ACTES. Colloque européen "L égalité femmes hommes et la loi : deux ans d études d impact"



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Colloque européen L égalité femmes-hommes et la loi: deux ans d études d impact Mardi 30 septembre 2014 Première table ronde : Comment nos partenaires européens intègrent-ils l égalité dans les études d impact? «Présentation de la méthodologie espagnole d analyse normative au prisme de l égalité» par Rosario GUERRERO MARTIN Experte des affaires juridiques, Institut de l Egalité de la Femme, Ministère de la Santé, des Affaires Sociales et de l Egalité, Madrid, Espagne Rosario Guerrero Martin présente le chemin parcouru et les perspectives du travail en Espagne, onze ans après la première loi qui oblige à rédiger des études d impact sur l égalité entre les femmes et les hommes pour tous les projets de loi. 2003 : la première loi instaurant les études d impacts genrées La première loi qui oblige le gouvernement espagnol à présenter une étude d impact genreé lorsqu il soumet au Parlement un projet de loi, date de 2003. Il s agit de la loi du 13 octobre 2003 «sur les mesures pour intégrer la valorisation de l impact sur l égalité entre les femmes et les hommes dans les dispositions normatives du Gouvernement». La loi s appuie sur les conclusions de la Conférence de Pékin de 1995 à propos de l approche intégrée de l égalité (gender mainstreaming), et sur divers textes émanant de l Union Européenne (notamment le Traité d Amsterdam 1 et la Convention des droits de l homme). Elle se fonde 1 L article 3.2. du traité d Amsterdam, même s il n utilise pas l expression gender mainstreaming, entérine la généralisation du principe à toutes les politiques communautaires et proclame : «pour toutes les actions visées 2

également sur une décision du Conseil de l Europe datant du 20 décembre 2000 et sur une communication de 1996 sur l approche intégrée de l égalité. 2004 : les études d impact rentrent dans la pratique Le Parlement et le Gouvernement changent en 2004 et entre temps aucun projet de loi n a été accompagné d études d impact, probablement par manque de temps. Il n y a donc pas eu d études d impact pendant la fin de la 7 ème législature. A partir de 2004, des études d impact sur l égalité entre les femmes et les hommes ont été réalisées, mais qui demeuraient assez simples. On essayait de les rédiger, mais cela restait assez sommaire, notamment à cause du manque de données. Au même moment, on été élaborés des projets de lois très importants relatifs à l égalité entre les femmes et les hommes, comme la loi organique du 28 décembre sur les mesures de protection intégrale contre la violence de genre (Ley Orgánica 1/2004, de 28 de diciembre, de Medidas de Protección Integral contra la Violencia de Género). Cette loi est accompagnée d une étude d impact genrée de qualité. Durant cette période, on assiste donc à une évolution positive du point de vue des études d impact, qui rentrent dans la pratique tout en restant en règle générale assez concises. Entre temps, en 2005, l Institut de la Femme publie un guide à destination de toute personne susceptible d être concernée par l élaboration et la rédaction des études d impact. 2007 : la loi organique pour l égalité réelle entre les femmes et les hommes En 2007, a été approuvée par le Parlement la loi organique 3/2007 pour l égalité réelle entre les femmes et les hommes (Ley Orgánica 3/2007, de 22 de marzo, para la igualdad efectiva de mujeres y hombres). Cette loi a une incidence sur les études d impact entre les femmes et les hommes : elle exige qu en plus des projets de loi, des études d impact sur cette question soient réalisées en amont de tout plan revêtant une importance particulière dans les domaines économique, social, culturel ou artistique, que le gouvernement présente au Conseil des ministres pour approbation. C'est-à-dire que ne sont plus concernés seulement les lois, mais aussi les plans généraux concernant n importe quel sujet. D ailleurs, en Espagne, pour parler de l approche intégrée de l égalité (gendermainstreaming), on utilise le terme de transversalité (transversalidad). La loi organique 3/2007 explique le principe de transversalité dans son article 15. «Le principe d égalité de traitement et d opportunités entre les femmes et les hommes sous-tend de manière transversale l action de tous les pouvoirs publics. Les administrations publiques l intégreront de manière active dans l adoption et l exécution de ses dispositions normatives, dans la définition et l élaboration des politiques publiques dans tous les domaines et dans le déroulement de l ensemble de ses activités.» L article 3 précise la définition de l égalité entre les femmes et les hommes, et l article 4 dispose sa déclinaison dans l interprétation et l application des normes : au présent article, la Communauté cherche à éliminer les inégalités, et à promouvoir l égalité, entre les hommes et les femmes.». 3

«L égalité de traitement et d opportunités entre les femmes et les hommes est un principe qui sous-tend l architecture juridique et en tant que tel s intégrera et s observera dans l interprétation et l application des normes juridiques» Cette loi crée les Unités de l Egalité dans tous les départements ministériels. Elles ont notamment pour fonction de réaliser les études d impact sur l égalité entre les sexes. De plus, la loi oblige toutes les institutions publiques à produire des statistiques systématiquement sexuées. 2009 : le décret royal sur l analyse de l impact des normes En 2009, un décret royal précise les modalités de l analyse dans les études d impact et met en place une méthodologie. Une étude d impact doit comporter deux paragraphes : 1. Premièrement, un paragraphe est destiné à l identification des objectifs de la loi en matière d égalité entre les femmes et hommes. 2. Deuxièmement, un paragraphe est consacré à l analyse de l impact sur l égalité. Dans cette analyse, on distingue trois parties fondamentales : a. La description de la situation de départ, qui sert de base pour identifier les possibles inégalités préalables, pouvant exister dans le contexte d intervention de la norme. On attache une attention particulière aux inégalités découlant des objectifs identifiés dans le premier paragraphe. Pour cela, il faut user d indicateurs quantitatifs et qualitatifs. b. La prévision de résultats, qui comporte trois aspects : o Résultats directs résultant de l application de la norme, exprimés en termes quantitatifs et ventilés par sexe ; o L incidence sur les rôles et les stéréotypes sexués ; o Contribution au déroulement des objectifs d égalité des opportunités identifiés. c. La valorisation de l impact genré, qui qualifie les résultats prévus concernant l élimination des inégalités entre les femmes et hommes et l accomplissement des objectifs de la politique d égalité, suivant l échelle suivante : a. Négatif : lorsqu on ne prévoit pas une élimination ou diminution des inégalités détectées et que l on ne contribue pas aux politiques d égalité ; b. Nul : lorsqu il n existe pas d inégalités de départ en termes d opportunités et de traitement entre les femmes et les hommes, nulle modification n est alors prévue ; c. Positif : lorsqu on prévoit une diminution ou une élimination des inégalités détectées et que la norme contribue aux objectifs des politiques d égalité. Un guide général sur l analyse des impacts a été rédigé. Il comprend un ensemble d annexes décrivant les indicateurs devant être mesurés, ceux-ci prennent en compte la dimension du genre. Enfin, le même texte instaure une procédure particulière pour la loi de finances. Ce n est qu en 2008 que la loi de finances en Espagne a pu avoir une étude d impact genrée. Une vraie difficulté réside dans le fait d avoir et de coordonner les données nécessaires. 4

Conclusion Rosario Guerrero Martin conclue sur le fait que, selon l unité juridique de l Institut de la Femme (Instituto de la Mujer) où elle travaille, il reste encore beaucoup à faire pour les études d impact. L Espagne est actuellement dans une bonne dynamique, apprend beaucoup et développe ses études d impact, mais ce n est pas encore suffisant. Les études d impact ne se conforment pas, ou pas assez, au guide établi et ne présentent pas assez de données sexuées permettant une évaluation de qualité. La réalité est qu il manque encore des données sexuées, parfois pour des raisons économiques. 5