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 30

31 II. L amour meurtrier : une même morale dans la nouvelle et dans le film? La métaphore construite au début de la nouvelle paraît mettre sur le même plan les dangers de l amour et ceux de la guerre. Même si cette comparaison paraît hyperbolique, la nouvelle qui se clôt avec la mort de la princesse, avec sa clausule moralisatrice, souligne bel et bien l aspect mortifère de la passion. a. Les personnages punis? Dissertation : Guerre et amour Comme le remarquent Rohou et Siouffi dans Lectures de Madame de La Fayette, la vision de l amour apparaît bien sombre dans cette nouvelle. Fidèle à l augustinisme de l époque, l écrivain semble condamner sans appel la passion : «la passion amoureuse conduit au malheur, principalement pour les femmes, victimes à la fois de l autorité parentale et maritale, et de l ingratitude des amants.» (p. 37). La dernière phrase, avec l irréel du passé de sa proposition hypothétique «si la vertu et la prudence eussent conduit toutes ses actions» p. 80, ne laisse aucun doute sur cette condamnation. La princesse est punie de s être laissée submerger par ses sentiments, d avoir cru en l amour. Et pourtant, même Chabannes guidé par la vertu et la prudence, s est retrouvé puni, ce qui rend cette clausule quelque peu ambiguë. D ailleurs, seuls ces deux personnages meurent, ce qui semblent les relier au-delà de la mort : tout amour, qu il soit mené avec vertu ou avec déraison, mène à la mort. Dans le film, la punition s estompe largement. Marie, par la force de son caractère, la transforme en déclaration d indépendance. C est le sens de ces plans où elle chevauche seule dans ces grandes étendues. (À la 51 e et la 128 e minutes) Ces plans larges rappellent ceux où Chabannes chevauche seul au début du film. La force du paysage semble contaminer le personnage et le dynamisme du cheval lui permet de surmonter son malheur. Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 31

32 b. La prégnance de la mort Dissertation : Guerre et amour La fin des deux œuvres baigne dans une ambiance similaire. Le dernier événement historique en constitue le cadre : il s agit de la «ruine des huguenots» (p. 79), en l occurrence le massacre de la Saint-Barthélémy en La mort plane ainsi sur cette fin. Le prince disparaît de l intrigue, sans qu on sache ce qu il advient de lui après la mort de sa femme : le lecteur le sait juste atteint d une «douleur mortelle» (p. 77). La vie de Guise est résumée rapidement «jusques à la mort» (p.79), alors même que depuis l épisode du bal le lecteur sait que sa mort est décidée par Anjou («souvenez-vous que la perte de votre vie sera peutêtre la moindre chose dont je punirai quelque jour votre témérité» p. 61 ; ici Madame de La Fayette semble broder à partir d un fait historique, qui est l assassinat de Guise par Anjou devenu roi de France sous le nom d Henri III, lors de Etats généraux de Blois en 1588). Avec la princesse et Chabannes, c est donc tout un monde qui disparaît, ce qui ne dénote pas avec la nostalgie dont fait preuve le narrateur par rapport à cette époque. Bertrand Tavernier, quant à lui, est fidèle à cette ambiance funèbre : la dernière séquence, où Marie vient se recueillir sur la tombe de Chabannes, est un ajout pur et simple par rapport à la nouvelle. Conclusion (À la 134 e minute) Le deuil est mis en scène par le lieu, qui marque la solitude et le retrait du monde, par la saison et par les choix esthétiques : le noir est mis en valeur par la blancheur de la neige, les plans fixes où Marie chemine vers la caméra comme si elle marchait vers la mort, la musique sombre et majestueuse qui est une réorchestration d un psaume du compositeur Roland de Lassus. La voix off de Marie succède à celle de Chabannes dans un effet de contamination du monde des vivants par celui des morts. La première phrase de la nouvelle permet aussi bien de construire la cohérence du genre et de l intrigue, que d organiser le système des personnages et d établir une signification, en l occurrence une condamnation des passions. Le film, tout en respectant cette organisation, modifie, en modifiant la fin, la morale de l œuvre : malgré une même ambiance funèbre, Bertrand Tavernier valorise le personnage de la princesse, sans jamais la condamner. Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 32

33 Dissertation : Le personnage de Chabannes Dissertation Le personnage de Chabannes Pour commencer : 1. Situez, décrivez et analysez les photogrammes suivants : 2. Comparez la nouvelle et le film : quelle est la première apparition de Chabannes? Et la dernière? Quels changements opère Bertrand Tavernier par rapport à la nouvelle de Madame de La Fayette? 3. Chabannes est-il catholique ou protestant? 4. Quel amoureux est-il dans la nouvelle et dans le film? Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 33

34 Introduction Dissertation : Le personnage de Chabannes Le personnage de Chabannes, que ce soit dans la nouvelle de Mme de La Fayette ou le film de Bertrand Tavernier, apparaît comme singulier. C est le seul personnage qui soit fictif, même si le nom est historique, puisqu une certaine Antoinette de Chabannes était la grand-mère de l historique princesse de Montpensier. De manière générale, la comparaison entre la nouvelle et le film permet de constater un vaste processus d amplification. En effet, ce personnage n a ni la royauté du duc d Anjou, ni l héroïsme de Guise, ni la légitimité de Montpensier, il n est jamais un rival sérieux du prince de Montpensier. Il apparaît ainsi comme en marge de l intrigue dans la nouvelle. Et pourtant, c est un personnage qui devient quasiment le héros du film. De fait, Bertrand Tavernier ouvre et ferme son œuvre avec lui. Il en fait même une sorte de fil conducteur de l intrigue, confident de la princesse et du prince, présent aussi bien à Mont-sur-Brac pour l instruction de Marie, qu à la guerre comme secrétaire particulier du jeune prince. I. Un personnage secondaire? La lecture de la nouvelle laisse facilement penser que le comte est un personnage secondaire dans l intrigue : c est l amoureux transi qui ne peut vraiment rien espérer en retour. Pourtant, le réalisateur Bertrand Tavernier, à la suite du scénariste François- Olivier Rousseau (premier à s atteler au travail de l adaptation), amplifie considérablement la place de ce personnage, au point que celui-ci dispute à la princesse sa première place. a. Première apparition Dans la nouvelle, Chabannes apparaît tardivement, après l introduction de tous les personnages, et alors même que l intrigue est déjà bien avancée : Mlle de Mézières s est résignée à obéir à ses parents et à épouser le prince de Montpensier. De plus, sa présentation dépend d un autre personnage : «Le prince de Montpensier, dans sa plus grande jeunesse, avait fait une amitié très particulière avec le comte de Chabannes.» (p. 42) A contrario, dans le film, Chabannes est le premier personnage introduit et les dix premières minutes lui sont exclusivement consacrées. Lambert Wilson y campe un soldat vaillant et sans pitié. Son apparition est spectaculaire, par le rythme échevelé et le suspense. Si le premier plan, assez long, «traîne» la caméra, en travelling latéral, en filmant d abord les corps des soldats morts, puis par un effet d amplification, le champ de bataille déserté où se côtoient les blessés pêle-mêle, soudain surgissent des cavaliers qui procèdent à une attaque surprise et la caméra leur emboîte le pas. Puis, elle «saute» sur un groupe de cavaliers caché dans le sous-bois, qui les prend en chasse. Elle suit alors les poursuivants selon un rythme toujours effréné. Enfin, par un retournement brusque, par un effet de contre-champ, Chabannes apparaît. Cette première introduction est donc marquée par l épique, le suspense et une impression d urgence, qui contraste fortement avec ce que sera le personnage dans la suite du film. Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 34

35 Dissertation : Le personnage de Chabannes b. La mort de Chabannes Dans la nouvelle, la mort de Chabannes précède de peu celle de la princesse. Le narrateur, pourtant par ailleurs avare en modalisation, qualifie le personnage de «pauvre» (p. 78), ce qui témoigne d un certain pathétique. Son sort participe du même registre : Chabannes y est tué lors des massacres de la Saint-Barthélémy, presque victime d une méprise. Bertrand Tavernier, quant à lui, juge cette mort indigne du personnage et refuse ce pathétique. Il conserve de fait la circonstance historique, mais dans le film le comte meurt de manière glorieuse, en sauvant une vieille femme attaquée par les Catholiques. Chabannes, par sa mort, rachète ainsi le meurtre de la femme enceinte qu il a perpétré au début du film : c est l héroïsme de son sacrifice qui est mis en scène. Il redevient donc à la fin du film le soldat courageux qu il était au début. Il est à noter que c est, dans le film, le seul personnage qui meurt, ce qui ne manque pas de lui donner un certain relief. c. Le rôle de Chabannes dans l intrigue Les apparitions de Chabannes au sein de la structure des œuvres diffèrent fortement. Dans le film, le comte est le personnage qui est de loin le plus présent dans le champ. A l exception de quelques scènes, comme la scène de bataille au milieu du film ou les tête-à-tête amoureux, il est témoin de tous les événements. C est même lui que suit le spectateur. Ainsi, pendant onze minutes, il est seul dans le champ. Puis apparaît le prince de Montpensier qu il suit jusqu au château de Mézières. Il assiste au mariage des princes. Sa position de confident est sans cesse rappelée par sa présence dans le champ : peu de plan où le prince de Montpensier ne figure sans lui. Lorsque le prince laisse sa femme à Mont-sur-Brac, Chabannes reste avec le spectateur à ses côtés et devient son confident. Lorsque le comte est appelé par le prince sur le champ de bataille, le spectateur quitte la princesse au profit de la tente royale. Au Louvre, sa présence se fait plus discrète mais toujours marquée. Il exhorte, par exemple, la princesse à la retenue après son tête-à-tête avec Guise. Dans la dernière partie du film, la séquence qui le concerne, alors qu il travaille humblement dans Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 35

36 (À la 57 e minute) Dans cette scène où Chabannes n a rien à faire, sa présence à l arrière-plan rappelle son intimité avec le prince et conforte son rôle de témoin des événements. Ce plan annonce la séquence suivante où les mêmes quatre personnages dîneront autour de la princesse, tous amoureux d elle. Dissertation : Le personnage de Chabannes une auberge, est plus longue que celle qui suit la solitude de la princesse à Mont-sur-Brac. Or, le lecteur de la nouvelle peut avoir l impression lors d une première lecture rapide que le comte est introduit, puis «oublié» par le narrateur. C est parce que Chabannes n accompagne pas le prince et la princesse à la cour ; il ne réapparaît donc que lorsque la princesse est exilée par son mari à Champigny, à partir de la page 67. Et pourtant, le texte de la nouvelle laisse une place importante à l intimité qui unit Chabannes et la princesse, mais toujours avec cet art de la retenue et de la condensation qui a rendu Madame de La Fayette célèbre. D une certaine manière, Chabannes correspond au rôle du confident du théâtre classique, recueillant les aveux, machinant les stratagèmes pour réunir les amants. A la seule différence qu il tombe éperdument amoureux de la princesse. II. L amoureux parfait Parmi toutes les manières d aimer que met en scène Madame de La Fayette, Chabannes incarne un amour parfait. C est lui seul, en effet, qui connaît véritablement le caractère de la princesse. Et cet amour passionné le mènera au sacrifice, puisqu il ira jusqu à servir son rival Guise dans sa relation avec la princesse. Dans l exploitation de ce thème, la nouvelle et le film sont à l unisson. a. A l opposé du prince : le double de Marie Dans l ensemble du film, Chabannes fréquente assidûment la princesse : il apparaît comme le mari idéal. La progression apparaît particulièrement spectaculaire, puisqu il dispose au départ de la même situation que le prince de Montpensier. La séquence de la voiture l illustre bien. Peu après, le prince est obligé de partir et Chabannes connaît une longue période d intimité avec Marie : ensemble ils travaillent, se baladent, regardent les étoiles, se font des aveux (l une avoue son amour ancien pour Guise, l autre son amour pour la Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 36

37 Dissertation : Le personnage de Chabannes princesse). Cette partie du film dure une vingtaine de minutes, brièvement interrompue par une séquence de combat. Or, cette compréhension immédiate et naturelle est préparée par le narrateur dans la nouvelle, car Chabannes est le seul des trois amoureux à bénéficier, au début, d un portrait élogieux. À la beauté de la princesse répond la vertu de Chabannes : «ce comte, étant d un esprit fort sage et fort doux, gagna bientôt l estime de la princesse» p. 43. Le narrateur décrit ensuite une relation sans cesse plus intime, en généralisant un lexique axiologique fort : «amitié» (utilisé deux fois), «admiration», «vertu» (utilisé trois fois en trois paragraphes), «extraordinaire», «grandeur», «respect», «confiance», «sincérité». L on songe à l intrigue de La Princesse de Clèves, où l héroïne, fraîchement mariée, découvre son alter ego lors du bal de la cour, le duc de Nemours, et en tombe tout de suite amoureuse. b. L amoureux platonique (À la 27 e minute) Le prince et la princesse fraîchement mariés se rendent sur leur terre, accompagnés de Chabannes. Le premier échange entre les époux a lieu en route, à travers la fenêtre du carrosse, de manière maladroite et inconfortable. A ce moment-là, le prince comme Chabannes sont des inconnus pour Marie : le surcadrage en témoigne. L amour que porte Chabannes à la princesse est marqué du sceau de l idéal courtois, dont les valeurs galantes du XVII e siècle sont les descendantes. Il sait son amour impossible. En effet, tout les sépare : l âge, le rang nobiliaire, la fortune, mais aussi l absence de réciprocité en amour. Le narrateur conte avec une certaine ironie la fatalité de cet amour dans le passage au présent de vérité générale : «il ne put se défendre de tant de charmes qu il voyait tous les jours de si près. Il devint passionnément amoureux de cette princesse et, quelque honte qu il trouvât à se laisser surmonter, il fallut céder, et l aimer de la plus violente et de la plus sincère passion qui fut jamais. [ ] l amour fit en lui ce qu il fait en tous les autres.» p. 44. Or, il sera l éternel ami : il s agit du «plus parfait ami qui fut jamais» p. 80. Son attitude est marquée par un très grand respect, qui s oppose par exemple à la sensualité de Guise, qui ne peut rencontrer la princesse sans la toucher. C est lorsque l intrigue se noue entre la princesse et Guise qu il manifeste la plus haute idée d un amour platonique, rempli d abnégation. Il sert de fait d intermédiaire entre les amants, se faisant porteur de lettres, messager, et son amour se réalise alors dans «une générosité sans exemple» p. 75, quand il se sacrifie à la place de Guise. Le costume de Lambert Wilson renforce d ailleurs cette posture d austérité : il est toujours habillé de noir. La sévérité de son costume renvoie autant à son statut social secondaire, qu à son ancienne proximité Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 37

38 avec les Protestants. La princesse le moque gentiment : «Vous auriez dû vous faire prêtre», lui lance-t-elle, alors qu il vient de l exhorter à oublier Guise. Elle lui demande ainsi dans la foulée d être son «confesseur» pour lui avouer la flamme rallumée entre les anciens amants. Dissertation : Le personnage de Chabannes c. Le nouvel Orphée L amour que Chabannes voue à Marie se révèle une source de tourments sans fin, à l image de la douleur éternelle du poète légendaire de la mythologie grecque. La narratrice de la nouvelle développe longuement les détours de cette passion, en exploitant le lexique de la violence physique : «supplice», «tourmentait» p. 68, «poison imaginable», «maltraita» p. 69. Cette conception négative de la passion est à la mode dans l univers littéraire du classicisme, influencé par l augustinisme. Chabannes l illustre presque à l excès : «Cette intrigue secondaire manifeste un pessimisme encore plus radical que la principale, exprimé par une accumulation de malheurs qui frise l invraisemblance. [ ] Voilà [ ] comment l amour en a fait une victime de sa maîtresse, de son rival et de son meilleur ami, qui le croit bien plus coupable qu il ne l est.» (Jean Rohou et Gilles Siouffi, Lectures de Madame de La Fayette, p. 34 et 35) Or, cet amour, dans le film, connaît une sorte d apothéose, bien loin de la visée moralisatrice de la nouvelle. En effet, Chabannes devient une sorte de fantôme qui clôt le film. Dans la dernière séquence, Marie, habillée de vêtement de deuil, se recueille sur sa tombe, au sein d un lieu hivernal désert, qui semble éloigné de tout. La voix off termine la lecture de la lettre ensanglantée laissée à la princesse : c est une voix d outre-tombe. À l instar d Orphée dont l amour vainc la mort, Chabannes semble persuader Marie qu il est le seul qu elle aurait dû aimer. III. Un nouveau modèle de héros C est du point de vue symbolique que le travail d amplification mené par Bertrand Tavernier apparaît comme le plus conséquent. Le réalisateur exploite pleinement les détours du texte pour promouvoir un nouveau modèle héroïque, qui mêle les époques et les genres. a. Un personnage subalterne D une certaine manière, Chabannes ressemble à un héros de drame romantique. Sa valeur morale est bien supérieure à son statut social. En effet, c est le seul à appartenir à la petite noblesse : alors que tous les personnages sont soit prince, soit duc, Chabannes n est qu un comte. C est d ailleurs la première raison que lui objecte Marie lorsqu il lui avoue son amour : «Elle lui représenta en peu de mots la différence de leurs qualités» (p. 44). Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 38

39 (À la 22 e minute) Ce plan rend bien compte de la différence de statut. Alors que les mariés et leurs parents siègent à la table d honneur, Chabannes mange sur une petite table, en compagnie de la dame d honneur de la princesse. Cette relégation est d autant plus marquée que cette table se caractérise par le silence : Chabannes, homme instruit, n a pas voix au chapitre. Dissertation : Le personnage de Chabannes En raison de sa position subalterne, Chabannes a besoin de la protection de puissants parce qu il a changé de camp pendant les guerres de religion. L injustice de sa dépendance est soulignée par le contraste entre les âges : c est un homme tout jeune, le prince de Montpensier, qui le sauve et le protège. Et on retrouve là encore le modèle romantique, avec la figure du fugitif et du transfuge. Or, ce modèle connaît ses limites, car nulle rébellion de sa part, tout au contraire. C est ce dont témoigne la scène sur le balcon, de nuit, à Mont-sur-Brac, où le comte et la princesse observent les étoiles. CHABANNES : Moi, je pense, après tant de grands esprits qui se sont appliqués à comprendre leur mécanique céleste, donc divine, que les astres nous donnent un prodigieux exemple sur lequel régler nos sociétés. Asservis à des routes immuables, respectueux de la hiérarchie universelle qui maintient le faible dans l orbite du fort sans jamais l écraser, ils nous enseignent... MARIE : la résignation? CHABANNES : Non pas la résignation, la simple obéissance aux lois d équilibre et de modestie sans lesquelles d effroyables collisions se produiraient, entraînant d effroyables malheurs. (scénario du film, p. 148) Chabannes adopte ainsi la posture d une humilité chrétienne assez juste dans cet environnement intellectuel du XVI e siècle, baigné d auteurs antiques. b. La figure de l humaniste La nouvelle mentionne sobrement le rôle d éducateur du personnage, sorte de Pygmalion pour la princesse : «se servant de l amitié qu elle lui témoignait pour lui inspirer des sentiments d une vertu extraordinaire et dignes de la grandeur de sa naissance, il la rendit en peu de temps une des personnes du monde la plus achevée.» (p. 43). La formule ne manque pas d ambiguïté : Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 39

40 Dissertation : Le personnage de Chabannes s agit-il vraiment d une éducation «scolaire», comme le développera Bertrand Tavernier? Peut-être n est-ce qu une éducation morale. En tout cas, le réalisateur fait de Lambert Wilson un humaniste modèle. Ses connaissances sont encyclopédiques : le latin (il reprend Marie sur une traduction inexacte), l astronomie (il connaît le nom des étoiles en hébreu et en arabe), la botanique (il promet des plantes médicinales pour guérir les engelures), la théologie (il répond à Marie sur la question de la foi, en citant saint Jean Chrysostome et saint Paul), la chirurgie (il est capable de découper un sanglier). Il correspond également à l idéal antique du mens sana in corpore sano : c est un homme complet, capable de guerroyer et de jouer de la musique. C est par ailleurs un pédagogue à l image du modèle décrit par Montaigne : il se montre soucieux de son élève, soucieux de relier la connaissance à la vertu. c. Une figure de western Une source primordiale d inspiration pour Bertrand Tavernier, dans ce film comme dans l ensemble de sa filmographie, est le western hollywoodien classique, auquel il est fortement attaché dès le départ par le biais de son métier de critique. Ainsi, Chabannes apparaît de nombreuses fois en cowboy solitaire. La deuxième séquence du film, qui est celle du générique, valorise ainsi le cheminement du cavalier dans des plans larges, alors qu il évolue dans un décor naturel forestier. Cette «communion» avec la nature n est pas sans rappeler d ailleurs les errances d un autre héros de Bertrand Tavernier : celles de Bouvier, le criminel fou du Juge et l assassin (1976). L errance du comte n est expliquée qu a posteriori et renforce l héroïsme et la vertu du personnage. Elle se termine par une tentative de pendaison dans la plus pure tradition du western. (À la 7 e minute) Chabannes est victime de bandits de grand chemin, qui lui volent son épée et le détroussent, et manque d être pendu à un arbre. Il est sauvé in extremis par l arrivée inattendue du prince. Cette séquence aurait pu figurer dans un western. (À la 27 e minute) À plusieurs reprises, le comte est montré en train de prendre soin des chevaux, de les panser. Comme tout bon cowboy, il reconnaît dans le cheval un compagnon d infortune. Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 40

41 Conclusion Dissertation : Le personnage de Chabannes Le personnage de Chabannes apparaît par conséquent précieux pour comparer la nouvelle et le film. En effet, le réalisateur a fait le choix d étoffer considérablement ce rôle secondaire au point d en faire le véritable personnage principal de l œuvre filmique, en le chargeant d un héroïsme multiple : chevalier parfait, humaniste savant et sage, confident classique, héros romantique, cow boy à la John Wayne. La complexité du personnage est renforcée par son évolution et l ambiguïté de son parcours : meurtrier et sauveur, guerrier et pacifique, ami dévoué de la femme comme du mari. Lambert Wilson signe ici un de ces meilleurs rôles. Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 41

42 Dissertation : Les personnages féminins Dissertation Comment la nouvelle et le film représentent-ils les personnages féminins? Pour commencer : 1. Analysez la composition de l affiche du film 2. Situez, décrivez et analysez les photogrammes suivants : Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 42

43 Introduction Dissertation : Les personnages féminins La nouvelle de Mme de La Fayette et le film de Bertrand Tavernier partagent le même personnage féminin pour héroïne éponyme. Mais ils s inscrivent, à plusieurs siècles de distance, dans des contextes socio-culturels dissemblables : le statut de la femme, la signification du mariage, la conception de l amour, sont perçus de manière tout à fait différente par un lecteur du XVII e siècle et par un spectateur du XXI e. Si le film reste très fidèle au canevas de la nouvelle, il lui fait subir quelques inflexions notables (dont le refus très signifiant de faire mourir son héroïne) pour en gommer le moralisme «d œuvre à thèse» (ayant pour fonction, selon Bertrand Tavernier, de «prévenir les jeunes filles du danger de tomber amoureuse», Édition GF p. 132). Il profite également de ses silences et ellipses pour composer une héroïne plus complexe et moderne, et proposer un tableau plus riche du féminin à travers des personnages secondaires (comme Catherine de Guise ou la marquise de Mézières) simplement évoqués par la nouvelle. Ces modifications ont pour effet de détourner la critique de l héroïne vers celle d un système patriarcal qui étouffe les élans les plus sincères et broie les êtres les plus faibles. I. La femme comme objet de désir a. Une héroïne idéalisée : l héritage courtois Madame de la Fayette n a de cesse d insister sur les qualités exceptionnelles de son héroïne : au prestige de sa naissance («une héritère très considérable» p. 39, «la grandeur de sa naissance» p. 43) s ajoutent de grandes qualités morales («esprit» et «vertu» p. 43), et surtout une exceptionnelle beauté. Madame de La Fayette n est jamais à court de superlatifs pour exprimer celle-ci, qu elle soit posée par la narration comme un fait objectif (dans l incipit l héroïne porte déjà «les commencements d une grande beauté», lors du bal à la cour elle seule peut «disputer le prix de la beauté» à Madame), ou qu elle soit perçue à travers le regard de ses protagonistes masculins : par Chabannes («tant de beauté, d esprit et de vertu» p. 43, «tant de charmes» p. 44), par son mari Philippe («il fut surpris de voir la beauté de cette princesse dans une si grande perfection», p. 46), par Anjou et ses compagnons («une beauté qu ils crurent surnaturelle» p. 50), etc. Elle conclura d ailleurs la nouvelle en décrivant son héroïne comme «une des plus belles princesses du monde». Les personnages masculins ne sont pas en reste, dotés symétriquement de qualités propres à attirer l admiration : eux-mêmes de haute noblesse (Anjou appartenant même à la famille royale), ils se distinguent tous trois par leurs exploits guerriers. Cette idéalisation de l héroïne et de ses prétendants correspond aux codes de l amour courtois des romans de chevalerie, codes Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 43

44 Dissertation : Les personnages féminins repris par le roman précieux au XVII e siècle : comme le fait remarquer Odette Virmaux (Les héroïnes romanesques de Madame de La Fayette, Klincksieck, 1981), héros et héroïnes sont tous «beaux, bien faits, dignes d admiration.». «Tout nous rappelle que nous nous trouvons à la cour, c est-à-dire dans le milieu le plus fermé, le plus élevé, le plus élitaire qui soit.». On retrouve ces codes du roman précieux dans le désir que Marie éprouve pour Guise, dont elle est doublement séparée par l obstacle du mariage avec Montpensier et l obstacle de la guerre qui l éloigne. L adaptation de Bertrand Tavernier est fidèle à cette héroïsation : le film constitue un écrin pour la beauté de Mélanie Thierry, par le travail conjugué des lumières (qui mettent en valeur la clarté qui rayonne de son visage et de sa peau) et des costumes (pour lesquels le film a remporté son seul César) ; mais le cinéaste s est montré tout aussi attentif à sa distribution masculine, composant un quatuor de «jeunes premiers» (Gaspard Ulliel, Raphaël Personnaz, Grégoire Leprince-Ringuet) ou ex-jeunes premiers (Lambert Wilson) particulièrement séduisants. En les montrant (au moins pour trois d entre eux) physiquement engagés dans les combats, auquel le film consacre de longues séquences, il en fait des hommes d action et accentue leur dimension héroïque. Le film reprend ainsi fidèle à cette représentation de l héroïne comme d un astre autour duquel gravitent de brillants amants (cf la composition de l affiche du film), et plusieurs scènes reprennent les codes de l amour courtois : ainsi la scène du colporteur, ou la séquence au cours de laquelle où tous les protagonistes réunis à Mont-sur-Brac rivalisent pour obtenir les faveurs de l unique dame. b. La femme comme proie : la métaphore de la chasse La scène du colporteur reprend les codes de l amour courtois : en vantant les exploits de l amant absent, éloigné par la guerre, celui-ci ravive le désir de la dame. Mais le film donne un autre sens à ces codes : objet du désir des hommes, la princesse apparaît moins comme un idéal inacessible que comme une proie à posséder. Sur l affiche du film qui met en scène les cinq protagonistes, Marie de Montpensier n est pas sur un piédestal, dominant ses prétendants, comme dans les représentations traditionnelles de l amour courtois : elle est au contraire dominée par ces quatre silhouettes masculines qui l encerclent et la percent de leurs regards croisées, dans une mise en scène oppressante. Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 44

45 Dissertation : Les personnages féminins Le film multiplie les scènes où des corps d hommes se fraient un chemin jusqu à Marie, fondant (à l exception de Chabannes) sur elle comme des rapaces, à la cour comme à Mont-sur-Brac. Dans un monde masculin rythmé par la guerre, l amour apparaît comme sa continuation par d autres moyens, à l instar de la chasse (cf sa définition par Marie de Montpensier : «un plaisir pour ceux qui se reposent de tuer des hommes en sacrifiant cerfs et biches»). Dans la nouvelle on trouve une seule mention de la chasse, lors de la séquence sur la rivière : «Elle lui apprit qu étant partie de Champigny avec le prince son mari dans le dessein de le suivre à la chasse, elle s était trouvée trop lasse et était venue sur le bord de la rivière où la curiosité d aller voir prendre un saumon qui avait donné dans un filet l avait fait entrer dans ce bateau. M. de Guise ne se mêlait point de la conversation, et sentant réveiller dans son cœur si vivement tout ce que cette princesse y avait autrefois fait naître, il pensait en lui-même qu il pourrait demeurer aussi bien pris dans les liens de cette belle princesse que le saumon l était dans les filets du pêcheur.» (p ) On observe combien ici, à travers le regard de Guise, c est le masculin qui se rêve proie (on peut rêver aux multiples symboles de ce saumon, érotique, mais aussi spirituel, qui fascine la princesse comme Guise). Cette comparaison est conforme à la tradition courtoise, qui idéalise aussi bien l amant que la maîtresse et les met sur un pied d égalité. Or le réalisateur délaisse cette analogie entre féminin et masculin pour montrer la dissymétrie et l inégalité des rapports amoureux. Le dialogue explicite cette comparaison, Guise comparant Marie à une biche : «GUISE : Vous étiez autour de nous comme une biche autour du brame. MARIE : Nous? GUISE : Oui, nous, Montpensier, Anjou, moi. Cette rivalité m a poussé à obtenir MARIE : Ce que vous avez eu!» (126 e minute). Le film procède à une critique en règle du désir masculin, marqué par l inconstance (Guise), l instinct de propriété (Montpensier) ou le caprice (Anjou), mais surtout par une commune rivalité : à travers cet aveu, Guise révèle que c est moins Marie qu il poursuivait que le triomphe sur ses rivaux. De fait, le personnage féminin ne paraît que comme un faire-valoir pour ces hommes en quête permanente de pouvoir, incapables de sentiments véritables. Seul Chabannes échappe à cette opprobre, par la profondeur et le désintéressement de son amour pour Marie, qui éclatera dans sa lettre finale. Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 45

46 II La femme comme marchandise a. Un autre système de valeurs Dissertation : Les personnages féminins Le film, écrit et réalisé au XXI e siècle, s inscrit dans un horizon d attente totalement différent de celui de la nouvelle, écrite au XVII e siècle : alors que le «mariage d amour» est progressivement devenu la norme sociale et morale au siècle dernier, il est une exception (voire une anomalie) à l époque de Madame de La Fayette et a fortiori à celle de ses personnages. Le mariage arisocratique est à l époque une institution sociale, servant à la fois à nouer des alliances politiques, à constituer ou préserver des patrimoines, à assurer une descendance aux familles de la noblesse. Pour que l intrigue soit compréhensible par le spectateur contemporain, Bertrand Tavernier est obligé de la contextualiser en campant l arrière-plan socio-historique. Il le fait en développant une suite de séquences autour du mariage de la jeuneprincesse, simple incident déclencheur expédié en deux pages dans la nouvelle : d abord l entrevue amoureuse entre Marie et Henri (sous le regard de Mayenne et Catherine de Guise), l entreprise de persuasion du marquis de Mézières par le duc de Montpensier, la révolte de Marie et sa confrontation avec ses parents, la cérémonie nuptiale et le banquet de mariage, et enfin la nuit de noces Il explicite également la conception du mariage de l époque par une phrase placée dans la bouche de la marquise de Mézières (absente de la nouvelle mais empruntée à la correspondance de Madame de La Fayette) : «Ah ma fille, l amour est la chose la plus incommode du monde et je remercie le ciel tous les jours qu il nous ait épargné cet embarras à votre père et moi.» b. Une critique des pères et du système patriarcal À travers ces scènes, Bertrand Tavernier développe une critique acerbe du patriarcat, dans une veine réaliste qui contrebalance l idéalisation de l intrigue amoureuse. Pour ce faire, il donne chair aux pères de Philippe et Marie, absents de la nouvelle (qui utilise des termes génériques : la «maison de Bourbon», «les parents» ou l impersonnel : «L on travailla à cette affaire avec tant de succès»). Le cinéaste a pris un grand plaisir (évoqué dans le commentaire audio du DVD) à filmer ces scènes qui lorgnent vers le comique : ainsi de la longue séquence au cours de laquelle le duc de Montpensier (savoureux Michel Vuillermoz) fait feu de tout bois pour convaincre le marquis de Mézières de lui donner sa fille. Dans cette séquence comme dans les suivantes, les deux pères apparaissent comme préoccupés par leurs seuls intérêts, voir leur bon plaisir (comme en attestera le remariage du duc de Montpensier), faisant peu de cas de leurs obligations morales (le serment donné) ou du sort de leurs proches (femme, enfants). La trivialité de leurs préoccupations (la composition de la dot), le dérisoire de leurs conversations (la recette de l anguille détaillée lors de la noce) et occupations (ils jouent aux échecs en attendant que Philippe ait défloré sa femme) ne fait que mieux ressortir l horreur de ce qu ils imposent à leurs enfants. L ironie s exerce de manière particulièrement féroce à l encontre du duc de Montpensier, le père de Philippe, qui se remarie quelques semaines seulement après le décès de sa femme, avec une jeune fille qui n est autre qu une de ces Guise dont il disait pis que pendre Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 46

47 c. Violences Dissertation : Les personnages féminins Pour appuyer sa critique du patriarcat, Bertrand Tavernier met également en scène la violence, physique ou symbolique, qui s exerce à l encontre de Marie de Mézières (et, dans une moindre mesure, de son futur époux). Le cinéaste a trouvé dans l expression «tourmentée par ses parents» (p. 41), le prétexte à une scène de violence au cours de laquelle le marquis gifle sa fille, menace de l envoyer au couvent, s apprête à la frapper du poing. Sa femme intervient pour retenir son bras et protéger sa fille, mais c est pour mieux prêcher la soumission à celle-ci. Cette violence physique se prolonge par la violence symbolique de la nuit de noces publique (scène inventée par Bertrand Tavernier à partir des faits que lui ont relatés les historiens), au cours desquelles Marie est mise à nu, puis déflorée par son mari, en présence de sa famille, de sa belle famille, et des serviteurs. Cette scène publique suscite la gêne chez le spectateur, qui perçoit l embarras et la pudeur de Marie comme celle de Philippe. Elle peut s apparenter, selon nos critères contemporains, à un viol, Marie exprimant clairement sa réticence. Mais la violence n est pas que le fait des pères : elle est aussi celle des maris, ainsi de Philippe de Montpensier, qui de promis gauche et timide se transformera en époux jaloux et possessif, dans la nouvelle («Il s emporta avec des violences épouvantables») comme dans le film (à Mont-sur-Brac ou après le bal à Paris). La violence exercée sur Marie est à la fois physique et symbolique (la mise à nu publique lors de la nuit de noces) Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 47

48 d. Les autres femmes, victimes ou complices Dissertation : Les personnages féminins En guise de personnages féminins, la nouvelle se concentre presque exclusivement sur le personnage-titre : les seules autres femmes qui sont citées sont ses rivales auprès de Guise comme Marguerite de Valois, Madame de Portien ou encore la marquise de Noirmoutiers. Ces personnages ne sont pas développés par le film, comme si celui-ci ne voulait pas jouer le jeu de la rivalité féminine. En revanche, le film met en lumière des personnages laissés dans l ombre par la nouvelle comme Catherine de Lorraine, la sœur de Guise, les mères de Marie ou de Philippe, ou d autres purement inventés comme Jeanne, la suivante de Marie. On peut établir une différence de traitement entre les mères et les «sœurs» symboliques. Les secondes sont des personnages avec lesquels Marie partage des moments de complicité, furtifs (une danse ou un échange de regard avec Jeanne) ou plus longs (les scènes dialoguées avec Jeanne). Le rôle des mères est plus ambigu : si la reine-mère Catherine de Médicis fait office de chef de famille, et si la duchesse de Montpensier apparaît comme une victime effacée, le rôle de la marquise de Mézières est plus intéressant. Ce sont ses arguments, et non la violence du marquis, qui vont convaincre Marie de se soumettre. Ses conseils de prudence visent à préserver Marie mais aussi à se conformer à l ordre patriarcal. Il est intéressant de constater que victimes comme complices du patriarcat font usage des mêmes qualités de ruse. Il est frappant de constater que pour maintenir l époux à distance et favoriser l entrevue entre Marie et Guise, Catherine retienne Montpensier en l entretenant sur une comparaison physique qui la dévalue au profit de Marie, comme si elle jouait réellement le jeu de la femme uniquement préoccupée de son physique. On pense à ce qu écrit Pierre Bourdieu dans La Domination masculine : «Les hommes (et les femmes elles-mêmes) ne peuvent qu ignorer que c est la logique du rapport de domination qui parvient à imposer et à inculquer aux femmes, au même titre que les vertus que la morale leur enjoint, toutes les propriétés négatives que la vision dominante impute à leur nature, comme la ruse ou, pour prendre un trait plus favorable, l intuition.» (La Domination masculine, BOURDIEU Pierre, Seuil, 1998) Marie partage des moments de complicité avec ses «sœurs» : sa suivante, Jeanne, et Catherine, la sœur de Guise. Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 48

49 III Un personnage en quête d émancipation a. Un personnage plus libre Dissertation : Les personnages féminins Bertrand Tavernier explique que c est en découvrant un personnage potentiellement «plus rebelle, plus fort, plus fier» qu il ne l avait imaginé à la lecture d une première adaptation de la nouvelle, qu il a trouvé «sa» princesse de Montpensier, qu il a entrevu «la couleur, l état d esprit, la tessiture de Marie.» (GF, p. 126) Plus conforme à la vision contemporaine de l héroïne, la princesse du film est moins soumise, plus indépendante, plus active que l héroïne de Madame de la Fayette, tenue par sa «vertu» et sa «prudence». Elle s oppose ainsi violemment à ses parents dans la scène qui précède le mariage, imaginée par le cinéaste à partir des mots «tourmentée par ses parents». Elle se montre à plusieurs reprises d une ironie amère à l égard de son mari, sous une apparence de soumission : (quand à la question «M aimerez-vous?» de Philippe, elle répond «Quand vous me le commanderez») Elle n hésite pas non plus à tenir tête à son précepteur, sur un mode plus espiègle. b. L éducation, vecteur d émancipation Le film procède à une amplification de la nouvelle, qui, si elle mentionne la formation de la princesse par Chabannes («se servant de l amitié qu elle lui témoignait pour lui inspirer des sentiments d une vertu extraordinaire et dignes de la grandeur de sa naissance, il la rendit en peu de temps une des personnes du monde la plus achevée.»), ne précise pas le contenu et les modalités de l apprentissage. À l inverse, Bertrand Tavernier multiplie les scènes de leçon (latin, géométrie, astrologie) et les discussions entre le maître et son élève (sur la religion, la guerre, le péché). Il faut souligner qu à la différence de la nouvelle où elle est passive (c est Chabannes qui «la rendit [ ] une des personnes du monde la plus achevée»), Marie se montre active dans le film : curieuse, vive et malicieux, elle assaille Chabannes de questions, poussant parfois le pédagogue dans ses retranchements. Surtout elle insiste pour apprendre l écriture, que Chabannes n avait pas prévu de lui inculquer. La nouvelle provoque une vive inquiétude chez le jaloux Philippe de Montpensier, qui pense tout de suite à l usage qu elle peut en faire dans une intrigue amoureuse («C est pour répondre?»), ce qui manifeste bien que l écriture est un instrument d émancipation pour les femmes. Ici, c est, dans l adaptation de Bertrand Tavernier, la romancière qui perce à travers l héroïne, le cinéaste avouant avoir voulu rendre hommage à Madame de La Fayette : «C était une façon de renouer avec l esprit de Madame de La Fayette, la première femme à s être imposée par l écriture d une œuvre romanesque, ce qui n était pas le cas de Madame de Sévigné, sa contemporaine. C est un acte tellement révolutionnaire qu elle ne signe pas ses premiers écrits de son nom. Madame de Lafayette se bat donc contre son entourage, sa caste, qui ne pouvaient pas voir d un bon œil qu elle écrive. Cela faisait sens que Marie partage son combat.» (Entretien avec Yves Alion, L Avant Scène Cinéma, n 646, octobre 2017, p. 15) Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 49

50 Le film détaille les étapes de la formation de Marie par Chabannes, et rend celle-ci plus active. Dissertation : Les personnages féminins c. Une fin ouverte Dans l ensemble très fidèle à l intrigue de la nouvelle, c est dans son épilogue que le film s en écarte le plus. Il choisit de faire consommer leur amour à Philippe et Marie, et permet à celle-ci d arracher à l amant qui l a trahi une dernière entrevue à Blois. Surtout, Bertrand Tavernier refuse de faire mourir son héroïne, et ainsi de lui administrer le châtiment qui justifiait la morale de la nouvelle («Elle mourut peut de jours après, dans la fleur de son âge, une des plus belles princesses du monde et qui aurait été la plus heureuse si la vertu et la prudence eussent conduit toutes ses actions.»). Sa fin, plus ouverte, laisse celle-ci méditer les paroles de la lettre de Chabannes. Si la princesse a, comme dans la nouvelle, perdu «l estime de son mari, le cœur de son amant» au moins lui reste-t-il «la parfaite amitié de François, comte de Chabannes». Si dans le discours en voix-off qui clôt le film, Marie exprime son désespoir («la vie ne serait plus pour moi que la succession des jours, et je souhaitais qu elle fut brève») les derniers plans du film montrent l image d une femme libre et en paix avec ellemême. L épilogue montre un personnage certes solitaire et en deuil, mais libre et en paix avec lui-même. Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 50

51 Conclusion Dissertation : Les personnages féminins À quatre siècles d écart, Bertrand Tavernier procéde donc à une relecture féministe de la nouvelle, plus conforme à l horizon d attente de ses spectateurs potentiels. Alors Mme de Lafayette condamnait (à tous les sens du terme) son héroïne pour illustrer les dangers de la passion, le cinéaste valorise au contraire sa liberté, sa sincérité, son courage. Il insère également l intrigue de Mme de La Fayette dans le tableau historique d une société patriarcale qui fait des femmes le jouet des intérêts et des désirs des hommes. En modifiant la signification et la portée de la nouvelle, il la fait résonner dans le présent : la situation de Marie de Montpensier n est pas très éloignée de celle d une jeune fille d aujourd hui «née dans une famille religieuse fondamentaliste turque, yéménite ou hindoue.», ou même d une élève d un lycée français («J ai présenté très souvent La Princesse de Montpensier dans les lycées. Et beaucoup de jeunes m ont dit que le film racontait leur histoire.», Entretien avec Yves Alion, L Avant Scène Cinéma, n 646, octobre 2017, p. 9) Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 51

52 Analyse de séquence : l apparition merveilleuse Analyse de séquence : L apparition merveilleuse DVD Chapitres : De 1:04 à 1:17 De l épisode du lac à la chevauchée commune de Guise et d Anjou au sujet de Marie Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 52

53 Analyse de séquence : l apparition merveilleuse Introduction Il s agit d un moment-clef de la nouvelle. En effet, l action s y noue : si la princesse accepte jusqu alors son sort, l arrivée inattendue de Guise bouleverse le cours de sa vie. Peu de temps après, la princesse paraîtra à la Cour et son destin s y accomplira. L auteur prend ici de grandes libertés avec l Histoire : à ce moment où, dans la nouvelle, Guise et Anjou «revenai[ent à Loches par un chemin peu connu» p. 48, pour se retrouver finalement sur les terres de Montpensier à Champigny, «il n y a pas eu d interruption de la guerre, et Champigny était occupé par des huguenots» (Lectures de Madame de La Fayette, note 5, p. 37). Ce qui est intéressant, c est que cet épisode inventé de toutes pièces est en rupture poétique avec le reste de l œuvre. De fait, il renoue avec «certains procédés du roman héroïque» (Présentation, p. 21), contre lequel justement Madame de La Fayette construit son nouveau modèle de nouvelle historique. Le narrateur insiste sur le caractère proprement romanesque de la péripétie : «elle leur parut une chose de roman», «voulant pousser l aventure au bout» (p. 49). Bertrand Tavernier, quant à lui, adapte fidèlement les différents éléments de cet ensemble de séquences : le merveilleux («une beauté qu ils crurent surnaturelle» p. 50), la passion («sa vue lui apporta un trouble» p.49), la comparaison aquatique inspirée par le contexte («aussi bien pris dans les liens de cette belle princesse que le saumon l était dans les filet du pêcheur» p. 51), les rivalités masculines (Anjou amoureux, Guise reconquis, le prince jaloux). Les différentes scènes de la nouvelle se retrouvent ainsi dans le scénario, même si l ordre et l intensité diffèrent quelque peu. Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 53

54 Analyse de séquence : l apparition merveilleuse I. Un événement extraordinaire : une esthétique du choc a. Les circonstances C est tout d abord un événement inattendu. De fait, la séquence précédente célèbre l amour conjugal et l intimité entre les époux. Marie y apparaît nue, câline, comblée dans les bras du prince. Comment y imaginer qu il suffira d un regard de Guise pour ébranler ce bonheur? De plus, Chabannes apporte une lettre où le père du prince les demande à Paris ; c est finalement Anjou qui y enverra le prince comme émissaire auprès de la reine. L extrait peut donc se voir comme l inversion de ce qui est attendu : au lieu d être «reçus» à la cour, le prince et la princesse de Montpensier reçoivent chez eux le frère du roi et sa suite. La séquence qui suit exploite le même fil : dans un monologue, le père réclame la venue de Marie à Paris. Événement inattendu aussi, car Anjou et Guise ne sont nullement attendus à Mont-sur-Brac. Certes, c est la trêve, et ils ont déserté le lieu des combats, mais leur venue est le résultat d une erreur d orientation. Leur arrivée fracassante, à cheval, presque que comme sur un champ de bataille, annonce une action d éclat et réactive la métaphore de l amour comme combat meurtrier. b. Une esthétique picturale Ce qui frappe dans le premier plan (photogramme 1), c est le soin de la composition. Il fonctionne ainsi comme un véritable tableau d inspiration italienne : une rigoureuse structure tripartite en largeur et en longueur, les personnages qui se réfléchissent dans l eau, l extrême tranquillité du lac, les pêcheurs qui campent une scène de genre à la flamande. Bertrand Tavernier souligne d ailleurs l importance des couleurs (et la grande chance qu ils ont eu avec le temps au moment du tournage) : l eau noire, les falaises claires, la lumière, les feuillages d automne, les costumes qui se détachent de la surface aqueuse. Ce lac fonctionne ici comme une sorte de plateau (le prince de Montpensier parlera d une «estrade») : c est ainsi une mise en scène spectaculaire. Ce n est pas pour rien qu Anjou et Guise sont saisis par la beauté de cette femme, dans un décor aussi magnifique. c. Les échos mythiques et légendaires : le registre merveilleux L association de la féminité à l élément aquatique dans un cadre forestier est loin d être une invention de Madame de La Fayette. Bien au contraire, les références littéraires abondent. On pense ainsi aux Sirènes de l Odyssée, qui charment les marins de leur chant, et à la déesse Diane, surprise au bain, par le chasseur Actéon : elle se vengera en transformant l impudent en cerf. Ce mythe est d ailleurs très à la mode à la fin du XVI e et au début du XVII e siècle : cette vision baroque de l amour séduit poètes et musiciens. Au Moyen Age, également, dans les Lais de Marie de France et les romans de Chrétien de Troyes, le chevalier rencontre souvent dans la forêt, en pleine aventure, une femme mystérieuse auprès d un lac ou d une source. Il Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 54

55 Analyse de séquence : l apparition merveilleuse s agit le plus souvent d une créature merveilleuse, fée ou ondine. Songeons à la légende de Mélusine et à Morgane la sœur du roi Arthur. Les visions de l amour qui y sont véhiculées se ressemblent : la femme ensorcèle l homme d un amour vécu comme un enchantement magique qui l emprisonne. Dans cet contexte, Anjou ne peut que tomber fou d amour, Guise ne peut que renouer avec son ancienne passion. II. L action se noue : rivalités masculines a. Anjou témoin et souverain Henri d Anjou domine la scène par son statut : il commande et met en scène (il donne l ordre à ses hommes de quitter la table, par exemple). On retrouve dans cet extrait un reste d héritage féodal : le vassal doit à son suzerain gîte et couvert, à sa demande. C est le sens du photogramme 7 où le prince de Montpensier s incline devant Anjou et lui témoigne de l affection, alors même que sa jalousie doit commencer à s éveiller en voyant sa femme revenue en galante compagnie. De ce fait, Anjou domine, de son regard, de sa parole, de sa volonté, l extrait. Il peut, par exemple, sans gêne aucune, sombrer dans le grivois lorsqu il exprime le souhait de dormir dans la chambre de Marie. De même, il peut écarter le mari gênant lorsqu il envoie le prince de Montpensier en ambassade, et menace son rival à la fin de la conversation à cheval avec Guise. Pour Bertrand Tavernier, le duc d Anjou est le pivot dramatique de la scène. Il est témoin des premiers regards entre les anciens amants : il remarque l embarras de Marie, le regard de Guise médusé devant Marie, la rebuffade subie par Guise (photogrammes 5 et 6). Il envie Chabannes qui l a instruite. Grâce à ce personnage, le trio traditionnel du mari, de la femme et de l amant se complexifie. b. Seul contre tous : Guise au centre du jeu C est ce personnage qui guide les cavaliers au début de l extrait. Le film, comme la nouvelle d ailleurs, laisse planer le doute sur cet aspect : s est-il vraiment perdu ou a-t-il eu le dessein de surprendre la princesse, la sachant sur ses terres? Le premier regard qu ils échangent (photogrammes 3 et 4) ouvre toutes les possibles pour le spectateur : Guise semble saisi, Marie inquiète. Dans un premier temps, Guise est supplanté par Anjou : il ne monte pas sur la barque (contrairement à la nouvelle) et Marie n accepte pas son aide pour monter à cheval. Et pourtant, la séquence en fait le type du chevalier : il est fougeux, armé comme le personnage mythologique à l arrière-plan (cf photogramme 10), prêt à défendre son roi et son Dieu et sa bienaimée. C est lui l ancien amant de Marie, comme le montre son geste lorsqu il coupe la parole à Montpensier lors du dîner. D ailleurs, ce dernier ne s y trompe pas : il n est pas jaloux des belles paroles du futur Henri III, mais bel et bien de l amour de jeunesse de Marie. Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 55

56 Analyse de séquence : l apparition merveilleuse c. Chabannes et Montpensier au second plan Face à ces personnages éclatants, Chabannes en noir et Montpensier en vert semblent effacés, alors même qu ils ont l habitude de régner sur ces lieux. Certes, la position pacifiste de Chabannes lui donne une aura particulière, qu illustre sa position privilégiée auprès de Marie, puisqu il reste assis à ses côtés (photogramme 9), certes le prince est le maître des lieux, en tête de table, et la mission d ambassadeur qui lui est confiée lui donne de l importance, mais leur temps de parole est extrêmement réduit. Chabannes ne parle que lorsqu on l interroge ; son statut d ancien huguenot en milieu catholique l isole. Toutefois, leur parole se libère dans l intimité face à Marie : Montpensier dans la chambre à coucher, Chabannes dans les bâtiments réservés aux domestiques, où il prend soin d une selle. III La passion (r)allumée : Marie, chasseresse ou proie? a. Le mariage disqualifié Loin de la séquence précédente, le prince de Montpensier fait subir à sa jeune épouse une scène humiliante et injuste (cf photogramme 11). Humiliante, car la fureur de Grégoire Leprince-Ringuet éclate de manière tonitruante, à tel point que tout le château est au courant. Bertrand Tavernier est lui-même saisi, au moment du tournage, par la violence de l éclat de son comédien : le cinéaste raconte que celui-ci en détériore une commode XVI e, ce qui n était évidement pas prévu dans le scénario. Injuste, puisqu il insinue que cet événement présenté comme inattendu est en réalité un rendez-vous galant et secret entre les anciens amants. Il remet ainsi en doute les justifications données par sa femme. A partir de là, la communication entre ces deux êtres semblent interrompue ; ils ne se comprennent plus. Le lendemain matin, Montpensier demeure indécis devant une porte close. Il ne verra ensuite sa femme que derrière une fenêtre grillagée (photogramme 12), en contre-plongée. D ailleurs, il ne parviendra plus, par la suite, à s entretenir sereinement avec sa femme : les seules scènes où ils seront seuls désormais, seront des scènes de confrontation marquées par la violence. b. Le triomphe de la galanterie Après ces longs mois de retrait du monde à Mont-sur-Brac, Marie goûte à la mondanité. Quand elle aperçoit les cavaliers, elle s empresse par exemple d accéder à la demande d Anjou de monter dans la barque. Elle se retrouve de fait au centre des attentions d une poignée d hommes. Chacun, à sa manière, lui témoigne son amour : elle reçoit avec des sourires les multiples compliments d Anjou et les sous-entendus de Guise. Dans ce contexte, le regard est aussi important que la parole. Le prince, Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 56

57 Analyse de séquence : l apparition merveilleuse de son côté, se montre extrêmement jaloux de cette galanterie et reproche à Marie de se montrer comme «sur une estrade». Lorsqu Anjou vient chercher Montpensier, et l empêche à ce moment précis de revenir auprès de sa femme pour aller s excuser, c est encore sans doute une marque de la galanterie : il pense protéger Marie de l ire de son époux. c. L amour, la chasse, la guerre : la métaphore filée Les conversations et le contexte réactivent la métaphore conduite par la première phrase de la nouvelle. Les hommes reviennent de la guerre, le prince est à la chasse, c est-à-dire une guerre sur le mode mineur : ces univers peuplent les dialogues. Le contexte fait de Marie une chasseresse ; c est aussi ainsi qu elle apparaît à cheval au milieu d Anjou et Guise, dans la première séquence de l extrait. Mais ce duc est justement présenté par le prince royal comme un excellent chasseur : c est un avertissement pour Marie. Lors du dîner, il tient un discours enflammé sur sa fidélité à sa foi et à ses sentiments : l implicite est clair pour la princesse. Elle, de son côté, revendique du dégoût pour ces activités : elle n a que rejet pour la chasse, qui n est pour elle qu une boucherie, et donc pour la guerre. Elle rejoint ainsi la position de Chabannes, qui voit la même cruauté des deux côtés de la guerre civile, et qui en conclut l inutilité. De chasseresse, elle devient donc une proie, qui paiera cher son innocence. «L amour ne laiss[era] pas de trouver sa place parmi tant de désordres, et d en causer beaucoup dans son empire.» Conclusion Cet extrait s ouvre et se termine par une chevauchée, que Bertrand Tavernier paraît avoir beaucoup de plaisir à filmer. Ces plans spectaculaires donnent un relief particulier à cet ensemble de séquences qui relance l action : Marie retrouve son amour de jeunesse, et toute l éducation morale de Chabannes ne lui sera d aucun secours. Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 57

58 Analyse de séquence : Le bal costumé, nymphes et maures DVD : Fin du chapitre 11 et chapitre 12 : de 1:34:32 à 1:41:02 Analyse de séquence : le bal costumé Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 58

59 Introduction Analyse de séquence : le bal costumé Cette scène de bal occupe une place centrale dans l économie de la nouvelle : elle dévoile la passion jusqu ici cachée de Marie de Montpensier pour Guise, nouant le drame et précipitant sa conclusion. Sa transposition cinématographique posait un double problème à Bertrand Tavernier (voir entretien pp ) : d un point de vue narratif d une part, le subterfuge romanesque de la méprise cadrait mal avec le caractère de son héroïne et le souci de la vraisemblance pour les spectateurs du XXI e siècle («En agissant ainsi au milieu d une foule, au vu et au su de tout le monde (même s il y avait des paravents et des piliers), Marie risquait de passer pour une écervelée.») ; du point de vue de la production, la représentation d un bal de cour avec ses décors, ses éclairages et ses dizaines de figurants costumés, grevait de manière trop importante le budget du film, à tel point que son producteur lui proposa de supprimer purement et simplement la scène. En se plaçant dans les coulisses du bal, Bertrand Tavernier concilie les deux contraintes et réussite une scène doublement attendue : pour son importance dans l intrigue mais aussi parce que la scène de bal est un passage obligé des films historiques. I. La fête des apparences a. Une nuit à la cour : féérie et prestige Au cours de cette séquence nocturne, éclairée aux flambeaux et aux chandelles, habillée d un fond sonore de musique d époque, Bertrand Tavernier nous plonge dans l atmosphère typique d un bal de cour du XVI e siècle (photogrammes 2 et 4). À la différence des bals du XIX e tel que le cinéma en a fixé les traits, avec habits noirs de soirée et robes à crinoline (voir par exemple la scène du Guépard de Luchino Visconti), les bals de cour au XVI e siècle sont de véritables spectacles, combinant musiques, danses et chansons variées, masques, costumes et décors élaborés, auxquels les nobles et la famille royale prennent une part active. C est Catherine de Médicis qui en a introduit l usage à la Cour, important de son pays natal la pratique du «spectacle à l italienne». Le premier plan-séquence dans la cour nous introduit à cette pratique, puisqu il s ouvre, de manière surprenante, sur le gros plan d un chameau, et se poursuit en s élargissant par un dialogue entre le chamelier et un personnage d intendant (photogramme 2). Le dialogue évoque une danse de «maures» et une autre de «nymphes», préparant ainsi le spectateur à retrouver les personnages déguisés : les femmes en nymphes (Marie de Montpensier et Catherine de Lorraine), et surtout les hommes (Guise et Anjou) en maures, déguisement qui va jouer un rôle déterminant dans l intrigue. Ces costumes puisent à la fois dans le répertoire mythologique qui irrigue toute la culture au XVI e siècle (depuis les tapisseries ornant les châteaux jusqu aux poèmes de la Pléiade), et dans l influence des conquêtes arabes dans l imaginaire européen Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 59

60 Analyse de séquence : le bal costumé (dont on peut retrouver la trace chez Corneille, dans Le Cid). L introduction d un animal exotique comme le chameau, lui aussi paré, surprend et participe à créer un climat féérique (on peut penser aux éléphants, que ce soit à la fin de Peau d âne de Jacques Demy, ou dans The Party de Blake Edwards). Les plans suivants saisissent la fin de la «danse des nymphes» impliquant Marie de Montpensier et Catherine : dernières mesures jouées par le petit orchestre à l arrière-plan, révérence des danseuses et applaudissements des spectateurs. Le dialogue de Marie et Catherine leur permet d évoquer à la fois la présence du roi et l éclat de la beauté de Marie souligné par la nouvelle («Le roi fit un ballet où dansaient Madame et toutes les princesses. La princesse de Montpensier pouvait seule lui disputer le prix de la beauté.», p. 60). Ce regard posé par le roi sur l héroïne évoque une situation de conte, mais aussi la fameuse scène de bal de La Princesse de Clèves. b. Le faste et le féérique évacués Pour autant, Bertrand Tavernier s attache à désamorcer les clichés de la scène de bal traditionnelle : les blatèrements du chameau jurent avec la douceur féérique de l ambiance et son introduction à travers un dialogue trivial et comique rompt l enchantement : «Aime rien, râle tout le temps» (ce qui nous pousse aussi à faire une analogie : ne serait-ce pas ce que l on pourrait dire de Philippe de Montpensier)? De même, la figure du roi et l élection de Marie, sont immédiatement désacralisées puisque Catherine dit, en riant, que la beauté «à couper le souffle» de Marie a «ôté la toux» au souverain qui est donc malade. Enfin, pour des raisons autant économiques qu esthétiques (voir p ), Bertrand Tavernier choisit d escamoter le bal proprement dit, et de situer l ensemble de la séquence dans les coulisses. Le réalisateur joue donc avec les codes de la scène de bal, en les reprenant mais aussi en les détournant. On peut remarquer qu en s appuyant sur l économie de moyens pour accentuer la vraisemblance de la scène, il retrouve les principes de l esthétique classique. II Les coulisses de la passion a. Les déguisements : vérité et illusions Le déguisement affranchit des règles et des lois et libère l individu des contraintes qui pèsent sur lui, ou alors le sublime, c est le cas de Marie et de Catherine qui s amusent de leurs danses, comme enivrées par la liberté qui leur est donnée. Mais les déguisements qui libèrent sont aussi ceux qui enferment car, ils renforcent la dualité entre homme et femme et une répartition genrée des rôles sociaux : comme si, même dans les divertissements, les femmes devaient se consacrer à l amour Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 60

61 Analyse de séquence : le bal costumé et à la séduction (dans la mythologie les nymphes, esprits féminins de la nature, sont souvent sexualisées dans leur association avec les satyres) tandis que les hommes manifestent leur prouesses physiques dans des danses guerrières. Chez les personnages masculins, le costume ou l absence de costume permettent de définissent deux «couples» de rivaux. D un côté, Anjou et Guise, masqués et déguisés en combattants maures : le costume traduit leur égale maîtrise des codes de la cour et du divertissement, mais aussi leur souci constant de l image qu ils renvoient, de leur «gloire» pour reprendre un terme cher au XVII e siècle. La similarité de leur costume souligne leur rivalité, mais c est la méprise de Marie, qui va le leur révéler. De l autre côté, Chabannes et Montpensier ne participent pas au bal costumé. Il semble que le le divertissement et la légèreté leur sont interdits, de par sa position sociale pour le premier, de par son caractère austère pour le second. Ainsi ils demeurent des témoins muets, des spectateurs de la tragédie qui se joue, tout en ignorant qu ils sont aussi rivaux l un de l autre. Mais on peut dire qu eux aussi portent un masque, celui de l impassibilité, pour ne pas laisser filtrer leurs émotions en public : Philippe de Montpensier est obligé de faire bonne figure quand Anjou l humilie en l empêchant de retrouver Marie. Bertrand Tavernier orchestre dans cette scène un jeu de dissimulations et de dévoilements, favorisé par le caractère festif du bal. Quand Anjou demande à Marie, encore en costume de nymphe, de se couvrir, il lui intime l ordre de sortir de l espace libre du jeu et de la fête que représente le bal, pour revenir dans l espace du réel, celui des convenances et du respect de sa position, notamment envers son époux. Mais en agissant ainsi, c est-à-dire, en la recouvrant, il la découvre aux yeux de la cour, mettant à nu son désir pour Guise. b. Chassés-croisés : du pas de deux à la traque En jouant sur l entre-deux et les coulisses du bal, le réalisateur parvient à dramatiser les ruses du cœur. Marie comprend le salut que lui fait Guise et cherche à le rejoindre, elle demande de l aide à Catherine pour empêcher son époux de s y opposer. Elle s adresse à Anjou, croyant qu il s agit de Guise, sans avoir l air d y paraître, et lui donne rendez-vous. Tout au long de la séquence, on passe de duos en duos : Marie-Catherine, puis Marie-Anjou, Catherine-Montpensier, Anjou- Guise, Chabannes-Montpensier, Anjou-ses «mignons» et Anjou-Marie. Seule, Marie attend dans le renfoncement d un couloir dérobé Guise qui ne viendra pas. Ces duos permettent au réalisateur de traquer les sentiments sur les visages de ses comédiens, saisis en gros plans ou plans moyens, mais ils sont aussi un moyen subtil d évoquer la danse et ses changements de partenaires, un pas de deux. Enfin filmer les coulisses et les personnages impose un rythme très vif, ce à quoi, le réalisateur dit avoir pris plaisir : «Et le tournage dans ces petites pièces, ces corridors, ces escaliers m a inspiré ce découpage haletant, ces mouvements d appareil rapides, ces changements d axes qui imitent le mouvement intérieur des personnages.» (p.132). En effet, l effroi de Marie à la vue de son époux, la jalousie réprimée de Montpensier, la colère d Anjou à l encontre de Guise, la joie de Marie d attendre Guise comme dans un jeu de cache-cache, puis sa détresse humiliée face à Anjou, composent une peinture d émotions en mouvement. Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 61

62 Néanmoins la séquence s achève sur une Marie traquée et exposée, comme mise à nu devant ses prédateurs, ce que la musique martiale, jusque-là réservée aux scènes de bataille, révèle. Le bal est la scène de bascule qui fait passer Marie du jeu à la violence. III Le quiproquo tragique Analyse de séquence : le bal costumé a. Plongée tragique Analysez le photogramme 7. C est par ce plan d ensemble en plongée que le spectateur comprend qu il n y a pas qu un seul maure et que Marie s est mépris en fixant un rendez-vous à Anjou qu elle prenait pour Guise. Ce plan qui nous en apprend plus que l héroïne correspond à une double énonciation au théâtre puisque nous voyons Marie foncer droit dans un piège. Ce plan rappelle aussi celui où le spectateur comprend que Marie est encore amoureuse de Guise, quand elle est vue en plongée sur les carreaux, rêveuse et joyeuse. On ne peut pas s empêcher de lire ce plan en plongée, comme la manisfestation d un Fatum qui nous montre l égarement de l héroïne, emportée par sa passion. Cette erreur qui va se révéler fatale est aussi un quiproquo, au sens propre du terme «quelqu un à la place d un autre». Ce procédé théâtral, souvent utilisé dans la comédie, révèle ici sa dimension tragique. Du côté du spectateur, l émotion est double, car si ce dernier peut comprendre la force du désir qui anime Marie et a envie de la voir s émanciper du carcan conjugal, il a peur pour elle, peur de la voir s abandonner à Guise, qui ne paraît pas fiable, peur de la voir découvrir son secret à Anjou. Cet égarement est traduit métaphoriquement par l espace. Quand le «mignon» d Anjou traque Marie, il ne la trouve pas immédiatement, il traverse des espaces multiples, sombres, prend des escaliers, qui sont comme autant de métaphores, des détours empruntés par la passion pour suivre son cours. b. Sidérations L effet obtenu par cette séquence, malgré ses mouvements de caméra qui suivent avec fluidité les personnages, ou la rapidité nerveuse de la traque de Marie lancée par Anjou est la sidération. Tous les personnages à un moment ou un autre sont cloués sur place par une révélation qui leur est faite : Chabannes par Montpensier qui lui assène qu il ne peut pas comprendre sa situation de «mari, amant et jaloux», Anjou par Marie qui lui révèle malgré elle son amour pour Guise, Guise par la révélation et les menaces d Anjou, Montpensier par Anjou qui lui intime de rester sur place, et finalement Marie par Anjou. Cette immobilité soudaine des personnages traduit leur sidération, comme s ils prenaient conscience tous par le figement des corps que le jeu est fini, que la fin de la récréation a sonné. De fait on peut mesurer la force de la passion à la réaction des Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 62

63 personnages après cet état de sidération : Anjou disparaît, Marie s en trouve confortée et passe outre, Montpensier déchaîne sa violence, Chabannes fait entrer Guise et prend sa place, Guise en récolte les fruits et passe à autre chose. Cette séquence place donc les personnages dans une situation de non-retour. Conclusion Analyse de séquence : le bal costumé En choisissant d expliquer au spectateur le quiproquo qui pousse Marie à révéler à Anjou son désir pour Guise, Tavernier réussit à faire de cette scène de bal, une séquence-charnière où les personnages basculent du jeu des sentiments vers la guerre des passions. Néanmoins seul le sacrifice de Chabannes éclairera Marie sur sa passion. Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 63

64 Analyse de séquence : La Saint-Barthélémy DVD : Chapitre 14 : De 1:54:20 à 1:58:39 Analyse de séquence : la Saint-Barthélémy Dossier pédagogique La Princesse de Montpensier p. 64

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