Loi du 27 octobre 2010 portant renforcement du cadre légal en matière de lutte contre le blanchiment et contre le financement

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Nouvelles juridiques a publication of the Luxembourg Bankers Association Novembre 2010 - n 03 Loi du 27 octobre 2010 portant renforcement du cadre légal en matière de lutte contre le blanchiment et contre le financement du terrorisme Principales nouveautés introduites dans le dispositif luxembourgeois La loi du 27 octobre 2010 a modifié quelques 21 lois et a pour but de répondre aux critiques du GAFI concernant le dispositif luxembourgeois en matière de lutte contre le blanchiment et contre le financement du terrorisme, formulées dans son rapport d évaluation publié le 19 février 2010. 1. Extension de la définition de l infraction de blanchiment Jusqu à présent, l infraction de blanchiment est celle par laquelle une personne «facilite la justification mensongère de l origine d un bien». Désormais, le point 1) de l article 506-1 du Code pénal est complété par une référence à la «nature», à l «emplacement», à la «disposition», au «mouvement» et à la «propriété» des biens visés. De même, l article 506-1 (2) du Code pénal est complété par une référence au «déguisement» et au «transfert», de sorte que l infraction de blanchiment est également celle par laquelle une personne apporte sciemment son concours à une «opération de placement, de dissimulation, de déguisement, de transfert ou de conversion» de biens. L infraction de blanchiment est une infraction autonome, punissable indépendamment de toutes poursuites ou condamnations pour une des infractions primaires (nouvel article 506-8 du Code pénal). 2. Extension de la liste des infractions primaires - L infraction de terrorisme : un groupe terroriste est désormais défini comme l association structurée d au moins deux personnes (au lieu de 3 personnes précédemment). Par ailleurs, l acte de financement du terrorisme est applicable même si les fonds «n ont pas été effectivement utilisés pour commettre ou tenter de commettre» des actes de terrorisme, ou «s ils ne sont pas liés à un ou plusieurs actes terroristes spécifiques». La notion de «fonds» est précisée : il s agit des «biens de toute nature, corporels ou incorporels, mobiliers ou immobiliers, acquis par quelque moyen que ce soit, y compris sous forme électronique ou numérique, qui attestent un droit de propriété ou un intérêt sur ces biens et les crédits bancaires, les chèques de voyage, les chèques bancaires, les mandats, les titres, les obligations, les traites et les lettres de crédit». - Les attentats contre les personnes jouissant d une protection internationale : les infractions primaires sont étendues aux attentats contre les chef d Etat, chef de gouvernement ou ministre des affaires étrangères, lorsqu une telle personne se trouve dans un Etat étranger, ainsi que les membres de sa famille qui l accompagnent ; tout représentant, fonctionnaire ou personnalité officielle d un Etat et tout fonctionnaire, personnalité officielle ou autre agent d une organisation intergouvernementale qui a droit à une protection spéciale contre toute atteinte à sa personne, sa liberté ou sa dignité, ainsi que les membres de sa famille. 3. Reconnaissance légale d une cellule de renseignement financier La loi modifiée du 7 mars 1980 sur l organisation judi-

ciaire comporte un nouvel article 13 bis concernant la cellule de renseignement financier, ce qui lui confère une existence légale. Celle-ci est placée sous la direction d un procureur d Etat adjoint. Elle a une compétence nationale et exclusive en matière de lutte contre le blanchiment et contre le financement du terrorisme. Ses missions sont désormais définies par la loi : - servir d autorité nationale pour recevoir les déclarations d opérations suspectes et les autres informations concernant des faits susceptibles de relever du blanchiment ou du financement du terrorisme, les demander dans la mesure prévue par la loi, les analyser et leur réserver les suites appropriées, - veiller à ce que les informations détenues soient correctement protégées et ne soient diffusées que conformément à la loi, - assurer un retour d information au déclarant sur la pertinence des déclarations d opérations suspectes et sur les suites réservées à celles-ci, - établir un rapport d activité annuel (statistiques, typologies, exemples banalisés), - veiller à la bonne connaissance des lois, règlements et recommandations s appliquant aux personnes soumises aux dispositions régissant la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme, en vue d assurer l application de la loi et une coopération adéquate avec les autorités. 4. Extension des professionnels concernés Le champ d application de la loi du 12 novembre 2004 relative à la lutte contre le blanchiment et contre le financement du terrorisme est étendu à certains professionnels qui, jusqu à présent, n étaient pas encore visés. Il s agit des : - gestionnaires et conseillers des OPC, des sociétés d investissement à capital à risque et des fonds de pension, - des organismes de titrisation, lorsqu ils exercent des activités de prestataire de service aux sociétés et aux fiducies, - des entreprises d assurance, de réassurance et leurs intermédiaires lorsqu ils réalisent des opérations de crédit ou de caution, - les personnes (autres que celles spécifiquement désignées comme assujetties aux obligations en matière de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme) qui exercent à titre commercial une ou plusieurs des activités ou opérations au nom ou pour le compte d un client (dépôt, prêts, crédit-bail, transferts d argent ou de valeurs, émission et gestion de moyens de paiement, octroi de garanties et souscription d engagements, négociation sur instruments financiers, participation à des émissions de valeurs mobilières et prestation de services connexes, gestion de patrimoine, conservation et administration de valeurs mobilières pour le compte d autrui, souscription et placement d assurances vie et autres produits d investissement en lien avec une assurance, change manuel, location de coffres), certaines de ces activités étant, en tout état de cause, réservées aux établissement de crédit. En pratique, il s agit des personnes suivantes : - les personnes qui fournissent un service d investissement exclusivement à leur entreprise mère, à leurs filiales ou à une autre filiale de leur entreprise mère; - les personnes qui fournissent un service relevant de la loi du 5 avril 1993 relative au secteur financier, exclusivement à une ou plusieurs entreprises appartenant au même groupe que la personne qui fournit le service ; - les personnes qui fournissent un service relevant du chapitre 2 de la partie 1 de la loi du 5 avril 1993, si cette activité est exercée de manière accessoire dans le cadre d une activité professionnelle et si cette dernière est régie par des dispositions législatives ou réglementaires ou par un code de déontologie régissant la profession, qui n excluent pas la ABBL asbl - an ABBL publication - page 2

fourniture de ce service; - les personnes dont les services d investissement consistent exclusivement dans la gestion d un système de participation des salariés; - les personnes qui fournissent des services d investissement qui ne consistent que dans la gestion d un système de participation des salariés et la fourniture de services d investissement exclusivement à leur entreprise mère, à leurs filiales ou à une autre filiale de leur entreprise mère; - les personnes négociant des instruments financiers pour compte propre ou fournissant des services d investissement portant sur des instruments dérivés sur matières premières ou des contrats sur instruments dérivés visés à l annexe II, section B, point 10 de la loi du 5 avril 1993 aux clients de leur activité principale à condition que ces prestations soient, au niveau du groupe, accessoires par rapport à leur activité principale et que cette dernière ne consiste pas dans la fourniture de services d investissement visés aux sections A et C de l annexe II de la loi du 5 avril 1993 ou l exercice de l une ou plusieurs des activités visées à l annexe 1 de la loi du 5 avril 1993; - les personnes dont l activité principale consiste à négocier pour compte propre des matières premières et/ou des instruments dérivés sur matières premières; - les entreprises dont les services et/ou activités d investissement consistent exclusivement à négocier pour compte propre sur un marché d instruments financiers à terme ou d options ou d autres marchés dérivés et sur des marchés au comptant uniquement aux fins de couvrir des positions sur des marchés dérivés, ou qui négocient ou font un prix pour d autres membres du même marché et qui sont couvertes par la garantie d un membre compensateur de celui-ci. Le champ d application de la loi s étend également aux succursales au Luxembourg de professionnels étrangers, ainsi qu aux professionnels de droit étranger qui fournissent des prestations de service au Luxembourg sans y établir de succursale. Inversement, les professionnels établis au Luxembourg doivent appliquer l ensemble des obligations professionnelles dans leurs succursales et filiales à l étranger, y compris l obligation des disposer d une organisation interne adéquate et l obligation de coopérer avec les autorités. Les professionnels doivent veiller plus particulièrement au respect des obligations professionnelles s agissant de leurs succursales et filiales dans les pays qui n appliquent pas ou insuffisamment les mesures de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme. Ils doivent en informer les autorités luxembourgeoises lorsque la législation du pays étranger ne permet pas d appliquer des mesures équivalentes et prendre des mesures supplémentaires pour faire face de manière efficace au risque de blanchiment ou de financement du terrorisme. Lorsque les normes minimales sont différentes de celles applicables au Luxembourg, les succursales et filiales dans le pays d accueil doivent appliquer la norme la plus rigoureuse (dans la mesure où les textes législatifs et réglementaires du pays d accueil le permettent). 5. Ajustements concernant les obligations professionnelles 5.1. Approche basée sur le risque La nouvelle loi ajoute à l article 3(3) de la loi de 2004 : «Les professionnels sont tenus de procéder à une analyse des risques de leurs activités. Ils doivent consigner les résultats de cette analyse par écrit». L exposé des motifs du projet de loi précise qu il s agit là de souligner l importance d une analyse appropriée des risques, élément nécessaire à une application correcte de l approche basée sur les risques. Elle permet d une part de justifier les cas où une vigilance réduite est acceptable et, d autre part, de mettre en évidence les cas où des mesures additionnelles de vigilance sont nécessaires. ABBL asbl - an ABBL publication - page 3

tions) ; 5.2. Obligations simplifiées de vigilance à l égard de la clientèle a) Cas dans lesquels les obligations simplifiées de vigilance sont applicables : Au lieu d une exemption pure et simple des obligations de vigilance, la nouvelle loi permet aux professionnels de réduire les mesures de vigilance lorsque le client est un établissement de crédit ou un établissement financier soumis à la loi de 2004. Dans les cas dans lesquels les professionnels pouvaient ne pas appliquer les obligations de vigilance (lorsque le client est une société cotée, le bénéficiaire d un compte groupé tenu par un notaire ou avocat, une autorité publique, une personne morale présentant un faible risque de blanchiment), le professionnel peut désormais réduire les mesures de vigilance. De plus, pour ce qui concerne les sociétés cotées de pays tiers, il doit s agir uniquement des sociétés établies dans un pays qui «respecte les mesures de lutte contre le blanchiment et contre le financement du terrorisme requises par les normes internationales et qui les applique effectivement». Il s agit ici expressément des Etats qui respectent les normes du GAFI. De même, les professionnels peuvent réduire (et non plus écarter l application des mesures de vigilance) pour ce qui concerne certains produits : a) les polices d assurance vie dont la prime annuelle ne dépasse pas 1.000 euros ou dont la prime unique ne dépasse pas 2.500 euros; b) les contrats d assurance retraite qui ne comportent pas de clause de rachat et qui ne peuvent être utilisés en garantie; c) les régimes de retraite ou dispositifs similaires versant des prestations de retraite aux employés, pour lesquels les cotisations se font par déduction du salaire et dont les règles ne permettent pas aux bénéficiaires de transférer leurs droits; e) d autres produits ou transactions se rapportant à ces produits présentant un faible risque de blanchiment ou de financement du terrorisme (et qui satisfont à certains critères) (article 3-1(4) de la loi de 2004). b) Règles applicables pour l application des mesures simplifiées de vigilance : - La réduction des obligations de vigilance concerne uniquement les mesures d identification du client et du/des bénéficiaires effectifs. Les autres mesures de vigilance (obtention d informations sur l objet et la nature de la relation d affaires, surveillance des transactions, mise à jour des informations) restent applicables. - L application de ce régime n est possible que si le professionnel a suffisamment d informations permettant de déduire que le risque est faible. La loi précise qu afin d établir s il est possible de réduire les obligations de vigilance, le professionnel est tenu «de recueillir en toutes circonstances des informations suffisantes pour établir si le client remplit les conditions requises pour l application de mesures de vigilance simplifiées, ce qui implique de disposer d un niveau raisonnable d informations» en matière d identification du client, du bénéficiaire effectif, et concernant l objet et la nature des relations d affaires. L article 3-1(3) de la loi précise qu «en présence d informations donnant à penser que le risque n est pas faible, l application du régime des obligations simplifiées n est pas possible». Ainsi, l application de mesures simplifiées de vigilance n est pas seulement exclue en cas de soupçons de blanchiment ou de financement du terrorisme, mais également dans le cas où il y a des doutes concernant la véracité ou la pertinence des données précédemment obtenues aux fins d identification. - Un suivi de la relation doit permettre de s assurer que les conditions d application de ce régime restent remplies. d) la monnaie électronique (sous certaines condi- ABBL asbl - an ABBL publication - page 4

5.3. Obligations renforcées de vigilance à l égard de la clientèle a) Entrée en relation à distance Les mesures de vigilance renforcées sont applicables, en particulier, à l entrée en relation à distance. Le professionnel doit prendre des mesures spécifiques, et notamment des mesures assurant que la vérification ou la certification des documents fournis ou exigeant une attestation de confirmation de la part d un établissement de crédit ou d un établissement financier, ou encore des mesures garantissant que le premier paiement des opérations soit effectué au moyen d un compte ouvert au nom du client auprès d un établissement de crédit. La nouvelle loi impose qu il s agisse d un établissement soumis à la loi luxembourgeoise en matière de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme, ou «à des obligations professionnelles équivalentes». Ainsi, la prise en compte de l intervention d autres établissements de crédit ou d établissements financiers au titre de mesures de vigilance renforcées suppose que ces établissements respectent les normes du GAFI. b) Relations de correspondant bancaire En cas de relations de correspondant bancaire, la nouvelle loi vise à étendre l application de mesures de vigilance renforcées également aux relations au sein de l Union européenne s il y a un risque accru, et à étendre l obligation à d autres institutions que les seuls établissements de crédit. Les «autres relations similaires» visées par le texte concernent, selon la méthodologie du GAFI, les relations établies «pour opérer des transactions de valeurs mobilières ou des virements de fonds, que ce soit pour le compte propre de l institution financière à l étranger ou pour le compte de ses clients», ce qui peut viser le cas des comptes collectifs détenus par les fonds d investissement pour la réalisation des ordres de souscription et de rachat de la part de leurs clients sous-jacents. c) Relations avec des personnes politiquement exposées (PEP) ment exposée, celle-ci est étendue et vise désormais également les responsables de partis politiques. Par ailleurs, la loi du 12 novembre 2004 (telle que modifiée par la loi du 17 juillet 2008) englobait également, dans la notion de «personne politiquement exposée», les membres directs de la famille, c est-à-dire «le conjoint, tout partenaire considéré par le droit interne comme l équivalent d un conjoint, les enfants et leurs conjoints ou partenaires, les parents». La nouvelle loi ajoute qu il s agit «notamment» de ces personnes afin d éviter de fixer un cadre limitatif à ces personnes. L objectif est de s aligner sur les recommandations du GAFI qui indiquent que doivent être englobées dans la notion de «membre direct de la famille» d une personne politiquement exposées, les frères et sœurs de celle-ci. De plus, les mesures de vigilance renforcées ne sont plus uniquement applicables aux PEP résidant dans un autre Etat, mais également aux personnes exerçant une fonction publique à l étranger, même si elles résident au Luxembourg, ainsi qu aux personnes exerçant une telle fonction pour le compte d un Etat étranger (par exemple, les ambassadeurs étrangers résidant au Luxembourg). Les mesures de vigilance renforcées sont applicables non seulement lorsque le client est un PEP mais aussi lorsque le bénéficiaire effectif l est. Enfin, les mesures de vigilance sont également applicables pour les clients et bénéficiaires effectifs lorsqu il apparaît ultérieurement qu ils sont PEP ou qu ils le deviennent. 5.4. Obligations de coopération avec les autorités Les professionnels sont tenus d informer «sans délai» (au lieu de «promptement») la cellule de renseignement financier (au lieu du Procureur d Etat, puisque la cellule de renseignement financier a désormais une existence légale). La déclaration «devra être accompagnée de toutes les informations et pièces qui Pour ce qui concerne la notion de personne politique- ABBL asbl - an ABBL publication - page 5

ont motivé la déclaration». Il est en outre précisé que «l obligation de déclaration des opérations suspectes s applique sans que les déclarants qualifient l infraction sous-jacente». Lorsque la coopération se fait à la demande de la cellule de renseignement financier, le professionnel doit également transmettre les pièces sur lesquelles les informations fournies sont fondées. Concernant la lutte contre le terrorisme, l obligation de déclaration s applique aussi «aux fonds pour lesquels il existe des motifs raisonnables de soupçonner ou dont on soupçonne qu ils sont liés ou en rapport avec ou qu ils vont servir au terrorisme, à des actes terroristes, à des associations, organisations ou groupes terroristes ou à ceux qui financent le terrorisme». Cette formulation recouvre les critères de soupçons tant subjectifs - la personne soupçonne - qu objectifs - lorsqu il existe des motifs raisonnables de soupçonner, c est-à-dire que le soupçon peut être vérifié si les circonstances entourant l opération conduisent normalement une personne raisonnable à suspecter que l opération est liée à une activité criminelle. La nouvelle loi introduit des dispositions spécifiques pour ce qui concerne les instructions de blocage. Alors que l instruction de blocage avait jusqu à présent une durée maximale de trois mois, elle peut dorénavant être renouvelée pour un mois, jusqu à une durée totale de six mois. Une confirmation écrite de la CRF est adressée au professionnel et, «à défaut de confirmation écrite, les effets de l instruction cessent le troisième jour ouvrable à minuit». Le professionnel n est pas autorisé à faire état de cette instruction à l égard du client sans le consentement exprès préalable de la cellule de renseignement financier. Celle-ci peut utiliser son pouvoir de blocage même en l absence de déclaration d opération suspecte. Bien que le secret professionnel tombe en vertu de l article 41(2) de la loi du 5 avril 1993 sur le secteur financier, l article 5(4) précise également que le secret professionnel n est pas applicable à l égard de la cel- lule de renseignement financier. Cette même exception au secret professionnel figure désormais également à l article 39 de la loi du 5 avril 1993. Le libellé de l article 5(4bis) précise que les déclarations, informations et pièces fournies par un professionnel ne peuvent pas être utilisées contre lui dans le cadre d une poursuite pour violation des obligations professionnelles. Cette disposition a pour but d assurer une protection au professionnel qui effectue une déclaration d opération suspecte contre le risque de s incriminer lui-même, conformément à l article 6 de la Convention de Sauvegarde des Droits de l Homme et des Libertés fondamentales. 5.5. Sanctions La loi augmente substantiellement le taux maximum de l amende pénale applicable à ceux qui ont contrevenu sciemment aux obligations professionnelles : il est porté de 125.000 euros à 1.250.000 euros. Les pouvoirs de sanction de la CSSF sont également renforcés : celle-ci peut désormais appliquer des amendes d ordre allant de 250 à 250.000 euros (précédemment : de 125 à 12.500 euros). Outre les amendes d ordre, elle peut également prononcer un avertissement, un blâme, ou même l interdiction limitée dans le temps ou définitive d effectuer une ou plusieurs opérations ou activités, l interdiction professionnelle limitée dans le temps ou définitive des administrateurs, gérants ou dirigeants de fait ou de droit des personnes et entités soumises à sa surveillance. La CSSF peut en outre prononcer des astreintes afin d inciter les personnes visées à se conformer aux injonctions de la CSSF. 6. Coopération entre autorités compétentes Une nouvelle disposition (article 9-1) confère une base légale à la coopération entre les autorités de surveillance et la cellule de renseignement financier. Jusqu à présent, il ne s agissait que d une coopération informelle. Désormais, le texte précise que ces autorités «coopèrent étroitement et sont autorisées à échanger ABBL asbl - an ABBL publication - page 6

les informations nécessaires à l accomplissement de leurs missions respectives». 7. Honorabilité des dirigeants/actionnaires des établissements de crédit La CSSF, dans son évaluation concernant l agrément des établissements de crédit, doit désormais veiller à ce que les personnes liées au crime organisé ne puissent prendre le contrôle des établissements de crédit et autres entités soumises à la surveillance de la CSSF, que ce soit, en particulier, en tant que bénéficiaires effectif, en acquérant des participations significatives ou de contrôle ou en occupant un poste de direction. ABBL asbl - an ABBL publication - page 7