La lutte contre les mutilations génitales féminines



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Mai 2003 N o 180 Association humanitaire La lutte contre les mutilations génitales féminines Dans cette édition Six jours de contractions Fatimé, une femme sauvée du déshonneur Vous et nous www.morija.org

Editorial: Sommaire Risquer sa vie pour être mère L Afrique subsaharienne détient un bien triste record du monde: c est la région qui enregistre le plus fort taux de mortalité maternelle. En effet, selon les chiffres de l Organisation Mondiale de la Santé, chaque année, un demi-million de femmes meurent des suites de complications survenues pendant la grossesse ou à l accouchement. Celles qui survivent en portent parfois de graves séquelles: fistules, incontinence, stérilité, etc. Alors qu en Europe le risque de mourir en couches est de 1 sur 4100, en Afrique subsaharienne il est de 1 sur 13. Naissance et mort paraissent comme deux sœurs presque inséparables tant les conditions médicales sont mauvaises au Sahel. Et le défi à relever est de taille pour ces femmes qui risquent de perdre leur vie en la donnant. Il y a quelques années, alors qu elle était établie en Afrique, une famille de missionnaires a malheureusement dû affronter ces conditions. Le couple avait déjà trois beaux enfants en pleine santé, et la mère était sur le point d accoucher de son quatrième bébé. La grossesse s était déroulée sans encombre jusqu à ce que des complications surviennent pendant l accouchement. Les conditions médicales précaires n ont pas permis de la sauver. On pourrait se demander comment les choses se seraient déroulées si cette mère de famille avait accouché en Europe. Mais là n est pas la question. Il s agit de redoubler d efforts pour offrir aux femmes africaines un système médical fiable, un accompagnement prénatal et post-partum suivi, pour qu elles puissent donner la vie en toute sécurité. Bonne découverte de ce numéro de Morija tourné vers l espoir. Ensemble, offrons des jours meilleurs aux mamans du Sahel. L équipe de Morija Un accouchement cauchemardesque (page 4) Fatimé, le drame d une fistulée (page 6) Vous et nous (page 7) ASSOCIATION HUMANITAIRE En Reutet 1868 COLLOMBEY-LE-GRAND Tél. 024/472.80.70 Fax 024/472.80.93 E-Mail: relat.publique@morija.org CCP 19-10365-8 Association sans but lucratif Fondée en 1979 selon les articles 60ss du Code civil Suisse But: Aide aux plus déshérités d Afrique, du Sahel en particulier, sans distinction de race ou de religion. Siège social: Collombey-le-Grand Vérificateur des comptes: Fiduciaire R. Künzlé SA Monthey Rédaction: L Avènement Graphisme: Zion Design, Romanel-sur-Lausanne Impression: Jordi SA MORIJA-FRANCE: Monsieur D. Barbuis Les Feuillantines, La Rouguière 13011 MARSEILLE Tél/Fax: 04.91.44.50.92 But: Aide aux personnes déshéritées en Afrique Compte bancaire: Crédit Mutuel, 13400 Aubagne 8972-253914-40 CCP 13.875-50 W 029, Marseille Mensuel d information Prix de l abonnement: CHF 25. / 15. Abonnement de soutien: CHF 50. / 30. Tout don supplémentaire est le bienvenu. MERCI

Les mutilations génitales féminines Le 6 février 2003 a marqué la Journée mondiale de tolérance zéro contre les mutilations génitales féminines (MGF). Trois jours de conférence internationale ont réuni à Addis-Abeba (Ethiopie) des responsables de gouvernements africains et leurs épouses. Les participants étaient déterminés à lutter contre la tragédie silencieuse des MGF, qui affectent quelque 120 millions de femmes dans 28 pays africains. Au nom de la tradition, l excision et l infibulation subies par les filles hypothèquent lourdement leur future vie de femme et de mère: accouche-ments difficiles, voire fatals à la mère et à l enfant, sans compter les fistules vésicovaginales qui font perdre à tout jamais leur dignité aux femmes. Afin de diminuer la mortalité en couches, Morija réalise depuis plusieurs années au Tchad en partenariat avec le SMI d Abéché et des ONG locales (Africaire et la WEC) des formations d accoucheuses traditionnelles (matrones) dans les villages. Cette initiative porte ses fruits. Dans une région où ces formations ont débuté en 1998, le nombre d orphelins a fortement diminué. Malheureusement, en 2002, par manque de personnel Victime elle aussi de la tradition? d encadrement, Morija n a pu les donner. Avec votre soutien, nous souhaitons reprendre cette activité, car le nombre des femmes décédant à l accouchement est encore bien trop élevé. Coût d une formation d accoucheuse Pour un village situé à une distance moyenne d Abéché, soit 80 km, un cours de formation de quatre à dix accoucheuses revient à environ CHF 826. ( 550. ), dont voici le détail: Sensibilisation Déplacements en voiture (visite au chef de village et aux matrones, poursuite des contacts, établissement d un calendrier des cours, amortissement du véhicule, etc.) CHF 511. / 341. Indemnité de nuit pour le chauffeur (3 à 4 nuits) CHF 20. / 13. Déplacements à cheval lorsque la piste se termine CHF 13. / 8.50 Salaires des formatrices CHF 230. / 153. Formation (cours de base et révision des acquis) Matériel qui compose la trousse d accouchement (en général remboursé par le village)chf 12. / 8. Nourriture CHF 40. / 26.50 Les chiffres montrent à l évidence que ce sont surtout les trajets qui grèvent le budget. D où toute l importance de former des matrones capables de transmettre le savoir. Formation d accoucheuses 3

Un accouchement cauchemardesque Lors d une tournée en brousse pour visiter les enfants orphelins, nous arrivons à la nuit tombante dans un village où l on nous apprend que, dans une localité voisine, une femme a des contractions depuis six jours et qu elle n a toujours pas accouché! Il fait nuit noire, nous avons un pneu crevé, et c est vraiment trop dangereux de circuler la nuit à cause des bandits coupeurs de route. Nous sommes préoccupés par cette femme qui souffre. Pourvu que nous puissions lui venir en aide avant qu il ne soit trop tard... Le lendemain, nous nous levons de bon matin et partons immédiatement vers ce village, dont on nous indique la direction. Ils disent que c est proche, mais il nous faut presque une heure pour y arriver. Ce qui nous attend là-bas est tout simplement incompréhensible pour nous: les hommes sont assis sur une natte et sirotent du thé en attendant que le bébé naisse. A côté, quelques femmes s affairent dans une petite case. A l intérieur, nous découvrons une femme allongée, à bout de forces. Une vieille matrone est à son chevet. En palpant son ventre, nous réalisons que la vessie est à la hauteur du 4 Les employés du SMI d Abéché n hésitent pas à se rendre dans des endroits reculés pour venir en aide aux populations démunies nombril, la tête du bébé ayant bloqué l excrétion de l urine depuis trois jours. La matrone explique ce qui s est Au Sahel, beaucoup d hommes ne se préoccupent pas des problèmes liés à l accouchement. Mais heureusement, les mentalités changent. passé. Elle a insisté pour amener la jeune femme à l hôpital, mais les hommes ont dit qu il fallait attendre. Après avoir évacué l urine, nous essayons de faire «Si Allah le veut, ce bébé va venir en son temps» avancer l accouchement. Nous nous rendons vite compte qu il faudra aller au dispensaire pour effectuer une ventouse, car la maman est épuisée et le bébé semble assez grand. S ensuit une négociation avec le mari et le père de la femme, pas très convaincus de la nécessité de se déplacer: «Si Allah le veut, ce bébé va venir en son temps.» A force d insister et d argumenter, nous obtenons l autorisation de conduire la femme au dispensaire le plus proche, à quelque 50 km.

Les parents de la malheureuse nous accompagnent, et nous la transportons tant bien que mal dans la voiture. La piste est bien chaotique pour une femme qui a des contractions depuis une semaine, et qui n a plus d énergie. Pourtant, elle est bien courageuse, presque résignée... Après deux heures de route, nous voilà enfin arrivés. L infirmier, à peine mis au courant, fait appeler une accoucheuse traditionnelle du quartier. Dans cette situation difficile, quelle joie de voir arriver une accoucheuse qui a suivi une formation que nous avons dispensée un mois auparavant, et de la voir mettre en pratique les règles d hygiène enseignées! Même au dispensaire, l accouchement est long et très difficile. Nous avons l impression que nous n y arriverons jamais... Après bien des efforts, le bébé vient au monde, mais bien sûr, il est sans vie. Décédé depuis plusieurs jours, il n a pas supporté les contractions pendant si longtemps... Pourtant la maman est en vie, et cela tient du miracle après avoir vécu un tel travail. Nous craignons Le bébé vient au monde, mais bien sûr, il est sans vie qu elle ne développe une fistule ou d autres complications et nous la confions à l infirmier. Continuant les visites aux orphelins, nous repassons par le dispensaire le soir même, et n en revenons pas de voir Deux heures sur une piste chaotique pour atteindre le dispensaire le plus proche cette femme transformée, encore faible certes, mais sans séquelles. Elle et sa mère nous remercient, car au-delà des souffrances endurées, elles se rendent bien compte que quelques heures de plus auraient été fatales. Elle revient de loin, cette jeune femme, et elle en est consciente. Nous espérons que son mari et les hommes du village auront appris quelque chose pour qu à l avenir, une telle situation ne se représente plus. Carmen Weise et Agathe Burrus (SMI d Abéché) Parfois le bébé vit, mais la maman meurt Morija prend soin des orphelins La lutte contre les mutilations génitales féminines est commune à tous les centres de Morija au Sahel. Des enseignements aux mères et aux nourrices y abordent les problèmes de l excision, de l accouchement et des mesures d hygiène. Morija dispose en outre de deux maternités, l une à Farendé au Nord-Togo et l autre à Guider au Nord-Cameroun. Les consultations prénatales et les accouchements en milieu médical contribuent grandement à réduire la mortalité des femmes et des bébés lors de l accouchement. Dans nos centres, les mamans apprennent les mesures d hygiène 5

Fatimé, le drame d une fistulée Heureuse de pouvoir reprendre une vie normale Agathe Burrus, du SMI d Abéché, s est rendue à Adré (à 170 km à l est d Abéché) pour participer aux soins postopératoires de femmes soignées pour des fistules vésico-vaginales, c est-à-dire 6 des lésions provoquées par des accouchements difficiles et responsables d incontinence. Voici l histoire de Fatimé, une jeune femme prise en charge par cette équipe médicale. C est après quelques jours seulement que Fatimé se rendit compte des conséquences désastreuses de l accouchement difficile qu elle venait de vivre et au cours duquel elle avait perdu son bébé. Elle n arrivait plus à retenir ses urines et avait une fistule. Elle savait ce que cela représentait: elle serait probablement répudiée par son mari, exclue de la vie du village, personne ne supportant l odeur nauséabonde qu elle dégagerait. Elle serait seule, et ne pourrait plus jamais avoir d enfant. Un véritable drame pour cette jeune femme de 17 ans. Après quelques mois, elle entendit parler d un hôpital, situé à plus de 100 km de son village, où un médecin opérait des femmes ayant des fistules. C est remplie d espoir qu elle s y rendit. Mais après quelque temps, elle dut se rendre à l évidence: l opération avait échoué. Puis elle apprit qu une équipe spécialisée venait deux semaines à Adré pour opérer des femmes fistulées. Alors Fatimé fit le voyage, accompagnée de son mari, qui ne l avait pas abandonnée, et de sa mère. Là, elle rencontra beaucoup de jeunes femmes qui souffraient du même problème et put être opérée. Pendant deux semaines, elle dut rester couchée, dépendante de sa mère ou de son mari pour manger, boire, se laver. Ce fut une longue attente, pleine de doutes et d appréhensions. Puis le grand jour arriva: Fatimé se leva et constata qu elle était guérie. Son visage rayonnait de bonheur! Une nouvelle vie Une nouvelle vie commençait pour elle commençait pour elle. Après trois mois de convalescence, Fatimé retourna dans son village. Quel accueil! Son mari avait construit une toute nouvelle case bien équipée: un lit avec de bonnes couvertures, des nattes, de beaux tapis sur le sol et au mur, une petite table avec un napperon, garnie de divers pots de crème, de parfums et autres produits de beauté. Les femmes du village défilèrent les une après les autres pour lui souhaiter la bienvenue et lui exprimer leurs vœux de bénédiction, chacune avec un petit présent. Bientôt, il y avait devant elle une quinzaine de petites assiettes avec des arachides, des dattes, des crêpes de mil, du thé... Les craintes de Fatimé s envolèrent définitivement. Elle faisait à nouveau partie intégrante du village. De plus, son mari n avait pas pris de deuxième épouse en son absence. C était plus que tout ce qu elle avait pu espérer. Agathe Burrus (SMI d Abéché)

Vous et nous Depuis 25 ans, Morija est active dans les pays du Sahel grâce à ses 14 programmes. Ensemble, nous avons épargné des milliers de vies et nous en avons secouru des milliers d autres. Depuis sa fondation en 1979, notre organisation d aide humanitaire a grandi. Elle grandit encore: goutte après goutte, un océan de générosité et de solidarité se forme. Il vient abreuver et nourrir des enfants, des femmes, des hommes, des personnes âgées, là-bas, au Sud. Ces nombreuses gouttes, c est vous. Morija met en place cette entraide si nécessaire, mais sans votre soutien, rien ne serait possible. Avec notre journal mensuel, nous vous informons du travail sur le terrain, des progrès vécus, des drames rencontrés et des besoins à combler. Ce journal est le vôtre. C est pourquoi nous avons ouvert une nouvelle rubrique le Courrier des lecteurs parue pour la première fois le mois dernier. Un courrier des lecteurs pour renforcer nos liens. N hésitez pas à nous écrire pour nous faire part de vos idées, de vos critiques et de vos initiatives en faveur des démunis. Parce que Morija, c est vous et nous. Ensemble, nous luttons contre la pauvreté, la maladie, la malnutrition et l injustice. Ensemble, poursuivons sans relâche ce juste combat. Nos lecteurs nous écrivent «Dans une édition précédente, nous avons lu que CHF 75. / 50. suffisaient à financer l écolage d un enfant orphelin pendant une année. Cela nous a inspiré, une copine et moimême (13 ans). Nous avons joué de la musique devant un magasin et récolté CHF 225. / 150. pour ces enfants.» Simone L. Morija: Voilà une initiative ô combien généreuse et encourageante. Comme Simone et son amie, n hésitez pas à faire preuve d audace et de talent en faveur des démunis. «Enfant du Burkina Faso, Rejoins ton école aussitôt. C est le moment, car le temps presse. Ecoute les leçons de ta maîtresse. Malgré ta pauvreté rageante, lutte contre la misère grandissante. Si tu travailles et si tu sues, tu auras un métier en vue. Alors ne te décourage pas, c est sûr, tu y arriveras!» Poème de Charline, élève au Cycle d orientation de Bagnes (VS) Morija: Bravo pour ton talent. C est vrai que la pauvreté des enfants au Sahel est rageante et que l assiduité à l école est source de progrès et de développement. Encore faut-il qu ils y aient accès. Morija s engage, avec vous, en faveur de leur scolarisation. «Nous avons reçu les bulletins de versement pour renouveler notre parrainage en faveur des enfants du Sahel. Comme les années passées, nous ferons un unique versement pour éviter les taxes postales.» Emilia B. et Gabriella A. Morija: C est vrai, à chaque versement, la Poste prélève une taxe. Merci à ces deux généreuses donatrices d être attentives jusque dans les détails. 7

Le CREN/PMI de Nobéré au Burkina Faso Centre de Récupération et d Education Nutritionnelle/Protection Maternelle et Infantile Date d ouverture 1987 Situation Nobéré, localité de brousse située à 110 km au sud de la capitale. Le niveau de vie y est faible, les habitants ne disposent donc que de peu de moyens pour assumer les frais de santé Objectifs principaux «Récupérer» les enfants atteints de malnutrition Pourvoir à la nutrition des nouveau-nés orphelins, ou que la mère ne peut allaiter Eduquer les mères (nutrition, santé, hygiène...) Assurer un suivi régulier de chaque enfant Infrastructure 1 couvert d accueil et d enseignement 2 bâtiments de consultations et stock de médicaments 16 cases où vivent les mamans 1 paillotte pour les causeries 2 cuisines africaines et 1 moulin traditionnel 4 puits et 1 château d eau 2 entrepôts et 1 garage Maisons du personnel Financement Coût annuel moyen par patient: CHF 360. / 240. Budget 2003 Dépenses Lait mil, médicaments 35 780. Salaires, formations et stages 22 350. Matériaux, vehicules et entretien 2 865. Eau, éléctricité, téléphone 1 913. Frais administratifs 450. Frais de déplacements 1 875. Fonctionnement 16 757. Aide sociale diverse 2 978. Total CHF 84 968. / 56 646. Confédération CH (don de lait) CHF 30 000. / 20 000. Participation patients CHF 1 185. / 790. Solde à pourvoir CHF 53 783. / 35 856. 64% 35% 1% Personnel burkinabé 1 gestionnaire responsable (KABORE Gédéon) 1 infirmière brevetée/responsable section médicale (SAWADOGO Solange) 3 auxiliaires infirmières 2 gardiens de nuit 2 jardiniers Le CREN de Nobéré en 2002 Séjours au CREN/PMI pour récupération: 236 enfants, soit une moyenne de 19,7 par mois. 53,4% sont sortis guéris, 21,2% ont été déférés à l hôpital car leur cas était trop grave, 6,4% sont décédés, 19% sont toujours en cours de traitement Les taux de rechute et de décès ont baissé en 2002, grâce à la gestion plus stricte des sorties. Souvent, les femmes demandent à quitter le centre avant le rétablissement complet de leur enfant Grande pesée et contrôle mensuel: 7188, soit une moyenne de 599 enfants par mois Consommation de lait en poudre: 1388 kg, soit 760 kg de lait entier, 388 kg de lait 1 er âge, 240 kg de lait 2 ème âge Des échanges avec le Centre National de Nutrition (CNN) ont permis d améliorer nos techniques de récupération nutritionnelle et de soins diététiques - En 2002, lors de sa première visite au CREN/PMI de Nobéré, le Haut Commissaire de la région a été très impressionné par le travail effectué. Il a vivement félicité et encouragé le personnel