sirna: SHORT INTERFERING



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Transcription:

Année : 2006/2007 BMC551 IT Projet d Analyse scientifique sirna: SHORT INTERFERING RNA Tuteur : BELLIER Bertrand bertrand.bellier@upmc.fr> ADAM Caroline : adam.caroline@gmail.com VERON Laure : veronlaure@yahoo.fr

REMERCIEMENTS Nous remercions tout particulièrement Valentina LIBRI, Patricia LASSIAZE et Mme GOUYETTE pour avoir mis à disposition un peu de leur temps au profit de notre projet. Leur gentillesse et leur approche passionnée pour la recherche ont été pour nous de bonnes sources d'inspiration et nous ont permis d'appréhender agréablement cette thématique prometteuse. Nous aimerions également dire toute notre considération à notre tuteur Bertrand BELLIER pour son soutien et son apport méthodologique à ce projet. Sa vue d'ensemble et ses observations nous ont permis de garder un esprit critique sur la technique des sirna.

SOMMAIRE UN PEU D HISTOIRE...1 UN INTERET TECHNOLOGIQUE...6 I. L INTERFERENCE ARN...7 A. EN PRINCIPE... 7 B. ZOOM SUR LES SIRNA... 8 1) Principe... 8 2) Mécanisme d action du sirna... 8 C. LA DELIVRANCE, UNE LIMITE? PAS POUR LES INDUSTRIELS...10 1) Lipofection... 10 2) Electroporation... 10 3) Biolistique... 10 4) Transfection par les vecteurs... 11 D. LES CONTROLES...11 1) Contrôles négatifs... 11 2) Contrôles positifs... 11 3) Contrôles de la transfection... 12 II. UTILISATIONS STRATEGIQUES... 12 A. DEVELOPPEMENTS DE L OUTIL SIARN...12 1) Design des sirna... 12 2) Production des sirna... 13 Synthèse chimique des sirna, un exemple concret :...13 3) Validation des sirna et création des banques... 15 B. ETUDE DE LA PERTE DE FONCTION D UNE PROTEINE...15 Phénotype perte de fonction, un exemple concret...15 C. VALIDATION DE GENE CIBLE ET UTILISATIONS THERAPEUTIQUES...17 Validation de gènes cibles, un exemple concret...17 III. POINT DE VUE SUR LES SIRNA... 19 QUEL AVENIR?...20

LISTE DES ABBREVIATONS ADNc : ADN "complémentaire" ARNase: enzyme de clivage de l ARN ARNdb: ARN double brin ARNi : ARN interférence ARNm : Acide Ribonucléique Messanger ATP : Adénosine Triphosphate ATPase : Enzyme de clivage de l ADN C.elegans : Caenorhabditis elegans CHS : Chalcone Synthase DICER : Enzyme de clivage des ARNdb DMLA : Dégénérescence Maculaire Liée à l'age DsRBD : Receptor Binding Domain GAPDH: Glycéraldéhyde-3-Phosphate Déshydrogénase GFP : Green Fluorescence Protein Hairpin : Épingle à cheveux HPLC : High Performance Liquid Chromatography KO : Knock out LT CD8 : Lymphocyte T CD8 NF?B : Nuclear Factor? B PAZ :Piwi Argonaute Zwille PKC? : Protéine Kinase C QN1: Quail neurotina 1 RISC : RNA Inducing transcrptional Silencing Complex RNAse III: ARN polymérase III RSV: Virus Respiratoire Syncytial RT-PCR : Reverse Transcriptase Polymerase Chain Reaction sirna: short interfering RNA TLR:Toll Like Receptor VEGF : Facteur de croissance de l endothélium vasculaire VIH : Virus de l'immunodéficience Humaine

LISTE DES FIGURES Tableau 1 (p8): Comparatif des variantes de l interférence ARN Tableau 2 (p19): Comparatif des différentes techniques d inhibition de l expression protéique Figure 1 (p9): Mécanisme d action des sirna Figure 2 (p10): Electroporateur Figure 3 (p10): Gene gun Figure 4 (p14): Synthétiseur Figure 5 (p14): Cycle de Phosphoramidite Figure 6 (p16): Marquage fluorescent de Jamip1

UN PEU D HISTOIRE L ARN interférence a été initialement caractérisé chez les plantes en 1990, par Richard Jorgensen. Pour intensifier la couleur des fleurs Pétunia, ce généticien introduisit dans le génome de la plante la copie du gène CHS (chalcone synthase) responsable de la pigmentation. Les résultats obtenus ne furent pas ceux attendus puisque la majeure partie des plantes transgéniques produisaient des fleurs blanches. En analysant de plus près cet incident, il mit à jours le phénomène de «co-suppression» consistant à inhiber l expression d un gène endogène par l introduction d un transgène (1). Cinq ans plus tard, le groupe d Andrew Fire et Craig Mello (Carnegie Institution Washington et Université du Massachusetts) testa par hasard un mélange de plusieurs ARN sens et anti-sens pour éteindre la fonction d une protéine chez le nématode C.elegans. Leurs observations montrèrent que ce mélange était plus efficace que l ARN anti-sens seul. En effet, le grand nombre de séquences présentent dans l échantillon avaient favorisé l association entre brins complémentaires. Et c est cet ARN double brins présent à l état de trace qui interférait avec la fonction du gène endogène en réduisant spécifiquement l expression des protéines (2). Ce phénomène fut alors appelé «ARN Interférence» (ARNi) et récompensé en 2006 par le prix Nobel de médecine. Dans un premier temps il semblait peu probable que ce même mécanisme puisse se produire chez les mammifères. En effet, l introduction d ARN double brin provoque une forte réaction antivirale d interféron de type 1, non spécifique, induite par des mécanismes de protection cellulaire associés à l activation des TLR. Ce n est qu en 2001, qu un article de M. Sayda Elbashir (3) montra que l ARNi existait chez les mammifères. En effet ces observations permirent de démontrer que la réaction de protection de la cellule était dépendante de la taille de l ARN. Par conséquent des petits fragments d ARN doubles brins peuvent inhiber rapidement, facilement et spécifiquement l expression des gènes cellulaires. UN INTERET TECHNOLOGIQUE Aujourd hui l utilisation de l outil ARNi suscite un véritable engouement auprès des laboratoires académiques et industriels et les retombées dans le domaine de la santé sont en pleine expansion.

C est pourquoi nous nous sommes intéressées à cette nouvelle technologie. Au travers de ce rapport nous avons voulu dresser un tableau exhaustif sur l état actuel de la technique en nous appuyant sur les données de la littérature mais aussi en allant à la rencontre des professionnels compétents dans ce domaine. Dans notre démarche nous avons dans un premier temps, réuni les informations concernant la technique d ARN interférence, en nous focalisant particulièrement sur les short interfering RNA (sirna). Dans un deuxième temps, nous avons trouvé intéressant de recueillir sous forme d interviews les témoignages de professionnels qui utilisent au quotidien cette technique pour essayer au mieux de comprendre son impact, ses applications et ses limites. Nous avons interviewé 3 professionnelles, en fonction de leur domaine d activité. Tout d abord, Dr Gouyette nous a permis d entrevoir les moyens nécessaires à la fabrication des sirna, en visitant la plate-forme de synthèse des oligonucléotides. La rencontre avec le Dr Libri, nous a donné concrètement un exemple d application pour étudier la fonction d une protéine cellulaire des lymphocytes T CD8. Et dernièrement, le rendez-vous avec le Dr Lassiaze a été une belle occasion de comprendre la finalité d une telle technologie pour une éventuelle application thérapeutique. Nous avons également eu l occasion de nous informer et de discuter avec différents acteurs industriels lors du Symposium RIGHT à Pasteur mais aussi au forum Eurobio 2006. C est justement toute cette investigation qui nous a permis de percevoir les différents points de vue de cette technologie et de son possible développement à l avenir. I. L INTERFERENCE ARN A. EN PRINCIPE Cette technologie est basée sur l inactivation spécifique de l ARNm par l utilisation de petits ARN doubles brins nommés «small RNA», dont la partie anti-sens peut s apparier spécifiquement avec l ARNm. Cet appariement crée une région double brin d ARN qui active dans la cellule une réaction anti-virale. Ce système activé provoque l inactivation de l ARNm par inhibition de sa traduction ou par sa dégradation. Il existe plusieurs types d ARNi permettant cette réponse, c est pourquoi nous nous proposons d établir un comparatif entre ces différentes variantes (4).

Types RNAi Caractéristiques Administrations Principaux avantages Principaux inconvénients dsrna Doublestranded RNA - > à 30 pb (paire de base) -Forme des smallrna par clivage enzymatique - Lipofection - Electroporation -Plusieurs small RNA produits par DICER -Qualitédes smallrna produits -Réponse d interférons de type 1 dans les cellules de mammifères sirna Short interfering RNA -21 à 25 pb -2 nucléotides libres aux extrémités 3 - Lipofection - Electroporation -Moins d effets nonspécifiques -Possibilité de modification chimique -Facile à synthétiser -Effet transitoire -Monitoring de l efficacité de transfection - Coût élevé shrna Short hairpin RNA -21 à 25 pb + boucle -Boucle en forme d épingle - Forme des small RNA par clivage enzymatique - Vecteurs: plasmidiquesou viraux + chlorure de sodium -Expression inductible et stable -Monitoring de l efficacité de transfection -Coût modéré -efficacitéde pénétration -Réponse non-spécifique interférons de type 1 -Difficultés de construction -Difficulté pour une application en thérapeutique mirna MicroRNA -19 à 23 nucléotides -ARN non codants - Endogène -Pas besoin de l introduire dans la cellule - Pas de dégradation de l ARNm mais inhibition de la traduction. - Peu d étude sur les mécanismes d action Tableau 1 : Comparatif des variantes de l interférence ARN B. ZOOM SUR LES SIRNA 1) Principe Les sirna (short interfering RNA) sont les véritables agents de l interférence ARN. Le clivage des ARN doubles brins longs conduit à un effet démultiplié : production de petits ARN interférents doubles brins de 21 à 25 nucléotides (nt), qui ciblent une séquence correspondante de l ARNm pour la détruire, dans le but d éteindre une fonction biologique. 2) Mécanisme d action du sirna Quelle que soit son origine, l ARN se retrouve sous forme d ARN double brin (ARNdb) dans la cellule pour permettre l initiation du mécanisme.

Phase d initiation Dans le cytoplasme, l ARN double brin est reconnu par DICER, une endonucléase membre de la famille des RNAse III, qui le clive en fragments sirna (12). Les cations Mg2+ stabilisent la dimérisation du complexe DICER/ARNdb permettant ce clivage qui s effectue préférentiellement à l extrémité la plus instable de l ARNdb (14). Phase effectrice Ce dimère est alors reconnu par le complexe RISC constituant ainsi un complexe inactif : DICER/ARN/RISC. L activité hélicase de RISC va permettre la dissociation des doubles brins, dépendante de l ATP (12). RISC est alors activé : DICER se détache et par addition d ATP le siarn anti-sens Figure 1 : Mécanisme d action des sirna ARNdb exogène Complexe inactif DICER/siRNA/RISC 1 2 2 1 RISC est déroulé. Le complexe qui fait ainsi 100kD utilise ce sirna déroulé pour le guider vers sa cible. Le clivage de l ARNm, par RISC activé, est endonucléasique et concerne seulement la région homologue au sirna, conduisant à la dégradation de l ARNm. Les enzymes intervenant dans ce mécanisme comportent plusieurs domaines catalytiques (12,14): DICER Un motif de liaison à l ARN dsrbd en Un domaine PAZ C-terminal Un domaine ARN hélicase dans sa RISC région N-terminale avec un motif ATP Un domaine PAZ (Piwi Argonaute binding nécessaire pour le déplacement de Zwille) qui s apparierait avec le domaine Dicer le long de l ARN PAZ de DICER et permettrait de lier Deux domaines RNAse III (IIIa et IIIb particulièrement l ARN simple brin en tandem) qui clivent l ARN tous les 22 Une Hélicase ATPase dépendante nt d intervalle 5 P m7g RISC Complexe actif sirna/risc DICER +2nt 3 3 +2nt sirna: 21-23nt 5 P Activation Par ATP 1- Site catalytique actif 2- Site catalytique central inactivé AAAAAAAA ARNm cible Dégradation ARNm

C. LA DELIVRANCE, UNE LIMITE? PAS POUR LES INDUSTRIELS L efficacité du knock-down dépend en grande partie des conditions de délivrance du sirna. Cette limite est problématique pour les chercheurs, c est pourquoi les industriels du sirna ont réagit en mettant au point différentes stratégies veillant à optimiser la délivrance selon le type cellulaire. Quatre types de modes de délivrance sont apparus, le plus souvent associés à des kits de tampons ou de réactifs. 1) Lipofection Il s agit d une transfection à l aide des lipides-cations, méthode la plus fréquemment utilisée aujourd hui car elle limite la cytotoxicité (5). Quand le sirna arrive au contact de la membrane cellulaire, il se forme un complexe lipides-sirna amphiphile maintenu par des forces électrostatiques entre les charges positives des lipides et les charges négatives du sirna. Ce complexe passera alors facilement la bicouche de phospholipides membranaires. Cette technique permet la transfection de cellules adhérentes ou en suspension. Sur le marché : siport NeoFX par Ambion, DharmaFECT par Dharmacon, Lipofectamine RNAiMAX + Lipofectamine RNAiMAX Transfection reagent par Invitrogen, silentfect Lipid Reagent for RNAi + Tranfectin Lipid reagent par Biorad. 2) Electroporation Application de fortes impulsions électriques qui augmentent la perméabilité membranaire et permettent de faire pénétrer les sirna (4,18). L électroporation permet la transfection de cellules primaires ou en suspension et qui rencontrent des difficultés à être transfectées. Cependant cette technique engendre un fort taux de mortalité cellulaire. Sur le marché : siporter-96 Electroporation chamber d Ambion pour être utilisée avec le Gene Pulser Xcell Electroporation System de Biorad (Cf photo). Figure 2 : Electroporateur 3) Biolistique Cette technologie est aussi appelée bombardement de particules effectué à l aide d un canon à particules (18). Il s agit en fait de propulser les sirna recouverts sur de petites particules de métal, à une vitesse suffisante pour perforer les cellules cibles. La technique a été utilisée avec succès pour transformer les cellules animales, végétales et fongiques. Mais son utilisation est souvent tentée quand il n est pas possible de faire de l électroporation ou de la lipofection. Figure 3 : Helios Gene Gun de Bio-rad

4) Transfection par les vecteurs Les sirna peuvent aussi être intégrés à des vecteurs plasmidiques ou viraux afin de passer dans la cellule (13). Cette technique est recommandée pour des cultures de cellules difficilement transfectables comme les cultures primaires (4,5). Mais généralement il est plus facile et surtout plus efficace d utiliser les sirna sous forment s oligonucléotides seuls. Sur le marché : Ambion silencer sirna transfection II Kit, BLOCK-iT Pol II RNAi Expression Vector Kit Invitrogen. D. LES CONTROLES L utilisation de contrôles constitue un outil d analyse important permettant la validation de la méthode de «silencing». Cette étape est une étape critique pour le succès de l application, qui veille à établir la relation de cause à effet entre le «silencing» et le sirna. 1) Contrôles négatifs Le contrôle négatif permet de vérifier la spécificité de l effet des sirna en effectuant une expérience parallèle avec un contrôle qui ne cible aucun transcrit cellulaire (4,5). Pour cela on peut utiliser différentes sortes de séquences soit un scramble (ou mismatch) qui correspond aux mêmes bases que le sirna mais dans un ordre aléatoire, soit un sirna auquel il manque la séquence la plus active pour la cible. Tous deux ont pour but de distinguer les effets non spécifiques sur l expression des gènes induits par l introduction de l oligonucléotide. De plus, les industriels mettent à disposition de larges gammes de contrôles en kit qui facilitent l interprétation de l inhibition par le sirna. Il peut s agir, par exemple, de sirna modifiés chimiquement qui inhibent la capture et la dégradation par RISC ou encore de mismatchs passant par RICS mais non spécifiques d une espèce. Sur le marché : Stealth RNAi negative control Collection chez Invitrogen), sicontrol RISC- Free sirna et sirna Non targeting sirna chez Dharmacon, 2) Contrôles positifs Les contrôles positifs sont utilisés afin d optimiser l efficacité de la transfection et permettent de contrôler la délivrance du sirna(4,5). Il s agit en fait de cibler des protéines résidentes hautement exprimées ayant un effet biologique facilement mesurable. Ces témoins positifs sont fabriqués par les industriels et peuvent être de différentes natures. Les plus communément utilisés ciblent la lamine, la cyclophiline B ou la GAPDH. L expérience est alors comparée aux cellules non

transfectées. Ils témoignent alors de l inhibition de l expression du gène, corrélée à une transfection efficace. Sur le marché : Stealth RNAi Human Druggable Collection chez Invitrogen, Dharmacon sicontrol GAPD sirna/cyclophilin B, KD alert GAPDH assay kit chez Ambion 3) Contrôles de la transfection Il ne faudra pas non plus oublier d effectuer une expérience de contrôle sans sirna. Enfin, il sera utile de vérifier le niveau d ARNm par RT-PCR ou le niveau d expression de la protéine par Western-blot afin de quantifier l inhibition au niveau transcriptionnel et au niveau traductionnel (16). De plus, pour vérifier l efficacité de la transfection on peut utiliser un sirna tag ou gène rapporteur puis suivre les cellules par cytométrie en flux pour calculer le taux de transfection (4,5). Sur le marché : siglo transfection indicators et sicontrol TOX transfection control Dharmacon chez Dharmacon. II. UTILISATIONS STRATEGIQUES A l heure actuelle trois axes stratégiques sont développés: - Développements de la technique sirna - Etude de la perte de fonction des protéines - Caractérisation et validation de gènes cibles Pour ces trois parties nous avons voulu transmettre les informations générales sous forme d une petite synthèse illustrée par les interviews que nous avons réalisés. A. DEVELOPPEMENTS DE L OUTIL SIARN De nombreuses sociétés industrielles concentrent leurs recherches sur l optimisation de la technique de sirna. Elles tentent de sélectionner, pour chaque stratégie de délivrance et pour chaque type cellulaire, les sirna les plus spécifiques, les plus efficaces et les moins toxiques pour les cellules. 1) Design des sirna Le design des sirna est un facteur crucial pour déterminer leur efficacité à cibler l ARNm. On sait que chaque brin du sirna est capable de se lier à RISC et que seul le brin complémentaire (antisens) à l ARNm est capable de diriger RISC jusqu à sa cible pour entraîner sa dégradation. Sinon le brin sens provoque un effet «off-target» (5) ou absence de ciblage. Les sociétés comme Ambion ou Dharmacon ont bien compris ce problème et se sont spécialisées dans le design des sirna. C est

notamment la cas pour Ambion qui a développé avec Cenix BioScience un algorithme permettant de choisir les sirna (4) en fonction de plusieurs critères connus pour améliorer leur potentiels (6) : La distribution des nucléotides: AA(N19/21)TT (N=nucléotide), choix des deux nucléotides sortants (cf figure B2 : en 3 + 2nt). Le pourcentage de G/C, en général inférieur à 50% La position et la spécificité du sirna sur la séquence cible (logiciel BLASTE). La modification du brin sens pour limiter l effet «off-target» La modification de la séquence pour suivre les sirna (fluorochromes, Tag.) Autant de critères pour pallier aux contraintes structurales, thermodynamiques ou de cross hybridation qui diminuent l efficacité des sirna. Ainsi après l étape de design, 3 à 4 sirna les plus intéressants vont être choisis puis synthétisés, afin d être validés et sélectionnés en fonction de leurs effets. 2) Production des sirna Il existe plusieurs méthodes de conception des sirna: La synthèse chimique: le plus souvent utilisée pour les sirna commercialisés, cependant elle constitue aujourd hui la technique la plus coûteuse. La transcription in vitro: Synthèse de séquence d ARN de 21 nucléotides complémentaires à partir de l ADN par une ARN polymérase (ex: T7). Cette technique est beaucoup moins chère mais elle demande de fabriquer soi même les séquences. Mélange de sirna à partir d ARNdb: Cette technique est réalisée par une enzyme RNAse III ou DICER qui clive l ARNdb. Ce procédé est avantageux car il évite de tester toutes les séquences sirna en utilisant directement le mélange, par contre il peut entraîner des effets non spécifiques. Même si la synthèse chimique est la méthode la plus onéreuse elle reste aujourd hui la plus appropriée. C est dans l optique de mieux comprendre ce procédé que nous avons visité la plateforme de synthèse d oligonucléotides à haut débit de l Institut Pasteur. Synthèse chimique des sirna, un exemple concret : Mme Gouyette de formation chimiste a été à l initiation de la création de la plate-forme en 2003, dont elle est la responsable actuellement. Parallèlement à son activité de synthèse d ADN à haut débit, la plate forme met à disposition toute sa technologie pour la synthèse chimique des sirna.

Quels types de RNAi produisiez-vous? Dans notre plate-forme nous synthétisons essentiellement des sirna en fonction des demandes de l Institut ou de l extérieur. Ce sont en général des sirna de 21 bases, que nous livrons lyophilisés sous forme séparée simple brin. Quels sont les différentes étapes de production des sirna? Nous possédons deux synthétiseurs qui sont des appareils automatisés permettant d assembler les différents nucléotides. Leur capacité de production est très importante, car on travaille en format 96 puits et chaque appareil peut contenir jusqu'à deux Figure 4 : Synthétiseur plaques. La méthode de synthèse utilise la réaction Phosphoramidite, et se décompose en plusieurs étapes: Choix du support de la colonne : Standard: contenant un groupement CpG qui fixe un nucléotide en 3 (A,T, G ou C). Universel: contenant un groupement CpG sans nucléotides préalablement fixés. Programmation des synthétiseurs: Choix des séquences par puit, quantité, calcul des besoins en solvants, choix des bases (normales, modifiées, mélangées ) La réaction phosphoramidite : 1) Etape de détritylation: permet d enlever le groupement protecteur de la base fixée et ainsi libérer l extrémité 5 pour accrocher la base suivante. 2) Etape de couplage: Ajout de la base (libre en 3 et groupement protecteur en 5 ) avec un agent de couplage qui accélère la réaction de fixation. 3) Etape d acétylation: élimination des bases non fixées par ajout d anhydre acétique, qui bloque de manière irréversible les extrémités 3 libres des bases en excès. 4) Etape d oxydation: Oxydation du phosphate avec une solution d iode pour augmenter la stabilité. Les séquences obtenues sont ensuite purifiées pour enlever les groupements qui protègent les bases. Pour cette étape les séquences sont décrochées du support en ajoutant une solution d ammoniac très concentrée qui va parallèlement Figure 5 : Cycle de Phosphoramidite servir à dissocier les groupements protecteurs.

Quels sont les méthodes utilisées pour vérifier la qualité des ARN synthétisés? Pour cette étape trois vérifications sont effectuées, tout d abord pour mesurer la quantité d ARN par un dosage en spectrométrie UV, puis deux contrôles de la qualité des séquences en utilisant l électrophorèse capillaire et HPLC. Pour les séquences de petites tailles comme les sirna une autre technique est utilisée, la spectrométrie de masse (MALDI-TOF). Cette vérification très rigoureuse permet de déceler les anomalies qui auraient pu subvenir lors de la synthèse. Quels sont les contraintes de synthèse des ARN par rapport a l ADN En effet la synthèse d ARN demande des précautions supplémentaires car les ARN sont très sensibles aux ARNases, enzymes que l on retrouve un peu partout dans l environnement (mains, eaux.). 3) Validation des sirna et création des banques. Typiquement on utilise 3 à 4 sirna spécifiques d un même ARNm puisque statistiquement 1 seul sur 4 aura une efficacité supérieure à 70%. Les industriels développent des outils d analyse globale qui fonctionnent comme des puces de sirna(5). Les cellules et les sirna sont mélangés sur des plaques, où l on peut mesurer par référence aux contrôles le taux d ARNm et le phénotype induit. Ces différentes étapes de screening sont nécessaires pour confirmer le meilleur sirna et dans un deuxième temps de valider une fonction biologique. Ces différents tests sont réalisés en fonction du type cellulaire et de la méthode de transfert utilisée. L analyse globale permet de mettre au point des stratégies pour optimiser l utilisation des sirna et créer des librairies de sirna. B. ETUDE DE LA PERTE DE FONCTION D UNE PROTEINE L une des premières utilisations du sirna consiste à étudier les mécanismes fondamentaux de la fonction des gènes au niveau cellulaire et moléculaire. Le sirna se positionne comme une technique simple et rapide pour diminuer l expression d une protéine. Les applications possibles sont nombreuses et couvrent plusieurs domaines comme la transduction du signal, la régulation du cycle cellulaire, la mort cellulaire, l infection virale. (13). A la vue de toutes ces applications nous avons choisi d illustrer cette partie par un exemple concret d utilisation en immunologie, sous la forme d une interview avec Dr Libri Valentina. Phénotype perte de fonction, un exemple concret Le Dr Valentina Libri travaille à l Institut Pasteur depuis trois ans où elle effectue un post-doctorat dans l unité de signalisation des cytokines.

L unité utilise depuis trois ans l ARNi pour étudier la fonction de la protéine Jamip1 dans les lymphocytes T (LT) humains. Pourquoi avoir choisi cette technique et pas une autre? Pour Valentina le choix de cette technique a d abord été une volonté de caractériser le rôle de cette protéine en regardant l effet perte de fonction. En effet, la protéine étant connue pour être associée au réseau de microtubules, l utilisation des LTCD8 constituait un bon modèle pour étudier la perte de fonction dans les mécanismes de cytotoxicité dépendant du réseau de microtubules. Figure 6: Marquage fluorescent de Jamip1 Quelle méthode d ARNi utilisez-vous? Le choix du shrna par rapport aux autres techniques d ARNi semblait la plus appropriée pour transfecter des cellules primaires LT CD8. Pour cela ma démarche première a été d utiliser la technique des shrna associés à un vecteur lentiviral qui va permettre, une fois dans la cellule, la co-expression du hairpin couplé à la GFP. Cette stratégie nous permet d avoir une production stable du shrna dans le temps mais aussi de trier uniquement les cellules transfectées sur la base de leur expression en GFP. Pour valider l effet du shrna, nous utilisons deux techniques le Western-Blot et la RT-PCR quantitative pour contrôler respectivement, la diminution de la protéine et l ARNm. En effet, pour Valentina ces techniques sont complémentaires car dans certains cas, une diminution de l ARNm ne traduit pas forcément une diminution de la protéine notamment pour des protéines stables. Quels sont les résultats obtenus par rapport aux résultats attendus? Les résultats obtenus malgré une bonne efficacité des shrna (80 à 90% d inhibition de la protéine, 4 à 5 jours après la transfection), ne montrent pas d effet significatif sur la cytotoxicité des LTCD8. Cela résultant probablement des effets différents entre les cellules naïves versus mémoires, variant selon les échantillons. De plus au cours de mes expériences j ai observé que la protéine s exprimait au moment de l activation des LT or la transfection par des vecteurs lentiviraux demande une activation préalable des cellules. Afin de pallier à cette contrainte je vais donc utiliser des sirna seuls sur les LT CD8 naïfs perméabilisés par électroporation. Sachant biensur que cette approche ne permet pas d obtenir une efficacité de transduction dans le temps par rapport au shrna (diminution maximum de la protéine obtenu à partir de 48h et qui ne dure que 3 à 4 jours). Quels sont les avantages et les limites de cette technique? Pour moi, l irna constitue une technique simple et facile à utiliser pour dépléter n importe quelle protéine, à condition de choisir la meilleure approche suivant le modèle utilisé et la question posée.

L inconvénient majeur est qu il faut réaliser de nombreux contrôles pour valider les observations. En ce qui concerne ces expériences j utilise un témoin avec des cellules transfectées par un hairpin de contrôle pour s assurer que la diminution est spécifique aux sirna, et un autre sans hairpin pour vérifier que les effets observés correspondent bien à l inhibition de l ARNm et non aux «Side effect» (effets indésirables). Pensez-vous utiliser cette technique pour d autres applications? Je pense prochainement appliquer l interférence pour mettre en évidence les facteurs de transcriptions responsables de l activation de la protéine Jamip1 et ainsi déterminer une cible de contrôle de la protéine. Comprendre les mécanismes et les différences entre les cellules naïves et mémoires pourraient constituer une référence pour le développement de nouveaux vaccins. C. VALIDATION DE GENE CIBLE ET UTILISATIONS THERAPEUTIQUES Les sirna sont aussi largement utilisés pour déterminer de nouvelles cibles thérapeutiques dans les systèmes physiopathologiques sur des modèles animaux ou cellulaires. L objectif de cette approche étant d utiliser le sirna comme agent thérapeutique direct. Le sirna permet potentiellement d aborder un grand nombre de pathologies pour lesquelles les approches pharmacologiques conventionnelles ne sont pas utilisables. Les principales pathologies sont: Le cancer (inhibition des oncogènes ras, cmyc, p53 ) (7) Les maladies métaboliques : l hypercholestérolémie en ciblant l apoproteineb (8) Les infections virales comme l hépatite C, l hépatite B et le VIH (pour ce dernier les cibles potentielles correspondent au co-récepteur CXCR5 combiné à un autre sirna qui cible l ARN viral). (9) Mais actuellement, seules deux sociétés bio-pharmaceutiques conduisent des essais cliniques sur les sirna: SiRNA therapeutics (rattaché au groupe pharmaceutique Américain Merck) est en essai clinique de phase II, pour le traitement de la dégénérescence maculaire, utilise des sirna contre le récepteur de VEGF qui contrôle la croissance des vaisseaux. (10) Alnylam pharmaceuticals va prochainement conduire un essai clinique de phase I des sirna pour le traitement de l infection RSV (respiratory syncitial virus) en ciblant l ARN viral. (11). Pour illustrer cette partie nous avons réalisé l interview du Dr Patricia Lassiaze, qui utilise les sirna pour définir des stratégies thérapeutiques dans le traitement des maladies oculaires. Validation de gènes cibles, un exemple concret Patricia Lassiaze est directeur de recherche à l INSERM, unité physiopathologie des maladies oculaires innovations thérapeutiques. L unité travaille sur la neuroprotection de l œil dans plusieurs modèles de pathologies : glaucomes, inflammations (uvéites) et rétinopathies diabétiques. Afin

d essayer de cibler localement la pathologie la stratégie adoptée consiste à introduire des médicaments afin de résoudre les problèmes pathologiques. A partir de travaux initiés sur la caille, Patricia a isolé, a partir d une banque d ADNc de rétine, les gènes qui contrôlent la prolifération cellulaire (QN1) et l orthologue humain a été cloné (KIAAI9) à partir de cerveau (16). Q1/ Quelle méthode d interférence utilisez-vous? Pourquoi? Chez l oiseau, le rôle de la protéine QN1 a été démontré dans la prolifération cellulaire en utilisant des constructions virales (virus du sarcome de Raous modifié) avec une séquence anti sens et une sens. Avec cet anti sens on observe des anomalies de développement énormes surtout au niveau du photorécepteur : formation de tumeur. Ainsi les cellules continuent leur prolifération au lieu de s arrêter. In vivo, chez l oiseau il est facile d éteindre une protéine car nous possédons tous les rétrovirus. Mais en passant chez l humain, n ayant pas le ADNc entier il était impossible de faire un KO. Dans le but d étudier le rôle cette protéine QN1 sur la prolifération j ai donc décidé d utiliser les sirna pour diminuer de façon transitoire la production de la protéine. Q2/ Dans quel cadre sirna sont-ils utilisés? On sait que QN1 passe dans le noyau et est plus exprimée à l état quiescent qu à l état prolifératif. On a trouvé plusieurs formes : cytoplasmique à 300kDa et 150kDa associées au cytosquelette et une forme nucléaire à 90kDa. La structure en coiled-coil de la protéine comprend différents domaines : MAD, kinésines, Au cours de la physiologie de la rétine, les kinésines jouent un rôle dans le transport des informations du noyau vers les photorécepteurs pour réaliser la phototransduction. Si elles manquent ou sont déficientes cela aboutit à une mort des photorécepteurs et l on perd la vue par une dégénérescence (rétinites pigmentaires). Ces kinésines font partie de molécules moteur, qui accrochées aux microtubules, sont impliquées dans le fuseau mitotique et dans la ségrégation des chromosomes (ATPase). Afin de démontrer l implication de QN1 dans la mitose on utilise les sirna fluorescents pour visualiser la pénétration dans les cellules au cours de la transfection. Q3/ Quelle méthode de transfection utilisez-vous? Nous utilisons la lipofectamine qui est un peu toxique. Mais dans nos conditions le sirna est très bien rentré. On a réussi à trouver un bon équilibre avec une bonne efficacité de transfection. Q4/ Quels sont les résultats obtenus/attendus? L efficacité de transfection des sirna-qn1 est de 80%. Initialement menée sur des cellules neuronales PC12, l étude de la mitose a pu confirmer que QN1 est associée au pôle du fuseau mitotique. De plus, les cellules transfectées démontrent une ségrégation anormale des chromosomes au niveau de la plaque équatoriale. En effet, on a pu démontrer que QN1 joue un rôle sur le degré de polymérisation des microtubules (16). J ai donc pensé à refaire l expérience sur des cellules de cancer mammaire les MCF-7. Il est apparu que les cellules transfectées par le sirna-qn1

possèdent le même problème de repolymérisation du réseau de microtubules engendrant l anomalie de ségrégation des chromosomes sur la plaque métaphasique. Ce défaut mitotique aboutit à une apoptose des cellules MCF-7 encore plus grande que pour les cellules PC12, car elles sont déjà aneuploïdes. Q5/Quels contrôlent utilisez-vous? Pour valider l expérience on utilise un contrôle transfectant seul lipofectamine et un contrôle lipofectamine-scramble sirna qui ne cible rien. Q6/ Comment peut-on quantifier l efficacité des sirna, c'est-à-dire l inhibition? Par western blot on quantifie l expression de la protéine. Sinon il est possible de le voir par rapport à la mort cellulaire (tunnel). Q7/ Envisagez-vous d utiliser cette technique des sirna pour d autres applications? QN1 joue sur le fuseau pour arrêter la mitose et éventuellement tuer les cellules. Toutes ces expériences montrent qu on peut en faire un outil thérapeutique important à développer, en induisant la mort des cellules. On est entrain de le tester dans d autres pathologies. Notamment dans le lymphome oculaire, système mis au point par l équipe de Sylvain Fisson, qu il caractérise en ce moment. Nous effectuons aussi un travail avec un chirurgien de la rétine afin d essayer de coller plus à la clinique. III. POINT DE VUE SUR LES SIRNA Nous nous sommes posées la question de savoir pourquoi cette technique connaît-elle un tel engouement quand il existe d autres méthodes d invalidation d expression de gènes? Pour cela nous nous proposons d établir un petit comparatif (non exhaustif) de ces différentes technologies et enfin de discuter des avantages et inconvénients de l utilisation de sirna pour le «silencing». Méthode sirna Oligos antisens KO Dominants négatifs Avantages Spécifique Transitoire Silencing < 100% Utilisation facile Peu cher 100% silencing Suppression stable possible Inconvénients Transfection Mode de délivrance Effets secondaires possibles Peu stable/ Transitoire Silencing < 100% Pas toujours spécifique Silencing variable Gène entier Utilisation difficile Cher Dépend de la transfection Inhibiteurs Administration facile Non spécifiques en général Tableau 2 : Comparatif des différentes techniques d inhibition de l expression protéique

Suite aux discussions que nous avons pu avoir avec les différents professionnels rencontrés au cours de ce projet force est de constater que cette technique possède beaucoup de limites. Il en ressort une évidence : cette technique n est pas toujours efficace, elle est transitoire et n inhibe pas 100% de la protéine. Il est vrai que dans la majorité des cas on ne fait que diminuer l expression des protéines mais cela suffit. C est même parfois important de ne pas déléter totalement la protéine. En effet tout dépend du gène que l on cible et de la question que l on se pose. Il faut donc très bien connaître le type cellulaire pour savoir quand et comment utiliser le sirna. En addition à cela il est vrai que l efficacité de la réduction de l expression de la protéine varie selon l espèce, il s agit d un facteur cellule-spécifique. De plus, plusieurs études ont démontrées que l interférence provoquait une réponse anti-virale de type interféron de type I induisant une dégradation non spécifique des ARNm (12). Pour cela la taille de l oligonucléotide à son importance : elle doit être inférieure à 30nt. D autres effets secondaires sont observés quand le complexe RISC est saturé. Pour cela on effectue un titrage des sirna afin de déterminer la plus faible concentration efficace pour le silencing, ce qui permettra un mécanisme correct par la machinerie d interférence. De plus, cette concentration de sirna dans la cellule, associée au nombre de divisions cellulaires qui ont lieu, déterminent la durée des effets des sirna. C est pourquoi il peut y avoir un effet dilution des oligonucléotides dans le temps, rendant l effet très transitoire. Concernant la spécificité, il est également possible que le sirna cible plusieurs gènes. Pour cela il faut effectuer un blast dans les banques de données existantes et vérifier l homologie de séquences. Néanmoins l utilisation de contrôles est donc obligatoire pour prouver que la diminution de l expression de la protéine est due à l oligonucléotide et que l effet fonctionnel est une conséquence de cette diminution. Pour cela des contrôles sans traitement et scrambles sont requis, ce qui constitue un réel inconvénient d utilisation (cf partie 2 F). Enfin, comme nous avons déjà pu le souligner les systèmes de délivrance sont également responsables d échecs car ils ne sont pas toujours bien maîtrisés mais les industriels s appliquent à les améliorer. Les modes d administration peuvent également constituer une source de contraintes. QUEL AVENIR? La technique sirna s inscrit comme une technologie prometteuse qui a déjà vu naître bon nombre de succès. Cette réussite est à relativiser aux vues de toutes les critiques que nous avons pu émettre. C est pourquoi il faut chercher toutes les possibilités d apporter le médicament à la cible : essayer de cibler le plus possible pour éviter les effets secondaires.

Tout d abord étant donné la faible stabilité des sirna dans le temps (3 jours) il paraît important de travailler sur un meilleur système de délivrance pour faire rentrer le sirna sans qu il soit dégradé. Soit une délivrance par un plasmide qui produira l oligonucléotide en permanence (et donc trouver le meilleur vecteur selon le type cellulaire). Soit un système avec une délivrance lente : on peut arriver à mettre les sirna dans des microsphères (sorte de cages) qui se dissolvent doucement par température ou ph au fur et à mesure afin d apporter des sirna sur une plus longue période. Cette technique est notamment mise an point par Sirna Thérapeutics pour le traitement de la DMLA. Dans ce cas de microsphères, une seule administration dans la vitrée sera suffisante. Comme nous l avons vu avec le Dr Lassiaze, l œil est un organe privilégié du point de vue immunologique et bon nombre de pathologies pourraient être traitées si la technique d injection était améliorée. Pour cibler les photorécepteurs on pourrait envisager d injecter le médicament dans la chambre antérieure de l œil ou encore de le faire rentrer par un courant électrique qui éviterait les injections répétées qui abîment l œil. La voie systémique pourrait également être optimisée en protégeant le sirna pour arriver au ciblage. Différents facteurs permettent d optimiser la techniques : design, stabilité, A partir des sirna administrés en vecteur, il est envisageable de trouver des moyens permettant d optimiser la transfection afin d avoir 100% d efficacité. Enfin, la recherche actuelle tend vers les mirna. Dernièrement, une étude démontrait que l introduction d une parfaite complémentarité dans les mirna permettait d induire la dégradation de l ARNm ciblé. Ce qui indiquerait que les mirna pourraient agir comme des sirna. Les voies empruntées par ces deux systèmes se chevauchent. On peut donc envisager que les sirna pourraient également agir comme les mirna, en jouant sur la base de leur complémentarité. Cependant, dans l avenir la stratégie pour une application thérapeutique nous semble d avantage porter sur l injection ou l électroporation. Et le sirna constitue une bonne stratégie car il s agit d un système maîtrisé d une durée de 3 jours, évitant de trop grandes complications conséquentes aux effets secondaires. L utilisation en thérapie requière encore de nombreux développements technologiques en particulier liés à l administration et à la distribution efficace de ces sirna. Les résultats des essais cliniques en préparations ou en cours décideront de l avenir de son utilisation comme médicament.

BIBLIOGRAPHIE 1. Chalcone synthase cosuppression phenotypes in petunia flowers: comparison of sense vs. antisense constructs and single-copy vs. complex T-DNA sequences. Jorgensen RA, Cluster PD, English J, Que Q, Napoli CA. 2. Inducible systemic RNA silencing in Caenorhabditis elegans.timmons L, Tabara H, Mello CC, Fire AZ 3. RNA interference is mediated by 21- and 22-nucleotide RNAs. Elbashir SM, Lendeckel W, Tuschl T. 4. Source d information sur le site: www.ambion.com 5. Source d information sur le site : www.dharmacon.com 6. On the art of identifying effective and specific sirnas. Pei Y, Tuschl T. 7. Small Interfering RNAs Targeting Mutant K-ras Inhibit Human Pancreatic Carcinoma Cells Growth In Vitro and In Vivo. Zhu H, Liang ZY, Ren XY, Liu TH. 8. Knockdown of apolipoprotein B, an atherogenic apolipoprotein, in HepG2 cells by lentivirusmediated sirna. Liao W, Ning G. 9. Inhibition of human immunodeficiency virus type 1 replication in primary macrophages by using Tat- or CCR5-specific small interfering RNAs expressed from a lentivirus vector. Lee MT, Coburn GA, McClure MO, Cullen BR. 10. Source d information sur le site : www.sirna.com 11. Source d information sur le site : www.alnylam.com 12. Killing the messenger : short RNAs that silence gene expression. Derek M. Dykxhoor, Carl D. Novina and Phillip A. Sharp, Nature. 13. RNA Interference in Biology and Medicine. Ollivier Milhavet, Devin S. Gary and Mark P. Mattson, Phamacological Reviews, 2003. 14. Small Interfering RNAs. Thomas Tuschl and Arndt Borkhardt, Molecular Intervention, 2002. 15. Mechanisms of gene silencing by double-stranded RNA. Gunter Meister and Thomas Tuschi, Nature, 2004. 16. QN1/KIAA1009: a new essential protein for chromosome segregation and mototic spindle assembly. A Leon, B Omri, A Gely C Klein P Crisani, Oncogene, 2005. 17. Source d information sur le site : www.invitrogen.com 18. Source d information sur le site : www.biorad.com 19. Source d information sur le site : http://fr.wikipédia.org 20. Source d information sur le site : www.promega.com

LES ANNEXES

QUESTIONNAIRE INTERVIEWS 1) Quel est votre métier? 2) Dans quelle unité travaillez-vous? 3) Quel est votre domaine d activité? 4) Dans quel cadre utilisez-vous la technique ARNi? Depuis quand? 5) Quelles sont ses applications? 6) Quelle méthode d ARNi utilisez-vous? 7) Pourquoi avoir choisi cette technique et pas une autre? 8) Quelle méthode de transfection utilisez-vous? 9) Quels contrôlent utilisez-vous? 10) Comment peut-on quantifier l efficacité des sirna, c'est-à-dire l inhibition? 11) Quels sont les résultats obtenus par rapport aux résultats attendus? 12) Quels sont les avantages et les limites de cette technique? 13) Améliorations, perfectionnements éventuels de cette méthode dans l avenir? 14) Pensez-vous utiliser cette technique pour d autres applications?

QUESTIONNAIRE INTERVIEW DE LA PLATE-FORME 1) Quel est votre métier? 2) Dans quelle unité travaillez-vous? 3) Quel est l activité de la plate-forme? 4) Quels types de RNAi produisiez-vous? 5) Quels sont les différentes étapes de production des sirna? 6) Quels sont les appareils utilisés? 7) Quels sont les méthodes utilisées pour vérifier la qualité des ARN synthétisés? 8) Quel est le conditionnement des ARN produits? 9) Quels sont les contraintes de synthèse des ARN par rapport a l ADN

LISTE DES CONCTACTS INDUSTRIELS ACADEMIQUES Eric Corteggiani, PhD ecorteggiani@ambion.com Pascale Belguise, PhD pbelguise@polyplus-transfection.com Lassiaze Patricia, PhD Unité physiopathologie des maladies oculaires innovations thérapeutiques oculaires, INSERM: patricia.lassiaz@idf.inserm.fr Naïma Beldjoudi nbelbjoudi@genecust.com Libri Valentina, PhD Unité de signalisation des cytokines, Institut Pasteur : vlibri@pasteur.fr Brigitte Pertuiset, responsable projet brigitte.pertuiset@perbio.com Gouyette Catherine, PhD Plateforme de synthèse oligonucléotides à ahut débit, Institut Pasteur : oligos@pasteur.fr Arielle Faure, PhD arielle.faure@invitrogen.com

PROGRAMME DU SYMPOSIUM RIGHT