Production des rayons X en imagerie par projection et en scanographie



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Production des rayons X en imagerie par projection et en scanographie D. Régent, D. Mandry, V. Croise-Laurent, A. Oliver, F. Jausset, V. Lombard RÉSUMÉ Le tube radiogène reste le facteur limitant dans les techniques d imagerie roentgeniennes exigeantes : angiographies et radiologie interventionnelle, scanographie avec rapport signal sur bruit (résolution en contraste) élevé, en particulier chez les sujets en surpoids. L optimisation de la qualité d image et la réduction des doses «dans les limites du raisonnable» nécessitent une bonne compréhension du rôle des différents paramètres intensité du courant-tube (ma), différence de potentiel aux bornes du tube (kvp), durée des expositions (s) dans les composants géométriques (flous géométrique, cinétique, de détection, morphologique) et photographiques (contraste, densité) de l image, en scanner comme en radiographie par projection. La technologie des tubes radiogènes a beaucoup évolué, dans la discrétion médiatique, au cours des dernières décennies, en particulier pour répondre aux exigences croissantes du scanner (acquisitions multiphasiques avec reconstruction «en temps réel» ou presque, grandes longueurs des segments explorés). Les caractéristiques significatives des tubes se sont modifiées ; la capacité de dissipation calorifique de l ensemble tube-gaine est beaucoup plus importante en scanographie que la puissance des foyers du tube ; les technologies utilisées (diamètre, masse et composition de l anode, enceintes métal-céramique, modalités de dissipation thermique par rayonnement et par convection, etc.) sont devenues des critères essentiels de choix car la performance des machines, au quotidien, est sous leur totale dépendance. Il faut donc que les radiologues fassent l effort de s investir dans ces domaines techniques s ils veulent rester des interlocuteurs crédibles, capables d argumenter des choix de matériel sur des bases médicotechniques plutôt que médicoéconomiques trop souvent devenues purement économiques Scanner et rayons X 20 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

2 Scanner et rayons X Introduction La production des rayons X reste un sujet technologique de la plus haute importance dans les deux grands domaines d application de la radiologie roentgenienne que sont : l imagerie par projection, qu elle soit radiographique (clichés standards), radioscopique télévisée (en particulier pour les gestes radioguidés en radiologie et en cardiologie interventionnelle) ou sériographique (angiographie numérisée et imagerie volumique par acquisition rotatoire) : à l heure actuelle, toutes ces techniques sont totalement numérisées, quel que soit le système de détection écrans radioluminescents à mémoire (ERLM, ou «plaques phosphore»), amplificateurs de luminance de plus en plus remplacés par les capteurs plans dynamiques, mais la qualité d image reste dépendante de la maîtrise du contraste par le choix judicieux des paramètres d exposition (en particulier le kilovoltage mais aussi la limitation du rayonnement diffusé) et de la résolution spatiale par l utilisation adéquate du petit foyer des tubes radiogènes, lorsque cela est possible ; la radioprotection est également directement dépendante d une utilisation rationnelle et raisonnée des paramètres d exposition, permettant de résoudre au mieux les compromis nécessaires entre dose délivrée et qualité d image ; l imagerie scanographique, dans laquelle la production des rayons X reste le seul facteur limitant la longueur et/ou la répétition des séquences d acquisition dans les explorations multiphasiques, en dépit de la réduction des doses nécessaires rendue possible par les techniques récentes et à venir de reconstruction par itérations : il s agit de limites physiques directement liées au mécanisme de production des rayons X et à l inévitable production massive de chaleur qui lui est associée ; c est donc, à l heure actuelle, la capacité de dissipation thermique de l ensemble «tube radiogène-gaine-systèmes de refroidissement» qui définit les possibilités exactes d acquisition scanographique dans les circonstances les plus exigeantes : explorations multiphasiques de segments corporels de grande longueur, même avec un pitch élevé, ou plus encore explorations multiphasiques de segments corporels relativement courts mais avec des acquisitions «chevauchées» (pitch inférieur à ) pour obtenir un rapport signal sur bruit élevé (explorations scanographiques cardiaques et coronaires, en particulier). Les progrès réalisés dans les systèmes de détection, en particulier les ERLM et les capteurs plans pour l imagerie par projection, l amélioration des performances des cristaux des détecteurs et le développement d algorithmes de reconstruction beaucoup plus performants (reconstruction itérative) en scanographie ont diminué, parfois de façon massive, les exigences en matière de radiations ionisantes tout en maintenant, lorsqu on respecte des conditions de réalisation raisonnables des examens, une qualité d image acceptable sur le plan diagnostique. Il n en demeure pas moins que ces résultats optimisés et adaptés aux circonstances restent totalement dépendants d une utilisation judicieuse des paramètres d exposition, qui nécessite donc une parfaite maîtrise des modalités de fonctionnement du tube radiogène et des dispositifs qui lui sont annexés.

Production des rayons X en imagerie par projection et en scanographie La radioprotection est particulièrement importante lors des examens scanographiques chez l enfant et l adulte jeune, en particulier la femme en âge de procréer. L adaptation des paramètres à la morphologie des patients (notamment l indice de masse corporelle) et l optimisation du rapport signal sur bruit en fonction du contraste propre des structures radiographiées sont les principes de base d une adaptation judicieuse des paramètres de l exposition sans compromettre la qualité diagnostique de l examen. Bases physiques de la production des rayons X en radiodiagnostic La différence de potentiel (ddp) entre cathode (filament) et anode est réglée par le choix du kilovoltage : kv. L énergie cinétique acquise par les électrons dans le champ électrique cathode-anode correspond à E = ev (e étant la charge électrique d un électron qui est une constante, égale à,60 0 9 C et V la différence de potentiel cathode-anode). Rappelons que si la différence de potentiel cathode-anode est exprimée par la valeur de pic du kilovoltage (ou kvp), dans la réalité, le kilovoltage varie en fonction de la qualité du redressement du courant électrique alimentant le tube. Seule une petite fraction des électrons est accélérée par le champ électrique maximal : pour celle-ci, l énergie cinétique des électrons exprimée en kev est numériquement identique au kvp (pour une ddp de 00 kvp, cette fraction des électrons acquiert une énergie cinétique de 00 kev) ; le reste des électrons acquiert une énergie cinétique inférieure à 00 kev et l énergie cinétique moyenne des électrons traversant le tube pour un kvp de 00 est de l ordre de 70 kev. Les photons X «utiles» pour le radiodiagnostic (radiographie par projection et scanographie) correspondent à des énergies s étalant de 0 à 0 kev. Ils sont produits par deux mécanismes : le freinage et le phénomène de collision. Rayonnement de freinage Le mécanisme le plus important quantitativement et qualitativement est le freinage ( Bremstrahlung ), qui correspond aux interactions entre les électrons accélérés par le champ électrique élevé créé entre le filament et l anode et les noyaux des atomes du métal lourd constituant l anode. Rappelons que le noyau représente une masse d extrêmement petite taille par rapport à celle des orbites électroniques de l atome : 5 0 0 m contre 5 0 5 m, soit un noyau 00 000 fois plus petit que l atome! Si un proton, noyau d atome d hydrogène, avait la taille d une orange, la couche K porteuse de l électron périphérique de cet atome serait une orbite elliptique de kilomètres de rayon moyen Le noyau renferme toutes les charges électriques positives (protons) et crée donc un champ électrique d autant plus intense qu il renferme un nombre de protons élevé (exprimé par le numéro atomique Z ). Les électrons

4 Scanner et rayons X 2 4 Figure. Rayonnement de freinage. La charge électrique positive du noyau des atomes de tungstène de la cible anodique () provoque le freinage (2) et la déviation (4) des électrons émis par le fi lament () et accélérés par la différence de potentiel. (chargés négativement) accélérés par la ddp entre filament et anode vont être déviés et freinés sous l action des forces de Coulomb provoquées par la charge positive du noyau ( fig.. ). La déviation et la décélération des électrons ont, pour un élément donné (caractérisé par son numéro atomique Z ), une intensité liée aux relations spatiales entre le noyau des atomes et la trajectoire des électrons ( fig..2 ) : freinage et déviation massives lorsque l électron passe à proximité immédiate du noyau (jusqu à arrêt total lorsque l électron «percute» le noyau, c est-à-dire perd toute son énergie cinétique au contact du noyau) ; freinage et déviation minimes voire nulles lorsque l électron passe à très grande distance du noyau ; avec tous les intermédiaires possibles entre ces deux extrêmes. L énergie cinétique perdue par les électrons dans la cible de l anode est transformée en radiations électromagnétiques de longueur d onde variable. Une très faible fraction ( % de l énergie électrique consommée par le tube radiogène) correspond à des photons X d énergie suffisante pour être utilisés en radiodiagnostic (0 à 0 kev). Les photons X d énergie inférieure à 0 kev sont dits «mous» ; ils doivent être éliminés autant que faire se peut par un filtre métallique interposé sur la fenêtre de sortie du tube radiogène pour éviter l irradiation inutile des téguments exposés par des radiations n intervenant pas dans la formation de l image radiologique. Une énorme

Production des rayons X en imagerie par projection et en scanographie 5 a Électrons du courant-tube 2 b 2 Interaction proche du noyau, photon d énergie moyenne «Collision» de l électron avec le noyau, photon d énergie maximale Interaction distante du noyau, photon d énergie faible Figure.2 Dispersion des énergies des photons X. La variation des relations spatiales entre les électrons (a) et les noyaux d atomes de tungstène (b) explique la dispersion des énergies des photons produits, qui appartiennent pour % d entre eux aux rayons X «utiles» (,2), les 99 % restants étant des radiations de grande longueur d onde () essentiellement sous forme de chaleur. partie (99 % de l énergie électrique consommée par le tube) est transformée en radiations électromagnétiques non ionisantes de plus grande longueur d onde, essentiellement de la chaleur. L énergie des rayons X émis par ce mécanisme de freinage est dispersée sur un large spectre continu, étalé à partir d une énergie maximale qui correspond à la très faible fraction d électrons ayant été accélérés par la différence de potentiel maximale (kvp) et ayant perdu toute leur énergie au contact des atomes du métal lourd constituant l anode ( fig.. ). Les valeurs minimales des énergies du spectre des photons X émis par le tube sont définies par la filtration additionnelle à la fenêtre de sortie du faisceau. Rayonnement caractéristique (phénomène de collision) Le second mécanisme de production des rayons X dans la cible anodique correspond au rayonnement dit «caractéristique» qui résulte d interactions entre les électrons accélérés par le champ électrique créé entre cathode et anode et les électrons des couches orbitaires des atomes du métal constituant l anode. Ce second mécanisme de production des photons X est souvent désigné sous le terme de phénomène de collision.

6 Scanner et rayons X a b c 0 0 20 0 40 50 60 70 80 90 Énergie des photons X émis (en kev) Figure. Spectre du rayonnement de freinage. Le spectre continu traduit la dispersion des énergies des photons X produits par ce mécanisme. L intensité du faisceau correspond à l aire sous la courbe. La fi ltration additionnelle du faisceau sortant du tube élimine le rayonnement X «mou» dont l énergie est insuffi sante pour qu il participe à la constitution l image, mais qui représenterait une part non négligeable de l irradiation cutanée. Les électrons des différentes couches orbitaires d un atome sont caractérisés par leur énergie de liaison, qui correspond aux forces nécessaires pour que ces électrons chargés négativement résistent à l attraction causée par la charge positive du noyau. On comprend donc que les couches centrales (K, L) de l atome, proches du noyau, correspondent à des énergies de liaison très élevées et d autant plus importantes que le numéro atomique (donc la charge positive du noyau) est grand. Au contraire, les couches plus périphériques, plus éloignées du noyau, correspondent à des énergies de liaison très faibles. Pour déplacer un électron d une couche électronique centrale (K, par exemple) vers une autre couche plus périphérique (L, M), il faut lui apporter une quantité d énergie égale aux différences d énergies de liaison caractéristiques des couches K-L ou K-M ( fig..4 ). Par exemple, pour le tungstène, l énergie de liaison des électrons de la couche K est de l ordre de 70 kev et celle des électrons de la couche L de l ordre de kev : pour expulser un électron de la couche K (ionisation), il faut lui apporter une énergie d au moins 70 kev. Puis, des phénomènes de transition électronique visant à ramener l atome à un état stable aboutiront à émettre un photon dont l énergie sera de 70 = 59 kev qui, dans ce cas, appartiendra donc au domaine des rayons X utiles. Cette énergie sera toujours la même chaque fois qu une ionisation sur la couche K de l atome de tungstène aura été provoquée et suivie d une transition K-L. L énergie de liaison des électrons de la couche M du tungstène étant de l ordre de 2 kev, la transition

Production des rayons X en imagerie par projection et en scanographie 7 b a 2 c K L M 4 Figure.4 Phénomène de collision. Les interactions entre les électrons du courant-tube () et les électrons périphériques des atomes de tungstène de la cible anodique (2,) aboutissent à l expulsion d électrons des couches centrales (à énergie de liaison élevée) qui sont suivies de transition électronique à l origine de l émission de photons X ayant des énergies caractéristiques du corps qui leur a donné naissance. Elles correspondent aux différences d énergie de liaison entre les couches intéressées par la transition électronique. Leur traduction spectrale correspond à des pics d énergie caractéristiques (spectre de raies) qui s additionnent au spectre continu du rayonnement produit par freinage. électronique entre les couches K et M produira un photon d énergie égale à 2 = 9 kev qui n est plus du domaine des X «utiles» en imagerie et sera éliminé par la filtration additionnelle. Ce mécanisme de production des rayons X aboutit à produire des photons X dont l énergie est parfaitement déterminée pour un élément chimique donné. Ce type de rayonnement X est dit «caractéristique» de l élément qui lui a donné naissance et le spectre correspondant est constitué d une ou plusieurs «raies», dont chacune est le résultat d une transition électronique entre deux couches ou sous-couches électroniques périphériques de l atome. Dans le cas du tungstène, il y a par exemple deux sous-couches L, avec des énergies de liaison (bien entendu très proches) qui conduiront lors des transitions électroniques avec la couche K à deux raies caractéristiques du tungstène : 59, kev et 57,9 kev ( fig..5 ). La part représentée par le rayonnement caractéristique par rapport au rayonnement produit par freinage est variable en fonction des conditions d utilisation du tube radiogène et de la nature du métal constituant l anode. En radiologie standard, en dessous d un kilovoltage à 70 kvp, il n y a pas de rayonnement caractéristique de la couche K, car l énergie cinétique

8 Scanner et rayons X Intensité du faisceau X α α 2 β β 2 2 4 0 50 00 50 200 Énergie des photons X (en kev) Figure.5 Spectre d émission complet. Il associe le spectre continu du rayonnement produit par freinage () (avec filtration des photons X «mous» ()) et le spectre de raies (2) caractéristique du métal constituant la cible anodique. des électrons du flux cathode-anode est inférieure à l énergie de liaison des électrons de la couche K du tungstène. Il ne peut donc y avoir d ionisation sur cette couche. Entre 80 et 50 kvp, La part du rayonnement caractéristique de la couche K passe de 0 % à 80 kvp, à 28 % à 50 kvp. Au-delà de cette valeur de 50 kvp, la contribution du rayonnement caractéristique diminue et devient négligeable au-dessus de 00 kvp, mais on est hors du domaine du radiodiagnostic. Matériau de l anode Le matériel constituant la cible anodique détermine la quantité de rayonnement X qui pourra être produite à un kilovoltage donné. Plus le numéro atomique du métal constituant la cible est élevé, plus l efficacité de production des rayons X sera grande. Par exemple, le tungstène ( Z = 74) produira plus de rayonnement de freinage que l étain ( Z = 50), si ces deux éléments étaient utilisés dans des conditions identiques de kilovoltage et d intensité du courant-tube. Dans la pratique, on emploie le tungstène dans les cibles anodiques en raison de son numéro atomique relativement élevé ( Z = 74) et de son point de fusion très élevé ( 70 C) le platine, avec un numéro atomique plus favorable ( Z = 78) a un point de fusion de 770 C, tandis que l or stable ( Z = 79) fond à 06 C. Le numéro atomique du métal de la cible détermine en partie la quantité de photons X produits par freinage (spectre continu ) ; il détermine également la qualité du rayonnement X caractéristique (spectre de raies).

Production des rayons X en imagerie par projection et en scanographie 9 Dans les cibles anodiques en molybdène (mammographie ), la part relative du rayonnement de freinage est réduite et le rayonnement caractéristique constitue l essentiel du faisceau produit. Le kilovoltage optimal est de l ordre de 28 kvp ; on élimine par un filtre de molybdène de 0,0 cm d épaisseur le spectre continu pour ne conserver que les raies caractéristiques du molybdène (7,5 kev et 9,6 kev pour les couches K-alpha et K-bêta). À retenir Le numéro atomique du matériel constituant la cible détermine la quantité (nombre de photons produits par freinage) et la qualité (énergie) du rayonnement caractéristique. Le kilovoltage (kvp) détermine l énergie cinétique des électrons, ellemême à l origine de l énergie maximale (qualité) des photons produits. Les kilovoltages élevés augmentent également la quantité de photons, donc l intensité du faisceau qui est proportionnelle au carré du kvp. La longueur d onde du rayonnement caractéristique produit par la cible n est pas modifiée par le kvp mais, bien entendu, il faut un kilovoltage suffisant pour que cette radiation caractéristique apparaisse ; par exemple, avec une cible en tungstène, il faut une différence de potentiel minimale de 70 kvp pour que le rayonnement caractéristique de la couche K prenne naissance. Le nombre d électrons qui traverse le tube radiogène de la cathode à l anode (courant-tube ) détermine le nombre de photons produits. Si on augmente l intensité du courant-tube à kilovoltage constant, on augmente l intensité du faisceau sans modifier sa qualité, représentée par l énergie maximale et l énergie moyenne des photons X produits ( fig..6 ). Si on augmente le kilovoltage en conservant une intensité du couranttube constante, on augmente l intensité du faisceau mais en modifiant sa qualité, c est-à-dire en augmentant l énergie maximale et l énergie moyenne des photons X produits ( fig..7 ). Tubes radiogènes : caractères généraux Les tubes radiogènes sont des convertisseurs d énergie qui consomment de l énergie électrique pour produire des radiations électromagnétiques de longueurs d onde (et d énergie) variées [-]. Les plus énergétiques des rayonnements produits (rayons X) ne représentent que % de l énergie électrique consommée ; les 99 % restants sont des radiations de grande longueur, en quasi-totalité du rayonnement infrarouge, c est-à-dire de la chaleur. Les rayons X sont produits par conversion d énergie quand un faisceau d électrons accélérés à grande vitesse dans un champ électrique est soudainement décéléré dans la cible inclinée, constituée de métal lourd (de numéro atomique Z élevé), d un tube à rayons X.