COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL DE MARSEILLE



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md COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL DE MARSEILLE N 13MA03128 COMMUNE DE CARROS Mme Carassic Rapporteure Mme Chamot Rapporteure publique RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS La cour administrative d'appel de Marseille (2ème chambre) Audience du 7 janvier 2015 Lecture du 5 février 2015 54-04-02 C Vu, enregistrée le 1er août 2013, la requête présentée pour la commune de Carros, représentée par son maire en exercice, sis en cette qualité Hôtel de Ville, rue de l'euzière à Carros (06510) par la SCP d'avocats Lesage-Berguet-Gouard-Robert ; la commune de Carros demande à la Cour : 1 ) d annuler le jugement n 1103533 du 11 juin 2013 du tribunal administratif de Nice qui l'a condamné, à la demande de M. Dominique Forgione, à verser à ce dernier la somme totale de 36 393,19 euros en réparation du préjudice qu'il a subi résultant de son accident le 16 avril 2008 au stade de football Jaboulet à Carros et la somme de 5 889,89 euros assortie des intérêts à la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes au titre du remboursement de ses débours et celle de 980 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ; 2 ) de rejeter la demande de M. Forgione ; 3 ) de condamner M. Forgione à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; La commune soutient que : - le 16 avril 2008, vers 16 h, M. Forgione, alors âgé de 20 ans, qui jouait au football au stage Jaboulet de Carros, a tenté après un tir au but de récupérer le ballon qui était passé de l'autre côté des grillages de clôture de l'enceinte du stade et en escalant la grille, sa bague du majeur de la main gauche s'est coincée au niveau d'une pointe qui dépassait du grillage et en retombant de l'autre côté de grille, son doigt s'est arraché ;

N 13MA03128 2 - une tentative de réimplantation de son majeur gauche s'étant révélée impossible, il a subi le 23 avril 2008 une amputation de la première phalange du majeur de la main gauche ; - il a demandé réparation sur le fondement des dommages de travaux publics en sa qualité d'usager du stade ; - le Tribunal a entaché son jugement d'irrégularité pour s'être fondé, pour déterminer les préjudices du requérant, sur le rapport d'expertise médicale établi par le Dr Macario du 29 juin 2010, qui ne lui a pas été communiqué ou qui n'a jamais été versé aux débats ; - sur la responsabilité, c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le requérant apportait la preuve de la matérialité des faits et du lien de causalité ; - le lien de causalité entre la pointe du grillage et le dommage subi n'est pas établi par le rapport d'intervention du 16 avril 2008 des sapeurs-pompiers, qui n'ont pas assisté à l'accident et par la seule attestation de sa compagne établie 4 ans après les faits ; - la version des faits est contredite par d'autres témoignages recueillis lors de procès-verbal d'audition de M. Forgione par la gendarmerie nationale, qui mentionnent que le ballon ne serait pas resté coincé, comme cela est soutenu, mais serait passé à travers les filets de sécurité du stade par un petit trou ; - c'est un élément essentiel dès lors que les premiers juges ont retenu le défaut d'entretien normal du stade au motif que le ballon va régulièrement se loger entre les grillages de clôture du stade et les filets de protection d'une hauteur de 2,50 m ; - aucun document n'établit la présence de "pointes" ou de "tiges dessoudées" sur la grille de clôture ; - de plus, les premiers juges ont fait une inexacte appréciation des circonstances de fait en retenant que le ballon était resté bloqué dans les filets de protection derrière les cages, alors qu'il est passé au travers du filet de protection, ce qui permettait au joueur de passer par une porte sur le côté du stade et prévue à cet effet pour récupérer son ballon ; - en outre, la commune établit l'entretien normal du grillage ; - ce grillage est relativement récent et en parfaite conformité avec les normes AFNOR en vigueur en terme de tissage, hauteur, structure et matériaux ; - les installations du stade sont homologuées par la Fédération française de football ; - ce stade fait l'objet d'une ronde quotidienne du gardien ; - compte-tenu de la hauteur de 2,50 m de la clôture, la circonstance que le faîte du grillage présente, comme à l'habitude, un léger débordement des tiges verticales n'était pas susceptible de présenter un danger en conditions d'usage normal ;

N 13MA03128 3 - de plus, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, M. Forgione, qui fréquentait le stade sans autorisation contrairement à l'article 1 du règlement intérieur adopté par délibération du conseil municipal du 20 novembre 2003 affiché à l'entrée du stade, ne peut prétendre à l'indemnisation de ses préjudices compte tenu de sa situation illégitime au moment de son accident ; - l'accident est exclusivement imputable à la faute d'imprudence de la victime, qui a fait une utilisation inadaptée des clôtures du stade en décidant de grimper sur la clôture plutôt que de passer par la porte ; - il aurait dû enlever sa bague avant de jouer au football ; - cette faute de la victime exonère totalement la commune de sa responsabilité et non à 50 % ; - sur les préjudices patrimoniaux, c'est à tort que les premiers juges ont alloué la somme de 8 393,19 euros au titre de la perte de gains professionnels actuels avant sa consolidation le 29 septembre 2009, au motif que sa perte de chance sérieuse d'occuper pendant son déficit fonctionnel temporaire l'emploi de carrossier-peintre pour lequel il disposait d'une promesse d'embauche eu égard à son CAP de peintre-carrossier était établie ; - ce préjudice n'est pas établi par une pièce sérieuse et il est purement éventuel ; - le Tribunal ne pouvait pas non plus allouer à M. Forgione la somme forfaitaire de 50 000 euros au titre de l'incidence professionnelle, au motif qu'il ne pourrait plus, selon l'expert, exercer l'activité professionnelle de carrossier-peintre pour laquelle il était diplômé, dès lors que le rapport de l'expertise non contradictoire ne suffit pas à établir que son état de santé ne permettrait pas d'exercer cet emploi et qu'il n'est pas établi que les activités de magasinier et de manutentionnaire exercées par le demandeur après son accident seraient moins rémunératrices que celle de carrossier-peintre ; - la décision de la commission des droits de l'autonomie des personnes handicapées l'a reconnu apte à occuper un emploi adapté ; - les pertes de revenu futures alléguées sont aussi purement éventuelles ; - s'agissant des préjudices patrimoniaux, l'indemnisation de son déficit fonctionnel temporaire à 750 euros par mois par les premiers juges est excessive selon le barème de l'oniam ; - les souffrances endurées chiffrées à 4 /7 seront réparées par la somme maximale de 5 000 euros ; - son déficit fonctionnel permanent de 10 % pour un homme de 20 ans sera réparé par la somme maximale de 10 000 euros ; - son préjudice esthétique de 3 /7 s'évalue à 3 000 euros ; - le préjudice d'agrément allégué, consistant en l'impossibilité de jouer au football, n'est pas établi ;

N 13MA03128 4 Vu le jugement attaqué ; Vu, enregistré le 2 octobre 2013, le mémoire présenté pour M. Forgione par la SCP Céline Carrion-Tamioti et Laure Teresi, qui conclut par la voie de l'appel incident à ce que la Cour retienne la responsabilité pleine et entière de la commune de Carros et à la condamnation de la commune à lui verser d'une part, la somme de 97 207,76 euros au titre de ses préjudices patrimoniaux et la somme de 47 700 euros au titre de ses préjudices personnels, et, d'autre part, la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; M. Forgione fait valoir que : - sa demande préalable d'indemnisation a été notifiée le 3 juin 2011 à la commune de Carros et est restée sans réponse ; - c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que la responsabilité de la commune était engagée dès lors que le maire n'a pris aucune mesure destinée à prévenir cet accident, en méconnaissance de l'article L. 2212-2 5 du code général des collectivités territoriales ; - son ballon est allé se loger à la suite d'un tir au but dans le filet de protection attaché au grillage de clôture situé à l'arrière de la cage, à l'intérieur du stade ; - c'est en prenant appui sur le grillage pour se surélever et dégager le ballon que sa bague est restée coincée dans les ferrailles du grillage et que son majeur a été arraché pendant qu'il retombait de l'autre côté de la grille ; - il ne pouvait pas passer par la porte du stade pour récupérer son ballon à l'intérieur de l'enceinte ; - la commune n'établit pas que les services techniques municipaux, dépêchés sur place, n'auraient pas constaté de dégradation de cette clôture, alors que les tiges de fer du grillage étaient complètement dessoudées et dangereuses ; - d'ailleurs, 4 mois plus tard, un autre accident s'est produit au même endroit, qui a donné lieu à un jugement de condamnation de la commune de Carros non frappé d'appel ; - la circonstance que le maire a fait procéder à la réfection de la clôture du stade en 2000 soit 8 ans avant l'accident et que le grillage de protection ait obtenu l'aval de la Fédération française de football en 2002, 6 ans avant l'accident, n'établit pas l'entretien normal de l'ouvrage ; - en revanche, c'est à tort que les premiers juges ont limité la responsabilité de la commune à 50 % ; - les panneaux d'interdiction d'accès au stade ont été apposés après son accident par la commune et n'étaient pas en place ce jour-là, comme l'atteste le gardien du stade ; - la commune n'établit pas que le règlement intérieur était affiché à l'entrée du stade ou à l'entrée des tribunes ;

N 13MA03128 5 - le stade étant ouvert et aucune interdiction de pénétrer n'étant signalée, il a pu légitimement penser avoir un droit d'accès à ce stade municipal ; - aucune signalisation informant les usagers du danger à escalader le grillage n'était installée ; - et aucun matériel de récupération de son ballon n'était prévu ; - il n'a ainsi pas commis de faute d'imprudence ; - et la pratique du football, qui se joue avec les pieds, n'exige pas de retirer au préalable ses bagues ; - le rapport de l'expert, qui n'a pas fait l'objet d'une procédure contradictoire, peut néanmoins être retenu à titre d'information par les juges, dès lors que la commune a eu communication de ce rapport par les greffes du tribunal administratif et qu'elle a pu le contester en première instance ; - sur son préjudice, il a subi une perte de gains avant sa consolidation le 29 septembre 2009 d'un montant total de 16 786,38 euros une fois déduites les indemnités journalières qu'il a perçues ; - il est titulaire d'un CAP "carrosserie réparation" obtenu en juillet 2005 et d'un autre CAP "peinture en carrosserie" obtenu en juillet 2006 ; - ses pertes de gains professionnels futurs sont certaines puisqu'il devait reprendre la carrosserie que son père exploite depuis près de 20 ans ; - ses pertes de gains jusqu'à ce jour s'élèvent à 4 344,12 euros du 4 janvier au 30 septembre 2010 lorsqu'il a exercé une activité de magasinier et de 890,26 euros du 4 octobre 2010 jusqu'à ce jour ; - pour le futur, la commune sera condamnée à lui verser, sur la base d'un euro de rente de 25,187 au regard de son âge de 25 ans au jour de sa liquidation et de 100 euros de perte mensuelle, la somme de 30 421,38 euros ; - les premiers juges ne pouvaient rejeter ce chef de préjudice au motif qu'il ne produisait qu'une promesse d'embauche, dès lors que cette promesse détermine les conditions exactes de l'emploi qu'il aurait dû occuper ; - l'incidence professionnelle devra être réparée par la somme de 50 000 euros ; - son déficit fonctionnel temporaire a été évalué à bon droit à la somme de 8 000 euros par les premiers juges mais sera infirmée en ce qu'elle a appliqué le partage de responsabilité ; - ses souffrances endurées seront indemnisées par l'allocation d'une somme portée à 10 600 euros ;

N 13MA03128 6 - son déficit fonctionnel permanent sera réparé par une somme de 18 800 euros ; - son préjudice esthétique permanent sera réparé par la somme de 5 300 euros ; - son préjudice d'agrément, qui doit faire l'objet d'une indemnisation séparée des troubles dans les conditions d'existence, sera réparé par la somme de 5 000 euros ; Vu, enregistré le 14 octobre 2014, le mémoire présenté pour la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes par Me Depieds, qui demande à la Cour que la somme de 5 889,89 euros obtenue au titre du remboursement de ses débours soit portée à celle de 11 779,77 euros avec intérêts de droit et que l'indemnité forfaitaire de gestion soit portée à 1 028 euros ; La caisse fait valoir que : - elle produit un relevé définitif de ses débours du 3 janvier 2012 d'un montant total de 11 779,77 euros et une attestation d'imputabilité de son médecin-conseil ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code de la sécurité sociale ; Vu le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 janvier 2015 : - le rapport de Mme Carassic, rapporteure ; - les conclusions de Mme Chamot, rapporteure publique ; - et les observations de Me Berguet pour la commune de Carros et de Me Toresi pour M. Forgione ; 1. Considérant que la commune de Carros interjette appel du jugement du 11 juin 2013 du tribunal administratif de Nice qui l'a condamnée, à la demande de M. Dominique Forgione, à verser à ce dernier, après avoir opéré un partage de responsabilité à 50 %, la somme totale de 36 393,19 euros en réparation du préjudice qu'il a subi résultant de son accident le 16 avril 2008 au stade de football Jaboulet à Carros et la somme de 5 889,89 euros assortie des intérêts à la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes au titre du remboursement de ses débours et celle de 980 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ; que M. Forgione demande, par la voie de l'appel incident, la réformation du jugement en tant qu il a limité la condamnation de la commune et à la condamnation de cette dernière à lui verser d'une part, la somme de 97 207,76 euros au titre de ses préjudices patrimoniaux et celle de 47 700 euros au titre de ses préjudices personnels ; que la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes demande à la Cour que la commune de Carros soit condamnée à lui verser une somme portée à 11 779,77 euros avec intérêts de droit au titre du remboursement de ses débours et que l'indemnité forfaitaire de gestion soit portée à 1 028 euros ;

N 13MA03128 7 2. Considérant que, le 16 avril 2008, vers 16 h, M. Forgione, alors âgé de 20 ans, jouait au football au stade Jaboulet de Carros avec des membres de sa famille ; qu il résulte de l instruction et principalement du procès-verbal d'audition de M. Forgione lors de l'enquête préliminaire de la gendarmerie du 9 mai 2008 dans le cadre d'une plainte déposée par M. Forgione contre la commune de Carros qu "après avoir tiré, le ballon est passé à travers les filets de l'autre côté des grilles de sécurité. Afin de le récupérer, je me suis rendu au niveau des grilles et j'ai tenté de les escalader. Alors que j'étais sur le faîte d'une grille, ma bague se trouvant sur le majeur de la main gauche s'est coincée au niveau d'une pointe et alors que je retombais de l'autre côté de la grille et du terrain de football, mon doigt s'est arraché.", de l'attestation du 30 mars 2009, rédigée peu de temps après l'accident, par un témoin direct qui affirme que "Le ballon étant passé derrière les grands filets de sécurité par un petit trou, M. Forgione Dominique a grimpé au grillage pour récupérer le ballon ; malheureusement, sa bague s'est accrochée à une pointe du grillage ce qui lui a arraché le majeur gauche" et de la réclamation préalable indemnitaire du 9 octobre 2008 adressée au maire de la commune, qui mentionne que "le ballon propulsé par l'un des joueurs est passé au travers des mailles du filet et est allé au-delà de la clôture grillagée. En escaladant cette clôture pour récupérer le ballon il (M. Forgione) s'est blessé sur un piquet de fer au niveau de la main gauche." ; que contrairement à ce qu allègue M. Forgione, le ballon n était pas retenu dans un filet de protection dans l enceinte du terrain mais était allé au-delà de la clôture grillagée ; qu il résulte des circonstances de fait ainsi établies que M. Forgione, qui pouvait au surplus récupérer le ballon en passant par les portes aménagées dans les grilles de clôture ainsi qu il l a mentionné spontanément lors de l enquête de gendarmerie, n a pas fait un usage normal de l ouvrage public communal en escaladant une grille de 2,5 m de hauteur et a provoqué, par sa seule imprudence, l accident dont il a été victime ; que, dans ces conditions, et contrairement à ce qu ont estimé les premiers juges la commune de Carros est fondée à soutenir que la faute de la victime était de nature à l exonérer entièrement de toute responsabilité ; 3. Considérant que le dommage trouvant son origine dans la seule imprudence de M. Forgione, celui-ci ne peut utilement se prévaloir d une faute commise par le maire dans l exercice de son pouvoir de police ; 4. Considérant qu il résulte de ce qui précède et sans qu il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement attaqué, que la commune de Carros est fondée à soutenir que c est à tort que les premiers juges l ont condamnée à indemniser les conséquences de l accident de M. Forgione ; que, par voie de conséquence, les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes tendant à une majoration du remboursement de ses débours et de l'indemnité forfaitaire de gestion doivent être rejetées ; Sur les conclusions présentées au titre de l article L. 761-1 du code de justice administrative : 5. Considérant que les dispositions de cet article font obstacle à ce que la commune de Carros, qui n est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à verser quelque somme que ce soit à M. Fargione au titre des frais non compris dans les dépens ; qu il n y a pas lieu, dans les circonstances de l espèce, de condamner M. Fargione à verser à la commune de Carros la somme qu elle demande au titre de ces dispositions ;

N 13MA03128 8 DECIDE : Article 1 er : Le jugement du 11 juin 2013 du tribunal administratif de Nice est annulé. Article 2 : Les demandes présentées par M. Forgione et la caisse primaire d assurance maladie des Alpes-Maritimes devant le tribunal et leurs conclusions incidentes sont rejetées. Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Carros, à M. Dominique Forgione et à la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes. Délibéré après l audience du 7 janvier 2015, où siégeaient : - M. Vanhullebus, président ; - M. Firmin, président-assesseur ; - Mme Carassic, première conseillère ; Lu en audience publique, le 5 février 2015. La rapporteure, Le président, M.C. CARASSIC T. VANHULLEBUS La greffière, D. GIORDANO La République mande et ordonne au préfet des Alpes-Maritimes en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière,