L état de l assainissement en Afrique subsaharienne



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Transcription:

RÉSUMÉ DU DOCUMENT DE RÉFÉRENCE 13 DIAGNOSTICS DES INFRASTRUCTURES NATIONALES EN AFRIQUE L état de l assainissement en Afrique subsaharienne Elvira Morella, Vivien Foster, and Sudeshna Ghosh Banerjee Juin 2008 Ce rapport a été produit par la Banque mondiale et le SSATP, avec le soutien financier et autre des institutions suivantes (par ordre alphabétique) : l Agence française de développement, le Département britannique pour le développement international (DFID), le Nouveau partenariat pour le développement de l Afrique (NEPAD), la Public-Private Infrastructure Advisory Facility (PPIAF), l Union africaine et l Union européenne.

Qu est-ce que l AICD? L étude qui suit s inscrit dans le programme Diagnostics des infrastructures nationales en Afrique (AICD _ Africa Infrastructure Country Diagnostic), dont l objectif est d étendre les connaissances mondiales en matière d infrastructure physique en Afrique. L AICD fournira une base de référence par rapport à laquelle les futures améliorations des services d infrastructure pourront être mesurées pour permettre de suivre les résultats atteints grâce à l appui des bailleurs de fonds. Le projet établira également des bases empiriques plus solides pour la détermination des priorités d investissement et pour la formulation des réformes stratégiques dans les secteurs infrastructurels en Afrique. L AICD produira une série de rapports (semblables à celui-ci) donnant un aperçu de l état des dépenses publiques, des besoins d investissement et de la performance individuelle de chacun des principaux secteurs d infrastructure : l énergie, les technologies de l information et de la communication, l irrigation, le transport, ainsi que l eau et l assainissement. La Banque mondiale publiera un résumé des constats réalisés par l AICD au printemps 2008. Les données utilisées seront mises à la disposition du public sur un site web interactif permettant à ses visiteurs de télécharger des rapports d informations taillés sur mesure et d effectuer des exercices de simulation simples. La première phase de l AICD est consacrée à 24 pays, qui ensemble représentent 85 % du produit national brut, de la population et des flux d aide à l infrastructure de l Afrique subsaharienne. Ces pays sont les suivants : Afrique du Sud, Bénin, Burkina Faso, Cap Vert, Cameroun, Congo (République démocratique du Congo), Côte d Ivoire, Éthiopie, Ghana, Kenya, Madagascar, Malawi, Mali, Mozambique, Namibie, Niger, Nigeria, Ouganda, Rwanda, Sénégal, Soudan, Tanzanie, Tchad, et Zambie. Dans une seconde phase, la couverture du projet sera étendue à d autres pays. L AICD est mis en œuvre par la Banque mondiale pour le compte d un comité de pilotage représentant l Union africaine, le Nouveau partenariat pour le développement de l Afrique (NEPAD), les communautés économiques régionales africaines, la Banque africaine de développement, et les principaux bailleurs de fonds des secteurs infrastructurels. Le financement de l AICD provient d un fonds fiduciaire multibailleurs dont les principaux contributeurs sont le Department for International Development (DfID) du Royaume Uni, le Mécanisme de conseil à l appui de la formation de partenariats public-privé dans le secteur des infrastructures, l Agence française de développement et la Commission européenne. Un groupe de personnalités éminentes issues de cercles de décideurs politiques et du monde académique, aussi bien de l Afrique que des autres continents, a évalué la qualité technique de tous les principaux résultats produits par l étude. Le présent article et d autres documents analysant des sujets clés liés à l infrastructure, ainsi que les sources de données utilisées mentionnées ci-dessus, pourront être téléchargés à partir du site www.infrastructureafrica.org. Des résumés sont disponibles en anglais et en français. Touts les demandes concernant la disponibilité des ensembles de données peuvent être adressées à VFoster@worldbank.org.

Résumé Les pays d Afrique subsaharienne, dans leur très grande majorité, sont loin d atteindre les Objectifs de développement pour le millénaire relatifs à l accès à l assainissement et à son amélioration. En 2004, la couverture en assainissement amélioré, telle qu elle a été définie par le Programme conjoint de suivi, chargé de suivre les progrès en vue de la réalisation des objectifs, était de 37 %. L objectif pour 2015 est de 66 %. L échelle de l assainissement L assainissement peut se réaliser à plusieurs niveaux, qu on représentera par les degrés d une échelle. Au bas de l échelle se trouvent les pays qui n ont aucune infrastructure d assainissement et qui ont encore recours à la défécation à ciel ouvert. Le premier degré représente les latrines traditionnelles, qui désignent différentes sortes de fosses pour l évacuation des excréments. Viennent ensuite les latrines améliorées qui comprennent les SanPlat, les latrines à fosse ventilée et les toilettes chimiques lesquelles garantissent toutes une séparation plus hygiénique des excréments des conditions de vie immédiates. Le dernier degré représente les toilettes à chasse d eau qui peuvent être reliées aussi bien à une fosse septique qu à un tout-à-l égout. A Chaque degré supérieur, le coût à l unité augmente, mais le niveau de risque sanitaire diminue proportionnellement. Les coûts unitaires moyens sur la base de l expérience du Sénégal sont fixés à 656 $ EU pour une fosse septique, 441 $ EU pour une latrine à fosse ventilée et à 49 $ EU pour une latrine traditionnelle. Le Programme conjoint de suivi classe les deux degrés les plus élevés de l échelle comme assainissement amélioré dans une optique de mesure des progrès vers la réalisation des ODM. En pratique, cependant, la distinction entre assainissement amélioré et assainissement non amélioré est loin d être aisée, en raison de la grande variété des installations qu on regroupe sous ces vocables de référence. La classification des latrines traditionnelles est particulièrement difficile. L une des difficultés majeures est de savoir dans quelle mesure les latrines traditionnelles peuvent ou, en y apportant quelques modifications, devraient améliorer la protection sanitaire. De plus, la distinction entre latrines traditionnelles et améliorées est quelque peu spécieuse, dans la mesure où les avantages sanitaires qu on en attend dépendent aussi de la façon dont on les utilise. Même des latrines très rudimentaires peuvent offrir une protection sanitaire, si on les couvre, vide et remplace régulièrement, et si l on s assure, qu une fois retirées, que le purin est correctement traité et évacué. (Les utilisateurs doivent aussi se laver les mains après avoir utilisé les latrines.) Inversement, même les latrines améliorées ne fournissent pas toujours la protection sanitaire voulue, si on ne les utilise pas correctement. Dans le monde entier, le développement des tout-à-l égout est souvent très en retard par rapport au développement des réseaux de canalisation dont ils dépendent. Dans les pays africains à faible revenu, seulement 40 % de la population jouit d un raccordement privé aux réseaux de canalisation, ce qui plafonne les chances de bénéficier d un tout-à-l égout à un niveau très bas. En effet, la prévalence des systèmes de tout-à-l égout est extrêmement basse en Afrique subsaharienne. Parmi les infrastructures desservant les grandes villes, seule la moitié d entre elles

rapporte qu elles disposent d un réseau d égouts qui fonctionne. Dans les pays à moyen revenu telles la Namibie et l Afrique du Sud, et dans le cas exceptionnel du Sénégal, les réseaux d égouts couvrent une grande partie du pays. Cependant, la situation la plus typique et c est le cas des pays comme la Côte d Ivoire, le Kenya, Madagascar, le Malawi, le Lesotho et l Ouganda montre que même là où les réseaux d égouts existent, ils touchent à peine 10 % de la population dans la zone desservie. À peine plus de la moitié de ceux qui disposent de canalisations ont des toilettes à chasse d eau, la plupart du temps liées à des fosses septiques plutôt qu à des tout-à-l égout. Au degré le plus bas de l échelle L assainissement en Afrique subsaharienne consiste essentiellement en un assainissement autonome des types que nous venons de décrire (cf.. tableau A). Environ la moitié de la population tant urbaine que rurale recourt à des latrines traditionnelles. Environ 30 % de la population recourt à la défécation à ciel ouvert. Cette proportion est même plus élevée dans certains pays. Les types améliorés de latrine ne touchent pas plus de 20 % de la population globale. Curieusement, la prévalence des latrines améliorées ne dépasse pas celle des fosses septiques, même s il existe une différence de coût substantielle entre les deux. Tableau A Types d accès à l assainissement Échelle Défécation non contrôlée Latrines traditionnelles Latrines améliorées Fosse septique Urbaine 8 51 14 25 Rurale 41 51 5 2 Nationale 34 52 9 10 Source: Base de données enquêtes AICD DH/MICS, 2007. Il y a un clivage net entre zones rurales et zones urbaines. Dans les zones rurales, la grande majorité de la population recourt toujours à la défécation non contrôlée et l assainissement amélioré reste négligeable. Dans les zones urbaines, près de 40 % de la population a accès aux types d assainissement amélioré et les fosses septiques sont beaucoup plus courantes que les latrines améliorées ; moins de 10 % des citadins pratiquent la défécation non contrôlée. Le partage des infrastructures d assainissement entre de nombreuses familles plus de 40 % des foyers déclarent partager leurs toilettes avec d autres foyers constitue une pratique courante de l assainissement urbain. Les types d accès à l assainissement varient considérablement selon le niveau socioéconomique. Les latrines traditionnelles sont de loin la forme d assainissement la plus égalitaire, auxquelles environ 50 % des ménages ont recours quel que soit le niveau socio-économique. Inversement, l accès aux latrines améliorées suit de près celle des fosses septiques, ce qui montre qu en dépit de leur moindre coût les latrines améliorées restent un luxe auquel la tranche moyenne de la distribution des revenus n a pas accès. En particulier, les latrines améliorées sont virtuellement inexistantes dans la moitié la plus pauvre de la population ; et même dans les couches les plus aisées, seulement 20 à 30 % des ménages en disposent. Les latrines traditionnelles constituent non seulement le mode d assainissement le plus courant en Afrique subsaharienne, mais elles sont aussi celui qui se répand le plus rapidement. Ces dernières années, 2

elles ont connu une augmentation annuelle supplémentaire de 2,8 % dans la population des zones urbaines et d 1,8 % dans la population des zones rurales, soit plus de deux fois le taux d expansion cumulé des toilettes à chasse d eau et des latrines améliorées (figure A). Comme on pouvait s y attendre, l expansion des latrines traditionnelles touche surtout la population la plus pauvre, tandis que celui des latrines améliorées et des toilettes à chasse d eau concerne la plus riche. Même si la situation dans l ensemble est médiocre, il faut noter quelques succès importants ces dernières années. Étant donné que les objectifs formulés par les ODM relatifs à l assainissement se concentrent sur les deux options supérieures (latrines améliorées et fosses septiques), les discussions sur la stratégie de l assainissement font peu état de la rapide expansion des latrines traditionnelles. La défécation à ciel ouvert tend finalement à décliner en Afrique subsaharienne, ne serait-ce que modestement. Figure A Taux d expansion des différents modes d assainissement 1. Zones urbaines 2. Zones rurales Source : AICD DH/MICS Base de données d enquête, 2007. Plusieurs pays sont parvenus à faire passer au moins 3 % de leur population à un degré supérieur de l échelle de l assainissement chaque année (figure B). Au bas de l échelle, des pays tels que la Côte d Ivoire, l Éthiopie, et l Ouganda font passer plus de 3 % de leur population chaque année à l utilisation des latrines traditionnelles. L Éthiopie est le pays qui progresse le plus rapidement pour réduire la défécation à ciel ouvert, réduisant cette pratique de 2 %, sinon plus, de sa population chaque année. Un second groupe de pays Burkina Faso, Madagascar, Rwanda ont réussi à faire passer plus de 3 % de la population chaque année à un type de latrine améliorée. Enfin, en haut de l échelle, le Sénégal (et uniquement le Sénégal) a connu un rythme d expansion comparable pour les fosses septiques. 3

Figure B Exemples réussis du haut en bas de l échelle d assainissement (a) Éthiopie : Accès à l échelon inférieur (ci-dessous) (b) Sénégal : généralisation des fosses septiques (c) Madagascar et Rwanda : Amélioration des latrines Source : AICD DH/MICS Base de données d enquête, 2007 Types de pratiques selon les groupes de pays et mesures stratégiques appropriées Au delà cette vue d ensemble, la morphologie des défis sanitaires diffère sensiblement d un pays d Afrique subsaharienne à l autre et en fonction également de l environnement urbain ou rural au sein de chaque pays (figure C). Dans les zones urbaines, on distingue trois types distincts de pays. Le groupe le plus important dépend essentiellement des latrines traditionnelles pour son assainissement urbain. Dans le deuxième groupe, si les latrines améliorées dominent, les latrines traditionnelles restent une part importante de l assainissement. Le troisième et plus petit groupe de pays présente un type d accès double : près de la moitié de la population dispose de fosses septiques, tandis que l autre moitié continue à dépendre des latrines traditionnelles : le mode intermédiaire - celui des latrines améliorées n existe pratiquement pas. 4

Figure C Types d accès à l assainissement dans les différents pays Zones urbaines Fréquence des latrines traditionnelles : République Centrafricaine, Tchad, Comores, République du Congo, Éthiopie, Guinée, Lesotho, Malawi, Mali, Mauritanie, Mozambique, Niger, Tanzanie, Ouganda, Soudan et République Démocratique du Congo Fréquence des latrines améliorées : Bénin, Burkina Faso, Cameroun, Ghana, Madagascar, Niger, Rwanda Type bimodal : Côte d Ivoire, Gabon, Kenya, Namibie, Sénégal, Afrique du Sud, Zambie, Zimbabwe Prévalence des latrines traditionnelles Zones rurales Fréquence de la défécation à ciel ouvert : Bénin, Burkina Faso, Tchad, Côte d Ivoire, Éthiopie, Mauritanie, Mozambique, Namibie, Niger et Soudan Fréquence des latrines traditionnelles : Cameroun, Comores, République du Congo, Gabon, Ghana, Guinée, Kenya, Malawi, Mali, Niger, Afrique du Sud, Tanzanie, Ouganda, Zambie et République Démocratique du Congo Expansion de l utilisation des latrines améliorées : République Centrafricaine, Lesotho, Madagascar, Rwanda, Sénégal, Zimbabwe Prévalence de la défécation à ciel ouvert Fosse septique Fosse septique Latrine améliorée Latrine traditionnelle Défécation dehors Latrine améliorée Latrine traditionnelle Défécation dehors Prévalence des latrines améliorées Prévalence des latrines traditionnelles Fosse septique Latrine améliorée Latrine traditionnelle défécation dehors Fosse septique Iatrine améliorée Latrine traditionnelle défécation dehors Type bi-modal Augmentation des latrines améliorées Fosse septique Latrine améliorée latrine traditionnelle défécation dehors Fosse septique latrine améliorée Latrine traditionnelle défécation dehors Source : AICD DH/MICS Base de données d enquêtes, 2007 5

Dans les zones rurales, la typologie des trois modes d assainissement est quelque peu différente. Tout d abord, il existe un groupe de pays dans lesquels la défécation à ciel ouvert se pratique toujours par une large majorité de la population. Dans un deuxième groupe de pays, le plus important, les latrines traditionnelles constituent le mode d assainissement dominant dans les zones rurales. Un troisième groupe de pays a réussi à étendre les latrines améliorées de façon significative dans les zones rurales, même si la grande majorité dépend toujours des latrines traditionnelles ou pratique la défécation à ciel ouvert. Des différences majeures dans le mode d accès à l assainissement, il ressort que les stratégies doivent s adapter à chaque environnement. Là où la défécation à ciel ouvert reste prédominante, il est crucial d encourager des comportements sanitaires appropriés pour deux raisons. La première est d assurer l utilisation effective des latrines lorsqu elles sont disponibles, puisque, comme le montrent les nombreux constats internationaux en la matière, les ménages qui en bénéficient ne les utilisent pas nécessairement si aucun effort n est fait pour modifier leurs comportements. La seconde est de garantir que les latrines fournissent les avantages qu on en attend en termes de santé ce qui est moins une question de technologie que de bonnes pratiques et de comportements. Dans un environnement où les latrines traditionnelles sont déjà chose courante, l attention doit se porter sur leur transformation en modèles améliorés. Ici, le débat est de savoir si le principal goulot d étranglement tient à la demande ou à l offre du marché. Du côté de l offre, le manque de latrines améliorées peut s expliquer par le fait que le secteur de la construction n a qu une connaissance limitée des exigences de conception et aussi, sans doute, par le manque de matériaux de construction essentiels sur les marchés locaux. Cette hypothèse va de pair avec la prévalence peu élevée de latrines améliorées en Afrique (même dans les pays à moyen revenu) ; les latrines traditionnelles couvrent bien 40-50 % de la population, même parmi les groupes à revenu très élevé, où les ressources pour des infrastructures plus avancées semblent disponibles. Du côté de la demande, la faible utilisation des latrines améliorées est peut être due à une question d accessibilité économique. Les revenus des ménages sont bas et le coût de ces latrines est relativement élevé. Les analyses comparant les coûts d investissement d infrastructures sanitaires et les budgets très limités des ménages indiquent que, si les différents groupes de revenus peuvent tous se permettre des latrines traditionnelles, les latrines améliorées représentent plus d un mois de budget, même pour les ménages appartenant au groupe de revenu le plus élevé. Ce constat correspond à la faible distribution sociale des latrines améliorées pour tous les groupes de revenu. Le nombre peu élevé de latrines améliorées est probablement dû à un ensemble de facteurs liés à la demande aussi bien qu à l offre. Néanmoins, il est impératif de remédier en premier lieu aux goulets d étranglement de l offre. Autrement, les subventions pourraient être accordées en pure perte à des ménages qui auraient pu les acquérir eux-mêmes si les latrines améliorées avaient été disponibles. De plus, permettre aux marchés locaux de se développer encourage également l innovation, pourrait finalement réduire le coût des latrines améliorées et ainsi régler, du moins partiellement, le problème de l accessibilité économique. 6

Dans les cas où l expansion des fosses septiques atteint des niveaux significatifs, le problème clé devient celui de savoir comment développer l assainissement amélioré dans les segments les plus pauvres de la population. Même si l assainissement autonome va rester probablement prédominant en Afrique subsaharienne pour un certain temps encore, la méthode connaît des limites. Comme la densité de la population urbaine augmente, la limitation en terres disponibles contraindra probablement à utiliser de plus en plus des latrines. De plus, avec l augmentation des raccordements privés aux canalisations, la consommation en eau par personne augmentera elle aussi de façon significative, nécessitant ainsi de traiter d importants volumes d eaux usées. Tôt ou tard, les villes en pleine croissance de l Afrique devront faire face au besoin d étendre leurs tout-à-l égouts. Mais étant donné les graves problèmes d accessibilité économique soulignés plus haut, il est impératif de trouver des moyens de réduire le coût des tout-àl égouts grâce à l innovation technologique. Une plus grande visibilité pour un service essentiel Dans toute la région, le cadre institutionnel pour l assainissement est fragmentaire. Contrairement à la situation de l approvisionnement en eau, les différents éléments qui constituent la chaîne de l offre de la promotion de l hygiène à la construction des latrines en passant par leur vidange sont aux mains de différents acteurs privés et publics, avec de multiples acteurs présents à chaque étape. Cette fragmentation prévient l instauration d un organisme, suffisamment puissant pour se faire le champion du secteur et le sortir de son état d abandon. La tendance récente à la décentralisation du secteur, qui a conféré des responsabilités à des entités qui n ont pas nécessairement les capacités techniques requises pour s en acquitter, n a pas facilité l affectation des ressources publiques nécessaires à l assainissement. La région a réalisé des progrès en vue de l adoption de mesures nationales d assainissement. Les pays, dans leur majorité, ont adopté une définition de la promotion en matière d assainissement et d hygiène qui jette les bases d un cadre de travail pour l assainissement. Quinze pays ont également établi des stratégies politiques nationales pour l assainissement. C est un progrès. Cependant, les composantes clés qui, dans la pratique, assurent l efficacité d un programme d assainissement comme le recouvrement des coûts d exploitation, dont on sait qu il est d un bon rapport n existent que dans sept pays. Huit pays seulement ont mis en place un fonds ou ont inscrit l assainissement au budget. Dans certains pays, ce fonds ou cette affectation budgétaire sont financés exclusivement par les bailleurs de fonds (comme au Tchad et en Éthiopie). Dans d autres, les fonds proviennent à la fois du Gouvernement, des prélèvements du secteur et de bailleurs de fonds. Plusieurs approches vers un meilleur assainissement Afin de réaliser les Objectifs de développement pour le millénaire relatifs à l assainissement, l Afrique subsaharienne a besoin d investir environ 0,6 % de son produit intérieur brut (PIB) chaque année dans le secteur. Réaliser l objectif apportera des avantages substantiels en diminuant l incidence de la diarrhée, des parasites intestinaux et du trachome sous réserve, bien sûr, que les nouvelles infrastructures sanitaires s accompagnent de comportements plus hygiéniques. 7

Figure D Dépenses en nouvelle infrastructure d assainissement en % du PIB Madagascar Rwanda Burkina Faso Mali Bénin Éthiopie Ghana République Démocratique du Congo Sénégal Zimbabwe Malawi Cameroun Niveau requis = 0,6 % PIB Tanzanie Guinée Nigéria Ouganda Mozambique Tchad Niger Kenya Lesotho Zambie Namibie Cote d'ivoire 0.00% 0.50% 1.00% 1.50% 2.00% 2.50% 3.00% Investissements annuels dans les nouvelles infrastructures sanitaires en pourcentage du PIB Source: Base de données enquête AICD DH/MICS, 2007. En suivant l évolution de l accès aux nouvelles infrastructures sanitaires, il est possible d estimer le montant que les parties y ont en fait investi. La réponse est 0,46 % du PIB, ce qui n est pas si loin du niveau recommandé. Mais cette moyenne générale occulte certaines différences entre les pays (figure D). Huit des pays sondés, comme Madagascar, le Rwanda, le Burkina Faso, le Mali, le Bénin, l Éthiopie, le Ghana, et la République Démocratique du Congo, se situent bien au-dessus de la valeur de référence. En particulier, Madagascar et le Rwanda, qui ont réalisé des progrès très rapides, ont investi jusqu à 2-3 % de leur PIB en faveur de l assainissement. A l inverse, la plupart des pays ont investi moins de 0,6 % de leur PIB certains même seulement 0,1 pourcent. En raison de la décentralisation et en l absence d une comptabilité transparente sur les dépenses de ce secteur, il est difficile d estimer exactement la part des dépenses totales provenant de l État et celle provenant des budgets des ménages. Les quelques pays pour lesquels les données sont disponibles affichent une dépense publique moyenne en faveur de l assainissement qui ne dépasse pas 0,15 % du PIB, soit environ un tiers de l estimation des dépenses totales. Les ménages, dès lors, semblent régler la facture. 8

Mais ici encore, les différences entre les pays sont importantes. Pour les pays où les données sont disponibles, l investissement public peut représenter la part dominante ou la part négligeable de l enveloppe globale des investissements. Les données, incomplètes, suggèrent que l allocation substantielle des ressources publiques n est pas toujours une condition préalable à un progrès significatif. Le Rwanda, par exemple, a réussi à étendre rapidement les modes d assainissement amélioré sans presque aucun financement public. La Côte d Ivoire, d un autre côté, est parvenue à répandre l utilisation des latrines traditionnelles, grâce à l État qui a couvert une part importante des coûts. Inversement, le Kenya a progressé très modérément en assainissement, malgré un niveau de financement public considérable. On peut résumer la relation entre les dépenses et les résultats (figure E) en comparant la hausse en pourcentage annuel de l accès à l assainissement sous toutes ses formes et les dépenses (aussi bien publiques que privées) par personne en faveur de l assainissement. Les pays au-dessus de la ligne réalisent des progrès relativement rapides par rapport à leurs dépenses, mais pas les pays en dessous de la ligne. Figure E Investissement en faveur de l assainissement et augmentation de l accès à l assainissement Investissement annuel moyen par personne et augmentation de l accès annuelle Augmentation annuelle de l accès (tous les modes) 7.0% 6.0% Madagascar 5.0% 4.0% 3.0% 2.0% 1.0% 0.0% Ouganda Éthiopie Burkina Faso Rwanda Cote d'ivoire RDC Sénégal Nigéria Mozambique Zimbabwe Mali Malawi Benin Guinée Ghana Cameroun Zambie Tanzanie Namibie Kenya TChad Niger Lésotho 0.0 1.0 2.0 3.0 4.0 5.0 6.0 7.0 Total en investissement annuel par habitant ($ EU) Source: AICD DH/MICS Base de données d enquête, 2007. Au nombre des facteurs qui font passer les pays au-dessus de la ligne, on trouve les mesures d assainissement efficaces, l accent sur les modes d assainissement à un coût relativement faible, et, dans certains cas, la taille importante des ménages, qui rend l extension à l accès moins coûteuse. Une grande proportion de pays dépense tout au plus 1$ par personne et par année en faveur de l assainissement, mais, même au sein de ces groupes, des pays comme la Côte d Ivoire, l Éthiopie et l Ouganda sont parvenus à réaliser des progrès plus rapides que les autres. Les pays qui réalisent des progrès sur les degrés supérieurs de l échelle (Burkina Faso, Madagascar, Rwanda et Sénégal) tendent à dépenser plus, entre 2 $ EU et 6 $ EU par personne et par année. 9

Même si les progrès que la région a accomplis en vue d atteindre les objectifs d assainissement des ODM sont insuffisants, certains signes sont encourageants, particulièrement aux degrés inférieurs de l échelle d assainissement, où la majorité des efforts se porte. La pratique de la défécation non contrôlée devient moins courante, mais la communication sociale a encore fort à faire pour encourager l adoption de mesures d assainissement. Plusieurs pays ont créé de bons précédents sur la façon d accélérer les progrès en matière d assainissement à différents niveaux. Bien que les dépenses publiques en faveur de ce secteur restent très limitées, les ménages eux-mêmes semblent investir de façon conséquente, particulièrement en faveur de latrines traditionnelles, tandis qu au niveau intermédiaire des services, les latrines améliorées notamment restent un luxe. La persistance de la prédominance des latrines traditionnelles exige une compréhension plus nuancée du niveau de protection que ce mode d assainissement offre ou pourrait offrir s il va de pair avec des comportements adéquats. 10