SNES Stage Le en mille morceaux
Une succession de réformes apparemment éclatées Loi LRU Réforme de l école primaire Réforme de la voie professionnelle Réforme de la formation des enseignants (Mastérisation) Réforme du lycée général et technologique Nouvelle gouvernance des EPLE qui occulte la question du collège
Et pourtant, depuis la loi Fillon Socle commun et livrets de compétences Note de vie scolaire Une orientation qui repose sur les enseignants : PDMF, entretien individuel Dynamitage de l éducation prioritaire Assouplissement de la carte scolaire Accompagnement éducatif Des mesures qui transforment, de fait, le collège en profondeur pour les élèves comme pour les personnels
Le collège a contribué à la démocratisation du second degré Il scolarise l ensemble d une classe d âge L allongement de la scolarité au-delà de l âge de 16 ans est effective pour plus de 90% des jeunes Le nombre de sortants sans qualification a considérablement décru (passant de 170 000 au milieu des années 1970 à 60 000 en 1995) mais le système éducatif ne progresse plus guère depuis 1995 : Un taux d accès au niveau IV (bac) qui stagne autour de 70 % Un taux de réussite au bac qui oscille entre 62 et 64 % 42 000 sortants sans qualification en 2005, soit 6% d une classe d âge
Qu entend-on par «sorties sans qualification»? 6% de sortants selon les critères français de 1969 Il s agit des jeunes ayant interrompu leurs études avant la seconde ou l année terminale de CAP ou de BEP (42 000 en 2005) 1% sont titulaires du brevet des collèges 5% n ont ni qualification ni diplôme
Qu entend-on par «sorties sans qualification»?
Qu entend-on par «sorties sans qualification»? 17% de non diplômés selon les critères de Lisbonne Il s agit alors des jeunes qui ont quitté l école avant d avoir obtenu un diplôme dans le secondaire Certains de ces jeunes n ont aucun diplôme (10%) Certains ont quand même obtenu le brevet des collèges (7%) Les 2/3 de ces 17% sont allés jusqu en année terminale de CAP, BEP ou de baccalauréat et sont donc qualifiés selon les critères français
Qu entend-on par «sorties sans qualification»?
Un collège où un «noyau dur» de l échec scolaire persiste 15 % des élèves entrent en 6 ème avec des difficultés de lecture (évaluations bilan en fin de CM2) 15 % d élèves en grande difficulté en fin de collège et entre 28 et 30 % d élèves fragiles (évaluations bilan en fin de 3ème) 11.8 % des jeunes de 17 ans en difficulté de lecture (Journées d appel 2008) dont 4.9 % en grave difficulté Comparaisons internationales PISA 2000 et 2003 : 4.2 et 4.7 % des jeunes français de 15 ans en- dessous du niveau de base (contre 6.2 % dans les pays de l OCDE) PISA 2006 : 21 à 22 % des français ne dépassent pas le niveau 1 sur une échelle de 5 (dont 8.5% en dessous en maths et compréhension de l écrit, et 6.6% en culture scientifique)
Compétences des élèves en fin d école primaire en 2003
Compétences des élèves en fin de collège en 2003
Un collège plus uniforme depuis les années 1990
Mais qui n a pas les moyens de prendre en charge des élèves plus divers Des jeunes pour qui le collège ne fait pas toujours sens Un travail quasi exclusivement en classe entière Des classes aux effectifs trop lourds Des horaires d enseignement insuffisants pour traiter l ensemble des programmes Des enseignants non formés pour identifier ce qui fait obstacle aux apprentissages
Et qui connaît une polarisation sociale accrue Dans le cadre d une polarisation sociale des territoires qui s accentue le refus d appliquer vraiment la loi SRU le «séparatisme social généralisé» qu analyse Eric Maurin Dans le cadre d une mise en concurrence des établissements avec l assouplissement de la carte scolaire Les collèges les plus difficiles voient partir leurs meilleurs élèves Ceux qui avaient préservé une certaine mixité s homogénéisent Les collèges les plus attractifs peuvent choisir leurs élèves
Le tournant de la loi Fillon de 2005 La loi Fillon n 2005-380 du 23 avril 2005 prétend résoudre le problème des sorties sans qualification par l imposition d un socle commun Elle prétend promouvoir «l égalité des chances» mais elle promeut surtout la notion de mérite individuel et prône l individualisation des apprentissages et des parcours. Elle dessine donc une école à plusieurs vitesses qui organise en son sein un tri social renforcé.
L objectif de 50% de diplômés du supérieur Un objectif légitime et ambitieux Le taux n est que de 43% aujourd hui en France Mais qui n a pas été accompagné de celui de faire accéder davantage de jeunes à l une des 3 voies du lycée L objectif de 80% d une classe d âge au niveau du bac ne constitue plus une priorité pour le MEN Le socle commun constitue l unique horizon pour une partie de la jeunesse
En 1996, le collège devait préparer tous les élèves à des poursuites d études Décret no 96-465 du 29 mai 1996 «Le collège accueille tous les élèves ayant suivi leur scolarité élémentaire. Il leur assure, dans le cadre de la scolarité obligatoire, la formation qui sert de base à l enseignement secondaire et les prépare ainsi aux voies de formation ultérieures» (art 1er). «Le collège dispense à tous les élèves, sans distinction, une formation générale qui doit leur permettre d acquérir les savoirs et savoir-faire fondamentaux constitutifs d une culture commune» (art 2).
Ses finalités ont été redéfinies par la loi Fillon Décret 2005-1013 du 24 août 2005 : Art. 2 - Le collège dispense à chaque élève, sans distinction, une formation générale qui doit lui permettre d acquérir au moins le socle commun de connaissances et compétences, défini en application de l article L. 122-1-1 du code de l éducation et dont l acquisition a commencé dès le début de l instruction obligatoire. D autres enseignements sont dispensés au cours de la scolarité obligatoire et complètent le socle commun dont la maîtrise est indispensable pour la poursuite des études, l exercice de la citoyenneté et l insertion professionnelle future.
Une approche par compétences Des compétences-clé européennes 1 Communication dans la langue maternelle 2 Communication en langues étrangères 3 Compétences mathématiques et compétences de base en sciences et technologies 4 Compétence numérique 5 Apprendre à apprendre 6 Compétences sociales et civiques 7 Esprit d initiative et d entreprise 8 Sensibilité et expression culturelles Projet européen de construire : Une «économie de la connaissance» Pour former «un capital humain» et développer son «employabilité»
Une approche par compétences Des compétences-clé européennes 1 Communication dans la langue maternelle 2 Communication en langues étrangères 3 Compétences mathématiques et compétences de base en sciences et technologies 4 Compétence numérique 5 Apprendre à apprendre 6 Compétences sociales et civiques 7 Esprit d initiative et d entreprise 8 Sensibilité et expression culturelles aux 7 compétences» du socle français 1. Maîtrise de la langue française 2. Pratique d une langue vivante étrangère 3. Principaux éléments de mathématiques et culture scientifique et technologique 4. Maîtrise des techniques usuelles de l information et de la communication 5. Culture humaniste 6. Compétences sociales et civiques 7. Autonomie et initiative
Un socle qui ne fait pas «culture» pour les jeunes Un socle qui invite à la fragmentation des apprentissages avec le risque que les élèves en difficulté se concentrent encore plus qu aujourd hui sur une tâche à accomplir sans percevoir les réels enjeux cognitifs Un socle qui écrase ou ignore des pans entiers de la culture Un socle qui affiche une culture humaniste mais qui vise au mieux à mémoriser des repères historiques, géographiques, littéraires ou artistiques Deux piliers (6 et 7) totalement déconnectés des disciplines qui visent à encadrer les individus, en imposant des comportements normatifs soumis à évaluation
Le socle ou les programmes? Un socle qui ne se substitue pas, en théorie, aux programmes mais qui constitue l objectif- cible pour une partie de la jeunesse, notamment en Zep (rapport IGEN 2006) Un socle qui va légitimer des parcours scolaires différenciés avec : des élèves qui pourront accéder à l ensemble de la culture scolaire des élèves qui seront cantonnés au seul socle commun dont certains seront même envoyés précocement vers les dispositifs d alternance et d apprentissage
La focalisation sur l insertion professionnelle Les PDMF : Parcours de Découverte des ème Métiers et des Formations dès la 5 : «mieux anticiper les transitions, permettre à chacun de construire un parcours personnel de la façon la plus éclairée possible pour fonder sur des bases solides ses choix d orientation» «explorer» en 5ème «organiser» en 4ème «mettre en cohérence» en 3 ème Les entretiens d orientation «au bénéfice ème des élèves de 3» à la charge des PP Les enseignants appelés à se substituer aux COPsy
Un recul de 50 ans!
Le renoncement à l ambition pour tous Une éducation prioritaire laminée Des collèges mis en concurrence avec la suppression de la carte scolaire Une généralisation du Bac Pro en 3 ans et une suppression des formations au BEP préjudiciables pour les élèves les plus fragiles La «mixité des élites» contre la mixité des Zep La question du «mérite» individuel
Carte de l éducation prioritaire en 2005
Des moyens insuffisants pour faire la différence
Des classements multiples 1982 : ZEP relances en 1990 et 1999 1991-92 : Sensible 1997 : Zones Violence 1999 : REP 2001 : PEP IV en RP 2004 : APV A chacun de ces classements, correspondent des mesures spécifiques. Un même établissement peut cumuler plusieurs classements.
2006 : Dynamitage de la carte des ZEP Un niveau EP1 Il correspondrait aux collèges «ambition réussite» et aux écoles de leur secteur (grande concentration de difficultés sociales et scolaires). Un niveau EP2 Zone urbaine mais moins sensible, qui comporte plus de mixité sociale : les établissements continueraient de recevoir les moyens actuels. Un niveau EP3 ZEP/REP qui ont vocation à sortir en trois ans du dispositif de l éducation prioritaire (les personnels actuellement en fonction conserveront les indemnités liées à l éducation prioritaire tant qu ils sont en poste dans ces établissements et durant trois ans maximum). 249 RAR Réseaux Ambition Réussite (253 aujourd hui) 832 RRS Réseaux de Réussite Scolaire Selon le rapport de l IG d octobre 2006, tous les établissements qui ne sont pas RAR doivent rentrer à terme dans le «droit commun», c est-à-dire sortir de l éducation prioritaire
RAR : des critères contestables un critère social (plus de 67% de CSP défavorisées) ; 10% d élèves ayant un retard supérieur à deux ans à l entrée au collège ; l évaluation des résultats à l entrée en Sixième : moins de 47% de réussite ; le nombre d élèves non francophones.
qui ont écarté beaucoup de collèges
Renoncement à l ambition pour tous Le rapport de l IGEN indique explicitement que le socle commun est «l objectif-cible» dans les établissements de l éducation prioritaire. Les élèves jugés «méritants» sont invités à quitter ces établissements (dérogations à la carte scolaire, internats d excellence) et peuvent bénéficier de bourses «au mérite». Les autres sont cantonnés à leur quartier avec, au mieux, des bourses sociales insuffisantes.
Déréglementation généralisée Dans le rapport annexé à la loi Fillon : lier «l obtention du statut de zone d éducation prioritaire à un contrat d objectifs, et en permettant des mesures dérogatoires dans les établissements très difficiles.» Dans une interview de 2006, Robien a souhaité : que ces collèges «s affranchissent de la structure classe et du cours s ils le souhaitent, pour faire travailler par exemple une semaine entière en sciences des jeunes répartis par groupes de compétence.» En réponse au rapport de la Cour des Comptes sur la ghéttoïsation des RAR, Luc Chatel a récemment répondu par la fuite en avant : aller plus loin encore dans les déréglementations, en permettant par exemple que les élèves de RAR «puissent être prioritaires pour choisir leur collège» ou encore que ces établissements «aient davantage d autonomie» et puissent «recruter leur personnel sur profil,, comme dans les internats d excellence». L éducation prioritaire est utilisée comme un laboratoire de test des déréglementations
Tryptique maudit Le «droit à l expérimentation» (art. 34) pour s affranchir des règles nationales en matière d organisation des enseignements La contractualisation (art 36) Les contrats d objectifs instituent le pilotage du système éducatif par la «performance» et soumettent les établissements à une «obligation de résultats» L Etat est dédouané de ses responsabilités : c est l établissement lui-même et ses personnels qui seront rendus responsables des réussites ou des échecs constatés L autonomie des établissements Nouveau décret EPLE
Aux conséquences lourdes (voir l audit sur les horaires en collège de 2006) Des établissements et des personnels plus perméables aux injonctions politiques Une évaluation du système éducatif décrochée de la réalité : la contractualisation tue l évaluation Une concurrence forcenée entre les établissements La disparition des règles nationales
Des personnels aux métiers dénaturés Une dégradation constante des conditions d exercice du métier Une évaluation incessante et problématique des élèves de multiples injonctions qui alourdissent la charge de travail Un empilement de tâches nouvelles pour lesquelles nous ne sommes pas formés
Des réformes qui ont une grande cohérence, mises en place à petits pas vers un collège en mille morceaux