Modèle de frottement pour l analyse du freinage en ligne droite d un véhicule léger

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Modèle de frottement pour l analyse du freinage en ligne droite d un véhicule léger Minh Tan Do To cite this version: Minh Tan Do. Modèle de frottement pour l analyse du freinage en ligne droite d un véhicule léger. JFT (Journées Internationales Francophones de Tribologie), May 2005, France. 10p., graphiques, ill., schémas, fig., bibliogr. <hal-00851304> HAL Id: hal-00851304 https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-00851304 Submitted on 13 Aug 2013 HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of scientific research documents, whether they are published or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers. L archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés.

La tribologie dans les transports De l analyse du contact à la fiabilité des systèmes 11-13 mai 2005 Tarbes France MODELE DE FROTTEMENT POUR L ANALYSE DU FREINAGE EN LIGNE DROITE D UN VEHICULE LEGER M.-T. Do 1 1 Laboratoire Central des Ponts et Chaussées - Bouguenais minh-tan.do@lcpc.fr Résumé L article présente un modèle frottement-vitesse pour le contact pneumatique/chaussée. La formulation du modèle est basée sur une description de la courbe de Stribeck. Ses paramètres sont exprimés en fonction des grandeurs mesurables liées au pneumatique et à la chaussée. Le modèle est utilisé pour estimer des coefficients de frottement mobilisés lors du freinage en ligne droite d un véhicule léger. La concordance entre la mesure et l estimation est discutée. Abstract This paper presents a friction-speed model for tire/road contact. The model formulation is based on a description of the Stribeck curve. Model constants are expressed as a function of measurable parameters related to the tire and the road surface. The model is employed for the estimation of coefficients of friction generated during longitudinal braking of a light vehicle. Agreement between the measurement and the estimation is discussed. 1. INTRODUCTION La capacité de freinage d un véhicule dépend des forces de frottement développées dans l aire de contact entre les pneumatiques et la chaussée. Pour un freinage en ligne droite, la force de frottement F x au niveau de chaque pneumatique dépend de la charge normale à la roue F z par la relation : F x = µ.f z, avec µ le coefficient de frottement pneumatique/chaussée. Le coefficient µ varie avec : - le glissement ( ) défini comme le rapport entre la vitesse de glissement du pneumatique sur la chaussée (V g) et la vitesse du véhicule (V) : = V g/v ; - la vitesse du véhicule V. La connaissance de la relation µ- -V est essentielle pour une évaluation du risque de perte de contrôle d un véhicule. La relation µ- est relativement bien connue et admise. Il existe cependant des divergences sur la modélisation de la variation de µ avec la vitesse, bien que les phénomènes physiques, qui sont à l origine de cette variation, soient bien acceptés. Cet article présente un modèle frottement-vitesse fondé sur une description de la courbe de Stribeck. L objectif est de proposer un modèle suffisamment général pour analyser diverses conditions expérimentales. On se limitera néanmoins à des sollicitations en ligne droite dites «sollicitations longitudinales» et aux véhicules légers.

2 La tribologie dans les transports Tarbes 2005 2. ADHERENCE LONGITUDINALE 2.1 Relation frottement-glissement Un exemple de la courbe µ-κ est montré sur la figure 1. On peut y distinguer deux parties correspondant à deux comportements de freinage : - une montée vers un coefficient de frottement maximal appelé µ max. Il s agit d un freinage «doux» : plus le conducteur appuie sur la pédale de frein, plus le véhicule décélère. - Une chute vers un coefficient de frottement appelé µ bloqué. Il s agit d un freinage «brutal» : les roues sont bloquées et le véhicule glisse. Ce cas de figure peut être évité en présence d un système anti-blocage des roues (ABS). 1,20 coefficient de frottement (µ) µ max 0,80 µ bloqué 0,40 0,00 0 0,2 0,4 0,6 0,8 1 glissement (κ) Source: LCPC Fig. 1 Exemple de mesure du coefficient de frottement en fonction du glissement. A glissement nul, il subsiste un coefficient de frottement non nul ; sa valeur est d environ 0,1. Cette valeur est attribuée à diverses résistances à l avancement du véhicule. Généralement, le µ max est atteint pour κ 0,1. De nombreux modèles existent pour ajuster les données de la figure 1. 2.2 Modèles frottement-vitesse Deux exemples de la courbe frottement-vitesse sont montrés sur la figure 2, le frottement étant mesuré en présence d eau entre un pneumatique et une surface de chaussée. La forme des courbes est typique de ce que l on trouve dans la littérature : exponentielle (Fig. 2a) ou S-inversé (Fig. 2b). Généralement, on observe la forme exponentielle pour de faibles hauteurs d eau. Lorsque la hauteur d eau croît, les courbes tendent vers la forme en S-inversé.

De l analyse du contact à la fiabilité des systèmes. 3 a) Mesure roue bloquée - 0,5 mm d'eau - pneu d'essai normalisé coefficient de frottement (µ) 1,00 0,80 0,60 0,40 0,20 0,00 0 20 40 60 80 100 vitesse du véhicule (km/h) Source: Projet HERMES b) Mesure roue bloquée - 3 mm d'eau - pneu commercial coefficient de frottement (µ) 1,00 0,80 0,60 0,40 0,20 0,00 0 20 40 60 80 100 vitesse du véhicule (km/h) Source: Projet VERT Fig. 2 Exemples de variation du coefficient de frottement avec la vitesse. Leu et Henry [1] ont proposé le modèle suivant pour la variation exponentielle : µ = c 0 exp(- c 1V) (1) avec µ : coefficient de frottement mesuré à un glissement donné ; c 0, c 1 : paramètres d ajustement. La Torre et Domenichini [2] ont proposé le modèle suivant pour la variation en S- inversé : ( ) b µ = µ + 1 ref b 0 (2) b + b V 1+ b 3 4 2e avec µ : µ max ou µ bloqué ; µ ref : coefficient de frottement de «référence» mesuré dans des conditions spécifiques ; b i (i = 0,, 4) : paramètres d ajustement. Comme les formules mathématiques présentées dans (1) et (2) ne sont pas transposables, leur utilisation n est pas facilement généralisable.

4 La tribologie dans les transports Tarbes 2005 3. ANALYSE DU CONTACT PNEUMATIQUE/CHAUSSEE 3.1 Echelles d irrégularités de surface de chaussée Les surfaces de chaussée sont rugueuses ; cette rugosité peut être observée à deux échelles : une échelle à la dimension des granulats, visible à l œil nu, et une échelle de rugosité sur les granulats, non visible mais sensible au toucher. Deux échelles dites «de texture» sont ainsi définies : la macrotexture et la microtexture. La macrotexture (Fig. 3) est définie comme des irrégularités de surface dont les dimensions sont comprises entre 0,1 mm et 20 mm verticalement et entre 0,5 mm et 50 mm horizontalement [3]. La microtexture (Fig. 3) est définie comme des irrégularités de surface dont les dimensions sont comprises entre 0,001 mm et 0,5 mm verticalement et inférieures à 0,5 mm horizontalement [4]. Macrotexture 0,1-20 mm 0,5-50 mm Microtexture 0,001-0,5 mm < 0,5 mm Fig. 3 Echelles de macro- et microtexture des surfaces de chaussée. 3.2 Aire de contact pneumatique/chaussée L échelle d observation des phénomènes est celle de l aire de contact entre un pneumatique et une surface de chaussée (Fig. 4). En général, on y distingue trois zones : - Une zone où l'eau s accumule devant le pneumatique et exerce une pression tendant à le soulever (zone 1) ; - Une zone où l eau est évacuée progressivement jusqu'à ce que le film d eau devienne discontinu (zone 2). Le pneumatique est «porté» en partie par les aspérités de la chaussée et en partie par le film d eau ; - Une zone où le contact est établi entre le pneumatique et les aspérités de la chaussée (zone 3). pneu qui roule film d eau surface de chaussée zone 3 zone 2 zone 1 Fig. 4 Schéma de l aire de contact pneumatique/chaussée en présence d eau à l interface. Selon ce schéma, les forces de frottement pouvant être développées dépendent essentiellement de la taille de la zone 3, et leur variation avec la vitesse dépend du rapport entre la zone 3 et l aire totale de contact. Sur chaussée sèche, les valeurs de frottement usuellement rencontrées sont de 1 à 1,3 [4] ; le problème de glissance ne se pose pas. Sur chaussée mouillée, la plage de valeurs est plus large : elle va de 0,1 à 0,9. Cette variation est due à la présence d eau et des contributions des macro- et microtextures de la surface de chaussée.

De l analyse du contact à la fiabilité des systèmes. 5 Le schéma à trois zones met en évidence trois régimes de lubrification : lubrification (élasto)hydrodynamique (zone 1), lubrification mixte (zone 2) et lubrification limite (zone 3). 3.3 Contacts lubrifiés et courbe de Stribeck Le contact entre deux solides séparés par un lubrifiant peut être décrit complètement par la courbe de Stribeck, qui est illustrée sur la figure 5. Comme le contact pneumatique/chaussée en présence d eau intègre les mêmes régimes de lubrification que ceux traités par Stribeck, l approche utilisant la courbe de Stribeck pour développer des lois frottement-vitesse semblait être prometteuse. F T /F N Lubrification limite Lubrification mixte α 1 Lubrification (élasto)hydrodynamique α 0 ηv/p F N F T, V A αa p, η viscosité pression Fig. 5 Contact lubrifié et courbe de Stribeck. Comparant les figures 2 et 5, on voit que les formes exponentielle et S-inversé constituent des parties de la courbe de la figure 5. Un modèle dérivé de la courbe de Stribeck serait donc plus général d application que ceux décrits dans (1) et (2). 4. MODELE DE FROTTEMENT 4.1 Description du modèle Le modèle suivant a été trouvé dans la référence [5] : µ = µ c + α V V s ( µ µ ) exp + βv s c avec µ c : coefficient de frottement de «Coulomb» [5] ; µ s : coefficient de frottement «statique» [5] ; V s : vitesse de Stribeck [5] ; α, β : paramètres d ajustement. La formule (3) a été simplifiée pour devenir : α V µ µ 0 exp = + V V β s avec µ : coefficient de frottement mesuré à un glissement (κ) donné ; µ 0 : frottement à vitesse «nulle». (3) (4)

6 La tribologie dans les transports Tarbes 2005 Les lignes pleines sur les graphes de la figure 2 correspondent à l ajustement de la formule (4) sur les mesures. On voit que le nouveau modèle s ajuste bien aux données expérimentales. De plus, des combinaisons de valeurs de (α) et (β) permettent de représenter les formes exponentielle (α = 1, β = 0) et S-inversé (α = 3, β = 0). Le nouveau modèle est donc suffisamment général. 4.2 Identification des paramètres du modèle Pour que le modèle puisse être utilisé à des fins prédictives, il est nécessaire que ses paramètres (µ 0, V s, α, β) puissent être reliés à des paramètres mesurables. Ces analyses ont été détaillées dans [6] ; les principaux résultats sont rappelés ici. Il a été démontré que : - µ 0 est lié à la microtexture de la surface de chaussée ; - V s est liée à la macrotexture de la surface de chaussée et au glissement κ ; - α est lié à la quantité d eau sur la chaussée ; - β est négligeable pour les données disponibles. Les figures 6 et 7 illustrent la dépendance de V s et (α) des paramètres de chaussée et de pneumatique. Sur la figure 6, le terme «PMP» (profondeur moyenne de profil) désigne un paramètre normalisé caractérisant la macrotexture des surfaces de chaussée [3]. Sur la figure 7, les termes «WD» et «TD» désignent respectivement la hauteur d eau dépassant la tête des aspérités de chaussée et la profondeur de sculpture des pneumatiques. Les deux ensembles de points expérimentaux correspondent à deux surfaces de chaussée. On voit que (α) varie entre les valeurs 1 et 3. Comme µ 0 est lié à la microtexture, il est possible de calculer ce paramètre à partir des profils de chaussée utilisant un modèle déjà présenté aux JFT 2001 [7]. 200 Vs (km/h) 150 100 50 κ = 0.86 κ = 0.34 0 0 1 2 3 4 PMP (mm) Fig. 6 Variation de la vitesse de Stribeck avec la macrotexture de la chaussée et le glissement du pneumatique.

De l analyse du contact à la fiabilité des systèmes. 7 α 3,5 3,0 2,5 2,0 1,5 1,0 0,5 0,0 0 1 2 3 4 5 WD/TD Fig. 7 Variation du paramètre de forme (α) avec la quantité d eau et l usure du pneumatique. 5. ANALYSE D ESSAIS DE FREINAGE 5.1 Démarche Dans ce paragraphe, on utilisera le modèle du paragraphe 4 pour prédire (µ) obtenu en condition de freinage roue bloquée à deux vitesses différentes. La démarche est la suivante : - Calculer µ 0 à partir de la microtexture en utilisant le modèle développé dans [7] ; - Calculer V s à partir de la macrotexture en utilisant la formule empirique suivante : V s = 117 PMP 0,19 κ 0,9 (5) - Tracer la courbe théorique µ-v pour α égal à 1 et 3 respectivement (la quantité d eau sur la chaussée n étant pas mesurée au moment des essais, ces courbes constituent un fuseau dans lequel devraient se situer les mesures). 5.2 Programme expérimental Des campagnes d essais ont été organisées sur une trentaine de sites comprenant des pistes d essais et des routes circulées. Dans le second cas, les essais se sont déroulés sur des sections fermées à la circulation. Sur chaque site, le programme expérimental comprend : 1. Des essais de freinage ; 2. Des mesures de la macrotexture de surface de chaussée ; 3. Des prélèvements d échantillons de chaussée (carottes de 20 cm de diamètre) pour des mesures de la microtexture en laboratoire. Une illustration du programme expérimental est montrée sur la figure 8. Les profils de microtexture sont relevés avec un pas d échantillonnage de 10 µm.

8 La tribologie dans les transports Tarbes 2005 Traces de freinage L d h 10m Mouillage de surface par camion citerne Mesure de macrotexture Prélèvement d échantillons pour mesure de microtexture Fig. 8 Véhicule instrumenté pour essais de freinage et programme expérimental. 5.3 Estimation de µ bloqué à partir d essais de freinage Les essais de freinage sont effectués à l aide d un véhicule léger instrumenté (Peugeot 406) du LCPC avec et sans déclenchement du système ABS (Fig. 8). Les décélérations sont enregistrées lors du freinage progressif des deux roues avant du véhicule entre deux vitesses V 1 et V 2, puis le frein est relâché. Les essais sont effectués à deux plages de vitesse : 90 km/h (V 1) à 70 km/h (V 2), et 60 km/h (V 1) à 40 km/h (V 2). L adhérence est estimée à partir de mesures de décélération à l aide de la formule suivante [4] : 2 2 V V 2 V V M 1 2 A B 1 2 + + 2 d 2 µ = (6) 2 2 V V h Z M 1 2 av + 2 d L avec M : masse du véhicule ; d : distance de freinage (Fig. 8) ; V i (i = 1, 2) : vitesse d essai ; Z av : charge statique sur l essieu avant ; h : hauteur du centre gravité du véhicule (Fig. 8) ; L : empattement du véhicule (Fig. 8) ; A, B : coefficients de résistance au roulement déterminés dans des conditions d essais particulières. Les estimations sont µ max (respectivement µ bloqué) pour des freinages avec ABS (respectivement sans ABS). Par convention, les vitesses associées sont 80 km/h et 50 km/h pour des décélérations de 90 km/h à 70 km/h et de 60 km/h à 40 km/h respectivement. Des résultats non publiés montrent que ces estimations sont proches (à 5%) des mesures enregistrées à l aide de systèmes complexes comme des moyeux dynamométriques.

De l analyse du contact à la fiabilité des systèmes. 9 5.4 Prévision de µ bloqué Pour des mesures à roue bloquée, le glissement (κ) devient 1. Le fuseau de courbes µ-v calculé à l aide du nouveau modèle de frottement est montré sur la figure 9. On y a reporté également les deux points de mesure (voir 5.3) obtenus sur la même surface. On voit que, malgré quelques approximations (absence de mesure de hauteur d eau par exemple), les prévisions ont un sens : les mesures se retrouvent dans le fuseau théorique. Pistes LCPC Nantes - Piste en béton bitumineux semi-grenu 1,00 0,80 µ bloqué 0,60 0,40 alpha = 3 mesure alpha = 1 0,20 0 20 40 60 80 100 vitesse (km/h) Fig. 9 Comparaison entre µ bloqué mesuré et calculé. 6. CONCLUSION L objet de cet article est de proposer un modèle frottement-vitesse pour l analyse de l adhérence longitudinale des chaussées. Les limites des modèles existants sont d abord montrées : ces modèles décrivent pour la plupart des conditions expérimentales assez spécifiques et ne sont pas transposables à d autres conditions. Les recherches sont orientées vers une description de la courbe de Stribeck. Outre la ressemblance entre cette courbe et celles couramment observées dans des essais d adhérence, on a noté aussi des similarités entre les régimes classiques de lubrification et la nature du contact pneumatique/chaussée en présence d eau. Un nouveau modèle a été proposé. Sa validation portait non seulement sur son ajustement aux données expérimentales, mais aussi sur l expression de ses paramètres en fonction de grandeurs mesurables. L estimation des coefficients de frottement générés lors du freinage d un véhicule léger sur une chaussée mouillée montre des concordances avec les mesures faites. Les perspectives d utilisation de ce type de modèle sont nombreuses : - Calcul des coefficients de frottement à une vitesse de référence à partir de mesures de frottement à d autres vitesses. Il s agit d une première étape vers l établissement d une échelle unique de frottement permettant d harmoniser divers appareils de mesure d adhérence ; - Estimation des distances de freinage d un véhicule. Il s agit d un indicateur important pour l étude de la perte de contrôle des véhicules.

10 La tribologie dans les transports Tarbes 2005 Références [1] Leu M.C., Henry J.J., «Prediction of Skid Resistance as a Function of Speed from Pavement Texture Measurements», Transportation Research Record, n 666, 1978, 7-13. [2] Mancosu F., Parry A., La Torre F., «Friction Variation Due to Speed and Water Depth», 4 ème Symposium International sur les Caractéristiques de Surface SURF, Nantes, France, 2000. [3] ISO 13473-1, «Characterization of Pavement Texture by Use of Surface Profiles Part 1: Determination of Mean Profile Depth», 1997. [4] MICHELIN, «Le Pneu L adhérence», 2000, 27-31. [5] Lampaert V., Swevers J., Al-Bender F., «Experimental Comparison of Different Friction Models for Accurate Low-Velocity Tracking», www.mech.kuleuven.ac.be/pma/. [6] Do M.T., Marsac P., Mosset A., «Tribology approach to predict the variation of tire/wet road friction with slip speed», 5 ème Symposium International sur les Caractéristiques de Surface SURF, Toronto, Canada, 2004. [7] Do M.T., Zahouani H., «Frottement Pneumatique/Chaussée Influence de la Microtexture des Surfaces de Chaussée», Actes des Journées Francophones Internationales de Tribologie, Obernai, France, 2001, 49-61.