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UNIVERSITÉ PANTHÉON-ASSAS PARIS II Année universitaire 2007-2008 Travaux dirigés - Master I en droit DROIT PUBLIC DE L ÉCONOMIE II Cours de Mme la Professeure Martine LOMBARD Distribution du 5 au 9 mai 2008 Séance n 10 Le soutien au cinéma 1 / BIBLIOGRAPHIE - Sur le financement du cinéma : BERLAND S., «La guerre de Troie du cinéma français aurait-elle lieu?», Gaz. Pal., 6 mai 2005, pp.12-18. CLAY T. et CONSTANTIN A., «Le film était presque français. (à propos de l'arrêt rendu par la Cour administrative d'appel de Paris le 31 mai 2005)», D., 2005, pp.2494-2498. GARSON C., «Le paysage cinématographique français depuis le rapport Leclerc : "Jusqu'ici tout va bien"...», Gaz. Pal., 7 mai 2004, pp.13-17. GIOLITO C. et DERENNE J., «Chronique», Concurrences, 1 er juillet 2007, pp.123-132. RENAULT C.-E., «Financement et distribution des œuvres cinématographiques : quel avenir pour les aides publiques au niveau européen?», Gaz. Pal., 13 mai 2007, pp.22-30. RENAULT C.-E. et COURNIL C., «Réflexions sur le soutien automatique à la production cinématographique. A propos des récents "désagréments des sociétés de production "extraeuropéennes"», Revue Lamy droit de l'immatériel, 1 er novembre 2005, pp.49-59 - Sur la régulation des industries culturelles : CORNU, M., «La Convention pour la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles : nouvel instrument au service du droit international de la culture», Journal du droit international, 2006, n 3, p. 929-935. DERIEUX, E., «L OMC et la communication : de l «exception culturelle» à la «diversité culturelle»», LPA, 1999, n 231, p. 12-17. MATTELARD, A., Diversité culturelle et mondialisation, La Découverte, 2005. MEYER-HEINE, A., «Les apports de la nouvelle directive «Télévision sans frontières» du 30 juin 1997 entrée en vigueur le 31 décembre 1998», RTDE, 1999, n 1, p. 95-109. REGOURD, S., De l exception à la diversité culturelle, La Documentation française, 2005. TINEL, A., «Qu est-ce-que l exception culturelle?», RMCUE, fév. 2000, n 435, p. 78.

2 / DOCUMENTS Document n 1 : cas pratique Document n 2 : CE, 5 octobre 2007, Sté UGC-Ciné-Cité, AJDA, 2007, p. 2260 ; DA, 1 er décembre 2007, pp.22-23 ; JCP A, 12 novembre 2007, pp.38-41. Document n 3 : CE, 6 juillet 2007, Sté 2003 Productions, RJEP, 2007, p.373 concl. C. Vérot ; DA, 1 er août 2007, p.29. Document n 4 : extraits de la Communication de la Commission concernant certains aspects juridiques liés aux œuvres cinématographiques et autres œuvres audiovisuelles du 26 septembre 2001, J.O. n C 043, 16/02/2002, p.6-17.

Document n 1 : cas pratique En vue de préparer une prochaine réunion de travail, le directeur général des services du département du Bar vous demande de préparer une note sur l aide que pourrait apporter le département à un projet particulièrement ambitieux qui a été récemment évoqué au cours d un entretien entre le président du Conseil général du Bar et un producteur français de cinéma très entreprenant, M. Jean-Luc Vesson. Le producteur de cinéma a en effet souligné la situation privilégiée du département, d un point de vue climatique aussi bien qu économique, pour la création sur son territoire d un ensemble de studios de cinéma, qui seraient utilisés tant pour les propres productions de M. J.-L. Vesson que pour être mis à disposition d autres producteurs, français ou non, lorsque ceux-ci décident de produire un film réalisé totalement ou partiellement en France. Ce projet de vastes studios de cinéma serait financé partiellement par un apport propre de la société dont M. J.-L. Vesson est l actionnaire principal, mais il recevrait aussi le soutien du département par diverses voies restant à définir. Il est éventuellement envisagé, pour mener à bien ce projet, la création d une société «Hollybar» dont le capital serait détenu conjointement par la société de M. J.-L. Vesson et le département du Bar, ainsi éventuellement que par d autres partenaires. Le président du conseil général a également évoqué une éventuelle cession par le département, selon des conditions attractives, de terrains et bâtiments qui seraient aménagés en studios de cinéma par la société de M. J.- L. Vesson ou par la nouvelle société à créer. M. J.-L. Vesson a mis l accent quant à lui sur l opportunité d une garantie que donnerait le département aux emprunts bancaires qui pourraient se révéler nécessaires pour le montage financier de ce projet. Le directeur général vous pose en particulier les questions suivantes : - A quelles conditions la création de la société «Hollybar», répondant aux caractéristiques qui viennent d être évoquées, paraît-elle juridiquement envisageable? Quelles seraient alors les relations institutionnelles et financières entre le département et la société? Le président du conseil général pourrait-il accepter sans risque de prendre, ainsi que le lui propose M. J.-L. Vesson, la présidence du Conseil d administration de cette société à créer? - A quelles conditions le département pourrait-il apporter son concours à ce projet, sous les formes qui ont été envisagées ou d autres? Faut-il en particulier, pour la bonne fin de ce projet, inviter à cette réunion de travail des élus d autres collectivités locales, voire le préfet, et quels seraient alors leurs rôles dans la conduite de ce projet? - Existe-t-il des limites aux engagements que pourrait prendre le département? - Comment veiller à ce que ces aides aient un minimum de contrepartie en termes de développement économique pour le département?

Le directeur général, qui souhaite inviter le président du conseil général à la prudence face aux initiatives de M. Vesson, vous demande à cette occasion de recenser les risques contentieux que pourraient encourir le département, que ce soit devant les juridictions judiciaires ou administratives, si ce soutien venait à être contesté ou si le projet venait à échouer. Le président du conseil général a cru comprendre, au cours de sa discussion, un peu confuse sur ce point, avec M. J.-L. Vesson, que certaines décisions administratives en matière d aides au cinéma avaient été censurées récemment pour avoir bénéficié, de fait, à une entreprise américaine. Faudrait-il interdire la location des studios à créer à des sociétés de production américaines, ou exclure la participation de réalisateurs ou d acteurs américains, pour mieux se conformer aux exigences communautaires en la matière? Il vous demande à cette occasion de lui présenter brièvement l état du droit s agissant des aides nationales au cinéma. Par ailleurs, ayant appris l existence de ce projet, le président de la grande université du département souhaite contribuer à un effort de promotion des activités cinématographiques. Il a l idée de convertir, à partir d une certaine heure, les plus grands amphithéâtres de l université en salles de cinéma dont l exploitation serait confiée à UGC ou d autres. Un festival de cinéma consacré aux droits de l homme y serait en outre organisé chaque été. Pour amortir le coût de la mise en place des équipements adaptés, des comédies et autres films de pur divertissement y seraient projetés le reste du temps. Eventuellement, si le service se révélait finalement déficitaire, une subvention d équilibre serait versée par l Université. Un tel projet vous paraît-il susceptible d être engagé par le conseil d administration de l université?

Document n 2 : CE, 5 octobre 2007, Sté UGC-Ciné-Cité : Vu la requête sommaire et les mémoires complémentaires, enregistrés les 13 novembre, 27 novembre et 4 décembre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'etat, présentés pour la SOCIETE UGC-CINE-CITE, dont le siège est 24, avenue Charles de Gaulle, à Neuilly sur Seine (92522), représentée par ses dirigeants ; la SOCIETE UGC-CINE-CITE demande au Conseil d'etat : 1 ) d'annuler l'ordonnance en date du 26 octobre 2006 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Nancy, statuant en application de l'article L. 551-1 du code de justice administrative, a rejeté sa demande tendant, en premier lieu, à ce qu'il enjoigne à la commune d'epinal de différer la signature de tout document contractuel avec la société d'économie mixte «Palace Epinal» se rapportant à l'exploitation du service public du spectacle cinématographique à Epinal, en deuxième lieu, à ce que soit ordonnée la suspension de la procédure de passation de la délégation du service public du spectacle cinématographique de la ville, et enfin, à ce qu'il ordonne à la commune d'epinal d'organiser une procédure de passation de ladite délégation respectant les obligations de publicité et de mise en concurrence ; 2 ) de mettre à la charge du département une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu les code général des collectivités territoriales ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Alban de Nervaux, Auditeur, - les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la SOCIETE UGC-CINE- CITE et de la SCP Boulloche, avocat de la ville d'epinal, - les conclusions de M. Didier Casas, Commissaire du gouvernement ; Considérant qu'aux termes de l'article L. 551-1 du code de justice administrative : Le président du tribunal administratif, ou le magistrat qu'il délègue, peut être saisi en cas de manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation des marchés publics ( ) et des conventions de délégation de service public./ Les personnes habilitées à agir sont celles qui ont un intérêt à conclure le contrat et qui sont susceptibles d'être lésées par ce manquement.../ Le président du tribunal administratif peut être saisi avant la conclusion du contrat. Il peut ordonner à l'auteur du manquement de se conformer à ses obligations et suspendre la passation du contrat ou l'exécution de toute décision qui s'y rapporte. Il peut également annuler ces décisions et supprimer les clauses ou prescriptions destinées à figurer dans le contrat et qui méconnaissent lesdites obligations. Dès

qu'il est saisi, il peut enjoindre de différer la signature du contrat jusqu'au terme de la procédure et pour une durée maximum de vingt jours ; Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que la société d'économie mixte «Palace Epinal», qui exploite à Epinal un cinéma composé de six salles, a demandé le 19 janvier 2006 à la commission départementale d'équipement cinématographique des Vosges l'autorisation d'ouvrir un nouveau multiplexe de dix salles, pour remplacer le précédent, autorisation qui lui a été délivrée le 24 avril 2006 ; que la SOCIETE UGC-CINE- CITE se pourvoit en cassation contre l'ordonnance du 26 octobre 2006 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant, sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 551-1 du code de justice administrative, à ce qu'il soit ordonné à la ville d'epinal d'organiser une procédure de passation de la délégation du service public de spectacle cinématographique respectant les obligations de publicité et de mise en concurrence préalable ; Considérant qu' indépendamment des cas dans lesquels le législateur a lui-même entendu reconnaître ou, à l'inverse, exclure l'existence d'un service public, une personne privée qui assure une mission d'intérêt général sous le contrôle de l'administration et qui est dotée à cette fin de prérogatives de puissance publique est chargée de l'exécution d'un service public ; que même en l'absence de telles prérogatives, une personne privée doit également être regardée, dans le silence de la loi, comme assurant une mission de service public lorsque, eu égard à l'intérêt général de son activité, aux conditions de sa création, de son organisation ou de son fonctionnement, aux obligations qui lui sont imposées ainsi qu 'aux mesures prises pour vérifier que les objectifs qui lui sont assignés sont atteints, il apparaît que l'administration a entendu lui confier une telle mission ; Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que si la société d'économie mixte «Palace Epinal», qui n'est pas dotée de prérogatives de puissance publique, a, en vertu de ses statuts, une mission d'intérêt général en vue d'assurer localement l'exploitation cinématographique, son activité, eu égard notamment à l'absence de toute obligation imposée par la ville d'epinal et de contrôle d'objectifs qui lui auraient été fixés, ne revêt pas le caractère d'une mission de service public confiée par la commune, qui n'avait ainsi à consentir aucune délégation à cet égard ; qu'il suit de là que le juge des référés n'a pas entaché d'erreur de droit son ordonnance, laquelle est suffisamment motivée, en jugeant que le projet de création de salles de la société d'économie mixte ne relevait pas de la procédure de délégation de service public ; Considérant que le juge des référés n'a pas considéré qu'il ne pouvait être saisi dans la mesure où la personne publique s'est abstenue de mettre en œuvre une procédure de délégation conforme aux exigences légales mais a jugé, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, que le projet de la société d'économie mixte «Palace Epinal» n'était pas réalisé dans le cadre d'une délégation de service public ; que doit ainsi être écarté le moyen tiré de ce que l'ordonnance attaquée aurait méconnu les dispositions de l'article L. 551-1 du code de justice administrative ; Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE UGC-CINE-CITE n'est pas fondée à demander l'annulation de l'ordonnance du 26 octobre 2006 du juge des référés du tribunal administratif de Nancy ;.

Document n 3 : CE, 6 juillet 2007, Sté 2003 Productions Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 1er août et 1er décembre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'etat, présentés pour la SOCIETE 2003 PRODUCTIONS, dont le siège est 102 avenue des Champs-Elysées à Paris (75008) ; la SOCIETE 2003 PRODUCTIONS demande au Conseil d'etat : 1 ) d'annuler l'arrêt du 31 mai 2005 de la cour administrative d'appel de Paris en tant qu'il a rejeté son appel tendant à l'annulation du jugement du 10 novembre 2004 du tribunal administratif de Paris ayant annulé, à la demande de l'association des producteurs indépendants et du Syndicat des producteurs indépendants, la décision du 23 octobre 2003 du directeur général du Centre national de la cinématographie lui accordant l'agrément des investissements pour la réalisation du film de long métrage intitulé Un long dimanche de fiançailles ; 2 ) de mettre à la charge de l'association des producteurs indépendants et du Syndicat des producteurs indépendants le versement de la somme de 5 000 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu la note en délibéré présentée le 25 juin 2007 pour la SOCIETE 2003 PRODUCTIONS ; Vu le code de commerce ; Vu le décret n 99-130 du 24 février 1999 Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Fabienne Lambolez, Maître des Requêtes, - les observations de la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de la SOCIETE 2003 PRODUCTIONS, de la SCP Boutet, avocat de l'association des producteurs indépendants et de Me Balat, avocat du Syndicat des producteurs indépendants, - les conclusions de Mlle Célia Verot, Commissaire du gouvernement ; Considérant que par un arrêt du 31 mai 2005, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté les appels formés par la SOCIETE 2003 PRODUCTIONS et le Centre national de la cinématographie contre le jugement du tribunal administratif de Paris du 10 novembre 2004 ayant annulé, à la demande de l'association des producteurs indépendants et du Syndicat des producteurs indépendants, la décision du 23 octobre 2003 du directeur général du Centre national de la cinématographie accordant à la SOCIETE 2003 PRODUCTIONS l'agrément des investissements prévu par le décret du 24 février 1999 relatif au soutien financier de l'industrie cinématographique pour la réalisation du film «Un long dimanche de fiançailles» ; que la SOCIETE 2003 PRODUCTIONS se pourvoit en cassation contre cet arrêt ; Considérant qu'aux termes de l'article 7 du décret du 24 février 1999, dans sa rédaction applicable à la date de la décision litigieuse : «I.- Sont seuls admis au bénéfice du soutien financier de l'industrie cinématographique les entreprises et organismes établis en France. ( ) / II. - Les entreprises de production doivent, en outre, satisfaire aux conditions suivantes : /1 Avoir des présidents, directeurs ou gérants, soit de nationalité française, soit ressortissants d'un Etat membre de la Communauté européenne, d'un Etat partie à la Convention européenne sur la télévision transfrontière du Conseil de l'europe ou d'un Etat tiers européen avec lequel la Communauté européenne a conclu des accords ayant trait au secteur audiovisuel. Les étrangers autres que les ressortissants des Etats européens précités justifiant de la qualité de résident sont, pour l'application du présent alinéa, assimilés aux citoyens français ; /2 Ne pas

être contrôlées, au sens de l'article 355-1 de la loi du 24 juillet 1966 susvisée, par une ou plusieurs personnes physiques ou morales ressortissantes d'etats autres que les Etats européens mentionnés au 1» ; que les dispositions de l'article 355-1 de la loi du 24 juillet 1966 ont été ultérieurement codifiées à l'article L. 233-3 du code de commerce qui, dans sa rédaction applicable à la date de la décision litigieuse, issue de la loi du 11 décembre 2001, dispose : «I.- Une société est considérée, pour l'application des sections 2 et 4 du présent chapitre, comme en contrôlant une autre : /1 Lorsqu'elle détient directement ou indirectement une fraction du capital lui conférant la majorité des droits de vote dans les assemblées générales de cette société ; / 2 Lorsqu'elle dispose seule de la majorité des droits de vote dans cette société en vertu d'un accord conclu avec d'autres associés ou actionnaires et qui n'est pas contraire à l'intérêt de la société ; / 3 Lorsqu'elle détermine en fait, par les droits de vote dont elle dispose, les décisions dans les assemblées générales de cette société. / II. - Elle est présumée exercer ce contrôle lorsqu'elle dispose directement ou indirectement, d'une fraction des droits de vote supérieure à 40 % et qu'aucun autre associé ou actionnaire ne détient directement ou indirectement une fraction supérieure à la sienne. / III. - Pour l'application des mêmes sections du présent chapitre, deux ou plusieurs personnes agissant de concert sont considérées comme en contrôlant conjointement une autre lorsqu'elles déterminent en fait les décisions prises en assemblée générale» ; qu'aux termes de l'article L. 233-10 du code de commerce : «I. - Sont considérées comme agissant de concert les personnes qui ont conclu un accord en vue d'acquérir ou de céder des droits de vote ou en vue d'exercer les droits de vote, pour mettre en oeuvre une politique vis-à-vis de la société. / II. - Un tel accord est présumé exister : / 1 Entre une société, le président de son conseil d'administration et ses directeurs généraux ou les membres de son directoire ou ses gérants ;» Considérant en premier lieu qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges d'appel que la SOCIETE 2003 PRODUCTIONS est une société par actions simplifiée qui comprend, selon ses statuts, deux catégories d'actions, attribuées d'une part, à hauteur de 34 % du capital, à la société anonyme Warner Bros France, et d'autre part, à hauteur de 66 % du capital, à cinq actionnaires personnes physiques qui étaient tous, par ailleurs, cadres dirigeants de Warner Bros France ; Considérant en deuxième lieu que les statuts prévoient que les bénéfices de la société sont distribués à proportion de 15 % aux titulaires des actions réparties entre les associés personnes physiques et de 85 % aux titulaires des actions attribuées à la société Warner Bros France ; que les associés personnes physiques s'engagent à céder toutes leurs actions dans l'hypothèse où, une offre d'acquisition portant sur la totalité du capital ayant été faite, Warner Bros France souhaiterait accepter cette offre ; que le président de la SOCIETE 2003 PRODUCTIONS est assisté dans l'exercice de ses fonctions par un conseil d'administration ; que certaines décisions ne peuvent être adoptées qu'à la majorité de plus de 75 % des membres du conseil d'administration, notamment celles qui tendent à autoriser le président à négocier, conclure, modifier ou résilier des conventions ou des opérations sortant du cadre normal des affaires de la société ou portant sur des sommes supérieures à 250 000 euros ; qu'aucune décision de son conseil d'administration ne peut être prise sans qu'un membre représentant la société Warner Bros France soit présent ; Considérant que la cour a pu, sans dénaturer les clauses des statuts de la SOCIETE 2003 PRODUCTIONS et sans commettre d'erreur de droit ni d'erreur de qualification juridique, estimer que la somme de ces éléments manifestait l'existence d'un accord de concert entre les associés personnes physiques de la SOCIETE 2003 PRODUCTIONS et la société Warner Bros France pour déterminer «en fait les décisions prises en assemblée générale» au sens du

III de l'article L. 233-3 du code de commerce ; que la cour n'a pas inexactement qualifié les faits de l'espèce en en déduisant que la société Warner Bros France, dont le capital est détenu à hauteur de 97 % par la société Warner Bros Entertainment Inc., société de droit américain dont le siège social est aux Etats-Unis d'amérique, contrôlait la SOCIETE 2003 PRODUCTIONS et que, dès lors, la SOCIETE 2003 PRODUCTIONS devait être regardée comme contrôlée par une personne morale ressortissante d'un Etat non européen au sens des dispositions du 2 du II de l'article 7 du décret du 24 février 1999 ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE 2003 PRODUCTIONS n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué, qui est suffisamment motivé ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de la SOCIETE 2003 PRODUCTIONS le versement à l'association des producteurs indépendants d'une part, au Syndicat des producteurs indépendants d'autre part, d'une somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'association des producteurs indépendants et du Syndicat des producteurs indépendants, qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande la SOCIETE 2003 PRODUCTIONS ;

Document n 4 : extraits de la Communication de la Commission concernant certains aspects juridiques liés aux œuvres cinématographiques et autres œuvres audiovisuelles du 26 septembre 2001. 1. Introduction Les œuvres audiovisuelles, et le cinéma en particulier, jouent un rôle important dans la formation des identités européennes, tant au niveau des aspects communs partagés dans toute l'europe qu'au regard de la diversité culturelle qui caractérise nos différentes traditions et histoires. Elles représentent un élément essentiel pour le bon fonctionnement de nos démocraties, en raison de leur large influence sur la société. Elles se trouvent également au cœur des transformations résultant du développement de la société de l'information : les nouveaux développements technologiques offrent des possibilités nouvelles de promouvoir la culture et de préserver le patrimoine, et de renforcer la compréhension mutuelle en Europe. Cependant, la multiplication des canaux disponibles pour la distribution des biens audiovisuels ne débouche pas automatiquement sur une augmentation de la création de contenus de qualité. Les principes de la politique audiovisuelle communautaire ont été exprimés dans la communication de la Commission de décembre 1999 et restent parfaitement valables aujourd'hui. Le but principal de la réglementation dans le secteur audiovisuel consiste à préserver certains objectifs d'intérêt public, tels que le pluralisme, la diversité culturelle et linguistique et la protection des mineurs. Au niveau européen, il est nécessaire de maintenir un équilibre permettant de garantir la subsidiarité dans un domaine où les compétences principales se situent au niveau national ou régional, tout en veillant à ce que les sociétés européennes puissent pleinement bénéficier de la dimension communautaire. Les instruments européens clés élaborés dans ce domaine, la directive «télévision sans frontières» pour ce qui est des aspects réglementaires, et le programme MEDIA Plus en ce qui concerne les mécanismes de soutien, ont pour principal objectif de permettre aux entreprises européennes de ce secteur de tirer pleinement profit du marché unique européen. [ Les œuvres audiovisuelles présentent des caractéristiques uniques en raison de leur double nature : ce sont des biens économiques, offrant des possibilités importantes de création de richesses et d'emplois. En 1999, le marché audiovisuel européen était estimé à 58,3 milliards d'euros (+ 8,7% par rapport à 1998). Ce sont également des biens culturels qui tout à la fois reflètent et façonnent nos sociétés. C'est la raison pour laquelle le développement de ce secteur n'a jamais été laissé aux seules forces du marché. L'avènement des technologies nouvelles n'a pas affecté la renaissance du cinéma en Europe ; elles ont apporté des revenus supplémentaires aux opérateurs de médias, plutôt que de se substituer aux médias existants. Le total des entrées de cinéma en Europe est passé de 662 millions en 1995 à 844 millions en 2000 (+ 27 %). Cette augmentation semblerait liée, du moins partiellement, à l'augmentation du nombre d'écrans de cinéma en Europe, en particulier aux multiplexes (+ 22 % entre 1995 et 1999), ainsi qu'à l'amélioration des infrastructures dans les cinémas. Des chiffres récents montrent que le temps passé à regarder la télévision a augmenté dans la plupart des États membres au cours de l'année dernière. Parmi les œuvres audiovisuelles, les œuvres cinématographiques occupent une place particulière, en raison de leur coût de production et de leur importance culturelle : les budgets

des productions cinématographiques sont beaucoup plus élevés que ceux des autres œuvres audiovisuelles elles font plus souvent l'objet de coproductions internationales et leur durée d'exploitation est plus longue, car elles peuvent utiliser passer par tous les canaux de distribution, cinéma, DVD et vidéocassette (vente et location), téléchargement à partir de l'internet et télévision (facturation à la séance, facturation par canal ou libre accès). Les œuvres cinématographiques sont confrontées à une forte concurrence extra-européenne [5]. Les œuvres européennes sont peu diffusées en dehors de leur pays d'origine, bien que la tendance en la matière soit à la hausse : selon certaines estimations, les films européens nonnationaux représentaient plus de 10 % de la fréquentation des salles en 1999, contre moins de 8 % en 1996. En raison de la nature particulière du cinéma, la Commission avait indiqué, dans sa communication de 1999 sur la politique audiovisuelle, qu'il convenait d'approfondir un certain nombre de questions, afin de clarifier le cadre juridique du secteur cinématographique, y compris l'application de la politique en matière d'aides d'état dans ce domaine. L'objectif de cet examen était de déterminer quelles mesures pouvaient être prises pour améliorer la circulation de ces œuvres en Europe. Conformément aux principes du livre blanc sur la gouvernance, les services de la Commission ont organisé une consultation publique, sur la base d'un document de travail, afin de donner à toutes les parties intéressées la possibilité de faire connaître leur point de vue, avant l'adoption de la présente communication par la Commission. Une audition, à laquelle ont participé quelque 250 parties intéressées, a été organisée le 15 juin. Elle a non seulement donné à la Commission l'occasion d'identifier les questions centrales parmi celles soulevées dans le document de travail, mais elle a aussi permis aux parties intéressées d'entendre les avis des autres et d'y répondre. 49 commentaires écrits ont été reçus, émanant des États membres, des autorités réglementaires nationales et des organismes d'autorégulation, des auteurs et artistes, des producteurs et réalisateurs de films et d'oeuvres télévisées, des éditeurs/distributeurs de vidéocassettes et DVD, des organismes de radiodiffusion télévisuelle, des associations professionnelles du secteur, des représentants des consommateurs et des syndicats. La présente communication présente les orientations de la politique de la Commission et les propositions découlant de l'exercice de consultation. Elle précise les principes à respecter dans le cadre de l'application des règles relatives aux aides d'etat au secteur cinématographique et identifie les mesures à prendre et les domaines qui appellent une réflexion plus approfondie, afin de créer un environnement favorable à la production et à la distribution des oeuvres audiovisuelles. 2. Orientation générale de la Commission en matière d'aides d'état en faveur du secteur cinématographique Les programmes de cinéma et de télévision constituent deux des médias de divertissement les plus universels, dotés d'un puissant impact sur un grand nombre de personnes au niveau international. Étant donné l'état actuel de développement et les caractéristiques particulières de la production audiovisuelle au sein de la CE, il est difficile pour les producteurs d'obtenir un soutien commercial initial suffisant pour réunir des moyens financiers permettant de réaliser des projets. Dans ces conditions, l'encouragement de la production audiovisuelle par les États membres joue un rôle clé pour assurer que leur propre culture et leur capacité créatrice puissent trouver à s'exprimer, reflétant ainsi la diversité et la richesse de la culture européenne.

Le traité de Maastricht a consacré au niveau communautaire l'importance cruciale de la promotion de la culture pour l'union européenne et ses États membres, en intégrant la culture parmi les politiques de la Communauté spécifiquement mentionnées dans le traité CE (article 151 du traité CE). En même temps, il a inséré à l'article 87, paragraphe 3, point d), du traité CE une nouvelle possibilité spécifique d'exception au principe d'incompatibilité générale de l'article 87, paragraphe 1, applicable aux aides accordées par les États membres pour promouvoir la culture. Les États membres mettent en œuvre un large éventail de mesures de soutien à la production audiovisuelle de films et de programmes de télévision. Ce soutien se concentre sur les phases de création et de production de films et prend généralement la forme de subventions ou d'avances remboursables. Ces mesures se fondent sur des considérations tant culturelles qu'industrielles. Elles ont pour objectif culturel premier de veiller à ce que les cultures régionales et nationales et le potentiel créatif soient exprimés dans les médias audiovisuels tels que le cinéma et la télévision. D'autre part, elles visent à générer la masse critique d'activité requise pour créer la dynamique assurant le développement et la consolidation de l'industrie, par la création d'entreprises de production sur des bases solides et le développement d'un pool permanent de compétences humaines et d'expérience. La présente communication ne couvre pas l'application des articles 81 et 82 du traité CE (pratiques anticoncurrentielles des entreprises) au secteur audiovisuel. 2.1. Compatibilité avec le traité CE des régimes d'aide à la production cinématographique et télévisuelle Les règles fondamentales en matières d'aides d'état prévue par le traité CE sont les suivantes : l'article 88, paragraphe 3, du traité CE dispose que les États membres sont tenus d'informer la Commission de tous les projets tendant à instituer ou à modifier des aides, avant de les mettre en œuvre. L'article 87, paragraphe 1, interdit les aides les aides accordées par les États ou au moyen de ressources d'état qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence et le commerce entre les États membres. Toutefois, la Commission peut accorder une exemption pour certaines aides d'état. En particulier, l'article 87, paragraphe 3, énumère certains types d'aide, qui en raison de leurs effets, peuvent être autorisés par la Commission. L'une de ces exemptions est prévue à l'article 87, paragraphe 3, point d), pour les aides destinées à promouvoir la culture, quand elles n'altèrent pas les conditions des échanges et de la concurrence dans une mesure contraire à l'intérêt commun. 2.2. Application des règles prévues par le traité CE aux aides à la production cinématographique et télévisuelle En 1997, la Commission a reçu une plainte sur les effets d'exclusion créés par le régime français d'aide à la production cinématographique. Ceci a été confirmé par l'évaluation de la Commission. Les effets anticoncurrentiels résultaient de dispositions conditionnant l'aide à la réalisation de certaines activités de production de films dans l'état membre (la «territorialisation»). Les autorités françaises ont, à la demande de la Commission, modifié une série de dispositions incompatibles de leur régime d'aide à la production cinématographique et la Commission a autorisé ce régime le 3 juin 1998. Dans sa décision (N3/98), la Commission a exposé quatre critères de compatibilité spécifiques pour autoriser l'aide à la production cinématographique et télévisuelle conformément à la «dérogation culturelle» prévue à l'article 87, paragraphe 3, point d), du traité CE. La Commission a également entrepris de réexaminer

les régimes des autres États membres à la lumière des critères adoptés dans la décision concernant la France. La Commission a lancé une enquête demandant des informations à tous les États membres sur leurs régimes d'aides au secteur audiovisuel. Cette enquête a démontré que la majorité des régimes n'avaient pas été notifiés à la Commission en vue d'obtenir une autorisation préalable. 2.3. Evaluation des régimes d'aide à la production cinématographique et télévisuelle Lorsqu'elle évalue les régimes d'aide à la production cinématographique et télévisuelle la Commission doit vérifier : Premièrement que les régimes d'aide respectent le principe de la «légalité générale», c'est-àdire qu'elle doit s'assurer que le régime ne comporte pas de clauses qui seraient contraires aux dispositions du traité CE dans des domaines autres que les aides d'état (y compris les dispositions relatives à la fiscalité) ; Deuxièmement que le régime répond aux critères de compatibilité de l'aide, fixés par la Commission dans sa décision de 1998 sur le régime d'aide automatique français. La deuxième condition est spécifique aux régimes d'aide à la production cinématographique et télévisuelle, alors que l'autre est un contrôle de routine appliqué à tous les régimes d'aide, quel que soit le secteur. a) Respect du critère de légalité générale La Commission doit s'assurer que les conditions d'accès au régime d'aide d'état ne contiennent pas de clauses contraires aux dispositions du traité CE dans des domaines autres que les aides d'état. La Commission doit veiller, notamment, au respect des principes du traité CE interdisant toute discrimination en raison de la nationalité et assurant la liberté d'établissement, la libre circulation des marchandises et la libre prestation de services (articles 12, 28, 30, 39, 43, 48 et 49 du traité CE). La Commission applique ces principes conjointement avec les règles de concurrence, lorsque les dispositions contraires aux principes en question sont indissociables du fonctionnement du régime. Conformément aux principes ci-dessus, les régimes d'aide ne peuvent par exemple : réserver l'aide aux seuls ressortissants du pays concerné ; exiger des bénéficiaires qu'ils possèdent le statut d'entreprise nationale établie en vertu du droit commercial national (les entreprises établies dans un État membre et opérant dans un autre par l'intermédiaire d'une succursale ou d'une agence permanente doivent pouvoir bénéficier de l'aide ; en outre l'exigence du statut d'agence ne doit être applicable qu'au moment du paiement de l'aide) ; exiger des travailleurs des entreprises étrangères assurant des services cinématographiques qu'ils respectent les normes du travail nationales. Certains régimes d'aide à la production cinématographique et télévisuelle sont financés par des taxes parafiscales. Selon la pratique administrative de la Commission et la jurisprudence de la Cour de Justice, lorsque de tels régimes profitent seulement aux producteurs nationaux ou leur profitent davantage qu'à leurs concurrents d'autres États membres, la Commission exige que les produits importés ne soient pas taxés et que la production nationale ne bénéficie pas d'un taux d'imposition plus faible à l'exportation. Lorsque la Commission applique les règles en matière d'aides d'état pour évaluer la compatibilité des régimes d'aide examinés, elle traite en même temps les problèmes identifiés par le Groupe du Code de conduite relatif à la fiscalité des entreprises, créé par le Conseil, (le groupe «Primarolo»).

b) Critères de compatibilité spécifiques pour les aides d'état à la production cinématographique et télévisuelle Les critères spécifiques sur la base desquels la Commission évalue actuellement les aides d'état à la production cinématographique et télévisuelle, dans le cadre de la dérogation culturelle prévue à l'article 87, paragraphe 3, point d), du traité CE, ont été établis dans sa décision de juin 1998 relative au régime français d'aide automatique à la production de films. Ces critères spécifiques sont les suivants : (1) L'aide est destinée à un produit culturel. Chaque État membre doit veiller à ce que le contenu de la production faisant l'objet de l'aide soit culturel, selon des critères nationaux vérifiables (conformément au principe de subsidiarité). (2) Le producteur doit avoir la liberté de dépenser au moins 20 % du budget du film dans d'autres États membres, sans que l'aide prévue par le régime soit aucunement réduite de ce fait. En d'autres termes, la Commission a admis que soit fixée une condition de territorialisation, en termes de dépenses, jusqu'à 80 % du budget de production d'une oeuvre cinématographique ou télévisuelle aidée. (3) L'intensité de l'aide doit en principe être limitée à 50 % du budget de production, afin de stimuler les incitations commerciales normales propres à une économie de marché et d'éviter toute surenchère entre États membres. Les films difficiles et à petit budget sont exemptés de cette limite. La Commission considère que, conformément au principe de subsidiarité, il appartient à chaque État membre d'établir une définition des films difficiles et à petit budget, en fonction des paramètres nationaux. (4) Les suppléments d'aide destinés à des activités spécifiques de production de films (par exemple la postproduction) ne sont pas autorisées, afin de garantir que l'aide ait un effet d'incitation neutre et, par conséquent, que l''effet de protection/d'attraction de ces activités spécifiques dans l'état membre qui accorde l'aide soit évité. Plusieurs considérations découlent des critères ci-dessus. La Commission estime que l'aide doit porter sur le budget global d'un projet cinématographique spécifique et que le producteur doit être libre de choisir les postes du budget qui seront dépensés dans d'autres États membres. Les régimes d'aide élaborés sur cette base sont censés soutenir la création d'un produit audiovisuel et non le développement d'une activité industrielle. Par conséquent, les aides doivent être évaluées à la lumière de la dérogation culturelle de l'article 87, paragraphe 3, point d), du traité CE, plutôt que de la dérogation industrielle de l'article 87, paragraphe 3, point c). Les entreprises du secteur de la production cinématographique et télévisuelle peuvent également bénéficier d'autres types d'aide accordés dans le cadre de régimes nationaux d'aide horizontale autorisés par la Commission en vertu des dérogations prévues à l'article 87, paragraphe 3, points a) et c) du traité CE (par exemple les aides régionales, les aides aux PME, les aides à la recherche et au développement, les aides à la formation et les aides à l'emploi). La Commission a admis que les États membres puissent exiger, comme condition d'accès à l'aide, qu'une certaine partie du budget de la production du film soit dépensée sur leur territoire. Le raisonnement suivi est qu'un certain degré de territorialisation des dépenses peut être nécessaire pour assurer la présence continue des ressources humaines et des capacités techniques requises par la création culturelle. Cette restriction ne doit pas dépasser le niveau minimal requis pour promouvoir les objectifs culturels. En outre, en raison des caractéristiques particulières de la production cinématographique, la Commission considère que le budget global d'une production audiovisuelle correspond à l'ensemble des fonds qu'il est nécessaire de risquer pour sa création et, par conséquent, admet que ce budget global représente la référence pour le calcul des aides, indépendamment des dépenses individuelles dont il est constitué. L'attribution d'une aide à des postes individuels

spécifiques du budget d'un film pourrait transformer cette aide en préférence nationale pour les secteurs assurant la fourniture de ces postes, ce qui pourrait être incompatible. Les fonds fournis directement par des programmes communautaires tels que MEDIA Plus ne sont pas des ressources d'état. Par conséquent, l'assistance qu'ils apportent n'intervient pas dans le calcul du respect du plafond de 50 % d'aide. En outre, cette assistance stimule la distribution de films nationaux à l'étranger et, par conséquent, ses effets ne se cumulent pas avec ceux des régimes nationaux centrés sur la production et la distribution nationales. Les obligations légales d'investir dans la production audiovisuelle, imposées par les États membres aux organismes de radiodiffusion télévisuelle, ne constituent pas une aide d'état, lorsque ces investissements apportent une compensation raisonnable aux organismes en question. La question de savoir dans quelle mesure ces obligations légales peuvent être considérées comme des aides d'état en tant que telles doit être examinée à la lumière de la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes, après son arrêt du 13.3.2001 dans l'affaire C-379/98 (PreussenElektra). La Commission estime que les critères ci-dessus établissent un équilibre entre les objectifs de création culturelle, le développement de la production audiovisuelle dans la CE et le respect des règles de la Communauté européenne en matière d'aides d'état. 2.4. Réexamen des régimes À la suite de sa décision de 1998 concernant le régime français d'aide automatique à la production cinématographique, la Commission a réexaminé les régimes en place dans d'autres États membres, à la lumière des critères d'évaluation mentionnés plus haut. La Commission a déjà examiné et approuvé les régimes d'une série d'états membres [14]. Elle achève à présent ses discussions avec les autres États membres en vue de mettre leurs régimes en conformité avec le droit communautaire. La Commission a l'intention d'achever son examen d'ici la fin de 2001. La finalisation de cet examen apportera au secteur la sécurité juridique. [14] La France, les Pays-Bas, l'allemagne (et certains Länder allemands), l'irlande et la Suède : cf. http://europa.eu.int/comm/competition/state_aid/decisions/ L'examen a révélé les caractéristiques principales suivantes des régimes nationaux d'aide d'état : - il existe une grande diversité de régimes d'aide au sein de la CE, tant en termes de type d'aide que de champ d'application ; - bon nombre des régimes contenaient des dispositions contraires au principe de légalité générale ; - très peu d'états membres imposent des conditions de territorialité pour bénéficier de l'aide ; - les aides accordées par les États membres ne dépassent qu'exceptionnellement le niveau de 50 % des coûts du film ; - les exceptions en question entrent généralement dans la catégorie des «films difficiles et à petit budget». 2.5. Évolution future Les critères de compatibilité spécifiques pour l'aide à la production cinématographique et télévisuelle, indiqués plus haut, resteront valables jusqu'en juin 2004,date limite figurant dans les décisions déjà adoptées. Dans le cadre du réexamen, les régimes des autres États membres seront autorisés jusqu'à la même date. La Commission n'a pas l'intention de modifier ces critères, à moins qu'ils ne s'avèrent inaptes à prévenir des distorsions de concurrence indues au sein de la CE. À la lumière de l'examen, la Commission étudiera de façon plus approfondie le niveau maximal de territorialisation admissible. Les exigences de territorialité fragmentent le marché intérieur des biens et services destinés à la production audiovisuelle et entravent leur développement. Les éventuelles distorsions de concurrence créées par les aides à la production de programmes

cinématographiques et télévisuels seraient davantage susceptibles de provenir des exigences de territorialisation que du niveau de l'aide lui-même. Les exigences de territorialité excédant ce qui peut être jugé acceptable au regard des critères de nécessité et de proportionnalité dépassent les limites strictes de la promotion culturelle et visent fondamentalement des objectifs industriels. Par conséquent, la Commission, dans sa décision sur le régime d'aide français, a estimé que les États membres devraient être encouragés à réduire leur préférence nationale en matière de lieu des dépenses pour une partie importante des coûts. Au vu de l'aire géographique comparativement limitée de certaines langues et cultures et de la circulation limitée de ces produits culturels au sein de la CE et sur les marchés mondiaux, la Commission pourrait admettre des aides dont l'intensité dépasse 50 %, lorsque la nécessité en est prouvée, dans des cas autres que les films difficiles et à petit budget pour ces États membres. La Commission a l'intention de poursuivre le dialogue multilatéral avec les États membres sur les questions pertinentes liées aux aides d'état à la production cinématographique et télévisuelle. Ce dialogue a débuté lors de la conférence organisée par le Centre national cinématographique français à Paris en octobre 2000, qui a rassemblé des experts, des fonctionnaires de la Commission et des représentants des ministères concernés et des instituts cinématographiques de l'ue. Il s'est poursuivi au cours d'une seconde conférence organisée par l'institut cinématographique suédois à Stockholm en juin 2001.