3A 97 37 l'autorité foncière cantonale; En fait:



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IIIe Cour administrative. Séance du 27 octobre 1998. Statuant sur le recours interjeté le 21 mars 1997 (3A 97 37) par X, représentée par Me Y, avocat à Fribourg, contre la décision rendue le 3 octobre 1996 par l'autorité foncière cantonale; (notion d'un immeuble agricole et partage matériel / vente forcée et assujettissement des immeubles à la LDFR) En fait: A. En 1981, les époux V ont acquis quatre immeubles, art. 35aa, 35ab, 40 et 391 RF de la Commune de P, pour un prix de Fr. 325'000.--. Le prix fixé était celui d'une résidence non agricole avec 30'000 m2 de terrain. Pour financer l'achat de ces immeubles et la rénovation du bâtiment se trouvant sur l'art. 35aa, ils ont constitué deux cédules hypothécaires pour un montant total de Fr. 252'000.--. A cette fin, ils ont requis du Secrétariat de la Caisse d'amortissement de la dette agricole qu'il constate le caractère non agricole des immeubles et le non assujettissement de ceux-ci à la loi fédérale sur le désendettement des domaines agricoles (LDDA) alors en vigueur. Par acte du 5 octobre 1981, le Secrétariat de la Caisse d'amortissement de la dette agricole a déclaré que "les quatre articles ne constituent pas une exploitation agricole ayant le caractère de l'unité économique. Les terres font partie de l'environnement à sauvegarder pour une résidence non agricole. Ces articles ne doivent pas être assujettis à la LDDA". Le 16 octobre 1981, forts de cette déclaration, les époux V ont constitué deux cédules hypothécaires, l'une d'un montant de Fr. 185'000.-, en premier rang, et l'autre de Fr. 67'000.-, en second rang. Jusqu'en 1989, les époux V ont augmenté les montants des cédules. Les créanciers des époux V ont ainsi obtenu des garanties pour une créance totale de Fr. 648'000.--. La société X (ci-après: X) est titulaire de droits de gage sur les immeubles pour un montant de Fr. 458'000.-, soit deux cédules hypothécaires au porteur de Fr. 260'000.- et 198'000.- en premier et parité de rang. Pendant de nombreuses années, les époux V ont gardé l'usage et la jouissance de l'ensemble de la surface acquise, soit environ 30'000 m2. Sur cette surface, dont l'art. 35ab a été intégré à la parcelle 35aa suite à un remaniement parcellaire, ils ont fait paître des chevaux de loisir et parfois des poneys qu'ils prenaient en pension. Le fourrage provenait des trois parcelles et le fumier produit était épandu sur celles-ci. Finalement, les époux V ont affermé l'art. 391 ainsi qu'une partie des art. 35aa et 40 et ils ont conservé

- 2 - l'usage et la jouissance d'environ 15'000 m2. Ils ont gardé trois chevaux qui disposent de trois boxes se trouvant sur l'art. 35aa. B. Dans le cadre de la vente aux enchères des art. 35aa, 40 et 391, l'office des poursuites de la Veveyse a demandé, le 31 juillet 1996, à l'autorité foncière cantonale de fixer le prix licite de vente des immeubles précités, conformément à l'art. 68 de la loi fédérale sur le droit foncier rural (LDFR; RS 211.412.11). Par ailleurs, il a prié l'autorité foncière de lui indiquer si la proposition de division d'une parcelle contenant le bâtiment en vue de son non-assujettissement à la LDFR était envisageable. C. Par décision du 3 octobre 1996, l'autorité foncière a constaté que les bâtiments se trouvant sur l'art. 35aa ainsi qu'un dégagement de 4'000 m2 n'avaient pas d'affectation agricole et qu'ils n'entraient donc pas dans le champ d'application de la LDFR. Pour le reste de l'art. 35aa ainsi que pour les art. 40 et 391, elle a fixé le prix licite maximum des immeubles à Fr. 3,90 le m2. D. Le 21 mars 1997, X a saisi le Tribunal administratif. A l'appui de son recours, elle invoque, en résumé, la violation du principe de la protection de la bonne foi ainsi qu'une mauvaise application de la loi fédérale sur le droit foncier rural. Elle demande, à titre principal, que soit constaté que les art. 35aa, 40 et 391 n'entrent pas dans le champ d'application de la LDFR et que, par conséquent, il n'y a pas lieu de fixer le prix licite. A titre subsidiaire, elle requiert du Tribunal administratif de constater que la partie des art. 35aa et 40 qui n'est pas exploitée de manière agricole n'entre pas dans le champ d'application de la LDFR. Parallèlement au recours de droit administratif, X a introduit une demande en reconsidération auprès de l'autorité foncière qui l'a rejetée par décision du 14 avril 1997. Le 16 mai 1997, l'autorité foncière a déposé ses observations au recours. Elle conclut, du moins implicitement, au rejet du recours et à la confirmation de sa décision du 3 octobre 1996. Elle se réfère aux considérants de sa décision de rejet de la demande de reconsidération.

- 3 - En droit: 1. a) La compétence du Tribunal administratif pour connaître du présent recours contre une décision de l'autorité foncière cantonale découle de l'art. 11 de la loi du 28 septembre 1993 d'application de la LDFR (LALDFR; RSF 214.2.1). Conformément à l'art. 88 al. 1 LDFR, une décision de constatation de l'afc peut être attaquée devant l'autorité cantonale de recours compétente dans ce domaine. La recourante en sa qualité de créancière-gagiste est touchée par la décision de l'autorité intimée et elle a un intérêt digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée. Partant, elle a qualité pour recourir au sens de l'art. 76 let. a du code du 23 mai 1991 de procédure et de juridiction administrative (CPJA; RSF 150.1). Interjeté le 21 mars 1997 contre une décision rendue le 3 octobre 1996, mais notifiée seulement le 21 février 1997 à la société recourante, le recours respecte le délai légal de trente jours (art. 79 al. 1 CPJA et art. 88 al. 1 LDFR), ainsi que les formes prévues aux art. 80 et 81 CPJA. Le recours est donc recevable à la forme. b) En vertu de l'art. 77 al. 1 CPJA, le recours peut être formé (lettre a) pour violation du droit, y compris l'excès ou l'abus du pouvoir d'appréciation et (lettre b) pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents. Dans la mesure où aucune des situations prévues aux lettres a à c de l'art. 78 al. 2 CPJA n'est réalisée en l'espèce, le Tribunal administratif ne peut pas, dans le cas particulier, revoir l'opportunité de la décision entreprise. 2. a) Le droit à la protection de la bonne foi comporte notamment le droit d'exiger que l'autorité respecte ses promesses et qu'elle évite de se contredire (A. Grisel, Traité de droit administratif, tome I, Neuchâtel 1984, p. 388ss). La jurisprudence fait découler le droit à la protection de la bonne foi de l'art. 4 Cst. Conformément à ce droit, l'autorité est obligée d'agir de la même manière à l'égard de tous les administrés. L'autorité qui fait une promesse, donne une information ou une assurance, applique un contrat de droit administratif ou a un comportement créant certaines expectatives doit honorer sa promesse ou satisfaire les expectatives créées, en vertu du principe de la bonne foi, même si la promesse ou l'expectative sont illégales si cinq conditions sont cumulativement remplies: 1. L'autorité doit avoir agi dans un cas concret et vis-à-vis d'une personne déterminée.

- 4-2. L'autorité qui a agi doit avoir été compétente ou censée compétente; il faut entendre par là que l'administré ne devait ni ne pouvait se rendre compte de l'incompétence de l'autorité qui a fourni la promesse. 3. L'administré ne pouvait se rendre compte immédiatement de l'illégalité du comportement ou de la promesse. Il s'agit là du principe de la bonne foi de l'administré. 4. L'administré doit avoir pris, sur la base des informations qui lui ont été données, certaines dispositions qu'il ne saurait modifier sans subir un préjudice. 5. Enfin, il faut que la législation ne se soit pas modifiée entre le moment où l'autorité a fait ses déclarations ou a eu son comportement et celui où le principe de la bonne foi est invoqué. Cette dernière ne protège, en principe, pas contre les changements de législation car l'administration ne saurait lier le législateur par des promesses ou assurances (B. Knapp, Précis de droit administratif, 4 e Ed., Bâle 1991, p. 108 et 109 no 509 et la jurisprudence citée). Ainsi il résulte des conditions mêmes de son application que le principe de la bonne foi ne protège pas en cas de changement de loi. Il n'assure pas une sécurité juridique absolue. En effet, chaque administré doit s'attendre à ce que la loi change. Une exception à ce principe serait que le législateur ait prévu dans la loi son maintien pendant un certain temps et que la demande du respect des promesses intervienne dans ce laps de temps. L'administration peut, elle aussi, garantir dans les limites de ses compétences, par une décision ou un contrat de droit administratif avec l'administré, le maintien de la situation juridique pour une certaine durée, quelle que soit l'évolution de la législation (cf. B. Knapp, op. cit., p. 109 et 110 nos 513, 514 et 517 ainsi que le jurisprudence citée). b) En l'espèce, la question se pose de savoir si la déclaration de non assujettissement à la LDDA des articles 35aa, 35ab, 40 et 391 du registre foncier de la Commune de P, faite par la Caisse d'amortissement de la dette agricole, lie aujourd'hui encore l'autorité foncière cantonale. Au regard des conditions énumérées ci-dessus, la déclaration de la Caisse d'amortissement de la dette agricole avait bien le caractère d'une promesse effective, émanant de l'autorité compétente, sur laquelle l'administré était en droit de se fonder. Cependant, la condition du non changement de loi entre le moment de la promesse et celui où l'administré entend la faire valoir n'est pas remplie. De plus, la loi ne contenait aucune disposition prévoyant qu'elle ne serait pas modifiée ou serait maintenue pendant un certain temps. Finalement, la déclaration de la Caisse d'amortissement ne contenait aucune

- 5 - garantie pour l'administré du maintien de sa situation juridique pour une certaine durée, quelle que soit l'évolution de la législation. A cela s'ajoute que les dispositions de la LDDA en matière d'assujettissement à cette loi ont perdu toute signification juridique à partir du 1 er janvier 1994 (C. Bandli, das bäuerliche Bodenrecht, Kommentar zum Bundesgesetz über das bäuerliche Bodenrecht vom 4. Oktober 1991, Brugg 1995, p. 780 no 4 ad art. 95 LDFR). Après l'entrée en vigueur de la nouvelle loi, les époux V n'ont pas requis de l'autorité nouvellement compétente de décision constatatoire. Quant à cette dernière, elle n'était pas tenue de signaler d'office aux intéressés l'assujettissement de leurs immeubles à la nouvelle loi. Ainsi, la recourante ne peut pas invoquer le principe de la bonne foi et le droit au respect des promesses dans la mesure où la législation sur le droit foncier rural a été modifiée. 3. a) En vertu de son art. 2 al. 1, la LDFR s'applique aux immeubles agricoles isolés ou aux immeubles agricoles qui font partie d'une entreprise agricole, qui sont situés en dehors d'une zone à bâtir au sens de la loi sur l'aménagement du territoire et dont l'utilisation agricole est licite. La notion d'immeuble retenue par la LDFR correspond à celle de l'art. 655 al. 2 du Code civil (RS 210), sauf les mines. Ces immeubles doivent être appropriés à un usage agricole ou horticole (art. 6 LFDR) ou à un usage mixte (art. 2 al. 2 let. d LDFR) et situés en zone agricole, sous réserve de cas particuliers (art. 2 al. 2 let. a et c LDFR) (Y. Donzallaz, Le nouveau droit foncier rural, Sion 1993, p. 47 no 91 ad art. 7 LDFR). Il est à noter que la zone d'affectation dans laquelle se trouvent des immeubles ou une entreprise au sens de l'aménagement du territoire n'est pas déterminante (B. Studer / E, Hofer, Le droit du bail à ferme agricole, Brugg 1988, p. 31). Concrètement, toutes les surfaces qui ne sont pas boisées et qui disposent d'une couche de terre suffisante pour la végétation se prêtent à un usage agricole (C. Bandli, op. cit., p. 128 no 7 ad art. 6 LDFR). La caractéristique de l'aptitude est de nature mixte à prédominance objective: il convient en priorité d'analyser si, indépendamment de l'usage qui en est fait, un terrain est apte à être utilisé de manière agricole ou horticole. Toutefois, ce concept objectif doit être tempéré par des considérations d'ordre subjectif: l'usage qui en a été fait, depuis de longues années, doit jouer un rôle dans l'appréciation des autorités. Un parc attenant à une villa située en zone agricole, se prêterait aussi, sur la base de critères purement objectifs, à un usage agricole ou horticole. Le but de la loi n'est pas de faire de tels immeubles des immeubles agricoles. Il va toutefois de soi que la composante subjective n'a qu'une valeur secondaire. Dans le doute, l'immeuble ne sera pas considéré comme étant soumis à la LDFR. Par

- 6 - contre, si une partie de l'immeuble est effectivement affectée à l'agriculture, l'art. 2 let. d s'appliquera: il s'agit alors d'un usage mixte (Y. Donzallaz, op. cit., p.44 no 81 ad art. 6 LDFR et doctrine citée). b) En l'espèce, d'après les pièces figurant au dossier, on est en présence d'immeubles situés dans une zone agricole et dont l'utilisation agricole est licite. Par ailleurs, l'art. 391 est affermé ainsi qu'une partie des art. 35aa et 40. Enfin, il s'agit de prés où paissent des animaux et qui fournissent du fourrage. Il ne fait dès lors aucun doute que ces terrains sont aptes à être utilisés de manière agricole. Selon l'art. 2 al. 1 LDFR, ils sont donc soumis à la LDFR indépendamment de leur usage actuel, contrairement à ce qu'affirme la recourante. 4. a) Selon l'art. 58 LDFR, aucun immeuble ou partie d'immeuble ne peut être soustrait à une entreprise agricole (al. 1; interdiction de partage matériel); les immeubles agricoles ne peuvent, en outre, pas être partagés en parcelles de moins de 25 ares (al. 2; interdiction de morcellement). L'art. 59 let. d LDFR dispose toutefois que ces interdictions ne sont pas applicables dans le cadre d'une réalisation forcée. Dans ce cas, comme dans les autres éventualités mentionnées à l'art. 59 LDFR, la loi considère que d'autres intérêts publics l'emportent sur eux qui président au maintien d'entreprises et de surfaces minimales (Message à l'appui des projets de la loi fédérale sur le droit foncier rural FF 1988 III 970 ss.; C. Bandli, op. cit., p. 535 no 6 ad art. 59; Y. Donzallaz, op. cit., p. 149 no 519 ad art. 59). En particulier, il serait contraire aux buts de la loi (cf. art. 1 al. 1 er let. a LDFR) de procéder à la mise aux enchères de l'ensemble d'une entreprise agricole, si, parmi les immeubles qui en font partie, un seul fait l'objet d'une exécution forcée. Par ailleurs, dans le cadre de celle-ci, les intérêts des créanciers, et également ceux du propriétaire, commandent souvent une aliénation par parcelles de l'entreprise agricole (C. Bandli, op. cit., p. 358 no 12 ad art. 59 LDFR). b) En l'occurrence, l'autorité foncière, constatant que l'art. 35aa, d'une surface totale de 10'387 m2, supporte des bâtiments (une habitation, une grange et une écurie) qui n'ont pas d'affectation agricole, a estimé que cet immeuble devait être divisé en fonction de l'affectation du sol. Elle a décidé que les bâtiments et une place de dégagement d'environ 4'000 m2, sis sur l'immeuble art. 35aa, n'entraient pas dans le champ d'application de la LDFR. Pour le reste des immeubles, elle a fixé à fr. 3,90 le m2 le prix licite maximum. c) La recourante reproche à l'autorité intimée d'avoir distrait une surface insuffisante de dégagement. A l'appui de ce grief, elle invoque le rapport

- 7 - établi par l'institut agricole de Grangeneuve dont il ressort qu'un cheval de loisir a besoin d'une surface d'un demi-hectare. Dans le cas d'espèce, il faudrait donc soustraire, d'après la recourante, une surface de dégagement de 15'000 m2 et non pas de 4'000 m2 ainsi que l'a fait l'autorité foncière. Cette opinion est erronée. En effet, la recourante perd de vue que l'estimation de l'institut agricole de Grangeneuve repose sur des critères qui correspondent précisément à une exploitation de nature agricole de chevaux dans la mesure où les animaux dépendent des produits tirés de l'exploitation du sol (B. Studer/E.Hofer, op. cit., p. 31). Une surface de 0,5 ha par cheval doit permettre la production du fourrage, l'exercice physique de base et l'épandage du fumier d'un cheval de loisir. La recourante ne saurait cependant en conclure qu'une telle surface doive être obligatoirement libérée du champ d'application de la loi et être affectée définitivement à une utilisation non agricole du sol. Il ressort du dossier de la cause que les époux V possèdent des chevaux et des poneys de loisir, en propriété ou en pension, essentiellement pour leur propre agrément. Il s'agit en réalité d'une activité résiduelle de loisir qui ne correspond pas à une exploitation de nature agricole qui justifierait, le cas échéant, d'admettre une surface de dégagement de 0,5 hectare par équidé. Une surface de 4'000 m2 qui comprend la surface arborisée et celle aménagée actuellement en parc à chevaux semble dès lors une surface appropriée qui permet de soustraire une partie des immeubles aux restrictions particulières de la LDFR (cf. notamment ATA du 3 décembre 1997 p. 8 et 9 dans la cause E. dans lequel une surface de 4'200 m2 a été jugée suffisante). La mise aux enchères séparées de l'aire de dégagement de 4'000 m2 est suffisante sans pour autant diminuer d'une manière exagérée la surface agricole, conformément au but visé par la LDFR ( cf. art. premier). La décision de l'autorité intimée est par conséquent judicieuse; elle n'est pour le moins pas arbitraire et peut, par conséquent, être confirmée. 5. Au vu des considérants qui précèdent, le recours doit être rejeté.