ENERGIE RENOUVELABLE ET ACCES A L OR BLEU POUR UNE EMERGENCE DE l AFRIQUE EN 2025 Se projeter dans l avenir est une entreprise qui est loin d être aisée. En effet, cette initiative peut être dénuée de toute objectivité du fait d un réalisme excessif ou d un pessimisme accentué. L Afrique est un continent qui se porte mal dans sa globalité. C est pour cette raison qu au fil des années, des projets à court ou à long terme ont été élaborés en vue de guérir le continent de ses maux. Mais les résultats n ont pas toujours été à la hauteur des attentes. Cependant, les espoirs persistent. L Afrique est consciente de ce qu elle a deux montagnes à traverser à savoir celui de l émergence et celui du développement économique. L avenir augure des perspectives heureuses en 2025. Un certain nombre de pays seront émergents à partir de cette date. La question qui se pose est celle de savoir s il ne s agit pas là d une ambition démesurée étant donné que le continent peine encore à résoudre les problèmes que certains peuples du monde considèrent comme un acquis : l accès à l eau potable. En effet, le continent s illustre par une croissance de la population sans précédents dans l histoire de l humanité. Cette situation occasionne une pression sur les ressources naturelles notamment l eau et l énergie électrique. A titre illustratif, près de 80 pour cent de la population africaine ne bénéficie pas d un accès direct à l électricité et 300 millions d africains n ont pas accès à l eau potable qui constitue un luxe en milieu rural. Pourtant, l Afrique compte dix-sept grands fleuves et une centaine de grands lacs, auxquels s ajoutent de considérables nappes phréatiques. C est dire que le continent ne manque pas de ressources, mais celles-ci sont soit gaspillées, soit insuffisamment exploitées. Ce constat est d autant plus préoccupant que le continent subi des changements climatiques qui viendront exacerber le manque d eau et d énergie. Dès lors, si rien n est fait d ici à 2025, la pénurie d eau et d énergie engendreront des tensions et de nombreux conflits et constitueront, par voie de conséquence un véritable frein au développement dans la plupart des Etats africains. Ces derniers seront confrontés à l insécurité alimentaire et verront leur espoir d émergence s envoler. Il est clair que l accès à l eau constitue un enjeu déterminant pour une l Afrique de 2025, car il a des répercussions sur la sécurité alimentaire et sur la sécurité énergétique qui constituent des défis à relever. Energie renouvelable et accès à l or bleu pour une émergence de l Afrique en 2025 Page 1
Ainsi, il sera question dans la suite de cet argumentaire de présenter cet enjeu, une présentation qui nécessitera d examiner les forces et les faiblesses du continent, qui en font une terre de paradoxes. L Afrique : un continent de paradoxes Le continent africain est une terre de paradoxes. Il dispose d un réservoir hydraulique dense, mais demeure la région du monde où l eau et l électricité constituent des denrées rares pour les populations. Cette analyse du directeur général de la Société d'énergie et d'eau du Gabon, François OMBANDA, résume à elle seule le paradoxe africain. Ce dernier affirme que sur les 5 400 milliards de mètres cubes d'eau renouvelable par an que recèle le continent, il n'en consomme que 4 % pour boire, irriguer et produire de l'énergie. Le contraste est encore plus visible à l intérieur du continent : l Afrique du Nord, où la disponibilité d eau est la plus faible du monde, enregistre avec l Afrique du Sud des performances appréciables en matière d accès de leurs populations en ressources renouvelables. Mais pour ce qui est de l Afrique subsaharienne, elle en dispose en abondance, mais les délestages et coupures d eau y sont le lot quotidien des populations. D ailleurs, selon un rapport conjoint de l'organisation Mondiale de la Santé (OMS) et du Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF), en 2008, l'approvisionnement en eau de la population était de 31 % en Afrique subsaharienne contre 60 % en Afrique du Nord. L Afrique enregistre les taux d électrification les plus faibles du monde : seulement 42% de sa population était connectée à l électricité en 2009 avec seulement 15% de la population rurale ayant accès à l électricité. Toutefois, cet indicateur ne devrait pas masquer les disparités entre l Afrique du nord (électrifiée à 99%) et l Afrique subsaharienne (électrifiée à 30%) Par ailleurs, 70 % de la population active africaine travaillent dans l agriculture, contre 43 % à l échelle mondiale. Pourtant, l Afrique n est toujours pas parvenue à l autosuffisance alimentaire, alors que la Chine et l Inde, qui disposent de 3 à 6 fois moins de surfaces cultivables disponibles, y sont parvenues. En effet, l Afrique importe près de 50 milliards de dollars de nourriture chaque année (Organisation Internationale du Travail, 2013), bien que le continent possède suffisamment de ressources pour produire à l échelle continentale les besoins alimentaires de ses 1,1 milliard d'habitants. Energie renouvelable et accès à l or bleu pour une émergence de l Afrique en 2025 Page 2
L un des Objectifs du Millénaire pour le Développement adoptés en septembre 2000 par l Assemblée Générale des Nations Unies prévoyait de réduire de moitié le nombre d'habitants dépourvus d'accès à l'eau d'ici à 2015. Cependant, Seuls l'afrique du Sud et peut-être le Sénégal atteindront ces objectifs. Force est donc de constater qu il est capital d anticiper sur l avenir de la plupart des Etats africains qui, n ayant pas pu atteindre ces objectifs au seuil de la date butoire (2015), auront encore beaucoup plus de mal à s en acquitter même si 11 années supplémentaires leur étaient accordées. Ceci d autant plus que cette même Assemblée, reconnaissant l'importance de l'énergie pour le développement durable et la lutte contre la pauvreté, s est fixé trois objectifs principaux à l horizon 2030: Un accès universel à des services énergétiques modernes ; Une réduction de 40 % de l intensité énergétique mondiale ; Une augmentation de 30 % de l utilisation des énergies renouvelables dans le monde. Elle a par ailleurs proclamé dans sa résolution 65/151, l'année 2012 Année Internationale de l'energie Durable pour tous. C est dire que l année 2025 s annonce vraiment décisive en termes de défis suscités. Défi en termes d accès à l eau potable d ici à 2025 L eau constitue le premier principe de vie (BERGONZINI, 2004). Aucune stratégie de développement ne peut réussir sans politique de l eau. Il n y a pas de développement humain sans accès assuré à l eau potable. Avec la croissance démographique, la consommation d eau progresse de manière vertigineuse, tandis que le renouvellement des ressources est menacé par les changements climatiques. Plus d un milliard de la population mondiale n a pas accès à l eau et deux fois plus ne disposent pas de systèmes d assainissement appropriés. Dans sa première déclaration sur les attentes placées dans le sommet de Johannesbourg, le Sécrétaire général des nations unies a déclaré que «sans des mesures rapides et décisives, d ici 2025, les deux tiers de la population mondiale vivront peut-être dans des pays qui auront à faire face à une grave pénurie d eau.». Ces propos sont source d inquiétude dans un contexte de pauvreté où le manque d eau accentue les inégalités entre riches et pauvres et entre hommes et femmes. Ce contexte est celui de l Afrique dont environ 40% de la population située au Sud du Sahara n a pas accès à l eau potable. Selon le quatrième rapport de l ONU sur l eau, c est la partie du Energie renouvelable et accès à l or bleu pour une émergence de l Afrique en 2025 Page 3
monde où l accès à une eau de qualité est le plus limité. Or, La population africaine devrait augmenter de moitié entre 2010 et 2040, avec un pourcentage de citadins qui passerait de 44 % à 57 %. L Association Africaine de l Eau (AAE) et la Banque Mondiale, préparent actuellement une étude sur une trentaine de capitales africaines, afin de déterminer comment les sociétés de distribution peuvent préparer les vingt à trente prochaines années. Une première partie a été publiée lors du 16 e congrès de l'association, à Marrakech (du 20 au 23 février 2012). Selon le cabinet de conseil et d'ingénierie français, les besoins domestiques en eau d'ici à 2040 devraient se situer entre 135 milliards et 161 milliards de mètres cubes par an pour l'ensemble du continent. Il est donc clair que les besoins en eau s accentueront au fil des années, et en 2025, soit dans une décennie environ, les efforts de développement des Etats africains seront entravés par le manque d eau. La question de l eau s avère donc être un problème crucial qui se posera avec acuité en 2025, car la pénurie d eau a une incidence sur l énergie électrique et sur la production agricole. Rareté de l eau et sécurité alimentaire L agriculture est le premier secteur mondial en termes de consommation d eau avec près de 70 % du total des prélèvements (ONU). Dès lors, lorsque l eau se fait rare du fait des changements climatiques, cela a un impact sur la production agricole et expose les populations à l insécurité alimentaire. Or, les dirigeants africains se sont engagés lors du sommet de Maputo de 2003 portant sur l agriculture et la sécurité alimentaire, à réduire la faim de moitié d ici à 2025. Ceci impose une révolution agricole du continent. De l aveu même des participants au Sommet, le développement du secteur agricole est une condition sine qua non de l essor économique d une nation, «un secteur clé de la transformation du continent». Mais ce développement ne pourra se faire sans une politique nationale et internationale à même de prévenir le continent de la pénurie de l eau. Comment expliquer qu un nombre important d agriculteurs africains comptent sur les eaux de pluie pour arroser leurs champs alors que le changement climatique constitue une menace réelle? Une expression populaire traduit l impression de dérèglement climatique général : «il n ya plus de saison!». La grande majorité des hommes de science affirment que le climat à changé. De nombreux pays africains ont de plus en plus de préoccupations liées aux changements climatiques (sécheresses, inondations et variabilité des précipitations), qui, Energie renouvelable et accès à l or bleu pour une émergence de l Afrique en 2025 Page 4
additionnées aux faibles capacités d adaptation et à la pauvreté des populations, rendent ces pays encore plus vulnérables. Le manque d eau entraîne le manque d électricité, car il existe une interdépendance entre les deux ressources. Pour preuve, la production énergétique représente près de 15% des prélèvements en eau. L énergie électrique est utile pour pomper l eau des nappes souterraines. Sous l effet de la croissance démographique cette tendance devrait augmenter. C est pour cette raison qu il n existe pas une différence notoire entre les populations privées d eau et les populations privées d électricité.. L énergie renouvelable : une réalité en 2025? L Afrique dispose de potentiels hydrauliques, de géothermie, de biomasse, de solaire et d éolien non négligeables. Ces vastes potentiels demeurent cependant largement inexploités. Pourtant ceux-ci ont l avantage de combler une partie des besoins en énergie des pays africains. De nombreux pays africains sont vulnérables face à la sécheresse du fait de leur dépendance vis-à-vis de la production hydraulique. L accès à l eau et à l énergie pour tous sont indispensables pour un développement durable. Tant que les populations seront privées de ces ressources, elles développeront des stratégies de survie destructrices pour l environnement. L eau et l énergie constituent des défis majeurs de développement en Afrique. L introduction des technologies des renouvelables a longtemps souffert du manque de compétences techniques en la matière. Mais ces dernières années des centres de formation ont été ouverts dans la plupart des états pour assurer une formation de qualité en matière d énergie renouvelable. Ceci étant, tout porte à croire qu en 2025, la dépendance à l égard de la production hydraulique sera résolue grâce à l exploitation de l énergie renouvelable. L énergie solaire et éolienne seront des réalités, mais beaucoup restera encore à faire notamment en ce qui concerne l énergie de la biomasse. Cet énergie constitue encore aujourd hui la principale source d énergie primaire dans un nombre considérable de ménages. Selon les prévisions, le nombre absolu de personnes dépendant de l énergie de la biomasse en Afrique devrait augmenter passant de 583 millions en 2000, à 823 millions en 2030, soit une augmentation de 27%. Ceci constituera un défi majeur à relever en 2035, car l énergie de la biomasse a un impact sur la santé des populations. En effet, utilisée pour la cuisine sans aucun dispositif d évacuation de la fumée, elle occasionne des maladies respiratoires. Energie renouvelable et accès à l or bleu pour une émergence de l Afrique en 2025 Page 5
Quelles propositions pour 2025? 2025 s annonce prometteur pour l Afrique. C est l année de l émergence pour certains pays. Mais pour y parvenir, il faudra relever le défi de l accès à l eau ainsi que celui de l accès à l électricité. Ce sera sans compter avec la croissance démographique de la population africaine qui pourra atteindre les 1,5 milliards à cette date. C est donc dès à présent qu il faudrait prévoir le manque d eau et d électricité, car si rien n est fait de nos jours pour anticiper sur la situation qui s annonce, les populations descendront dans les rues pour réclamer de l or bleu c'est-à-dire l eau. Il importe donc de faire des propositions pour prévenir la situation : Dans la mentalité africaine, l eau est une denrée qui ne saurait être marchandée. Elle constitue un don généreux de la nature qui se donne gratuitement. Ce faisant, s acquitter de frais mensuels d eau semble être un coût difficile à supporter quel qu en soit le montant. C est cette vision des choses qui conduira plus d un africain qui dispose de l eau de robinet, à la délaisser pour aller la chercher plus loin ; que ce soit dans un puits, que ce soit dans toute autre source d approvisionnement en eau. Il est donc important que Les gouvernements mettent en œuvre des campagnes de sensibilisation des populations rurales sur les risques encourus par la consommation de l eau de moindre qualité. Même si cette dernière est traitée, il reste tout de même que puiser de l eau à des kilomètres constitue une perte énorme en temps et en argent. De nombreuses heures sont passées pour la recherche de l eau ; ce qui n est pas sans répercussions sur les autres secteurs d activité. En 2025, les populations devraient supporter le coût de l eau qui augmentera certainement. Si le prix de l eau augmente, celui de l électricité suivra. De toutes les façons, elles n auront pas le choix puisque le modernisme les a rendues dépendantes de l eau et de l électricité ; Mettre en place des infrastructures de distribution et d assainissement d eau pour permettre aux populations d accéder à une eau potable. En effet, les structures qui ont en charge la gestion et la distribution de l eau dans la plupart des pays africains dépendent de l Etat, ce qui leur laisse une marge de décision limitée ; Energie renouvelable et accès à l or bleu pour une émergence de l Afrique en 2025 Page 6
Sur le plan social, s assurer de l accessibilité des plus vulnérables à l eau et à l énergie, car ces derniers en payent le lourd tribut. Ce sont généralement les femmes et les enfants qui sont chargés de l approvisionnement en eau. Ces derniers doivent aller s en procurer sur de longues distances et doivent supporter la pénibilité du puisage et les longues files d attente ; Assurer une formation en énergie renouvelable en Afrique. Ces dernières années, des écoles de formation en la matière sont ouvertes dans les pays africains et des mécanismes de recyclage sont mis sur pieds. Ces initiatives doivent être encouragées dans les autres pays qui trainent encore le pas, car promouvoir l énergie renouvelable, c est promouvoir la sécurité énergétique ; Afin d éviter des pénuries d eau et d électricité en 2025, il importe pour les Gouvernements africains, d assurer une bonne coopération entre les deux secteurs d activité. En général, la gestion de l eau est indépendante de celle de l électricité, pourtant ces deux ressources sont dépendantes comme il a pu être démontré. C est pour cette raison que si l un des secteurs se porte mal, l autre le sera aussi ; Lutter contre le gaspillage de l eau. Pour ce faire, surveiller les fuites éventuelles et réagir au plus vite au moindre signalement. Et pourquoi pas utiliser l eau de moindre qualité pour des activités qui ne nécessitent pas l usage de l eau potable ; Les pays africains se doivent donc d instaurer un rassemblement solidaire autour de l eau entre les pays qui en disposent en quantité et ceux qui vivent dans des zones arides et semi-arides où la survenance des précipitations est aléatoire en vue d une redistribution équitable de cette denrée. Cette mesure est d autant plus capitale que selon les estimations de l Atlas sur l eau, la proportion de la population africaine risquant d être soumise à un stress hydrique et à une pénurie d eau augmentera de 65% en 2025. Il s agit là d un pronostic inquiétant dont les effets peuvent être réduits si des mesures sont prises dès à présent. Promouvoir une révolution agricole pour combattre l insécurité alimentaire qui pointe à l horizon 2025. Cette révolution se veut d ailleurs durable. Il est question ici d utiliser le moins de ressources notamment l eau pour une production optimale. Cette mesure permettra d économiser une quantité importante d eau compte tenu de ce que le secteur agricole est le plus grand consommateur d eau. Energie renouvelable et accès à l or bleu pour une émergence de l Afrique en 2025 Page 7
BIBLIOGRAPHIE BERGONZINI, J. C. (2004), Changements climatiques, Désertification, Diversité biologique, Et forêts, Silva. Rapport de l Organisation des nations unies pour l alimentation et l agriculture (2012) Faire face à la pénurie d eau, Rome. Afrique, Atlas de l eau, résumé pour les décideurs Nations Unies (2012),Recommandations internationales sur les statistiques sur l eau, Etudes statistiques, série M, N 91, 241P. Fondation prince Albert II de Monaco, Rapport annuel 2008 Energie renouvelable et accès à l or bleu pour une émergence de l Afrique en 2025 Page 8