L À-PROPOS JURIDIQUE CONSTRUCTION



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Avril 2008 Le groupe d expertise en droit de la construction de Miller Thomson Pouliot publie périodiquement des bulletins à l intention des clients du cabinet. Nous vous invitons à acheminer ce courriel à toute personne (qu elle fasse ou non partie de votre entreprise) susceptible d être intéressée par les articles contenus dans le présent document. Vous pouvez vous abonner gratuitement à cette publication électronique en adressant un courriel à info@millerthomsonpouliot.com Contenu Une assurance-chantier qui profite à tous Page 1 Le respect des règles de l art en dépit des ambiguïtés sur les plans d exécution Page 3 Pas d hypothèque légale sur les biens d Hydro-Québec Page 5 L À-PROPOS JURIDIQUE CONSTRUCTION UNE ASSURANCE-CHANTIER QUI PROFITE À TOUS Par M e Éric Couture 514.871.5489 ecouture@millerthomsonpouliot.com La question des assurances sur un chantier de construction est primordiale et, si elle est bien traitée avant le début des travaux de construction, bien des litiges pourront être évités. Un jugement récent de la Cour supérieure examine une situation où l entrepreneur général, qui avait obtenu un contrat pour la rénovation d une bibliothèque, s était engagé envers le propriétaire à fournir et maintenir en vigueur une police d assurance couvrant les dommages matériels aux lieux en plus de fournir et maintenir en vigueur une assurance multirisque sur les biens, incluant une police d assurance multirisque des chantiers 1. L entrepreneur général avait ensuite accordé des contrats de sous-traitance, notamment pour l exécution des travaux électriques et pour la fourniture de certains équipements. L édifice fut sérieusement endommagé par un incendie lors de la mise en marche du système de chauffage installé par le sous-traitant en électricité. La cause de l incendie provenait d une défaillance électrique résultant des fautes du sous-traitant en électricité et du fabricant du produit défectueux. Conformément à son contrat d assurance, l assureur de l entrepreneur général l a indemnisé pour les dommages causés au chantier. L assureur a ensuite poursuivi l entrepreneur en électricité de même que le fabricant du produit défectueux et leurs assureurs respectifs. Les arguments du sous-traitant et du fabricant Le sous-traitant en électricité et le fabricant ont proposé chacun une requête en rejet de l action de l assureur de l entrepreneur général. Selon eux, le contrat d entreprise générale conclu entre le propriétaire et l entrepreneur général prévoyait que l entrepreneur général s engageait à fournir et maintenir en vigueur une police d assurance couvrant les dommages matériels aux lieux en plus de fournir et maintenir en vigueur une assurance multirisque sur les biens, incluant une police multirisque des chantiers (formule globale). En conséquence, l entrepreneur en électricité et le fabricant alléguaient que l entrepreneur général avait l obligation spécifique de fournir et maintenir en vigueur une police d assurancechantier à leur bénéfice, couvrant tous les dommages matériels. De plus, compte tenu des obligations contractuelles de l entrepreneur général, le sous-traitant en électricité et le fabricant devenaient des «assurés innommés» en vertu de l assurance-chantier de l entrepreneur général. Ainsi, compte tenu de leurs statuts d assurés innommés en vertu de la police d assurance de chantier, le sous-traitant en électricité et le fabricant ne pouvaient être poursuivis par l assureur de l entrepreneur général. 1 AXA Assurances Inc.c. Valko Électrique Inc., J.E. 2008-100.

La clause relative à l assurance La clause incluse à l intérieur du contrat d entreprise liant l entrepreneur général et le propriétaire se lisait comme suit : «16. Assurance multirisque (incendie) L entrepreneur doit fournir et maintenir en vigueur une assurance multirisque sur les biens : 16.1 L assurance devra porter sur la pleine valeur assurable des travaux établis en fonction du prix du contrat et sur la pleine valeur déclarée des produits dont il est spécifié qu ils doivent être fournis par le donneur d ouvrage aux fins d incorporation aux travaux. L assurance tiendra compte des intérêts du donneur d ouvrage, de l entrepreneur, des sous-traitants et de toute autre personne ayant un intérêt assurable dans les travaux. 16.2 L assurance sera constituée par une police d assurance multirisque des chantiers (formule globale).» Décision du tribunal Les conditions générales du contrat intervenu entre l entrepreneur général et le propriétaire obligeaient l entrepreneur à fournir et maintenir en vigueur une assurance multirisque sur les biens. La disposition indique également que l assurance tiendra compte des intérêts de tous ceux qui auront un intérêt assurable dans les travaux, incluant les sous-traitants. À titre de sous-traitants, l entrepreneur en électricité et le fabricant sont couverts par la police d assurance émise par l assureur de l entrepreneur général, puisqu il s agit d une couverture à assurés multiples. À défaut d être désignés spécifiquement dans la police elle-même, ils deviennent des assurés innommés. La conséquence de cette réalité fait en sorte que l assureur de l entrepreneur général est réputé avoir renoncé à faire valoir une réclamation à l encontre de toute personne ayant participé au chantier de construction, ce qui inclut l entrepreneur en électricité et le fabricant, de même que leurs assureurs respectifs. Le juge prend également la peine de mentionner qu aucun des contrats de sous-traitance ne prévoyait l obligation du sous-traitant de contracter une police d assurance-chantier. Le juge cite notamment une décision de la Cour Suprême du Canada qui mentionne qu il est bien établi que le but principal des assurances-chantiers est de simplifier les couvertures d assurance sur les projets de construction compliqués impliquant un certain nombre d entrepreneurs et de sous-entrepreneurs. Le tout afin de réduire le coût d assurance sur ce type de projet et réduire les litiges pouvant découler d incidents. Ce type d assurance fait en sorte que le propriétaire, l entrepreneur général et les sous-traitants peuvent exécuter les travaux l esprit tranquille. Le juge cite enfin deux (2) jugements rendus au Québec pour conclure que la police d assurance émise par l assureur de l entrepreneur général se devait de profiter au sous-traitant en électricité et au fabricant de telle sorte que l assureur de l entrepreneur général ne pouvait poursuivre le sous-traitant et le fabricant. Le juge a donc rejeté la réclamation de 319 577,06 $ intentée par l assureur de l entrepreneur général. Ce dossier a été porté en appel. Nous vous tiendrons donc informés de la décision de la Cour d appel. 2

LE RESPECT DES RÈGLES DE L ART EN DÉPIT DES AMBIGUÏTÉS SUR LES PLANS D EXÉCUTION Par M e Antonio Iacovelli 514.871.5483 aiacovelli@millerthomsonpouliot.com Un constructeur a l obligation de respecter tant les règles de l art que le principe de bonne foi dans l exécution de son travail et ne peut plaider l absence, l insuffisance ou l ambiguïté de l information apparaissant sur les plans pour justifier un manquement à ses obligations de réaliser le travail selon les règles de l art. Un tel manquement constitue un acte fautif et le constructeur qui en est l auteur sera tenu de défrayer le coût des travaux correctifs ainsi que des dommages connexes. Enfin, un client qui accepte un travail sans réserve conserve, néanmoins, son recours contre l entrepreneur pour des vices ou malfaçons non apparents. Voilà les principes qui ressortent d un jugement rendu par la Cour supérieure qui fut confirmé par la Cour d appel le 30 octobre 2007 dans l affaire Acier St-Denis inc. c. Construction R.S.R. inc. Les faits Acier St-Denis inc. (ci-après désignée «St-Denis»), oeuvrant dans le domaine de la fabrication et de l installation de structures d aciers obtient le contrat pour la fabrication du toit en acier du Pavillon J.A. De Sève de l UQÀM. St-Denis retient, par la suite, les services de Construction R.S.R. inc. (ci-après désignée «RSR») à titre de sous-traitant pour ériger la charpente métallique qui fera partie du toit de l édifice et qui comportera des cadres sur lesquelles l on ancrera l équipement de lavage de vitres (auquel faisaient référence les plans). Pas plus de trois ans après la fin des travaux et lors du premier emploi de cet équipement, les soudures des cadres de support lâchent! Par chance, l incident ne fait ni morts ni blessés. Quelques jours plus tard, un représentant de chacune des parties impliquées est convoqué à une rencontre d inspection mais personne de RSR ne s y présente. C est lors de cette rencontre que l on constate que les soudures étaient déficientes. Le cas étant véritablement urgent, St-Denis procède aux travaux correctifs et, de ce fait, supporte des coûts qui dépassent 17 000,00$. Incapables de régler leur différend occasionné par cette affaire, St-Denis et RSR se retrouvent devant la Cour supérieure suite à l action intentée par St-Denis. RSR, pour sa part en défense, nie toute responsabilité et admet ne pas s être présentée à la rencontre d inspection parce qu elle ne se sentait pas responsable de l incident. RSR admet l insuffisance des soudures mais ajoute que les plans qu on lui avait donnés n étaient pas conformes puisqu il n y avait pas de symboles de soudure, que St-Denis ne lui avait pas fournit des renseignements suffisants et, finalement, qu elle, RSR, n était pas accréditée et donc ne possédait pas la compétence requise pour exécuter le travail en question! 3

La décision de la Cour supérieure D emblée, la Cour reproche à RSR d avoir utilisé une soudure par points («tack weld») qui n est que sommaire et temporaire. RSR aurait dû appliquer la norme minimale de soudure «W59» en l absence d indications spécifiques. La soudure par points était nettement insuffisante considérant la charge que les cadres devaient supporter. Puisque la norme «W59» est la norme minimale de soudure, l argument voulant que RSR fût justifié d utiliser une soudure sommaire face à des plans et devis ambiguës ne tient pas. Quant à l ambiguïté des plans, le Tribunal précise qu il appartenait à RSR de demander des clarifications et non à St-Denis de les fournir en l absence de toute demande. La Cour critique sévèrement RSR de ne pas avoir posé aucune question ni demandé de précisions à qui que ce soit. Pour ce qui est de l argument que RSR n était pas accréditée et donc ne possédait pas la compétence requise pour exécuter le travail en question, le Tribunal est d avis que St-Denis n avait pas à s enquérir si RSR était accréditée puisque RSR était un constructeur connu et, en pratique dans un tel cas, aucune vérification formelle n est effectuée. Cependant, il incombait à RSR d avertir St-Denis quant au fait qu elle n était pas accréditée pour effectuer du soudage. Devant la preuve soumise, la Cour retient que RSR n a pas respecté son obligation de bonne foi envers son client St-Denis. En matière de construction, agir de bonne foi envers son client veut dire agir dans le meilleur intérêt de celui-ci. RSR devait s assurer que les travaux étaient conformes au contrat en respectant les usages et les règles de l art. Le respect des règles de l art est une obligation de résultat. Il faut les respecter. Ne l ayant pas fait, RSR a commis une faute contractuelle et est donc tenue d indemniser St-Denis des dommages causés par cette faute. La Cour supérieure condamne RSR à payer à St-Denis la somme d environ 17 000,00$, qui comprend le matériel, l outillage, les frais d ingénierie, les services de dessins, la fabrication, l installation et, finalement, les frais d administration. RSR portera la décision en appel. La décision de la Cour d appel Parmi les moyens d appel plaidés, RSR soumet que le juge de la Cour supérieure s est trompé en lui attribuant l obligation de se renseigner auprès de St-Denis en présence de plans ambigus. Par ailleurs, RSR soutient que St-Denis aurait dû vérifier l ensemble des travaux au lieu de les accepter sans réserves. Ainsi, RSR prétend que St-Denis aurait pu remarquer les vices apparents de soudure et que ce supposé manquement de la part de St-Denis lui fait perdre tout recours contre RSR pour les vices apparents. Dans une courte décision, la décision de la Cour d appel rejette le premier moyen concernant les plans ambigus. Elle confirme la décision de la Cour supérieure eu égard au respect des règles de l art nonobstant l ambiguïté des plans. Quant à l argument voulant que St-Denis ait perdu tout recours contre RSR puisque elle n a pas vérifié les travaux mais les a plutôt acceptés sans réserve, la Cour d appel le rejette aussi. Après avoir étudier la preuve, la Cour constate que les vices de soudage étaient non apparents et elle nous rappelle le principe qui est énoncé à l article 2113 du Code civil du Québec : le client qui accepte sans réserve un travail conserve, néanmoins, ses recours contre le constructeur à l égard des vices ou malfaçons non apparents. 4

PAS D HYPOTHÈQUE LÉGALE SUR LES BIENS D HYDRO-QUÉBEC Par M e Mathieu Turcotte 514.871.5492 mturcotte@millerthomsonpouliot.com L hypothèque légale est un moyen très utilisé et apprécié dans le monde de la construction pour s assurer du paiement de créances à un entrepreneur. Rapide, efficace et relativement peu dispendieux, c est un outil doté d une poigne convaincante auprès des propriétaires puisqu il permet à son bénéficiaire de déposséder le propriétaire de l immeuble ayant bénéficié des travaux réalisés. Vu les conséquences importantes qu elle entraîne, le législateur a exclu de cette mesure les biens appartenant à l État, qui sont en principe insaisissables, de même que certains biens appartenant aux «personnes morales de droit public», soit les biens affectés à l utilité publique. Ces personnes morales sont en fait plusieurs corps publics n étant pas directement liés au gouvernement provincial ou fédéral, tels que les sociétés d État, les commissions scolaires, les hôpitaux ou encore les municipalités. La jurisprudence rendue sur la question est toutefois très éclatée et il peut être difficile de tracer une ligne entre les biens sujets à l hypothèque légale et ceux qui en sont «protégés». En matière municipale, par exemple, la plupart des équipements de services ont été exclus de cette mesure, par exemple un aqueduc, un réservoir relié à un aqueduc, un chemin public, un incinérateur, un entrepôt de sel destiné à l entretien des routes, une caserne de pompiers, un parc ou encore un terrain municipal d aéroport. Les tribunaux ont toutefois rappelé que des biens n étant pas affectés à l utilité publique pouvaient être hypothéqués, par exemple des équipements récréatifs comme un club de curling ou un chalet de loisirs. Qu en est-il d Hydro-Québec? La Cour d appel s est récemment prononcée, dans l affaire HMI-Promec senc c. 2954-4095 Québec inc. (Construction Kay-Bek Inn), sur la validité d une hypothèque légale publiée sur les biens d Hydro-Québec, faisant le point de façon intéressante sur cette question. Dans cette affaire, Construction Kay-Bec s était vue accorder un contrat de sous-traitance par l entrepreneur général HMI, en vue de la fourniture et l installation de l appareillage et des systèmes électriques et mécaniques de la centrale Eastmain-1, pour le compte de la Société d Énergie de la Baie-James. En mars 2007, Kay-Bec a fait publier un avis d hypothèque légale sur les bureaux administratifs, les unités de logement et les unités d activités sportives et de loisir du Camp Eastmain. Cette initiative de Kay-Bec fut immédiatement suivie d une requête en radiation d hypothèque de HMI, alléguant l insaisissabilité des biens visés par son sous-traitant. 5

La Cour supérieure, dans un premier temps, a reconnu la validité de l avis d hypothèque de Kay-Bec, jugeant que malgré que les biens de l État et de ses mandataires soient généralement insaisissables, l art. 3.1.2 de la Loi sur Hydro-Québec prévoyait explicitement que «l exécution des obligations de la Société peut être poursuivie sur [ses] biens.» La Cour d appel fait le point La Cour d appel a renversé ce jugement et en a profité pour faire le point sur la situation d Hydro-Québec, rappelant qu il importe de bien qualifier son statut afin de déterminer quel régime de protection est applicable à ses biens. De par sa loi constitutive, mentionne la Cour, Hydro-Québec est non seulement une personne morale de droit public, mais également un «mandataire de l État», et ses biens «sont la propriété de l État». Conséquemment, ses actifs ne sont pas susceptibles d appropriation et sont donc à l abri d une l hypothèque légale, y compris les biens qui ne sont pas affectés à l utilité publique. Quant à l art. 3.1.2 de la Loi sur Hydro-Québec, qui permet malgré tout l exécution des obligations de la société sur ses biens, il n est applicable qu à l égard des obligations prises par Hydro-Québec, par exemple dans le cadre d un financement. Or, l hypothèque légale de Kay- Bec ne résultait pas d une telle obligation, mais plutôt d un litige contractuel avec HMI. Cette décision de la Cour d appel est en droite ligne avec la jurisprudence développée il y a quelques années dans une autre affaire similaire, impliquant cette foi un entrepreneur en maçonnerie qui avait inscrit une hypothèque légale sur la station de métro de Longueuil, appartenant à l Agence métropolitaine de transports. Dans ce cas, la Cour avait étudié la loi constitutive de cet organisme et avait déterminé que même si l A.M.T. avait le pouvoir d hypothéquer ses biens dans le cadre d un emprunt, cette faculté n impliquait pas qu une hypothèque légale puisse être inscrite. La protection conférée aux biens de l État, à ses mandataires et, dans une moindre mesure, aux personnes morales de droit public, empêche donc les entrepreneurs en construction de bénéficier d une protection importante à laquelle ils ont par ailleurs droit sur tout autre chantier. Ce désavantage est cependant compensé par le fait qu ils bénéficient généralement d une formule de cautionnement s appliquant dans bon nombre de chantiers publics. 6

GROUPE D EXPERTISE EN DROIT DE LA CONSTRUCTION Brunelle, Gilles 514.871.5444 gbrunelle@millerthomsonpouliot.com Couture, Éric 514.871.5489 ecouture@millerthomsonpouliot.com D'Amour, Normand 514.871.5487 ndamour@millerthomsonpouliot.com Iacovelli, Antonio 514.871.5483 aiacovelli@millerthomsonpouliot.com Tremblay, Louis-Michel 514.871.5421 lmtremblay@millerthomsonpouliot.com Turcotte, Mathieu 514.871.5492 mturcotte@millerthomsonpouliot.com Le présent document a été rédigé à l'intention des clients du cabinet à titre informatif uniquement et résume certaines informations juridiques récentes. Les renseignements qu'il contient ne constituent pas un avis juridique et les personnes qui en prennent connaissance ne devraient pas réagir à la lecture du présent article sans avoir préalablement obtenu l'avis juridique d'un professionnel qualifié à l'égard de leur situation. Le cabinet utilise vos renseignements personnels afin de vous faire parvenir de l'information sur des sujets susceptibles de vous intéresser et en aucun cas ne les partage avec des tiers, à l'exception de sous-traitants qui ont accepté de se conformer à la politique de protection des renseignements personnels et aux autres politiques du cabinet. www.millerthomsonpouliot.com 7